adj. (Grammaire) ce que la machine exécute d'elle-même, sans aucune participation de notre volonté : deux exemples suffiront pour faire distinguer le mouvement machinal, du mouvement qu'on appelle libre ou volontaire. Lorsque je fais un faux pas, et que je vais tomber du côté droit, je jette en avant et du côté opposé mon bras gauche, et je le jette avec la plus grande vitesse que je peux ; qu'en arrive-t-il ? C'est que par ce moyen non réfléchi je diminue d'autant la force de ma chute. Je pense que cet artifice est la suite d'une infinité d'expériences faites dès la première jeunesse, que nous apprenons sans presque nous en apercevoir, à tomber le moins rudement qu'il est possible dès nos premiers ans, et que ne sachant plus comment cette habitude s'est formée, nous croyons, dans un âge plus avancé, que c'est une qualité innée de la machine ; c'est une chimère que cette idée. Il y a sans doute actuellement quelque femme dans la société, déterminée à s'aller jeter ce soir entre les bras de son amant, et qui n'y manquera pas. Si je suppose cent mille femmes tout à fait semblables à cette première femme, de même âge, de même état, ayant des amants tous semblables, le même tempérament, la même vie antérieure, dans un espace conditionné de la même manière ; il est certain qu'un être élevé au-dessus de ces cent mille femmes les verrait toutes agir de la même manière, toutes se porter entre les bras de leurs amants, à la même heure, au même moment, de la même manière : une armée qui fait l'exercice et qui est commandée dans ses mouvements ; des capucins de carte qui tombent tous les uns à la fîle des autres, ne se ressembleraient pas davantage ; le moment où nous agissons paraissant si parfaitement dépendre du moment qui l'a précédé, et celui-ci du précédent encore ; cependant toutes ces femmes sont libres, et il ne faut pas confondre leurs actions quand elles se rendent à leurs amants, avec leur action, quand elles se secourent machinalement dans une chute. Si l'on ne faisait aucune distinction réelle entre ces deux cas, il s'ensuivrait que notre vie n'est qu'une suite d'instants nécessairement tels, et nécessairement enchainés les uns aux autres ; que notre volonté n'est qu'un acquiescement nécessaire à être ce que nous sommes nécessairement dans chacun de ces instants, et que notre liberté est un mot vide de sens : mais en examinant les choses en nous-mêmes, quand nous parlons de nos actions et de celles des autres, quand nous les louons ou que nous les blamons, nous ne sommes certainement pas de cet avis.