S. m. (Histoire de la Médecine ancienne) Pharmacopole, était chez les anciens tout vendeur de médicaments. Mais il faut entrer dans quelques détails de la médecine ancienne, pour donner au lecteur une idée juste de la différence qu'il y avait entre un pharmaceute, un pharmacopole, un pharmacotribe, un herboriste, et autres mots, qui concernaient chez eux la matière des médicaments.

Ceux qui s'attachèrent à la pharmaceutique où à la médecine médicamentaire, furent appelés pharmaceutae ; car le nom de pharmacopaeus se prenait alors en mauvaise part, et signifiait dans l'usage ordinaire, un empoisonneur : il était synonyme à , et , dérivé de , mot générique pour toute sorte de drogue, ou de composition bonne, ou mauvaise, ou pour tout médicament ou poison, tant simple que composé. Les Latins entendaient aussi par medicamentum, un poison, et par medicamentarius, un empoisonneur ; quoique le premier signifiât encore un médicament, et le dernier un apothicaire.

Les pharmacopoles (pharmacopolae) formaient encore chez les anciens un corps différent des premiers. En général on appelait de ce nom tous ceux qui vendaient des médicaments ; quoiqu'ils ne les préparassent point. En particulier, ceux que nous nommons aujourd'hui charlatants, bâteleurs, gens dressant des échaffauds en place publique, allant d'un lieu en un autre, et courant le monde en distribuant des remèdes ; c'est de-là que dérivent les dénominations de circulatores, circuitores et circumforanei. Ils avaient encore celle d'agyrtae, du mot , qui assemble, parce qu'ils assemblaient le peuple autour d'eux, et que la populace, toujours avide du merveilleux, accourait en foule, aussi crédule à leurs promesses, qu'elle l'est encore aujourd'hui à celles des charlatants qui les représentent. C'est par la même raison qu'on les appelait . On leur donnait enfin le nom de médecin sédentaire, sellularii medici, , parce qu'ils attendaient les marchands assis sur leurs boutiques. Ce fut le métier d'Eudamus, d'un certain Chariton, de qui Galien a tiré quelques descriptions de médicaments, et à qui il donne l'épithète, d' ; et de Clodius d'Ancone, que Cicéron appelle pharmacopola circumforaneus.

On ne sait si les Pharmacotrites, Pharmacotritae, ou méleurs, broyeurs de drogues, étaient les mêmes que les Pharmaceutes, Pharmaceutae ; ou si ce nom ne convenait qu'à ceux qui composaient les médicaments sans les appliquer. Ces derniers pourraient bien avoir été les valets des Droguistes, ou ces gens appelés par les Latins Seplasiarii et Pigmentarii, et par les Grecs, , ou , ou vendeurs de drogues ; dans les derniers temps de la Grèce, , terme dérivé du latin.

Les boutiques ou magasins de ces marchands, s'appelaient seplasia au neutre pluriel, et leur métier seplasia, au féminin singulier. Ils vendaient aux Médecins, aux Peintres, aux Parfumeurs, et aux Teinturiers, toutes les drogues tant simples que composées, dont ils avaient besoin. Ils étaient, ainsi que les charlatants, fort sujets à débiter des compositions mal conditionnées, et mal faites. Pline reprochait aux médecins de son temps de négliger la connaissance des drogues, de recevoir les compositions telles qu'on les leur donnait, et de les employer sur la bonne foi d'un marchand, au lieu de se pourvoir des unes, et de composer les autres à l'exemple des anciens médecins.

Mais ce n'était pas seulement des Droguistes que les Médecins achetaient ; ils tiraient les plantes communes des Herboristes, Herbarii en latin, en grec , ou coupeurs de racines, et , ou , cueilleurs d'herbes, et non pas , nom propre à ceux qui mondaient les blés, ou qui en arrachaient les mauvaises herbes. Les Herboristes, pour faire valoir leur métier, affectaient superstitieusement de cueillir les simples en de certains temps particuliers, avec diverses précautions et cérémonies ridicules. Ils étaient fort attentifs à tromper les Médecins, en leur donnant une herbe, ou une racine pour une autre.

Les Herboristes, et ceux qui exerçaient la Pharmaceutique, avaient des lieux propres pour placer leurs plantes, leurs drogues, et leurs compositions ; on appelait ces lieux en grec , apothecae, d'un nom général, qui signifie place où l'on renferme quelque chose.

Les boutiques des Chirurgiens, se nommaient en grec , de , médecin ; parce que tous ceux qui se mêlaient de quelque partie de la Médecine que ce fût, s'appelaient médecins ; et que tous les Médecins exerçaient anciennement la Chirurgie. Plaute rend le terme , par celui de medicina ; et comme de son temps la Médecine n'était point encore partagée, et que le médecin, le chirurgien, l'apothicaire, et le droguiste, n'étaient qu'une seule personne ; ce nom s'étend dans ce poète à toutes les boutiques en général, soit qu'on y pansât des blessés, qu'on y vendit des drogues et des médicaments, soit qu'on y étalât des plantes et des herbes ; de même que medicus signifie dans le même poète un vendeur de médicaments.

Le partage de la Médecine, comme on vient de l'exposer, est celui qui subsistait au temps de Celse. L'usage changea dans la suite ; les uns ayant empiété sur la profession des autres, ou en ayant exercé plus d'une ; les mêmes noms restèrent, quoique les emplois ne fussent plus les mêmes. Quelques siècles après Celse, ceux que l'on nommait en grec , et en latin pimentarii, ou pigmentarii, qui devaient être des droguistes, faisaient aussi la fonction d'apothicaires ; ce que l'on prouve par un passage d'Olympiodore, ancien commentateur de Platon. Le médecin, dit-il, ordonne, et le pimentarius prépare tout ce que le médecin a ordonné. On ne peut marquer avec exactitude la date de ce changement ; mais Olympiodore vivait environ 400 ans après Celse. (D.J.)