adj. féminin pris subst. terme de Grammaire, et surtout de Grammaire grecque, par rapport à la lecture et à la prononciation. Ce mot vient de l'adjectif grec , incliné. R. , inclino. Ce mot est une expression métaphorique.

Une enclitique est un petit mot que l'on joint au mot qui le précède, en appuyant sur la dernière syllabe de ce mot ; c'est pour cela que les Grammairiens disent que l'enclitique renvoye l'accent sur cette dernière syllabe, et s'y appuie : l'on baisse la voix sur l'enclitique : c'est par cette raison qu'elle est appelée enclitique, c'est-à-dire enclinée, appuyée. Les monosyllabes que, ne, ve, sont des enclitiques en latin : rectè, beatè-que vivendum ; terra-que, pluit-ne ? alter-ve. C'est ainsi qu'en français, au lieu de dire aime-je, en séparant je de aime, et faisant sentir les deux mots, nous disons aimé-je, en joignant je avec aime : je est alors une enclitique. En un mot être enclitique, dit la méthode de Port-royal, à l'avertissement de la règle xxij. n'est autre chose que s'appuyer tellement sur le mot précédent, qu'on ne fasse plus que comme un seul mot avec lui.

Les Grammairiens aiment à personnifier les mots : les uns gouvernent, régissent, veulent ; les autres, comme les enclitiques, s'inclinent, panchent vers un certain côté. Ceux-ci, dit-on, renvoyent leur accent sur la dernière syllabe du mot qui les précède ; ils s'y unissent et s'y appuient, et voilà pourquoi, encore un coup, on les appelle enclitiques.

Il y a, surtout en grec, plusieurs de ces petits mots qui étaient enclitiques, lorsque, dans la prononciation, ils paraissaient ne faire qu'un seul et même mot avec le précédent ; mais si dans une autre phrase la même enclitique suivait un nom propre, elle cessait d'être enclitique et gardait son accent ; car l'union de l'enclitique avec le nom propre, aurait rendu ce nom méconnaissable : ainsi , aliquid, est enclitique ; mais il n'est pas enclitique dans cette phrase, , Act. 25. je n'ai rien fait contre César. Si était enclitique, on prononcerait tout de suite , ce qui défigurerait le nom grec de César.

Les personnes qui voudraient avoir des connaissances pratiques les plus détaillées sur les enclitiques, peuvent consulter le IXe livre de la méthode grecque de Port-royal, où l'on traite de la quantité des accens et des enclitiques. Ces connaissances ne regardent que la prononciation du grec avec l'élévation et l'abaissement de la voix, et les inflexions qui étaient en usage quand le grec ancien était encore une langue vivante. Sur quoi il est échappé à la méthode de Port-royal de dire, p. 548, " qu'il est bien difficîle d'observer tout cela exactement, n'y ayant rien de plus embarrassant que de voir un si grand nombre de règles accompagnées d'un nombre encore plus grand d'exceptions ". Et à l'avertissement de la règle xxij. l'auteur de cette methode dit " qu'une marque que ces règles ont été souvent forgées par les nouveaux grammairiens, ou accommodées à leur usage, c'est que non-seulement les anciens, mais ceux du siècle passé même, ne s'accordent pas toujours avec ceux-ci, comme on voit dans Vergare, l'un des plus habiles, qui vivait il y a environ 150 ans ". Je me sers de l'edition de la méthode grecque de Port-royal, à Paris, 1696.

Il y avait encore à Paris à la fin du dernier siècle, des savants qui prononçaient le grec en observant avec une extrême exactitude la différence des accens ; mais aujourd'hui il y a bien des gens de Lettres qui prononcent le grec, et même qui l'écrivent sans avoir égard aux accens, à l'exemple du P. Sanadon, qui dans sa préface sur Horace dit : " J'écris le grec sans accens ; le mal n'est pas grand, je pourrais même prouver qu'il serait bon qu'on ne l'écrivit point autrement ". Préface p. 16. C'est ainsi que quelques-uns de nos beaux esprits entendent fort bien les livres anglais ; mais ils les lisent comme s'ils lisaient des livres français. Ils voient écrit people, ils prononcent people au lieu de piple ; et disent, avec le P. Sanadon, que le mal n'est pas grand, pourvu qu'ils entendent bien le sens. Il y a pourtant bien de la différence, par rapport à la prononciation, entre une langue vivante et une langue morte depuis plusieurs siècles. (F)