S. m. (Grammaire) travail corporel, long, pénible et suivi. Il commence à vieillir ; cependant on l'emploie encore quelquefois avec énergie, et dans des occasions où ses synonymes n'auraient pas eu le même effet. On dit que des terres sont en labeur. Les puristes appauvrissent la langue ; les hommes de génie réparent ses pertes ; mais il faut avouer que ces derniers qui ne s'affranchissent des lois de l'usage que quand ils y sont forcés, lui rendent beaucoup moins par leur licence, que les premiers ne lui ôtent par leur fausse délicatesse. Il y a encore deux grandes causes de l'appauvrissement de la langue, l'une c'est l'exagération, qui, appliquant sans-cesse les épithetes et même les substantifs les plus forts à des choses frivoles, les dégrade et les réduit à rien ; l'autre, c'est le libertinage, qui pour se masquer et se faire un idiome honnête, s'empare des mots, et associe à leur acception commune, des idées particulières qu'il n'est plus possible d'en séparer, et qui empêchent qu'on ne s'en serve ; ils sont devenus obscènes. D'où l'on voit qu'à mesure que la langue du vice s'étend, celle de la vertu se resserre : si cela continue, bien-tôt l'honnêteté sera presque muette parmi nous. Il y a encore un autre abus de la langue, mais qui lui est moins nuisible ; c'est l'art de donner des dénominations honnêtes à des actions honteuses. Les fripons n'ont pas le courage de se servir même entr'eux des termes communs qui désignent leurs actions. Ils en ont ou imaginé ou emprunté d'autres, à l'aide desquels ils peuvent faire tout ce qu'il leur plait, et en parler sans rougir : ainsi un filou dit d'un chapeau, d'une montre qu'il a volée ; j'ai gagné un chapeau, une montre ; et un autre homme dit, j'ai fait une bonne affaire ; je sais me retourner, &c.