S. f. (Grammaire) ce mot qu'on emploie également au propre et au figuré, désigne en général l'exactitude, la régularité, la précision. Il se dit au figuré en matière de langage, de pensées, d'esprit, de gout, et de sentiment.

La justesse du langage consiste à s'expliquer en termes propres, choisis et liés en semble, qui ne disent ni trop ni trop peu. Cette justesse extrême dans le choix, l'union et l'arrangement des paroles, est essentielle aux sciences exactes ; mais dans celles de l'imagination, cette justesse trop rigoureuse affoiblit les pensées, amortit le feu de l'esprit, et desseche le discours. Il faut oser à propos, surtout en Poésie, bannir cet esclavage scrupuleux, qui par attachement à la justesse servîle ne laisse rien de libre, de naturel et de brillant. " Je l'aimais inconstant, qu'eussai-je fait fidèle ! est une inexactitude de langage à laquelle Racine devait se livrer, dès que la justesse de la pensée s'y trouvait énergiquement peinte.

La justesse de la pensée consiste dans la vérité et la parfaite convenance au sujet ; et c'est ce qui fait la solide beauté du discours. Les pensées sont plus ou moins belles, selon qu'elles sont plus ou moins conformes à leur objet. La conformité entière fait la justesse de la pensée ; de sorte qu'une pensée juste est, à proprement parler, une pensée vraie de tous les côtés, et dans tous les jours qu'on la peut regarder. Le P. Bouhours n'a pas eu tort de donner pour exemple de cette justesse, l'épigramme d'Ausone sur Didon, qui a été très-heureusement rendue dans notre langue.

Pauvre Didon où t'a réduite

De tes maris le triste sort.

L'un en mourant cause ta fuite,

L'autre en fuyant cause ta mort.

Une pensée qui manque de justesse est fausse ; mais quelquefois ce défaut de justesse vient plus de l'expression qui est vicieuse, que de la fausseté de l'idée. On est exposé à ce défaut dans les vers, parce que la servitude de la rime ôte souvent l'usage du terme propre, pour en faire adopter un autre, qui ne rend pas exactement l'idée. Tous les mots qui passent pour synonimes, ne le sont pas dans toutes les occasions.

La justesse d'esprit sait démêler le juste rapport que les choses ont ensemble ; la justesse de goût et de sentiment, fait sentir tout ce qu'il y a de fin et d'exact dans le tour, dans le choix d'une pensée, et dans celui de l'expression ; voyez l'article GOUT.

C'est un des plus beaux présents que la nature puisse faire à l'homme : que la justesse d'esprit et de goût ; c'est à elle seule qu'il en faut rendre grâces. Cependant lorsque la nature ne nous a pas absolument refusé ce don, nous pouvons le faire germer et l'étendre beaucoup par l'entretien fréquent des personnes, et par la lecture assidue des auteurs, en qui domine cet heureux talent. (D.J.)

JUSTESSE, (Maréchallerie) cheval bien ajusté ; finir un cheval, et lui donner les plus grandes justesses. Ces expressions désignent un cheval achevé dans tous les airs qu'on lui demande ; voyez AIR. Toutes les justesses dépendent de celles de ferme à ferme. Voyez FERME A FERME. Pour qu'un cheval soit parfaitement ajusté, il faut après les premières leçons, le promener de pas sur les demi-voltes ; après l'avoir promené quelque peu, lui faire faire une demi-volte juste ; lorsqu'il y répond sans hésiter, lui en faire faire trois ou quatre tout d'une haleine ; lui apprendre ensuite à manier sur le côté, de-çà et de delà en avant : on le finit et on lui donne les justesses les plus parfaites, en lui apprenant à aller et à manier en arrière, et pour cet effet il n'y a rien de meilleur que les voltes bien rondes. Voyez VOLTES.