S. m. (Géographie) fameux canal ou détroit qui sépare l'Europe et l'Asie, et qui est indifféremment nommé par les modernes, le bras de S. Georges, les bouches de Constantinople, le détroit de Gallipoli, ou le détroit des Dardanelles. Voyez DARDANELLES.

Les anciens l'appelaient Hellespont, du nom de Hellé, fille d'Athamas, qui en le traversant, pour s'enfuir dans la Colchide, avec son frère Phryxus, chargés tous deux de la taison d'or, tomba malheureusement dans cette mer, où elle périt. On y arrive par diverses routes, après avoir laissé derrière soi, à droite ou à gauche, les îles Cyclades et Sporades, qui composent dans la mer Egée, ce qu'on appelle l'Archipel.

Ce détroit est situé au 35d. 42'. de latitude, et environ au 55 de long. Toute sa longueur est de 10 à 12 lieues ; il n'en a guère plus d'une de largeur à son entrée, et dans toute la suite, il n'a qu'une demi-lieue tout au plus. A son couchant, que l'on a sur la gauche en y entrant, on voit la Thrace, qui est une partie de l'Europe que ce détroit sépare d'avec la Troade, Province d'Asie, qui est à son orient. Il a la Propontide au nord, avec tout l'Archipel au sud. A l'entrée de ce passage à main droite, on trouve le promontoire Sigée, qu'on appelle aujourd'hui cap Gianizzari ; quand on a passé les châteaux neufs bâtis par Mahomet IV, on entre dans l'Hellespont dont ils sont les portes ; et de-là jusqu'aux Dardanelles, il n'y a aucun vestige d'antiquités considérables.

Comme cette mer a divers noms chez les modernes, elle en a eu aussi plusieurs chez les Poètes, auxquels celui de Hellespontus, ne convenait pas toujours ; Virgile, Aeneid. lib. I. Ve 385. l'appelle la mer de Phrygie, Phrygium aequor, parce qu'en effet ce détroit resserre la Phrygie à l'orient. Lucain, liv. VI. Ve 55. et Valerius Flaccus, liv. II. Ve 586. l'appellent l'un, Phryxeum pontum, l'autre, Phryxea aequora, la mer de Phryxus, nommant le frère pour la sœur, parce que, selon la fable, elle était avec son frère Phryxus, lorsqu'elle donna son nom à cette mer. Leur père était Athamas, et de-là lui vint la dénomination de mer Athamantide.

Enfin, Ausone, in Mosell. Ve 287. et 288, emploie trois expressions de suite, pour peindre l'Hellespont, tant la poésie latine a de richesses pour s'exprimer.

Quis modò Sestiacum pelagus, Nepheleidosque Helles

Aequor, Abydoni freta quis miretur Ephebi.

Il l'appelle en premier lieu la mer de Sestos, et cette ville était sur le rivage du détroit du côté de l'Europe. Secondement, la mer d'Hellé, fille de Nephélé et d'Athamas ; et enfin le détroit du jeune homme d'Abydos : Abydos était au midi de Sestos, et le poète fait allusion à l'histoire touchante de Héro et de Léandre. (D.J.)