(LES), Géographie peuple particulier qui faisait partie de la Gaule ; il mérite bien d'avoir un article dans cet ouvrage, et sous son ancien nom, et sous son nom moderne, pour lequel voyez SUISSE.

Nous trouvons dans César les limites anciennes de l'Helvétie ; il la borne d'un côté par le Rhin qui la séparait de la Germanie, de l'autre par le mont Jura qui la séparait des Séquaniens, et d'un autre côté par e lac Léman et par le Rhône, qui la séparaient de l'Italie. Comme elle était au-delà du Rhin, elle appartenait à la Gaule, ce qui fait que Tacite appelle les Helvétiens, nation gauloise ; Jules-César met l'Helvétie dans la Gaule Celtique ; mais Auguste pour rendre les provinces à-peu-près égales, unit l'Helvétie à la Belgique. Voilà donc Pline et Ptolomée qui ont vécu après ce changement amplement justifiés, pour avoir mis les Helvétiens dans la Belgique ; ils devaient suivre la nouvelle disposition d'Auguste.

Toute l'Helvétie était divisée en quatre cantons qui, quoique compris sous le nom général d'Helvétiens, avaient cependant chacun un nom distingué, et un territoire séparé ; on appelait ces cantons Pagus Urbigenus, Pagus Ambronicus, Pagus Tigurinus, et Pagus Tugenus.

Les Urbigènes étaient les plus voisins de l'Italie ; ils tiraient leur nom de la ville Urba, Orbe, ville ancienne, mais dont la splendeur ne fut pas de durée ; car Aventicum, Avenche, lui enleva de bonne heure la gloire d'être non-seulement la capitale du canton, mais même de toute l'Helvétie. Avenche dut son élévation aux Romains qui, entr'autres faveurs, y établirent une colonie.

On comptait alors plusieurs autres villes dans ce canton, savoir Colonia Equestris, ou Noviodunum, aujourd'hui Nyon ; Lausanna, à présent Lausanne, outre Minodum, présentement Milden, et par les François Moudon ; et Ebrodunum, ou Castrum Ebrodunense, qui est Yverdun.

Les Ambrons n'avaient, selon Cluvier, que deux villes, Solodurum, et Vindonissa ; on ne peut douter que Soleurre ne soit la même ville que Solodurum. A l'égard de Vindonissa, dont Tacite lui-même fait mention, les Géographes se persuadent que l'on trouve aujourd'hui des vestiges de cette ville dans le village de Windisch au canton de Berne ; et si les noms ont assez de rapport, la position ne convient pas mal, aussi-bien qu'à celle que lui donnent la table de Peutinger et l'Itinéraire.

Le Pagus Tigurinus tirait son nom de la ville de Tigurum, aujourd'hui Zurich ; il n'y a cependant aucun ancien écrivain qui fasse mention de la ville ; mais apparemment qu'elle fut du nombre de celles que les Helvétiens brulèrent, lorsqu'ils formèrent le dessein que César empêcha, de s'aller établir dans les Gaules.

Strabon est le seul des anciens auteurs qui fasse mention du Pagus Tugenus ; il est toutefois vraisemblable, qu'il tirait son nom de la ville de Tugum, à présent encore capitale d'un canton. Je m'exprime ainsi, parce que le nom me parait le même que celui de Zug ; car dans plusieurs noms de villes, qui chez les Romains commençaient par la lettre T, les Germains changeaient cette lettre en Z. De Taberna, ils firent Zabern ; de Tolbiacum, Zulpich ; et ainsi de Tugum, ils ont fait Zug, suivant toute apparence.

Nous avons dit ci-dessus, qu'Auguste rangea les Helvétiens sous la Belgique, et ils étaient encore censés de cette partie des Gaules, du temps de Pline et de Ptolomée. Après Constantin, ils se trouvèrent avec les Rauraques et les Séquaniens dans la province nommée maxima Sequanorum ; peu-à-peu leur nom d'Helvétiens se perdit, et fit place à celui des Séquaniens ; mais les Allemands, nation différente des Germains, quoique demeurant dans la Germanie, se jetèrent dans l'Helvétie, dont il fallut leur céder une partie, les Burgundiens ou Bourguignons envahirent l'autre, de manière que l'Helvétie se trouvant partagée entre ces deux peuples, prit le nom d'Allemagne et Bourgogne.

Sous les empereurs Français, la partie Allemande de l'Helvétie fut gouvernée par le duc d'Allemagne et de Souabe ; l'autre obéissait à des comtes. Cette forme de gouvernement subsista très-longtemps, jusqu'à ce qu'enfin, après 13 cent ans de sujétion, ce pays recouvra son ancienne liberté, et s'associa divers états voisins, qui n'étaient point de l'ancienne Helvétie, mais qui sont du corps Helvétique de nos jours, lequel corps a pris le nom de Suisse. C'est sous ce mot, que nous parlerons de la Suisse moderne, heureux pays, où les solides richesses qui consistent dans la culture des terres, sont recueillies par des mains libres et victorieuses. (D.J.)