(Géographie moderne) paraisse de Suisse, dans le Tockenbourg, au Thour-Thall, où elle a le rang de sixième communauté. Wildenhaus est un lieu connu dans l'histoire, pour avoir été la patrie d'Huldric Zwingle qui y naquit en 1484, d'Huldric Zwingle amman du lieu, qui est la première dignité du pays.

Il fit ses études à Bâle, à Berne et à Vienne en Autriche. Il apprit bien les langues grecque et hébraïque, et prit ensuite le degré de docteur en théologie. Il fut nommé curé à Glaris en 1506, où il commença comme il s'exprime, à prêcher l'Evangile. Il en agit de même quand il fut appelé à Zurich en 1518 par le prévôt et les chanoines de cette ville, et attaqua non-seulement le trafic des indulgences, en quoi il était protégé par l'évêque ; mais il prêcha contre l'invocation des saints, le sacrifice de la messe, le célibat des prêtres.

En 1520, il renonça à une pension que sa sainteté lui faisait, et en 1522 il se maria. En 1523 le pape lui écrivit un bref très-flatteur, qui prouvait que la cour de Rome aurait été bien aise de le gagner. La même année, le magistrat de Zurich prescrivit une assemblée pour discuter par l'Ecriture-sainte, les matières de religion ; tous les ecclésiastiques du canton, ainsi que l'évêque de Constance, y furent appelés. Après ce colloque, on fit à Zurich de nouveaux pas vers la réformation ; et cependant le canton convoqua une seconde assemblée, où les Zurichais invitèrent les évêques de Constance, de Coire et de Bâle, avec l'université de cette ville. Ils invitèrent aussi tous les autres cantons à y envoyer les plus savants de leurs pasteurs. Le synode fut composé de neuf cent personnes, au nombre desquelles se trouvèrent trois cent cinquante prêtres. L'issue apprit au public, que les partisans de Zuingle avaient triomphé, car sa doctrine fut reçue à la pluralité des suffrages dans tout le canton. M. Dupin dit, que la plupart des ecclésiastiques qui assistèrent à cette conférence, abandonnèrent la cause de l'église, par ignorance ou par malice. Enfin en 1525 le conseil de Zurich abolit la messe.

Zwingle assista à la dispute de Berne tenue en 1528, et à la conférence de Marpourg. En 1531, la guerre se déclara entre les cantons protestants et les cantons catholiques, et les Zurichais furent défaits à la bataille de Cappel. Comme la coutume de Zurich est, que lorsqu'on envoye une armée contre l'ennemi, le premier pasteur de l'église doit l'accompagner, Zwingle s'y trouva, et par son devoir, et par un ordre particulier du magistrat ; il fut enveloppé dans le malheur de cette journée, blessé d'un coup de pierre, renversé à terre, et tué par un officier catholique à 47 ans.

Né avec un génie heureux, il le cultiva soigneusement, et prêcha la réformation, avant même que le nom de Luther fût connu en Suisse. Il était d'une application infatigable au travail, et étudiait toujours debout. Après le souper il faisait une promenade, et s'occupait ensuite à écrire des lettres, souvent jusqu'à minuit. Si l'on considère le temps que lui prenait encore la conduite de l'église de Zurich dont il était le premier pasteur, l'instruction de la jeunesse comme professeur, et la direction de la plupart des églises protestantes du pays, on sera surpris du grand nombre d'ouvrages qui sont sortis de sa plume.

Ils ont été recueillis en quatre volumes in-folio, imprimés à Zurich en 1544 et 1545. Les deux premiers tomes contiennent ses traités de religion et de controverse ; les deux derniers renferment ses explications de divers livres de l'ancien et du nouveau Testament. Zwingle, selon M. Simon, est assez simple dans son commentaire sur la bible, mais peu exercé dans l'étude de la critique. Sa modestie parait en ce qu'il ne semble pas avoir abandonné entièrement l'ancien interprete latin, qui était autorisé depuis longtemps dans toute l'église d'occident. Le même historien critique trouve que les notes de Zwingle sur quelques épitres de S. Paul, sont plus exactes et plus littérales, que celles qu'il a données sur les évangiles ; mais il ne faut point douter que les commentaires de ce théologien ne fussent meilleurs, s'il les eut publiés lui-même, et qu'il y eut mis la dernière main. Une circonstance qui mérite d'être observée, et qui n'a pas échappé à M. Simon, c'est que sur la première épitre de S. Jean, Zwingle n'explique point le vers. 7. du chap. Ve ce qui semble indiquer que ce passage ne se trouvait pas dans son exemplaire grec.

Léon de Juda, en parlant de Zwingle, dit, Huldricchus Zuinglius, non solum concionibus sacris, sed et lectionibus publicis, mirâ arte, claritate, brevitate ac simplicitate, parique diligentiâ, dexteritate, ac fide tractavit, ut nec prioris saeculi, nec nostri aevi scriptoribus judicio doctissimorum hominum, cedere videatur. Je souscrirais volontiers à une partie de cet éloge, ajoute M. Simon, si l'auteur suisse avait été moins agité de l'esprit de réformation, qui ne lui permit pas de faire un bon usage de sa raison.

Zwingle entendait les langues et la théologie. Il était agréable en conversation, possédait la musique, et la recommandait même aux gens de lettres, comme une récréation très-propre à les délasser. Il parait par une circonstance de la dispute de Berne, qu'il avait une opinion particulière sur l'apocalypse. Gilles Mourer lui en ayant cité un passage, en faveur de l'invocation des saints, Zwingle lui répondit séchement, qu'il ne reconnaissait point l'autorité du livre de l'apocalypse, et ne le regardait ni comme canonique, ni de la main de S. Jean l'évangéliste.

On mit au jour à Bâle en 1536, une courte exposition de la foi, que Zwingle avait composée peu de temps avant sa mort, et qu'il avait adressée à François I. C'est dans cette pièce, que se trouve le passage du salut des payens, contre lequel on s'est si fort récrié.

Zwingle a pensé que les sages du paganisme devaient avoir été sauvés, parce qu'il a cru que Dieu par les effets de sa grâce, avait produit en eux la foi nécessaire au salut. Voici comme il s'en explique lui-même : " J. C. n'a pas dit, celui qui ne sera point baptisé, ne sera point sauvé ; par conséquent les enfants morts sans baptême, et tous les payens ne sont pas damnés ; ce serait donc une témérité que de condamner aux enfers tous ceux qui n'ont pas été consacrés par la circoncision ou par le baptême. Il ne faut pas qu'on imagine que cette idée tende à anéantir J. C. car elle ne sert qu'à augmenter sa gloire. Que savons-nous ce que chacun a de foi écrite en son cœur par la main de Dieu ? Il nous faut bien vivre, dit Seneque, puisque rien n'est caché à l'être suprême ; il est présent à nos esprits, et pénétre toutes nos pensées ".

Zwingle n'a jamais douté que l'état du paganisme ne fût condamnable ; mais il a cru par un jugement d'humanité, que Dieu aurait pitié de Seneque et de quelques autres payens, qui avaient une foi confuse en lui, et qui n'avaient pas eu de part à la corruption de leur siècle.

Erasme contemporain de Zwingle, pensait comme lui sur cette matière. Si les juifs, dit-il, avant la publication de l'évangile, pouvaient se sauver avec une foi grossière, pourquoi cette foi ne suffirait-elle pas pour sauver un payen, dont la vie a été remplie de vertus ; un payen qui en même temps, a cru que Dieu était une puissance, une sagesse, une bonté sans bornes, et que par les moyens qu'il jugera les plus convenables, il saura protéger les bons et punir les mécans.

Jacques-Payva Andradius, théologien portugais, qui assista au concîle de Trente, soutient aussi que Platon, Socrate, Aristote, et les autres anciens philosophes, qui ont été d'excellents maîtres pour ce qui regarde la pratique des vertus, ont pu se sauver, aussi bien que les juifs qui ont reçu la loi. Dieu les a assistés de sa grâce pour leur salut, en sorte qu'on ne peut pas dire, qu'ils aient entièrement ignoré Jésus crucifié, quoiqu'ils n'aient point su la manière dont Dieu sauverait le genre humain.

Cette connaissance vague d'un rédempteur suffisante pour prouver le salut, a été adoptée par une confession de foi des évêques de Pologne assemblés en 1551 dans un synode de toute leur nation, et ils n'ont point été taxés d'hérétiques. Cette confession de foi imprimée à Anvers en 1559 in -8°. dit qu'il n'a pas été nécessaire que tous les hommes sussent en particulier qui serait le médiateur de leur salut, si ce serait le fils de Dieu, ou un ange du Seigneur ou quelqu'autre ; qu'il suffisait de croire en général, que Dieu par sa sagesse, trouverait quelque voie de sauver les hommes.

Il est certain que plusieurs pères de l'église ont aussi conçu une espèce d'illumination universelle, en conséquence de laquelle il s'est trouvé dans toutes les nations, des hommes vertueux agréables à Dieu. Justin martyr, dit en termes exprès, que J. C. est la raison divine, à laquelle Socrate et les autres philosophes ont participé. C'est encore le sentiment de Clément d'Alexandrie, Stromat, VI. p. 636. de saint Chrysostome, Homel. 37. sur Matth. et de saint Augustin, de civitat. Dei, liv. VIII. ch. IIIe et liv. XVIII. c. xlvij. Il ne faut donc pas faire à Zwingle un crime d'avoir soutenu, par un jugement de charité, une opinion judicieuse, et qui a eu dans la primitive église, plusieurs défenseurs respectables. (D.J.)