(Géographie moderne) Les Latins l'appelaient Placentia ; ceux du pays la nomment Piacenza ; et on prétend qu'elle tire le nom de Plaisance de son agréable situation dans un pays tout charmant. Ville d'Italie, capitale du duché de même nom, au confluent du Pô et de la Trebia, à 12 lieues nord-ouest de Parme, à 15 sud-est de Milan, à 20 au couchant de Mantoue, et à 30 est de Turin.

Ses rues sont droites et spacieuses ; la grande place est ornée de palais. Ses églises sont belles, et surtout celle de S. Sixte. Son évêché est suffragant de celui de Bologne. On compte dans cette ville environ 25 mille habitants, dont un dixième est d'ecclésiastiques. Elle a subi les mêmes révolutions que Parme dans les différentes guerres d'Italie. Long. 27. 16'. lat. 45. 6'.

Ceux qui seront curieux de l'histoire de cette ville peuvent parcourir les memorie storiche di Piacenza, par M. Poggiali, à Plaisance en 1761 : on en a déjà 9 volumes. C'est un ouvrage prodigieusement prolixe, car le neuvième volume ne finit qu'à l'année 1559, et le moindre petit livre suffirait pour tracer complete ment l'histoire de cette ville ; mais elle a produit dans les lettres un homme trop célèbre par ses écrits et par sa mort tragique, pour oublier son nom ; c'est (Ferrante) Pallavicino, l'un des beaux esprits d'Italie au XVIIe siècle, et de l'illustre maison de Pallavicini.

On conjecture qu'il naquit vers l'année 1615 : moins par inclination que par des raisons de famille, il entra dans la congrégation des chanoines réguliers de Latran ; il s'établit ensuite à Venise, d'où il fit un voyage en Allemagne. De retour en Italie, il écrivit une violente satyre contre le pape Urbain VIII. et contre la famille des Barberins, ce qui fut la triste cause de sa perte. Les Barberins extrêmement irrités, et ne voyant point de jour à se venger de lui dans un asîle aussi avantageux que Venise, résolurent de l'en tirer par trahison ; ils gagnèrent un français nommé Charles de Breche, fils d'un libraire de Paris. Ce français lui conseilla de venir en France ; le malheureux Ferrante gouta le conseil du fourbe ; et en passant sur le pont de Sorgues, dans le comtat Venaissin, des gens apostés l'arrêtèrent et le conduisirent à Avignon, où il eut la tête tranchée le 5 Mars 1644. Ses amis vengèrent sa mort ; et le traitre qui l'avait livré, ne jouit pas longtemps du fruit de sa perfidie : le cardinal Mazarin le fit assassiner par un nommé Ganducci, italien, dans une hôtellerie de la place Maubert.

Brussoni a donné la vie de Palavicino ; cette vie, avec les œuvres permises de cet écrivain, ont été imprimées à Venise en 1655, en quatre petits volumes in-douze. Les défendues l'ont été in Villa-franca, c'est-à-dire à Geneve en 1660, en deux volumes in-douze, et puis en Hollande en 1666 et en 1673, in-douze, sous la même inscription d'in Villa-franca, et sous le titre d'Opere scelte di Ferrante Pallavicino, civè, la pudicitia schernita, la rettorica delle puttane, il divortio céleste, il corriero svalligiato, la buccinata, dialogo tradue soldati del duca di Parma, la disgracia del conte d 'Olivarez, la rete di Vulcano, l'Anima, Vigilia I. et II : di novo ristampato, corretto, et agiuntovi la vita del autore, è la continuazione del corriero.

On lui attribue presqu'universellement le divorzzio céleste compris dans ce recueil ; et je ne sache que Girolamo Brussoni et M. de la Monnaie qui soutiennent le contraire.

Cet ouvrage plein de feu, d'esprit et d'imagination, fut imprimé in Villa-franca en 1643, in-douze ; il devait être divisé en trois livres, dont il n'y a eu que le premier de la main de Pallavicino. On y suppose que Jesus-Christ, poussé à bout par les dissolutions de l'église romaine son épouse, avec plusieurs papes, et particulièrement avec Urbain VIII. se résout à faire divorce avec elle ; que le Père éternel envoie S. Paul sur terre pour y faire les informations nécessaires ; que cet apôtre se transporte à Lucques, à Parme, à Florence, à Venise et à Rome, où il est épouvanté des débordements horribles qu'il y voit commettre ; que découvert à Rome par un possédé qu'on exorcisait, et par conséquent obligé de s'enfuir, il oublie son épée, dont le pape s'empare, avec menaces d'en exterminer tous ses ennemis (& voilà le trait imputé par tant d'auteurs au furieux Jules II. assez ingénieusement employé) ; enfin, que sur ses informations le Père éternel accorde le divorce demandé par Jesus-Christ.

Le second livre devait traiter des bâtards de l'église romaine, et le troisième du concours des autres églises pour les secondes noces de Jesus-Christ. On a depuis rempli ce dessein, en ajoutant deux nouveaux volumes au premier, et en les faisant imprimer tous trois à Genève en 1679. On assure que c'est Gregorio Leti qui a fait cette continuation.

Le premier de ces livres a été traduit en diverses langues : il y en a deux traductions françaises ; l'une dont on ignore l'auteur, et qui est intitulée le Céleste divorce, ou la séparation de Jesus-Christ d'avec l'église romaine son épouse, à cause de ses dissolutions, a été imprimée en 1644, in-douze : l'autre qui est de la façon de M. Brodeau d'Oiseville, conseiller au parlement de Metz, est intitulée le Divorce céleste, causé par les désordres et les dissolutions de l'épouse romaine, et dédié à la simplicité des chrétiens scrupuleux, avec la vie de l'auteur, et imprimée à Cologne, ou plutôt à Amsterdam chez Roger et de Lorme, ne 1696, in-douze. La traduction anglaise est intitulée, Christ divorced, from the curch of Rome, because of her lewdnesss, et imprimée à Londres en 1679, in-8°.

L'Anima di Ferrante Pallavicino, qu'on a mise aussi dans ce recueil, est un petit ouvrage qui fut fait à l'occasion de sa mort, et où la cour de Rome est encore moins ménagée que dans ses écrits ; il fut imprimé in Villa-franca en 1643 in-douze, sous le nom de Giorgio Fallardi ; mais on l'attribue à Jean François Loredano.

On en promettait six parties, dont on en destinait une contre les Jésuites, mais on n'en a donné que deux alors, encore la dernière n'a-t-elle presque aucun rapport avec le Pallavicino. Fort longtemps après, quelqu'un s'avisa d'y ajouter les quatre autres parties que l'auteur avait promises.

La troisième est intitulée l'infamia de'Giesuiti ; la quatrième, l'atheismo di Roma ; la cinquième, il Fravio delle stelle altière regnanti nel Vaticano ; et la sixième, l'ignoranza superba. Elles ont été imprimées, conjointement avec les deux premières, in Colonia, appresso Lodovico Feivaldo, en 1675, en deux volumes in-douze.

Le corriero sualigiato, ou courier dévalisé de Pallavicino ; et sa buccinata per le api barberini, ou la trompette pour rassembler les abeilles barberines, furent les causes de sa perte. C'est un malheur qu'un homme qui avait beaucoup d'esprit, en ait fait un si mauvais usage. Plongé dans la volupté, et avide de gloire, le feu de sa jeunesse le précipita dans toutes sortes de fautes ; il composa des ouvrages indignes de sa naissance et de sa profession, et prouva de plus par sa conduite cette grande vérité.

E che a' voli troppo alti e repentini,

Sogliono i precipizzi esser vicini.

Valla (Laurent), l'un des plus savants hommes de son temps, avait précédé de deux siècles Pallavicino, car il naquit à Plaisance en 1415, et fut l'un de ceux qui s'opposèrent le plus heureusement à la barbarie dont Rome avait été infectée par les Goths. Il contribua beaucoup à renouveller en Italie la beauté de la langue latine, et mourut à Rome en 1458, âgé de 43 ans. Ses traductions de Thucydide, d'Hérodote et d'Homère, prouvent qu'il n'était pas profondément versé dans la langue grecque ; mais ses six livres des élégances de la langue latine, sont fort estimés.

Le pape Grégoire X. était natif de Plaisance. Il tint environ 5 ans le siège pontifical, et mourut à Arrezo en 1276. C'est lui qui ordonna le premier qu'après la mort du pape les cardinaux seraient renfermés dans un conclave, et n'en sortiraient point qu'ils n'eussent élu un souverain pontife, afin de ne pas laisser le siège aussi longtemps vacant qu'il l'avait été après la mort de son prédécesseur. (D.J.)

PLAISANCE, (Géographie moderne) baie et port de l'Amérique septentrionale, sur la côte méridionale de l'île de Terre-neuve. La baie a 18 lieues de profondeur ; le port, un des plus beaux de l'Amérique, peut contenir plus de cent vaisseaux à couvert de tous les vents. La France l'a cédé à l'Angleterre par le traité d'Utrecht. Long. 325. 40'. Latit. 47. 42'. (D.J.)

PLAISANCE, maison de plaisance de Pline, (Architecture ancienne) La maison de plaisance de Pline le jeune, dont Scamozzi nous a donné les desseins, offrait un séjour des plus délicieux de l'Italie. Elle était située à 17 milles de Rome, sur la voie Laurentine ; elle avait son entrée du côté du nord ; sa droite vers l'est, était embellie par de magnifiques jardins ; à sa gauche, vers l'ouest, étaient les jardins potagers, et ce qui est nécessaire au ménage ; du côté du sud elle avait vue sur la mer, qui baignait le pied de ses murailles.

L'entrée avait un grand perron en dehors, dont la couverture du palier était soutenue par plusieurs colonnes : l'on entrait d'abord dans une grande sale, à chaque côté de laquelle il y avait une cour ornée d'un superbe portique rond à colonnes, entre lesquelles il y avait des fenêtres de pierre transparentes ; autour du portique était un chemin libre, avec une entrée et une sortie de quatre côtés.

Les quatre angles de cette cour étaient occupés les uns par des escaliers, et les autres par des cabinets. De cette cour on entrait dans un salon à chaque côté duquel il y avait deux chambres et un escalier vis-à-vis de l'entrée ; il y en avait une seconde par où l'on se rendait dans une vaste cour entourée de logements à droite et à gauche, avec un passage pour aller dans les jardins.

A l'autre bout de cette cour, vers le sud, on trouvait un vestibule à chaque côté duquel il y avait deux chambres dont la vue était sur la mer ; et au derrière du vestibule, une grande salle saillante en dehors sur la mer, qui la baignait par trois côtés. (D.J.)