S. f. terme de Religion, c'est l'office ou les prières publiques que l'on fait dans l'Eglise romaine lors de la célébration de l'Eucharistie. Nicod, après Baronius, dit que le mot Messe vient de l'hébreu missach, qui signifie oblatum, ou de missa missorum, parce qu'on mettait en ce temps-là hors de l'Eglise les cathécumenes et les excommuniés, lorsque le diacre disait ite missa est, après le sermon et la lecture de l'Epitre et de l'Evangile, parce qu'il ne leur était pas permis d'assister à la consécration, et cette opinion est la seule véritable. Voyez CATHECUMENE. Ménage le fait venir de missio, congé ; d'autres de missa, envoi, parce que la Messe, les prières des hommes qui sont sur la terre, sont envoyées et portées au ciel.

Les Théologiens disent que la Messe est une oblation faite à Dieu, où, par le changement d'une chose sensible, on reconnait le souverain domaine de Dieu sur toutes choses en vertu de l'institution divine.

C'est dans le langage ordinaire la plus grande et la plus auguste des cérémonies de l'Eglise. C'est le sacrifice non-sanglant de la nouvelle loi, où l'on présente à Dieu le corps et le sang de son Fils Jesus-Christ sous les espèces du pain et du vin.

On donne des noms différents à la Messe, selon les différents rits, les différentes intentions, les différentes manières selon lesquelles on la dit, comme on Ve le voir.

Messe ambrosienne, c'est-à-dire du rit ambrosien, ou de l'Eglise de Milan.

Messe anglicane, selon le rit qui s'observait autrefois dans l'Eglise d'Angleterre.

Messe gallicane est une Messe célébrée suivant l'ancien rit de l'Eglise de France.

Messe grecque est une Messe célébrée suivant le rit grec en langue grecque, et par un prêtre de cette nation.

Messe latine, celle qui se dit en latin dans l'Eglise latine, et selon le rit de cette Eglise.

Messe mozarabique ou gothique est celle qu'on célébrait autrefois en Espagne, et dont le rit est encore en usage dans les églises de Tolede et de Salamanque. On l'a nommée mozarabique, parce que les Arabes ont été maîtres de l'Espagne, et qu'on appelait alors les Chrétiens de ce pays-là mozarabes, c'est-à-dire mêlés avec les Arabes.

Messe haute, qu'on appelle aussi grande Messe, est celle qui se chante par des choristes, et que l'on célèbre avec diacre et soudiacre.

Messe basse, c'est celle qui se dit sans chant, mais en récitant seulement les prières, sans diacre ni soudiacre.

Messe de beatâ, ou de la Vierge, c'est celle que l'on offre à Dieu par l'entremise de la Vierge et sous son invocation.

Messe commune, ou de la communauté, celle qui se dit dans les monastères à certaine heure pour toute la communauté.

Messe du Saint-Esprit, celle que l'on célèbre au commencement de quelque solennité, ou d'une assemblée ecclésiastique qu'on commence par l'invocation du Saint-Esprit.

Messe de fête, comme de Noë, de Paques, c'est celle qu'on dit ces jours-là, et dont les lectures sont conformes au temps où l'on est, et au mystère que l'on célèbre.

Messe du jugement, celle où l'on se purgeait d'une calomnie par les preuves établies. Voyez PREUVES.

La Messe pour la mort des ennemis a été longtemps en usage en Espagne, mais on l'a abolie, parce que cette intention est contraire à la charité chrétienne.

Messe des morts ou de requiem est celle qu'on dit à l'intention des défunts, dont l'introït commence par requiem. Au XIIIe siècle, avant que de mener les coupables au supplice, on leur faisait entendre une Messe des morts pour le repos de leurs ames.

Messe de paraisse ou grande Messe est celle que le curé est obligé de faire chanter toutes les fêtes et dimanches pour ses paraissiens.

Petite Messe ou Messe basse, celle qui se dit à des autels particuliers avec moins de cérémonies.

La première Messe est celle que l'on dit dès le point du jour.

La Messe d'un saint est celle où l'on invoque Dieu par l'intercession d'un saint.

Il y a des Messes des apôtres, des martyrs, des confesseurs, des pontifes, des vierges, etc.

Messe du scrutin, était une Messe qu'on disait autrefois pour les cathécumenes le mercredi et le samedi de la quatrième semaine de carème, lorsqu'on examinait s'ils étaient disposés comme il faut pour recevoir le baptème.

On appelle seche la Messe où il ne se fait point de consécration, comme celle que dit un prêtre qui ne peut pas consacrer, à cause qu'il a déjà dit la Messe, comme témoigne Durandus ; ou celle qu'on fait dire en particulier aux aspirants à la prêtrise, pour apprendre les cérémonies : c'est ainsi que l'appelle Eckius.

Le cardinal Bona dans son ouvrage de rebus liturgicis, lib. I. cap. XVe parle assez au-long de cette Messe seche, qu'il appelle aussi Messe nautique, nautica, parce qu'on la disait dans les vaisseaux où l'on n'aurait pas pu consacrer le sang de Jesus-Christ sans courir risque de le répandre à cause de l'agitation du vaisseau, et il dit sur la foi de Guillaume de Nangis, que saint Louis dans son voyage d'Outremer en faisait dire ainsi dans le navire qu'il montait. Il cite aussi Génébrard, qui dit avoir assisté à Turin en 1587 à une pareille Messe célébrée dans une église, mais après diner et fort tard pour les funérailles d'une personne noble. Durand qui parle de ces Messes, assure très-distinctement qu'on n'y disait point le canon ni les prières directement relatives à la consécration, puisqu'en effet le célébrant ne consacrait pas. Pierre le Chantre, qui vivait en 1200, s'est élevé contre ces abus, aussi-bien qu'Estius, et le cardinal Bona remarque que la vigilance des évêques les a entièrement supprimées.

Le même Pierre le Chantre dans son ouvrage intitulé, Verbum abbreviatum, fait mention d'un autre abus, qu'il appelle Messes à deux et à trois faces, Missa bifaciata, Missa trifaciata ; et voici comme il le décrit : Quelques prêtres, dit-il, mêlaient plusieurs Messes en une ; c'est-à-dire qu'ils célébraient la Messe du jour ou de la fête jusqu'à l'offertoire, puis ils en recommençaient une seconde, et quelquefois une troisième et une quatrième jusqu'au même endroit ; ensuite ils disaient autant de secrètes qu'ils avaient commencé de Messes, mais pour toutes ils ne récitaient qu'une fois le canon, et à la fin ils ajoutaient autant de collectes qu'ils prétendaient avoir réuni de Messes. Il y avait bien de l'ignorance et de la superstition dans cette conduite. Il y a apparence que les exemples n'en ont pas été fréquents, puisque l'auteur dont nous venons de parler, est le seul qui en ait fait mention. Bingham, Orig. ecclesiastic. tom. VI. lib. XV. cap. iv. §. 5.

Messe votive, est une Messe autre que celle de l'office de jour, et qui se dit pour quelque raison ou quelque dévotion particulière.

Messe des présanctifiés, est celle dans laquelle on prend la communion de l'hostie consacrée les jours précédents, et réservée. Cette Messe est en usage ordinaire chez les Grecs, qui ne consacrent l'Eucharistie en carême que le samedi et le dimanche : chez les Latins, elle n'est plus en usage que le seul jour du vendredi-saint.

La Messe est composée de deux parties ; la première, l'ancienne Messe des Catéchumenes ; la seconde, qu'on nommait Messe des fidèles, comprenait la célébration et la consécration de l'Eucharistie jointe à la communion qui, selon l'ancien usage, suit la consécration. A l'égard des oraisons particulières et des cérémonies que l'on emploie dans la célébration de la Messe, elles ont été différentes en différents temps et en diverses Eglises, ce qui a composé diverses liturgies chez les Orientaux, et des Messes pour les différents pays occidentaux. Voyez LITURGIES.

MESSE du pape Jules, (Peinture) merveilleux tableau de Raphaël ; voici ce que M. l'abbé Dubos dit de ce tableau : Il est peint à fresque au-dessus et aux côtés de la fenêtre dans la seconde pièce de l'appartement de la signature au Vatican. Il suffit que le lecteur sache que cette peinture est du bon temps de Raphaël, pour être persuadé que la poésie en est admirable. Le prêtre qui doutait de la présence réelle, et qui a Ve l'hostie qu'il avait consacrée devenir sanglante entre ses mains pendant l'élévation, parait pénétré de terreur et de respect.

Le peintre a très-bien conservé à chacun des assistants son caractère propre, mais surtout l'on voit avec plaisir le genre d'étonnement des suisses du pape, qui regardent le miracle du bas du tableau où Raphaël les a placés. C'est ainsi que ce grand artiste a su tirer une beauté poétique de la nécessité d'observer la coutume en donnant au souverain pontife sa suite ordinaire.

Par une liberté poétique, Raphaël emploie la tête de Jules II. pour représenter le pape devant qui le miracle arriva. Jules regarde bien le miracle avec attention, mais il n'en parait pas beaucoup ému. Le peintre suppose que le souverain pontife était trop persuadé de la présence réelle pour être surpris des événements les plus miraculeux qui puissent arriver sur une hostie consacrée. On ne saurait caractériser le chef de l'Eglise, introduit dans un semblable événement, par une expression plus noble et plus convenable. Cette expression laisse encore voir les traits du caractère particulier de Jules II. On reconnait dans son portrait l'assiégeant obstiné de la Mirandole.

Enfin le coloris de ce tableau est très-supérieur au coloris des autres tableaux de Raphaël. Le Titien n'a pas peint de chair où l'on voie mieux cette mollesse, qui doit être dans un corps composé de liqueurs et de solides. Les draperies paraissent de belles étoffes de laine et de soie que le tailleur viendrait d'employer. Si Raphaël avait fait plusieurs tableaux d'un coloris aussi vrai et aussi riche, il serait cité entre les plus excellents coloristes. (D.J.)