S. f. (Histoire moderne) l'action de remettre ou de rétablir la paix et la tranquillité dans un état.

Dans notre histoire, on entend par édits de pacification plusieurs ordonnances des rois de France, rendues pour pacifier les troubles de religion qui s'élevèrent dans le royaume pendant le XVIe siècle.

Français I. et Henri II. avaient rendu des édits très-sévères contre ceux qui feraient profession des nouvelles opinions de Luther et de Calvin. Charles IX. en 1561 suivit à cet égard les traces de ses prédécesseurs ; mais les hommes souffriront toujours impatiemment qu'on les gène sur un objet, dont ils croient ne devoir compte qu'à Dieu ; aussi le prince fut-il obligé au mois de Janvier 1562, de révoquer son premier édit par un nouveau qui accordait aux Prétendus Réformés le libre exercice de leur religion, excepté dans les villes et bourgs du royaume. En 1563, il donna à Ambaise un second édit de pacification qui accordait aux gentilshommes et hauts-justiciers, la permission de faire faire le prêche dans leurs maisons pour leur famille et leurs sujets seulement. On étendit même ce privilège aux villes, mais avec des restrictions qui le rendirent peu favorable aux Calvinistes ; au lieu qu'on les obligea à restituer aux Catholiques les Eglises qu'ils avaient usurpées. L'édit de Lonjumeau suivit en 1568 ; mais les deux partis qui cherchaient à s'y tromper mutuellement, étant peu de temps après rentrés en guerre, Charles IX. par un édit donné à Saint-Maur au mois de Septembre 1568, révoqua tous les précédents édits de pacification. Cependant la paix ayant été faite le 8 Aout 1570, dès le 10 du même mois, ce prince rendit un nouvel édit, qui, aux privilèges accordés par les précédents, ajouta celui d'avoir quatre places de sûreté ; savoir, la Rochelle, Montauban, Coignac et la Charité, pour leur servir de retraite pendant deux ans.

Le massacre de la saint Barthelemi et un édit qui le suivit de près, annulla toutes ces conditions ; mais Henri III. en 1576 donna un nouvel édit de pacification, plus favorable aux Calvinistes qu'aucun des précédents ; la ligue qui commença alors, le fit révoquer aux états de Blais sur la fin de la même année ; mais le roi se vit obligé de faire en leur faveur l'édit de Poitiers du 8 Septembre 1577, par lequel en rétablissant à certains égards, et en restraignant à d'autres les privilèges accordés par les précédents édits pour le libre exercice de leur religion, il leur accorda de plus d'avoir des chambres mi-parties, et huit places de sûreté pour six ans ; savoir, Montpellier, Aiguesmortes, Nyons, Seyne, la Grand'Tour, et Serres en Dauphiné ; Périgueux, la Réole, et le mas de Verdun en Guienne. Mais en 1585 et 1588, la ligue obtint de ce prince la révocation totale de ces édits.

Enfin Henri IV. en 1591, cassa les derniers édits d'Henri III. et en 1598 donna à Nantes ce fameux édit de pacification, qui entr'autres choses permettait aux prétendus Réformés l'exercice public de leur religion dans tous les lieux où il avait été fait publiquement pendant les années 1596 et 1597, et leur en accordait l'exercice particulier à deux lieues des principales villes, pour chaque bailliage où on n'en pouvait établir l'exercice public sans trouble. Louis XIII. le confirma à Nimes en 1610, et Louis XIV. en 1652, pendant les troubles de la minorité ; mais il le révoqua en 1656, et le supprima en 1685.

Les Protestants se sont plaints avec amertume de la révocation de l'édit de Nantes, et leurs plaintes ont été fortifiées de celles de tous les gens de bien Catholiques, qui tolèrent d'autant plus volontiers l'attachement d'un protestant à ses opinions, qu'ils auraient plus de peine à supporter qu'on les troublât dans la profession des leurs ; de celles de tous les philosophes, qui savent combien notre façon de penser religieuse dépend peu de nous, et qui prêchent sans cesse aux souverains la tolérance générale, et aux peuples l'amour et la concorde ; de celles de tous les bons politiques qui savent les pertes immenses que l'état a faites par cet édit de révocation, qui exila du royaume une infinité de familles, et envoya nos ouvriers et nos manufactures chez l'étranger.

Il est certain qu'on viola à l'égard des Protestants, la foi des traités et des édits donnés et confirmés par tant de rois ; et c'est ce que Bayle démontre sans réplique dans ses lettres critiques sur l'histoire du Calvinisme. Sans entrer ici dans la question, si le prince a droit ou non de ne point tolérer les sectes opposées à la religion dominante dans son état, je dis que celui qui penserait aujourd'hui qu'un prince doit ramener par la force tous ses sujets à la même croyance, passerait pour un homme de sang ; que grâce à une infinité de sages écrivains, on a compris que rien n'est plus contraire à la saine religion, à la justice, à la bonne politique et à l'intérêt public que la tyrannie sur les ames.

On ne peut nier que l'état ne soit dans un danger imminent lorsqu'il est divisé par deux cultes opposés, et qu'il est difficîle d'établir une paix solide entre ces deux cultes ; mais est-ce une raison pour exterminer les adhérants à l'un des deux ? n'en serait-ce pas plutôt une au contraire pour affoiblir l'esprit de fanatisme, en favorisant tous les cultes indistinctement ; moyen qui appellerait en même temps dans l'état une infinité d'étrangers, qui mettrait sans cesse un homme à portée d'en voir un autre séparé de lui par la manière de penser sur la religion, pratiquer cependant les mêmes vertus, traiter avec la même bonne foi, exercer les mêmes actes de charité, d'humanité et de bienfaisance ; qui rapprocherait les sujets les uns des autres ; qui leur inspirerait le respect pour la loi civîle qui les protegerait tous également ; et qui donnerait à la morale que la nature a gravée dans tous les cœurs, la préférence qu'elle mérite.

Si les premiers chrétiens mouraient en bénissant les empereurs payens, et ne leur arrachaient pas par la force des armes des édits favorables à la Religion, ils ne s'en plaignaient pas moins amèrement de la liberté qu'on leur ôtait, de servir leur Dieu selon la lumière de leur conscience.

En Angleterre, par édit de pacification on entend ceux que fit le roi Charles I. pour mettre fin aux troubles civils entre l'Angleterre et l'Ecosse en 1638. Voyez EDIT.

On appelle aussi pacification en Hongrie des conditions proposées par les états du royaume, et acceptées par l'archiduc Léopold en 1655 ; mais ce prince devenu empereur, ne se piqua pas de les observer exactement, ce qui causa de nouveaux troubles dans ce royaume pendant tout son règne.