Ceux qui ont écrit sur l'Optique, nous ont donné la description de plusieurs machines qui sont d'usage dans cette science.

Pour construire une machine hydromantique, par le moyen de laquelle on fera perdre une image ou un objet de vue au spectateur, et on le lui fera apercevoir de nouveau sans changer la position de l'un ou de l'autre : prenez deux vaisseaux A B F, et C G M K (Pl. hydraul. fig. 31.), dont l'un soit plus haut que l'autre ; remplissez le premier d'eau, et soutenez-le sur trois petits piliers, dont l'un doit être creux et muni d'un robinet B ; partagez le vaisseau le plus bas C M en deux parties par une cloison H I, et adaptez un robinet à celle d'em-bas pour pouvoir l'ouvrir et fermer à plaisir.

Placez un objet sur la cloison que le spectateur placé en O, ne pourra apercevoir par le rayon direct N L.

Si l'on ouvre le robinet B, l'eau descendant dans la cavité C I, le rayon N L s'éloignera de la perpendiculaire, et réfléchira vers O, et le spectateur apercevra l'objet par le rayon rompu N O. Si l'on ferme le robinet B, et que l'on ouvre celui qui est marqué par la lettre P, l'eau descendra dans la cavité la plus basse H I ; la réfraction cessera, et il ne viendra aucun rayon de l'objet à l'oeil. Mais en fermant de nouveau le robinet P, et ouvrant l'autre B, la cavité se remplira de nouveau, et l'on apercevra l'objet comme auparavant. Voyez REFRACTION.

Pour construire un vaisseau hydromantique qui représente les objets extérieurs comme s'ils nageaient dans l'eau, prenez un vase cylindrique A B C D (Pl. hydraul. fig. 32.) partagé en deux par un verre E F, qui ne soit pas exactement poli : appliquez au point G une lentille convexe des deux côtés, et inclinez en H un miroir plan de figure elliptique sous un angle de 45 degrés ; que I H et H G soient un peu moindres que la distance du foyer de la lentille G ; en sorte que l'image de l'objet puisse passer à travers dans la cavité du vaisseau supérieur ; noircissez la cavité intérieure, et remplissez celle de dessus d'eau bien claire.

Ces machines appartiennent à l'hydromantie considérée comme une branche de l'histoire naturelle ; mais, pour y revenir entant qu'elle est divination, nous ajoutons après Delrio qu'il y a plusieurs espèces d'hydromantie, dont voici les principales.

1°. Lorsqu'à la suite des invocations, et autres cérémonies magiques, on voyait écrits sur l'eau les noms des personnes, ou des événements, qu'on désirait de connaître, ordinairement ces noms se trouvaient écrits à rebours, au moins se rencontrèrent-ils de la sorte dans l'évenement que cite Delrio, d'après Nicephore Choniate, Annal. lib. II.

2°. On s'y servait d'un vase plein d'eau, et d'un anneau suspendu à un fil, avec lequel on frappait un certain nombre de fois les côtés du vase.

3°. On jetait successivement, mais à peu de temps l'une de l'autre, trois petites pierres, dans une eau tranquille et dormante, et des cercles que formait la surface de cette eau, aussi-bien que de leur intersection, on tirait des présages pour l'avenir.

4°. On examinait avec soin les divers mouvements et l'agitation des flots de la mer ; les Siciliens et les Eubéens étaient fort adonnés à cette superstition, et quelques chrétiens orientaux ont eu celle de baptiser tous les ans la mer, comme si c'était un être animé et raisonnable ; mais ce n'en est pas une que d'examiner l'état de la mer, pour en conjecturer si le calme durera, ou s'il n'arrivera pas de tempête. On ne doit pas non plus mettre au nombre des superstitions, comprises sous le titre d'hydromantie, la cérémonie que fait tous les ans le doge de Venise d'épouser la mer Adriatique.

5°. On tirait aussi des présages de la couleur de l'eau, et des figures qu'on y voyait, ou qu'on y croyait voir représentées. C'est ainsi, selon Varron, qu'on apprit à Rome quelle serait l'issue de la guerre contre Mithridate ; certaines rivières ou fontaines passaient chez les anciens pour être plus propres que d'autres à ces opérations. Voyez PEGOMANCIE.

6°. C'était encore par une espèce d'hydromantie que les anciens Germains, quand ils avaient quelque soupçon sur la fidélité de leurs femmes, prétendaient s'en éclaircir : ils jetaient dans le Rhin les enfants dont elles étaient accouchées ; et s'ils surnageaient, ils les tenaient pour légitimes, et pour bâtards, s'ils allaient à fond ; c'est à quoi Claudius fait allusion dans ce vers,

Et quos nascentes explorat gurgite Rhenus.

Ne serait-ce pas sur cet ancien usage, que dans le même pays on faisait subir l'épreuve de l'eau froide à ceux qu'on accusait d'être sorciers ? Voyez ÉPREUVE.

7°. On remplissait d'eau une tasse, ou un autre vase, et après avoir prononcé dessus certaines paroles, on examinait si l'eau bouillonnerait, et se répandrait par-dessus les bords.

8°. On mettait de l'eau dans un bassin de verre, ou de crystal, puis on y jetait une goutte d'huile, et l'on s'imaginait voir dans cette eau, comme dans un miroir, les choses dont on désirait être instruit.

9°. Les femmes des anciens Germains pratiquaient encore une autre sorte d'hydromantie, en examinant les tours et détours, et le bruit que faisaient les eaux des fleuves dans les gouffres ou tourbillons qu'ils formaient, pour prédire l'avenir. Clem. Alex. Strom. lib. I.

10°. Enfin, on peut rapporter à l'hydromantie une superstition qui a été en usage en Italie, et que Delrio assure qu'on pratiquait encore de son temps. Lorsqu'on soupçonnait quelques personnes d'un vol, on écrivait les noms de trois de ces personnes sur autant de petits cailloux, qu'on jetait dans l'eau, et il ajoute que quelques-uns se servaient pour cette opération d'eau-bénite ; mais il n'ajoute pas ce qu'on découvrait par ce moyen. Delrio, Disquisit. magic. lib. IV. quaest. VIe sect. 3. p. 543 et 544.