Conards sont les Busots et non les Rabillis,

O fortuna potens quàm variabilis !

Les Busots et les Rabillis sont deux familles qui subsistent encore à Evreux ou dans le pays, et qui avaient fourni des abbés à la compagnie. Les conards avaient droit de juridiction pendant leur divertissement, et ils l'exerçaient à Evreux dans le lieu où se tenait alors le bailliage, mais qui n'est plus le même depuis l'établissement du présidial. Tous les ans ils obtenaient un arrêt sur requête du parlement de Paris avant l'établissement de celui de Rouen, et de celui-ci depuis le XVIe siècle, pour exercer leurs facéties. Taillepied, dans son livre des antiquités et singularités de la ville de Rouen, dit que dans cette ville les conards avaient leur confrairie à Notre-Dame de bonnes-nouvelles, où ils avaient un bureau pour consulter de leurs affaires : " ils ont succedé, dit-il, aux Coque-luchiers, qui se présentaient le jour des rogations en diversité d'habits ; mais parce qu'on s'amusait plutôt à les regarder qu'à prier Dieu, cela fut réservé pour les jours gras à ceux qui jouent des faits vicieux qu'on appelle vulgairement conards ou cornards, auxquels par choix et élection préside un abbé mitré, crossé, et enrichi de perles, quand solennellement il est trainé en un chariot à quatre chevaux le dimanche gras et autres jours de bacchanales ". A Evreux on le menait avec beaucoup moins de pompe ; on le promenait par toutes les rues et dans tous les villages de la banlieue monté sur un âne et habillé grotesquement. Il était suivi de sa compagnie, qui pendant la marche chantait des chansons burlesques moitié latin moitié français, et la plupart du temps très-satyriques ; ce dernier excès fit supprimer la compagnie des conards, dont la principale fête se célebrait à la saint Barnabé ; et à sa place Paul de Capranic nommé à l'évêché d'Evreux en 1420, établit une confrairie dite de S. Barnabé, pour réparer, dit-il, les crimes, malfaçons, excès, et autres cas inhumains commis par cette compagnie de conards, au déshonneur et irréverence de Dieu notre créateur, de S. Barnabé, et de la sainte Eglise. Voyez le glossaire de Ducange, et le supplément de Morery. Il y a dans de vieux imprimés des arrêts de l'abbé des conards ou des cornards ; lorsque ces pièces misérables se trouvent, on les achète fort chérement. Quis leget haec ? (G)