Hippocrate dit que le sang menstruel rougit la terre comme le vinaigre ; Pline et Columelle ajoutent qu'il brule les herbes, fait mourir les plantes, ternit les miroirs, et cause la rage aux chiens qui en goutent. Mais tout cela est fabuleux, car il est certain que ce sang est le même que celui des veines et des artères. Voyez SANG.

Selon la loi des Juifs, une femme était impure tant que le sang menstruel coulait : l'homme qui la touchait dans cet état, ou les meubles qu'elle touchait elle-même, étaient pareillement impurs. Levit. chap. XVe

Je n'ajouterai qu'une seule remarque à cet article. Quand le sang menstruel accumulé ne peut couler par les voies qui lui sont destinées, la nature plus forte que tout lui ouvre des routes également étonnantes et extraordinaires. Les Médecins ont Ve le sang menstruel se frayer un passage par toutes les parties du corps, à-travers les pores de la peau du visage, des joues, par des blessures et des ulcères, par le sommet de la tête, les oreilles, les paupières, les yeux, les narines, les gencives, les alvéoles, les lèvres, la veine jugulaire, les poumons, l'estomac, le dos ; par des abscès sur les côtes, par les mamelles, l'aine, la vessie, le nombril, les vaisseaux hémorrhoïdaux, les jambes, cuisses ulcérées ; par le talon, le pied, les orteils ; par le bras, la main, les doigts et le pouce.

Je n'entre point ici dans l'énumération de ces parties au hasard. Les curieux qui voudront se convaincre de la vérité de ce que j'avance, en trouveront les faits observés dans les écrits des auteurs suivants ; dans Amatus Lusitanus, les ouvrages des Bartholins, Bennet, Bergerus, Binningerus, Blancard, Blasiun, Blegny, Bonet, Borellus, Brendelius, Roderic à Castro, Dionis, Dolaeus, Dodonœus, Donatus, Fabrice de Hilden, Fabrice d'Aquapendente, Fernel, Forestus, Gochelius, de Graaf, Hagendorn, Harderus, Helwigius, Highmor, Hoechsteter, Maurice et Frédéric Hoffman, Hollerius, Horstius, Kerkringius, Langius, Laurentius, Lemnius, Lentilius, Lotichius, Mercatus, Michaelis, Musitanus, Nenterus, Palfyn, Panarolus, Paré, Paullini, Peclinus, Peyerus, Platerus, Ricdlinus, Riolan, Riverius, Rulandus, Ruyschius, Salmuthus, Schenckius, Sennert, Solenander, Spacchius, Spindler, Stalpart, Vander-Wiel, Sylvius, Timaeus, Tulpius, Velschius, Verduc, Verheyen, Vezarscha, Wedelius, Zacutus Lusitanus, les actes de Berlin, de Copenhague, des curieux de la nature, les transactions de Londres, les memoires de l'académie des Sciences. Il était impossible de joindre les citations sans y consacrer une vingtaine de pages.

Si une femme chez les Hébreux a ce qui lui arrive tous les mois, elle sera impure pendant sept jours, dit le Lévitique, XVe 19. 20. 21. etc. tout ce qu'elle touchera pendant ces sept jours sera souillé ; et ceux qui toucheront son lit, ses habits ou son siege, seront impurs jusqu'au soir, laveront leurs habits, et useront du bain pour se purifier. Si pendant le temps de cette incommodité un homme s'approche d'elle, il sera souillé pendant sept jours, et tous les lits où ils auront dormi seront aussi souillés. Que s'il s'en approche avec connaissance, et que la chose soit portée devant les juges, ils seront tous deux mis à mort. Les anciens chretiens regardaient aussi cet écoulement naturel au sexe comme une souillure. Les femmes grecques s'abstiennent encore aujourd'hui d'aller à l'église pendant ce temps : quelques indiens ne souffrent pas alors leurs femmes dans leurs maisons.

Les négresses de la côte d'Or passent pour souillées pendant leurs incommodités lunaires, et sont forcées de se retirer dans une petite hutte à une certaine distance. Au royaume de Congo c'est un usage qui subsiste pour les filles, lorsque leurs infirmités lunaires commencent pour la première fais, de s'arrêter dans le lieu où elles se trouvent, et d'attendre qu'il arrive quelqu'un de leur famille pour les reconduire à la maison paternelle : on leur donne alors deux esclaves de leur sexe pour les servir dans un logement séparé, où elles doivent passer deux ou trois mois, et s'assujettir à certaines formalités : comme de ne parler à aucun homme, de se laver plusieurs fois pendant le jour, et de se frotter d'un onguent particulier. Celles qui négligeraient cette pratique, se croiraient menacées d'une stérilité perpétuelle, quoique l'expérience leur ait fait souvent connaître la vanité de cette superstition.

On sait que toutes ces fausses idées sont le fruit de l'ignorance, et qu'une femme qui se porte bien ne rend point un sang menstruel différent de celui qui circule dans les artères du reste du corps, excepté que par son séjour dans les vaisseaux de l'utérus, il n'ait acquis quelque corruption.

Il ne faut pas non plus ajouter foi aux exemples qu'on rapporte de femmes qui ont eu leurs règles à 65, 70, 80, 90 ans : les récits de filles nubiles à quatre ou cinq ans ne sont pas plus vrais ; et l'académie des Sciences n'aurait jamais dû transcrire dans son histoire des contes aussi ridicules. (D.J.)

MENSTRUELLE, analyse, Chimie, ou analyse par combinaison, par précipitation, par extraction, par intermède : c'est ainsi que les chimistes modernes appellent la voie de procéder à l'examen chimique des corps, en séparant par ordre leurs principes constitutifs par le moyen de la dissolution partiale et successive. Voyez MENSTRUE, Chimie. On trouvera un exemple plus propre à donner une idée de cette analyse, que toutes les généralités que nous pourrions en exposer ici, à l'art. VEGETAL, Chimie.

Après avoir considéré le tableau de ce travail particulier, on s'apercevra facilement qu'il peut servir de modèle à l'examen de tous les corps naturels, et principalement de ceux qui sont très-composés, tels que les végétaux et les animaux, sujets sur lesquels on emploie cette analyse avec le plus de succès, et l'on se convaincra sans peine des avantages qu'a cette méthode moderne sur l'emploi du feu seul, que l'ancienne chimie mettait en œuvre pour l'examen des mêmes corps ; car on retire par le secours de cette analyse des principes réellement hypostatiques ou préexistens, et évidemment inaltérés : ces principes sont en grand nombre ou très-variés en comparaison des produits de l'analyse à feu seul. Ces avantages suffiraient pour mériter la préférence à l'analyse menstruelle, puisque les défauts tant reprochés à l'ancienne analyse se réduisaient précisément à l'altération ou même à la création des produits ou principes qu'elle manifestait, au petit nombre et à l'uniformité de ses produits. Mais un titre de prééminence plus essentiel encore pour l'analyse menstruelle, c'est la régularité de sa marche, de sa méthode : elle attaque par rang, comme nous l'avons déjà insinué, les différents ordres de combinaison du corps qu'elle se propose d'examiner, en commençant par les matériaux les plus grossiers, les plus sensibles ; au lieu que l'analyse par la violence du feu atteint tout d'un coup les derniers ordres de combinaison. Cette différence peut être représentée par la comparaison d'un mur formé de pierres et de mortier, et recrépit ou enduit d'une couche de plâtre ; dont on séparerait les matériaux en enlevant d'abord la couche de plâtre, dont il serait recouvert, détachant ensuite les pierres une à une, et les séparant du mortier ; prenant ensuite successivement chacun de ces matériaux, séparant, par exemple la pierre que je suppose coquillière, en coquilles et en matière qui leur servait de mastic naturel ; le mortier en chaux et en sable, etc. et voilà l'image de la marche de l'analyse menstruelle. Celle de l'analyse par la violence du feu seul, serait à-peu-près représentée par la destruction soudaine et confuse de ce mur, le broyement d'un pan entier du plâtre, de la pierre, du mortier pêle-mêle, etc. (b)