* COULEUVRE, (Mythologie) reptîle consacré à Esculape qui s'était caché plusieurs fois sous cette forme, et adoré à Rome et dans Epidaure, où on lui éleva des temples.

COULEUVRE, (Bois de) s. m. Botaniq. exot. Le bois de couleuvre, ou le bois couleuvré, en latin lignum colubrimum des boutiques, est un bois des Indes orientales, ou plutôt une racine ligneuse, dure, compacte, pesante, de la grosseur du bras, d'un goût âcre et amer, sans aucune odeur. Cette racine est couverte d'une écorce de couleur de fer, parsemée de taches cendrées ; on nous l'apporte des îles de Soloo et de Timoo : il est bon de la connaître.

Commelin assure que la noix vomique et le bois de couleuvre prennent naissance du même arbre ; mais Herman prétend au contraire que cette noix tire son origine d'une toute autre plante. Lequel faut-il croire ? Peut-être qu'ils disent vrai tous les deux, et qu'on nous apporte diverses espèces de noix vomiques plus ou moins grosses, qui viennent d'arbres différents.

Quelques louanges que certains auteurs aient donné à ce bois contre la morsure des serpens, les vers et la fièvre quarte, le docteur Antoine de Heyde a découvert par ses observations, qu'il avait une vertu somnifère, affectant les nerfs, causant le tremblement et la stupeur : qualités très-vénéneuses dans un végétal, qui doivent en faire rejeter l'usage. En vain répondrait-on qu'il ne faut s'en servir que lorsqu'il est vieux ; le meilleur est de ne s'en point servir du tout, et de le bannir de la Pharmacie, comme un remède dangereux, parce que le plus grand bien qu'on en puisse attendre, c'est que par le hasard de sa vétusté il ne produise aucun mauvais effet : la pratique de la Médecine court assez d'autres hasards sans celui-là. Par M(D.J.)

COULEUVRE, machine singulière dont les Caraïbes se servent pour exprimer et séparer le suc du magnoc. C'est une espèce de panier à-peu-près de la forme d'une chausse ou gros boyau long de cinq à six pieds sur trois pouces et plus de diamètre ; il est tissu de façon qu'il prête et s'élargit à proportion de la quantité de substance qu'on y met, sans pour cela que les aiguillettes d'écorce dont il est construit, s'écartent les unes des autres ; il ne peut cependant s'étendre en largeur, qu'il ne diminue considérablement en longueur. A la partie supérieure, qui est toujours ouverte, est une espèce d'anse très-forte, servant à le suspendre à quelque chose de solide au haut de la case ; l'extrémité inférieure est fermée, se terminant en pointe, au bout de laquelle est une forte boucle de la même matière que tout le reste de cette sorte de panier. Voyez MAGNOC.

Usage de la couleuvre. On la remplit de rapure de magnoc, qu'un Sauvage presse et refoule de sa main autant qu'il le peut. On conçoit par ce qui a été dit, que dans cette action du Sauvage la couleuvre doit s'élargir, et par conséquent diminuer de longueur. Lorsqu'elle est totalement remplie, le Sauvage la suspend par l'anse au milieu de la case : cela fait, il met un bâton dans la boucle inférieure ; et le passant entre ses jambes par-dessous ses fesses, il s'abandonne dessus, pour faire porter à la couleuvre tout le poids de son corps, de façon qu'elle est contrainte de s'allonger en diminuant de diamètre ; et la rapure de magnoc qu'elle contient, se trouve pour lors tellement resserrée et comprimée, que le suc s'en échappe et tombe à terre. Lorsque le Sauvage s'aperçoit qu'il ne découle plus rien, il décroche la couleuvre, et en retire la rapure qu'il fait cuire sur une platine, pour en former la cassave dont il se nourrit.

La tradition n'a point transmis chez les Caraïbes le nom de l'inventeur de la couleuvre ; cela n'a rien d'étonnant, puisque nous ignorons aujourd'hui l'auteur de ces utiles machines qui préparent le grain dont nous faisons l'essentiel de notre subsistance. Art. de M. LE ROMAIN.