La ville n'est point fortifiée du côté de la citadelle, afin que les habitants n'aient rien qui les mette à couvert de son canon, et qu'elle puisse commander partout dans la ville : c'est pourquoi elle doit être encore fortifiée avec plus de soin ; parce que si elle était plus faible, l'ennemi commencerait par l'attaquer ; et lorsqu'il en serait le maître, il le serait aussi de la ville : au lieu qu'étant obligé de commencer son attaque par celle-ci, il faut après sa prise faire un second siège pour s'emparer de la citadelle.

Entre la ville et la citadelle on laisse un grand espace vide de maisons dans l'étendue de la portée du fusil, que l'on nomme l'esplanade. Cet espace sert à empêcher qu'on ne s'approche de la citadelle sans en être découvert.

On ne fait point de citadelles au milieu des villes, parce qu'elles ne pourraient être secourues dans les cas de rébellion. On en construit quelquefois entièrement hors des villes ; mais elles y sont jointes par quelques lignes ou quelque ouvrage de communication.

La citadelle doit être placée dans le terrain le plus élevé de la ville, afin qu'elle en commande toutes les fortifications. On la place aussi de manière qu'elle puisse disposer des eaux de la ville, de sorte que l'ennemi après s'être emparé de la ville, ne puisse les lui ôter.

Pour donner une idée de la manière dont on peut tracer le dessein d'une citadelle, soient (Planc. IV. de Fortificat. fig. 6.) les bastions L, E, M, le côté ou la partie de l'enceinte où l'on veut placer la citadelle. Ces bastions ne seront point mis au trait dans le plan, mais au crayon, parce qu'il faudra en détruire un pour faire entrer la citadelle dans la place. Sait le bastion E qu'on se propose de détruire.

On prolongera sa capitale indéfiniment vers la campagne et vers la ville. On choisira un point D sur cette capitale plus ou moins avancé vers la ville, selon la position qu'on voudra donner à la citadelle ; on élevera sur ce point D une perpendiculaire A B, sur laquelle on prendra D A et D B chacune de 90 taises, afin d'avoir le côté A B de 180.

Présentement si l'on veut que la citadelle soit un pentagone régulier, on cherchera par la trigonométrie ou autrement le rayon du pentagone, dont le côté est de 180 taises, on le trouvera de 152. On prendra avec le compas ce même nombre de taises sur l'échelle ; puis des points A et B pris pour centre et de cet intervalle, on décrira deux arcs qui se couperont dans un point C qui sera le centre de la citadelle.

Du point C on décrira un cercle du rayon C B, on portera le côté A B cinq fois sur sa circonférence, et l'on aura le pentagone que doit former la citadelle, et qu'on fortifiera comme on l'a enseigné dans les constructions de M. de Vauban. Voyez l'article FORTIFICATION. Eléments de Fortification, par N. Leblond.

Les citadelles ne doivent avoir que deux portes, l'une pour aller de la citadelle dans la ville, et réciproquement de celle-ci dans la citadelle ; l'autre pour entrer de la campagne dans la citadelle : cette porte ne s'ouvre que pour recevoir du secours du dehors, et pour cet effet on la nomme porte du secours.

Les citadelles sont jointes aux villes de plusieurs manières, suivant la disposition de la ville et de la citadelle ; mais celle-ci doit être toujours placée de manière que la ville n'ait aucun ouvrage ou aucun flanc qui puisse battre la citadelle, ni aucun ouvrage qui la commande. On joint l'enceinte de la place à la citadelle par des espèces de murs qui aboutissent sur les capitales des bastions de la citadelle, sur celles des demi-lunes, ou enfin sur le milieu des courtines. Cette dernière disposition est la meilleure. Ces murs ont un rempart jusqu'à la distance de 40 ou 50 taises de la citadelle ; on les nomme lignes de communication : elles ne sont autre chose dans cet espace, qu'un mur de maçonnerie de quatre ou cinq pieds d'épaisseur, et de même hauteur que le rempart de la place. Sur la partie supérieure de ce mur on élève un garde-fou de deux pieds d'épaisseur et de six pieds de hauteur ; on le perce de creneaux pour découvrir dans la campagne.

Quand on construit des citadelles aux villes maritimes, on les dispose de manière qu'elles commandent la ville, le port et la campagne. Celle du Havre-de-Grace est placée de cette manière : elle peut servir de modèle pour la position de ces sortes de citadelles.

Les villes maritimes, outre les citadelles, sont encore quelquefois défendues par des châteaux qui commandent au port. Dans ces sortes de villes on construit ordinairement des jetées, qui sont des espèces de digues, de fortes murailles, ou chaussées, qu'on bâtit aussi avant qu'on le peut dans la mer, en y jetant une très-grande quantité de gros quartiers de pierres. A leur extrémité, on établit des forts dont le canon empêche que les vaisseaux ennemis ne s'approchent du port, et par conséquent de la ville. La figure de ces forts n'a rien de déterminé : on leur donne la plus propre à leur faire commander tous les côtés par où l'ennemi peut se présenter.

On construit aussi quelquefois des réduits dans les villes, qui ont le même objet que la citadelle. Voyez REDUIT. (Q)