S. m. (Histoire moderne) prince souverain sans titre ou sans qualité de roi. Tels sont le duc de Lorraine, le duc de Holstein, etc. Voyez PRINCE.

Ce mot est emprunté des Grecs modernes, qui appelaient ducas les personnes que les Latins nomment dux ; comme Constantin ducas, &c.

On compte en Europe deux souverains qui portent le titre de grand-duc, comme le grand- duc de Toscane et le grand- duc de Moscovie, que l'on appelle à présent le czar ou l'empereur des Russies ; et avant que la Lithuanie fût unie à la Pologne, on donnait à son duc le titre de grand-duc de Lithuanie, que le roi de Pologne prend dans ses qualités. L'héritier du trône de Russie s'appelle aujourd'hui grand-duc de Russie. On connait en Allemagne l'archiduc d'Autriche. Voyez ARCHIDUC.

DUC, dux, est aussi le titre d'honneur ou de noblesse de celui qui a le premier rang après les princes. Voyez NOBLESSE, PRINCE, PAIR, BARON, etc.

Le duché ou la dignité de duc, était une dignité romaine sous le bas empire ; car auparavant le commandement des armées était amovible, et le gouvernement des provinces n'était conféré que pour un an. Ce nom vient à ducendo, qui conduit ou qui commande. Suivant cette idée, les premiers ducs, duces, étaient les ductores exercituum, commandants des armées ; sous les derniers empereurs, les gouverneurs des provinces eurent le titre de ducs. Dans la suite on donna la même qualité aux gouverneurs des provinces en temps de paix.

Le premier gouverneur sous le nom de duc, fut un duc de la Marche rhétique ou du pays des Grisons, dont il est fait mention dans Cassiodore. On établit treize ducs dans l'empire d'Orient, et douze dans l'empire d'Occident.

La plupart de ces ducs étaient, ou des généraux romains, ou des descendants des rois du pays, auxquels en ôtant le nom de rais, on avait laissé une partie de l'ancienne autorité, mais sous la dépendance de l'empire.

Quand les Goths et les Vandales se répandirent dans les provinces de l'empire d'Occident, ils abolirent les dignités romaines par-tout où ils s'établirent ; mais les Francs, pour plaire aux Gaulois qui avaient été longtemps accoutumés à cette forme de gouvernement, se firent un point de politique de n'y rien changer ; ainsi ils divisèrent toutes les Gaules en duchés et comtés ; et ils donnèrent quelquefois le nom de ducs, et quelquefois celui de comtes, comites, à ceux qu'ils en firent gouverneurs. Voyez COMTE.

Cambden observe qu'en Angleterre, du temps des Saxons, les officiers et les généraux d'armées furent quelquefois appelés ducs, duces, sans aucune autre dénomination, selon l'ancienne manière des Romains.

Lorsque Guillaume le Conquérant vint en Angleterre, ce titre s'éteignit jusqu'au règne du roi Edouard III. qui créa duc de Cornouaille Edouard, qui avait eu d'abord le nom de prince noir. Il érigea aussi en duché le pays de Lancastre en faveur de son quatrième fils ; dans la suite on en institua plusieurs, de manière que le titre passait à la postérité de ces ducs. On les créait avec beaucoup de solennité per cincturam gladii cappaeque, et circuli aurei in capite impositionem, Et de-là sont venues les coutumes dont ils sont en possession de porter la couronne et le manteau ducal sur leurs armoiries.

Quoique les François eussent retenu les noms et la forme du gouvernement des ducs, néanmoins sous la seconde race de leurs rois il n'y avait presque point de ducs, mais tous les grands seigneurs étaient appelés comtes, pairs ou barons, excepté néanmoins les ducs de Bourgogne et d'Aquittaine, et un duc de France ; dignité dont Hugues Capet lui-même porta le titre, et qui revenait à la dignité de maire du palais ou de lieutenant général du roi. Hugues le Blanc père de Hugues Capet avait été revêtu de cette dignité, qui donnait un pouvoir presqu'égal à celui du souverain.

Par la faiblesse des rais, les ducs ou gouverneurs se firent souverains des provinces confiées à leur administration. Ce changement arriva principalement vers le temps de Hugues Capet, quand les grands seigneurs commencèrent à démembrer le royaume, de manière que ce prince trouva chez les François plus de compétiteurs que de sujets. Ce ne fut pas sans grande peine qu'ils parvinrent à le reconnaître pour leur maître, et à tenir de lui à titre de foi et hommage les provinces dont ils voulaient s'emparer ; mais avec le temps, le droit des armes et les mariages, les provinces tant duchés que comtés qui avaient été démembrées de la couronne, y furent réunies par degrés ; et alors le titre de duc ne fut plus donné aux gouverneurs des provinces.

Depuis ce temps-là le nom de duc n'a plus été qu'un simple titre de dignité, affecté à une personne et à ses hoirs mâles, sans lui donner aucun domaine, territoire ou juridiction sur le pays dont il est duc. Tous les avantages consistent dans le nom et dans la presséance qu'il donne. Ils sont créés par lettres patentes du roi qui doivent être enregistrées à la chambre des comptes. Leur dignité est héréditaire, s'ils sont nommés ducs et pairs. Ils ont alors séance au parlement ; mais non, s'ils ne sont que ducs à brevet.

En Angleterre, les ducs ne retiennent de leur ancienne splendeur que la couronne sur l'écusson de leurs armes, qui est la seule marque de leur souveraineté passée. On les crée par lettres patentes, ceinture d'épée, manteau d'état, imposition de chapeau, couronne d'or sur la tête, et une verge d'or en leur main.

Les fils ainés des ducs en Angleterre sont qualifiés de marquis, et les plus jeunes sont appelés lords, en y ajoutant leur nom de baptême, comme lord James, lord Thomas, etc. et ils ont le rang de vicomte, quoiqu'ils ne soient pas aussi privilégiés par les lois des biens fonds.

Un duc en Angleterre a le titre de grâce quand on lui écrit ; on le qualifie en terme héraldique de prince, le plus haut, le plus puissant, le plus noble. Les ducs du sang royal sont qualifiés de princes les plus hauts, les plus puissants, les plus illustres.

En France, on donne quelquefois aux ducs, en leur écrivant, le titre de grandeur et de monseigneur ; mais sans obligation ; dans les actes on les appelle très-haut et très-puissant seigneur ; en leur parlant on les appelle monsieur le duc.

Le nom de duc en Allemagne emporte avec soi une idée de souveraineté, comme dans les ducs de Deux-ponts, de Wolfembutel, de Brunswik, de Saxe-Weimar, et dans les autres branches de la maison de Saxe ; tous ces princes ayans des états et séance aux dietes de l'empire. Le titre de duc s'est aussi fort multiplié en Italie, surtout à Rome et dans le royaume de Naples ; mais il est inconnu à Venise et à Gènes, si ce n'est pour le chef de ces républiques, en Hollande, et dans les trois royaumes du nord, savoir la Suède, le Danemark, et la Pologne ; car dans celui-ci le titre de grand-duc de Lithuanie est inséparable de la couronne, aussi-bien qu'en Moscovie.

Duc-duc est une qualité que l'on donne en Espagne à un grand de la maison de Sylva, à cause qu'il a plusieurs duchés, réunissant en sa personne deux maisons considérables. Don Rodrigo de Sylva fils ainé de don Rui Gomez de Sylva, et héritier de ses duchés et principautés, épousa la fille ainée du duc de l'Infantado ; en vertu de ce mariage le duc actuel de Pastrana qui en est issu, et qui est petit-fils de don Rodrigo de Sylva, a ajouté à ses autres grands titres celui de duc-duc, pour se distinguer des autres ducs, dont quelques-uns peuvent posséder plusieurs duchés, mais aucuns d'aussi considérables, ni les titres de familles si eminens. Chambers. (G)