TEMPE, s. f. (Synonyme) on nomme indifféremment par ces deux termes, la partie double de la tête, qui est à l'extrémité du front, entre les yeux et les oreilles. L'académie française préfère temple à tempe, et je ne crois pas qu'elle ait raison, car outre que tempe ôte l'équivoque, il répond au mot latin tempora, qui désigne le temps ou l'âge de l'homme, à cause que le poil de cet endroit blanchit ordinairement le premier. De-là vient qu'Homère appelle poliocrotaphes les hommes qui grisonnent ; en grec , de , chauve, et , tempora, la tempe. (D.J.) Voyez TEMPE.

TEMPLE, EGLISE, (Synonyme) ces mots signifient un édifice destiné à l'exercice public de la religion ; mais temple est du style pompeux ; église du style ordinaire, du moins à l'égard de la religion romaine t car à l'égard du paganisme, et de la religion protestante, on se sert du mot de temple, même dans le style ordinaire, au-lieu de celui d'église. Ainsi l'on dit le temple de Janus, le temple de Charenton, l'église de S. Sulpice.

Temple parait exprimer quelque chose d'auguste, et signifier proprement un édifice consacré à la divinité. Eglise parait marquer quelque chose de plus commun, et signifier particulièrement un édifice fait pour l'assemblée des fidèles.

Rien de profane ne doit entrer dans le temple du Seigneur : on ne devrait permettre dans nos églises que ce qui peut contribuer à l'édification des chrétiens.

L'esprit et le cœur de l'homme sont les temples chéris du vrai Dieu ; c'est-là qu'il veut être adoré ; envain on fréquente les églises, il n'écoute que ceux qui lui parlent dans leur intérieur.

Les temples des faux dieux étaient autrefois des asiles pour les criminels ; mais c'est, ce me semble, déshonorer celui du très-haut, que d'en faire un réfuge de malfaiteurs. Si l'on ne peut apporter à l'église un esprit de recueillement, il faut du moins y être d'un air modeste, la bienséance l'exige, ainsi que la piété. Girard. (D.J.)

TEMPLE, s. m. (Architecture) c'est dans l'ancienne architecture, un bâtiment destiné au culte divin, et où l'on faisait les sacrifices : ce bâtiment était composé de quatre parties. La première était formée par des ailes en forme de galerie, ou portiques, nommés pleromata. La seconde était un porche appelé pronaos ; une partie à-peu-près semblable était opposée à celle-ci ; et une troisième beaucoup plus grande, était au-milieu de ces trois parties.

L'art de l'architecture des temples était aussi perfectionné que diversifié chez les Grecs et les Romains ; mais il s'agit seulement d'expliquer ici les principaux termes qui prouvent cette diversité.

Temple amphitrostyle, ou double prostyle. Temple qui avait des colonnes devant et derrière, et qui était aussi tétrastyle. Voyez ci - après TEMPLE TETRASTYLE.

Temple à antes. C'était, selon Vitruve, le plus simple de tous les temples ; il n'avait que des pilastres angulaires, appelés antes ou parastates, à ses encoignures, et deux colonnes d'ordre toscan aux côtés de sa porte.

Temple diptère. Temple qui avait deux rangs de colonnes isolées en son circuit, et qui était octostyle, c'est-à-dire, avec huit colonnes de front ; tel était le temple de Diane à Ephese. Le mot diptère vient du grec , qui a deux ailes.

Temple hypêtre. Temple dont la partie intérieure était à découvert, ainsi que l'indique le mot hypêtre, dérivé du grec , qui signifie lieu découvert. Il était décastyle, ou avec dix colonnes de front, et avait deux rangs de colonnes en son pourtour extérieur, et un rang dans l'intérieur. Tel était le temple de Jupiter Olympien à Athènes.

Temple monoptère. Temple rond et sans murailles, qui avait un dôme porté sur des colonnes ; c'est ainsi qu'était le temple d'Apollon Pythien, à Delphes.

Temple périptère. Temple qui était décoré de quatre rangs de colonnes isolées en son pourtour, et qui était hexastyle, c'est-à-dire, avec six colonnes de front, comme le temple de l'Honneur et de la Vertu à Rome. Le mot périptère est formé de deux mots grecs, , à-l'entour, et , aile.

Temple périptère rond. Temple dont un rang de colonnes forme un porche circulaire, qui environne une rotonde, comme les temples de Vesta à Rome, et de la Sibylle à Tivoli, et une petite chapelle près S. Pierre in montorio, à Rome, bâtie par Bramante, fameux architecte.

Temple prostyle. Temple qui n'avait des colonnes qu'à la face antérieure, comme le temple d'ordre dorique de Cérès Eléusis, en Grèce. Le mot prostyle est derivé de deux mots , devant ; et , colonne.

Temple pseudodiptère, ou diptère imparfait. Temple qui avait huit colonnes de front, avec un seul rang de colonnes qui régnait au pourtour, comme le temple de Diane, dans la ville de Magnesie en Grèce.

Temple tétrastyle. Le mot grec , qui signifie quatre colonnes de front, caractérise ce temple. Tel était celui de la Fortune virîle à Rome. (D.J.)

TEMPLE, de Dieu, (Critique sacrée) ; ce mot, outre le sens propre d'un édifice consacré au culte public de Dieu, se prend au figuré dans l'Ecriture, 1°. pour le séjour des bienheureux, 2°. pour l'Eglise de Jesus-Christ. " L'antéchrist, dit Saint Paul, II. Thessalon. IIe 4. siégera dans le temple de Dieu, c'est-à-dire, usurpera dans l'Eglise le pouvoir et les honneurs divins " 3°. Pour les fidèles : Vous êtes le temple de Dieu ; car l'esprit de Dieu habite en vous, I. Corinth. IIIe 16. Un poète grec a dit de la divinité, " qu'elle trouve autant de plaisir à habiter chez les gens de bien que dans l'olympe. " (D.J.)

TEMPLE de Salomon, (Histoire sacrée) David rassembla longtemps des matériaux pour la construction de ce temple, que Salomon éleva sur le mont de Sion, et qu'il acheva dans le cours de deux ans et avec des dépenses prodigieuses. Ce n'était cependant qu'une masse de bâtiment, qui n'avait que cent cinquante pieds de long, et autant de large en prenant tout le corps de l'édifice d'un bout à l'autre, ce qui est au-dessous de plusieurs de nos églises paroissiales. On ne conçoit guère qu'un si petit édifice ait occupé cent soixante mille ouvriers, que les rois d'Egypte et de Tyr fournirent à Salomon, au rapport de Clément qui dit avoir lu cette particularité dans un ouvrage d'Alexandre Polyhistor. Il faut donc supposer que c'était au travail exquis des ornements et des décorations intérieures, que la plupart de ces ouvriers furent occupés. Le livre des chroniques, ch. IIIe dit que la seule dépense des décorations du saint des saints, qui était une place de trente pieds en carré et de trente pieds de haut, montait à six cent talents d'or. S'il ne s'est point glissé d'erreur dans le texte, c'est une somme de quatre millions trois cent vingt mille livres sterling pour cette seule partie du temple, mais cela n'est pas vraisemblable.

Les édifices extérieurs étaient fort considérables ; car la cour dans laquelle le temple était placé, et celle du dehors nommée la cour des femmes, étaient environnées de bâtiments et de bâtiments magnifiques. Les portes qui y conduisaient, répondaient à cette magnificence. Enfin, la cour intérieure qui formait un carré de mille sept cent cinquante pieds de chaque côté, et qui embrassait tout le reste, était entourée d'une galerie soutenue de trois rangs de colonnes à trois de ses côtés, et de quatre rangs au quatrième. C'était-là qu'étaient les logements des prêtres et des lévites, et les magasins de toutes les choses nécessaires au culte public.

Au milieu de cette dernière enceinte était le sanctuaire, le saint, et le vestibule. Le sanctuaire formait un cube parfait, ayant trente pieds en tous sens. Au milieu était placée l'arche de l'alliance. A ses deux extrémités on voyait deux chérubins de quinze pieds de haut, l'un d'un côté, l'autre de l'autre, à égale distance du centre de l'arche et du mur de chaque côté. Ces chérubins, en étendant leurs ailes, occupaient toute la largeur du sanctuaire : voilà pourquoi l'Ecriture dit si souvent, que Dieu habitait entre les chérubins.

Le saint contenait le chandelier d'or, la table des pains de proposition, et l'autel d'or, sur laquelle on offrait les parfums. Ce métal était semé avec profusion dans tout l'intérieur du temple ; les tables, les chandeliers, les vases nombreux, de toutes espèces, étaient d'or. L'auteur du II. des Paralip. VIIe 1. dit noblement, pour en peindre l'éclat : majestas Domini implevit domum, la majesté du Seigneur remplissait son palais.

Mais ce beau temple, depuis sa construction, essuya bien des malheurs. Il fut pillé sous Roboam par Sézac roi d'Egypte. Achaz roi de Juda le ferma. Manassès le changea jusqu'à sa conversion, en réceptacle de superstition et d'idolatrie. Enfin l'an 598 avant Jesus-Christ, et la première du règne de Sédécias, Nabuchodonosor s'étant rendu maître de Jérusalem par la rebellion de Jehojakim, ruina le temple de Salomon, en enleva tous les vases, tous les trésors qui y étaient, et les transporta à Babylone.

On sait la suite des événements qui concernent ce temple. Il demeura enseveli sous ses ruines pendant l'espace de cinquante-deux ans, jusqu'à la première année du règne de Cyrus à Babylone. Ce prince, l'an 536 avant Jesus-Christ, permit aux Juifs de retourner à Jérusalem, et de rebâtir leur temple ; la dédicace s'en fit l'an 515 avant Notre-Seigneur, et la septième année du règne de Darius fils d'Hystaspe. Ce second temple, dont on trouvera l'histoire au mot JERUSALEM, fut pillé et prophané l'an 171 avant Jésus-Christ par Antiochus qui y fit un butin, qu'on estima dix-huit cent talents d'or. Trais ans après, Judas Macchabée le purifia et y rétablit le culte de Dieu. Pompée s'étant rendu maître de la ville l'an 63 avant Jesus-Christ, sous le consulat de Caïus Antonius et de Cicéron, il entra dans le temple, en vit toutes les richesses, et se fit un scrupule d'y toucher. Neuf ans après, Crassus moins religieux, les ravit par un pillage sacrilege qui montait à plus de deux millions sterlings. Hérode abattit ce triste édifice qui depuis cinq cent ans d'existence, avait beaucoup souffert et des sieges des ennemis, et plus encore des injures du temps. Il éleva à sa place un nouveau temple qui fut réduit en cendres à la prise de Jérusalem par Titus. (D.J.)

TEMPLES, (Littérature) Est-ce la piété ou la superstition qui éleva tant de temples superbes au culte des dieux ? Pour moi je pense que la politique se flatta par de magnifiques ouvrages de l'art, d'imprimer plus de respect, et d'exciter plus de crainte dans l'esprit des peuples.

Les arbres furent les premiers autels, et les champs les premiers temples. C'était sur des pierres brutes ou des mottes de gazon, que se firent les premières offrandes à la Divinité. Dans des temps où l'on ne connaissait ni l'Architecture ni la Sculpture, on choisit pour le culte religieux des bois plantés sur des hauteurs, et ces bois devinrent sacrés ; on les éclaira de lumières, parce qu'on y passait une partie de la nuit ; on les orna de guirlandes et de bouquets de fleurs ; on suspendit dans les chapelles de treillage les dons et les offrandes. L'on y fit des repas publics, accompagnés dans les années fertiles, de chants, de danses, et de toutes les autres marques de la joie et de la reconnaissance.

Les temples de pierre et de marbre naquirent avec les progrès de l'Architecture. Il arriva même alors, que pour conserver l'ancien usage, on continua de planter des bois autour des temples, de les environner de murailles ou de haies, et ces bois passaient pour sacrés.

Bientôt on éleva dans les villes des temples superbes en l'honneur des dieux, et la Sculpture tailla leurs statues. Phidias, par l'effort d'un art également brillant et heureux, d'un bloc de marbre, fit le dieu qui lance le tonnerre.

Tremblez, humains, faites des vœux ;

Voilà le maître de la Terre !

C'est en Egypte que la construction des temples prit naissance. Elle fut portée de-là chez les Assyriens, les Phéniciens et les Syriens, passa dans la Grèce avec les colonies, et de la Grèce vint à Rome. Telle a été la marche constante de la religion, des sciences et des beaux arts. Il n'y eut que quelques peuples, tels que les Perses, les Indiens, les Getes et les Daces qui persistèrent dans le sentiment, qu'on ne devait pas enfermer les dieux dans aucun édifice de la main des hommes, quelque magnifique qu'il put être : parietibus nunquam includendos deos, quibus omnia debèrent esse patentia, comme s'exprime Ciceron ; mais l'idée contraire des nations policées prévalut dans le monde.

Il arriva même, avec le temps, que chaque divinité eut ses temples favoris, dont elle ne dédaignait point de porter le nom, et c'était-là que son culte était le plus florissant. Les villes qui leur étaient dévouées, et qui se donnaient le titre ambitieux de villes sacrées, tirant avantage du grand concours de peuple qui venait de toutes parts à leurs solennités, prenaient sous leur protection, ceux que la religion, la curiosité ou le libertinage y attiraient, les défendaient comme des personnes inviolables, et combattaient, pour l'immunité de leurs temples, avec autant de zèle que pour le salut de la patrie.

Pour en augmenter la vénération, ils n'épargnaient ni la somptuosité des bâtiments, ni la magnificence des décorations, ni la pompe des cérémonies. Les miracles et les prodiges excitant encore davantage le respect et la dévotion populaire, il n'y avait guère de temples renommés dont on ne publiât des choses surprenantes. Dans les uns, les vents ne troublaient jamais les cendres de l'autel, dans les autres il ne pleuvait jamais, quoiqu'ils fussent découverts. La simplicité superstitieuse des peuples recevait aveuglément ces prétendues merveilles, et le zèle intéressé des ministres de la religion les soutenait avec chaleur.

L'aspect de ces temples était fort imposant. On trouvait d'abord une grande place accompagnée de galeries couvertes en forme de portiques, à l'extrémité de laquelle on voyait le temple, dont la figure était le plus souvent ronde ou carrée. Il était ordinairement composé de quatre parties ; savoir, d'un porche ou vestibule faisant la façade ; d'une autre semblable pièce à la partie opposée ; de deux ailes formées de chaque côté par divers rangs de colonnes ; et du corps du temple appelé cella ou . Ces trois premières parties ne se trouvaient pas néanmoins dans tous les temples. Les temples environnés de colonnes de toutes parts, étaient appelés périptères : on leur donnait le nom de diptères, quand il y en avait double rang : tel était le second temple d'Ephèse.

On peut voir dans Hérodote quelle était la magnificence du temple de Vulcain à Memphis, que tant de rois eurent bien de la peine à achever ; c'était une grande gloire, si dans un long règne un prince avait pu en construire un portique. On connait la description du temple de Jupiter olympien par Pausanias. Le temple de Delphes était aussi fameux par ses oracles que par les présents immenses dont il était rempli. Le temple d'Ephese, qu'un insensé brula pour acquérir l'immortalité, passait pour un chef-d'œuvre de l'art : on le rebâtit encore plus superbement. Les temples de Minerve à Athènes et à Saïs ne sont pas moins célèbres. Le temple de Jupiter capitolin à Rome, incendié tant de fais, épuisa la prodigalité de Domitien pour le rebâtir. Le corps du panthéon subsiste toujours dans son entier sous le nom de l'église de tous les saints, auxquels il est consacré, comme il l'était dans le paganisme, à tous les dieux. Le temple de la Paix faisait, au rapport de Pline, un des plus beaux ornements de Rome. Enfin, rien n'était plus étonnant dans le paganisme que le temple de Belus, composé de sept étages, dont le plus élevé renfermait la statue de ce dieu. Il y a beaucoup d'autres temples moins célèbres, dont nous tracerons l'histoire avec quelque soin, parce qu'elle est très-intéressante. Les Antiquaires ont fait dessiner le plan de quelques - uns de ces fameux édifices, sur - tout le P. Montfaucon, qu'on peut consulter dans son antiq. expliq. tome II. pag. 54. et suiv.

Le respect que l'on avait pour les temples répondait à leur beauté ; ils étaient, comme je l'ai dit, un lieu d'asîle pour les coupables et pour les débiteurs ; on n'osait y cracher ; et dans les calamités publiques, les femmes venaient se prosterner dans le sanctuaire, pour en balayer le pavé avec leurs cheveux. Rarement les conquérants osaient en enlever les richesses ; car la politique et la religion contribuaient également à rendre ces monuments sacrés et inviolables.

L'intérieur de tous ces temples était communément décoré de statues de dieux et de statues de grands hommes, de tableaux, de dorures, d'armes prises sur les ennemis, de trépiés, de boucliers votifs, et d'autres richesses de ce genre. Outre ces sortes d'ornements, on parait les temples, dans les jours de solennité, des décorations les plus brillantes, et de toutes sortes de festons de fleurs.

De plus, comme ces temples étaient destinés au culte des dieux, on avait égard dans leur structure, à la nature et aux fonctions qui leur étaient attribués. Ainsi, suivant Vitruve, les temples de Jupiter foudroyant, du Ciel, du Soleil, de la Lune, et du dieu Fidius, devaient être découverts. On observait cette même convenance dans les ordres d'architecture. Les temples de Minerve, de Mars et d'Hercule devaient être d'ordre dorique, dont la majesté convenait à la vertu robuste de ces divinités. On employait pour ceux de Vénus, de Flore, de Proserpine, et des nymphes des eaux, l'ordre corinthien, l'agrément des feuillages, des fleurs et des volutes dont il est égayé, sympathisant avec la beauté tendre et délicate de ces déesses. L'ordre ionique qui tenait le milieu entre la sévérité du dorique et la délicatesse du corinthien, était mis en œuvre dans ceux de Junon, de Diane, et de Bacchus, en qui l'on imaginait un juste mélange d'agrément et de majesté. L'ouvrage rustique était consacré aux grottes des dieux champêtres. Enfin, tous les ornements d'architecture que l'on voyait dans les temples, faisaient aussi-tôt connaître la divinité qui y présidait.

Au reste, ce ne fut pas aux dieux seuls que l'on bâtit des temples, les Grecs, les Asiatiques, et les Syriens en consacrèrent à leurs bienfaiteurs ou à leurs maîtres. Les lois romaines laissaient même la liberté aux proconsuls de recevoir des honneurs pareils ; cet usage même était établi dès le temps de la république, comme Suétone le remarque, et comme il serait aisé de le prouver par un grand nombre d'exemples. (D.J.)

TEMPLES DES EGYPTIENS. (Antiq. Egypt.) Voici la forme des temples d'Egypte suivant Strabon.

A l'entrée du temple, dit-il, est une cour pavée de la largeur d'un arpent, et de la longueur de trois, de quatre ou même davantage. Ce lieu s'appelle dromos en grec, mot qui veut dire la course.

Le long de cet espace, des deux côtés de la largeur, sont posés des sphinx de pierre à vingt coudées, et même plus de distance l'un de l'autre, de sorte qu'il y en a un rang à droite, et un rang à gauche. Après les sphinx est un grand vestibule ; plus avant il y en a un second, puis un troisième : mais ni le nombre des vestibules, ni celui des sphinx n'est fixé ; il y en a plus ou moins, à proportion de la longueur et de la largeur des dromes.

Après le vestibule est le temple qui a un grand parvis, mais le temple même est petit : il n'y a aucune figure, ou s'il y en a, ce n'est point celle d'un homme, mais de quelque bête. Des deux côtés du parvis s'étendent les ailes, ce sont des murs aussi hauts que le temple. D'abord leur distance est un peu plus grande que toute la largeur du temple ; ensuite elles se rapprochent l'une de l'autre jusqu'à cinquante ou soixante coudées. Ces murailles sont pleines de grandes figures sculptées pareilles aux ouvrages des Toscans ou des anciens Grecs. Il y a aussi un bâtiment sacré soutenu sur un grand nombre de colomnes, comme à Memphis, d'une fabrique dans le goût barbare ; car outre que les colonnes sont grandes et en grand nombre et disposées en plusieurs rangs, il n'y a ni peinture ni grâce ; c'est plutôt un amas de pierres qui a couté inutilement beaucoup de travail.

Les Egyptiens avaient des temples monolythes, ou faits d'un seul morceau de marbre fouillé dans les carrières éloignées, et qu'on avait amené par des machines, que nous ne pouvons construire aujourd'hui, tout savants que nous croyons être dans la mécanique.

Rien de plus superbe que leurs temples, dit Clément d'Alexandrie, (Paedag. lib. III. cap. 2. p. 216.) rien de plus grave que leurs sacrificateurs ; mais quand on entre dans le sanctuaire, et que le prêtre levant le voile, offre aux yeux la divinité, il fait éclater de rire les spectateurs à l'aspect de l'objet de son adoration ; on voit un chat, un crocodile, un serpent étranger qui se roule sur des tapis de pourpre. C'est là-dessus que saint Clément compare ces dieux égyptiens dans leurs temples aux femmes qui se parent de riches habits ; l'extérieur de ces femmes, continue-t-il, est magnifique, mais l'intérieur en est méprisable.

Ce que Clément d'Aléxandrie avance de la magnificence des temples de l'Egypte, est confirmé par les historiens prophanes. Hérodote, Lucien et autres, n'en parlent pas autrement : ils témoignent tous que l'Egypte avait un grand nombre de temples plus riches, et plus splendides les uns que les autres. Tels étaient ceux d'Isis et d'Osiris en général ; tels étaient en particulier ceux de Jupiter à Diospolis, et à Hermunthis, celui de Vulcain à Memphis, et celui de Minerve à Saïs. Nous parlerons de ces deux derniers à leur rang. (D.J.)

TEMPLES DES GRECS. (Antiq. Grecq.) Les Grecs avaient un si grand nombre de temples, de chapelles et d'autels, qu'on en trouvait à chaque pas dans les villes, dans les bourgades et dans les campagnes. Pour s'en convaincre, on n'a qu'à lire les anciens auteurs, surtout Pausanias qui s'est attaché particulièrement à les décrire, et qui en parle presque à chaque page de son voyage de la Grèce.

Parmi tant de temples, Vitruve en admirait principalement quatre bâtis de marbre, et si noblement enrichis, qu'ils faisaient l'étonnement des plus grands connaisseurs, et étaient devenus la règle des bâtiments dans les trois ordres d'architecture, le dorien, l'ionien et le corinthien.

Le premier de ces beaux ouvrages, était le temple de Diane à Ephèse ; le second celui d'Apollon dans la ville de Milet, l'un et l'autre d'ordre ionique ; le troisième était le temple d'Eleusis, d'ordre dorique ; le quatrième était le temple de Jupiter Olympien à Athènes, d'ordre corinthien. On pense bien que ces quatre temples ne seront pas oubliés dans notre liste ; il ne s'agit ici que d'observations générales sur tous les temples de la Grèce.

Ils étaient partagés en plusieurs parties qu'il est bon de distinguer pour entendre les descriptions qu'en font les historiens. La première était le vestibule, où était la piscine, dans laquelle les prêtres, aeditui, puisaient l'eau lustrale, pour expier ceux qui voulaient entrer dans les temples ; ensuite venait la nef, ; et le lieu saint appelé penetrale, sacrarium, adytum, dans lequel il n'était pas permis aux particuliers d'entrer ; il y avait enfin l'arrière temple ; mais tous n'avaient pas cette partie. Les temples grecs avaient souvent des portiques, et toujours des marches pour y monter ; il y en avait aussi plusieurs avec des galeries autour ; ces galeries étaient formées d'un rang de colonnes posées à un certain espace du mur couvertes de grandes pierres : ces sortes de temples se nommaient perieptères, c'est-à-dire, ailés ; diptères, quand la galerie avait deux rangs de colonnes ; prostyles, lorsque les colonnes formaient le portique sans galerie ; et enfin hypethres, quand ils avaient en-dehors deux rangs de colonnes, et autant en-dedans, tout le milieu étant découvert à-peu-près comme nos cloitres. Les Romains imitèrent toutes ces différentes structures. Vitruve remarque encore d'autres particularités qu'on peut voir dans son ouvrage : je n'en citerai que deux.

1°. Un temple ne pouvait être consacré sans la statue du dieu qui devait être placée au milieu. Il y avait au pied de la statue un autel sur lequel les premières offrandes qu'on faisait, étaient de légumes cuits dans de l'eau, et une espèce de bouillie qu'on distribuait aux ouvriers qui avaient élevé la statue.

2°. Quoique communément les hommes et les femmes entrassent dans les temples, il y en avait dont l'entrée était défendue aux hommes ; tel était celui de Diane à Rome, dans la rue nommée Vicuspatricius, ainsi que Plutarque nous l'apprend ; et néanmoins tout le monde pouvait entrer dans les autres temples de cette déesse. On croit que la raison de cette défense venait de ce qu'une femme qui priait dans ce temple, y reçut le plus sanglant affront.

Enfin, les politiques considérant la magnificence des temples de la Grèce, le nombre de prêtres et de prêtresses de tous ordres qui les desservaient, et les frais des sacrifices ; les politiques, dis-je, demandent avec curiosité, par quel moyen on suppléait à de si grandes dépenses. Je réponds d'abord que les temples à oracles n'avaient besoin de rien pour leur subsistance ; ils regorgeaient de présents, et les autres avaient des revenus particuliers qui leur étaient affectés : voici ceux de ma connaissance.

L'un de ces revenus à Athènes était le produit des amendes auxquelles on condamnait les particuliers, amendes dont la dixième partie appartenait à Minerve Poliade, et la cinquantième aux autres dieux, et aux héros dont les tribus portaient le nom. De-plus, lorsque les Prytanes ne tenaient pas les assemblées conformément aux lois, chacun d'eux était puni par une amende de mille dragmes qu'il fallait payer à la déesse. Si les proèdres, c'est-à-dire, les sénateurs chargés de faire à ces assemblées le rapport des matières sur lesquelles on devait délibérer, ne le faisaient pas suivant les règles, et dans l'ordre prescrit, ils étaient aussi condamnés à une amende de quarante dragmes, appliquée comme l'autre au profit de Minerve, ce qui devait l'enrichir.

Outre cette espèce de revenu appartenant en commun aux dieux, et qui variait suivant le nombre et la grandeur des fautes, les temples en avaient de particuliers ; c'est le produit des terres consacrées aux divinités : rien n'était plus commun dans la Grèce que ces fondations. Je ne parle pas ici des terres que l'on consacrait aux dieux, et qui étaient condamnées à rester éternellement incultes, comme le territoire de Cirrha proscrit par le decret solennel des amphictions, la campagne située entre Mégare et l'Attique consacrée aux déesses d'Eléusis, et plusieurs autres : il ne s'agit que de celles que l'on cultivait, et dont les fruits faisaient la richesse des temples.

Tel fut le champ que Xénophon consacra à Diane d'Ephèse, en exécution d'un vœu qu'il lui avait fait pour son heureux retour dans la retraite des dix mille. Il l'acheta d'une partie de l'argent qui provenait des dépouilles des Perses, et de la rançon de leurs prisonniers ; ce champ était situé auprès de Scilunte, petit bourg fondé par les Lacédémoniens sur la route de Sparte à Olympie ; il employa ce qu'il eut de reste après cet achat, à faire bâtir un temple sur le modèle de celui d'Ephèse : un trait de ressemblance assez singulier entre ces deux édifices, c'est leur situation. Le fleuve qui coulait auprès du temple d'Ephèse se nommait Sellène, et nourrissait beaucoup de poisson. Un ruisseau du même nom, et qui avait le même avantage, arrosait la campagne où Xénophon fit élever le sien. Ses environs, aussi variés que fertiles, offraient des terres labourables, des pâturages excellents, où les animaux destinés à servir de victimes trouvaient une nourriture abondante, des forêts remplies de gibier de toutes espèces, et qui servaient de retraite à une grande multitude de bêtes fauves.

Le temple était environné d'un bois sacré et de jardins plantés d'arbres fruitiers de toute saison. Devant la porte de cet édifice, on voyait une colomne que Xénophon fit élever comme le monument de la fondation, et sur laquelle on lisait ces mots : : terre consacrée à Diane. Elle était affermée ; celui qui percevait les fruits devait en payer la dixme à la déesse, et déposer le reste pour être employé aux réparations et aux dépenses ordinaires.

Cette dixme servait aux sacrifices offerts dans la fête solennelle que Xénophon institua en l'honneur de Diane. Elle se célébrait tous les ans, et durait plusieurs jours ; tous les habitants du bourg et des environs s'y trouvaient, et la divinité nourrissait pendant tout le temps ses adorateurs, en leur fournissant du blé, du vin, et toutes les choses nécessaires à la vie. Xénophon même, afin de procurer l'abondance, indiquait auparavant une chasse générale, à laquelle il présidait avec ses enfants. J'ai rapporté tous ces détails d'après les Mém. des Inscript. parce que c'est peut-être la seule fondation dont les particularités nous aient été conservées, et qu'elle peut donner une idée de toutes les autres. (D.J.)

TEMPLES DES ROMAINS, (Antiquité romaine) Rome et l'Italie n'avaient peut-être pas moins de temples que la Grèce. Donnons une idée générale de leur origine, de leur consécration et de leur structure ; les détails sont réservés à chaque temple en particulier.

On sait assez que les anciens romains ont eu beaucoup d'attachement pour leur religion ; je dirai mieux, beaucoup de superstition dans leur culte. Il ne leur arrivait guère d'heureux ou fâcheux succès, qui ne fût suivi de la construction de quelque temple. Le nom même des temples qu'ils consacrèrent aux dieux, tire son origine du temple augural, c'est-à-dire, d'une simple enceinte dans laquelle les augures observaient le vol des oiseaux. Tous les lieux tracés par les augures étaient même appelés temples, templa, quoiqu'ils ne fussent pas destinés au culte de la religion ; c'est ainsi que les augures trouvèrent le secret d'accréditer leur ouvrage.

Les uns attribuent la fondation des premiers temples de l'Italie à Janus, par l'invocation duquel on commençait tous les sacrifices ; les autres en donnent la gloire à Faune, et prétendent que le mot fanum en tire son origine. Quoi qu'il en sait, ces premiers temples n'étaient que des bois sacrés, puisque les Romains, au rapport de Varron, ont été sans temples pendant l'espace de 170 ans. Ainsi le temple de Jupiter Féretrien et celui de Jupiter Stator n'étaient point apparemment consacrés, et le temple de Janus ne doit être envisagé que comme un monument de l'union des Romains et des Sabins, dont la statue de ce dieu à deux visages était le symbole, et le fut aussi de la paix et de la guerre.

Les formalités requises pour l'établissement d'un véritable temple, étaient l'autorité des lois, l'observation des auspices, les cérémonies de la consécration. Un magistrat qui avait fait vœu de bâtir un temple, n'engageait point la république sans son consentement. Quand la construction du temple avait été résolue dans le sénat, il fallait une loi ou un plébiscite pour l'éxécution du projet. Sous les empereurs, leur volonté tenait lieu de loi.

Ensuite on consultait les augures qui s'assemblaient par ordre des duumvirs, c'est-à-dire, des commissaires nommés pour la conduite de l'ouvrage. Les augures commençaient par le choix du terrain, en quoi ils avaient égard à la nature et aux fonctions des dieux auxquels le temple devait être consacré. Suivant les observations de Vitruve, les temples de Jupiter, de Junon et de Minerve devaient être construits sur des hauteurs, parce que ces divinités avaient inspection sur toutes les affaires de l'empire dont elles prenaient un soin particulier. Mercure, Isis et Sérapis, dieux du commerce, avaient leurs temples proche des marchés. Ceux de Mars, de Bellone, de Vulcain et de Vénus étaient hors de la ville ; on les regardait comme des divinités ou turbulentes ou dangereuses. Il est vrai que ces convenances n'ont pas toujours été observées.

Le lieu de la construction étant choisi, les augures prenaient les auspices, et si les auspices étaient favorables, ils traçaient le plan du temple : c'est ce qu'on appelait effari ou sistère templum. On posait la première pierre avec plus de cérémonie encore. Les vestales accompagnées de jeunes garçons et de jeunes filles, ayant père et mère, arrosaient la place de trois sortes d'eaux ; on la purifiait encore par le sacrifice d'un taureau blanc et d'une genisse. Le grand prêtre invoquait les dieux auxquels le temple était destiné. La pierre sur laquelle étaient gravés les noms du magistrat et du souverain pontife, était mise dans la fondation avec des médailles d'or et d'argent, et du métal tel qu'il sort de la mine, aux acclamations de tout le peuple qui s'empressait d'y prêter la main.

Lorsque le temple était bâti, on en faisait la dédicace. Cette fonction appartenait dans les premiers temps aux grands magistrats ; ensuite à cause des dissensions qui survinrent à cette occasion, on eut recours à la puissance du peuple. Enfin on en laissa la disposition au sénat, avec l'intervention des tribuns du peuple, qui n'y eurent plus de part sous les empereurs.

Le jour de la dédicace d'un temple était une fête solennelle, accompagnée de réjouissances extraordinaires. On immolait des victimes sur tous les autels ; on chantait des hymnes au son de la flute. Le temple était orné de fleurs et de bandelettes. Le magistrat qui faisait la cérémonie, mettait la main sur le jambage de la porte, appelant à haute voix le souverain pontife, pour lui aider à s'acquitter de cette fonction, en prononçant devant lui la formule de la dédicace qu'il répétait mot-à-mot. Ils étaient si scrupuleux sur la prononciation de ces paroles, qu'ils s'imaginaient qu'un seul mot ou une syllabe oubliée ou mal articulée gâtait tout le mystère. C'est pourquoi le grand pontife Metellus qui était begue, s'exerça plusieurs mois pour pouvoir bien prononcer le mot d'opifera. Le deuil était incompatible avec la solennité ; on le quittait pour y assister en habit blanc. Sur ce prétexte, les ennemis d'Horatius Pulvillus qui faisait la dédicace du temple du capitole, vinrent troubler la cérémonie, en lui annonçant la fausse nouvelle de la mort de son fils, mais il la reçut sans s'émouvoir, et continua ce qu'il avait commencé.

Tacite, liv. II. parlant du rétablissement du capitole, nous a conservé la formule et les autres cérémonies de la consécration du lieu destiné à bâtir un temple. Vespasien, dit-il, ayant chargé L. Vestinus du soin de rétablir le capitole, ce chevalier romain consulta les aruspices, et il apprit d'eux qu'il fallait commencer par transporter dans les marais les restes du vieux temple, et en bâtir un nouveau sur les mêmes fondements l'onzième jour avant les kalendes de Juillet, le ciel étant serein. Tout l'espace destiné pour l'édifice fut ceint de rubans et de couronnes. Ceux des soldats dont le nom était de bon augure, entrèrent dans cette enceinte avec des rameaux à la main ; puis vinrent les vestales accompagnées de jeunes garçons et de jeunes filles dont les pères et mères vivaient encore, qui lavèrent tout ce lieu avec de l'eau de fontaine, de lac et de fleuve. Alors Helvidius Priscus, préteur, précédé de Plaute Elien, pontife, acheva d'expier l'enceinte par le sacrifice d'une vache et de quelques taureaux qu'il offrit à Jupiter, à Junon, à Minerve et aux dieux patrons de l'empire, et les pria de faire en sorte que le bâtiment que la piété des hommes avait commencé pour leur demeure, fût heureusement achevé. Les autres magistrats qui assistaient à cette cérémonie, les prêtres, le sénat, les chevaliers et le peuple plein d'ardeur et de joie, se mirent à remuer une pierre d'une grosseur énorme, pour la trainer au lieu où elle devait être mise en œuvre. Enfin on jeta dans les fondements plusieurs petites monnaies d'or et d'autres pièces de métal, comme nous venons de le dire. Les noms des magistrats étaient gravés au frontispice des temples qu'ils avaient dédiés. Ceux qui les faisaient rebâtir, en y mettant de nouvelles inscriptions, n'en ôtaient pas celles des premiers fondateurs.

Quoique la partie du temple appelée cella fût destinée au culte de la religion, on ne laissait pas d'y traiter d'affaires profanes après les sacrifices, en tirant des voiles qui couvraient les statues et les autels. Elle ne pouvait être dédiée à plusieurs divinités, à moins qu'elles ne fussent inséparables, comme Castor et Pollux ; mais plusieurs dieux pouvaient avoir chacun la sienne sous un même tait ; et alors ce temple s'appelait delubrum, quoique ce terme soit un terme générique.

La statue du dieu y était placée quelquefois dans une niche ou tabernacle appelé aedicula. Elle regardait le couchant, afin que ceux qui venaient l'adorer, eussent le visage tourné vers l'orient. Autour était le sanctuaire.

Il y avait ordinairement trois principaux autels dans le temple. Le plus considérable était placé au pied de la statue. Il était fort élevé, et par cette raison on l'appelait altare. On brulait dessus l'encens et les parfums, et l'on y faisait des libations. Le second était devant la porte du temple, et servait aux sacrifices. Le troisième était un autel portatif nommé anclabris, sur lequel on posait les offrandes et les vases sacrés. Les autels des dieux célestes étaient plus hauts que les autres ; ceux des dieux terrestres étaient plus bas, et ceux des dieux infernaux fort enfoncés.

Il y avait toujours un grand nombre de tables, de toutes sortes d'ustensiles et de vases sacrés dans les temples. On suspendait les offrandes et les présents à la voute nommée tholus. On attachait aux piliers les dépouilles des ennemis, les tableaux votifs, les armes des gladiateurs hors de service.

Tout ce qui servait aux temples, comme les lits sacrés appelés pulvinaria, et les présents qu'on y avait offerts, étaient gardés dans une manière de trésor appelé donarium. Les particuliers y mettaient aussi leurs effets en dépot.

Les statues des hommes illustres, leurs images en bas-relief enchassées dans des bordures appelées clypei votivi, et les tableaux représentants leurs belles actions et leurs victoires, faisaient l'ornement des temples. L'or, le bronze, le marbre et le porphyre y étaient employés avec tant de profusion, que l'on peut dire que la somptuosité de ces édifices était digne de la grandeur et de la magnificence de l'ancienne Rome. La plupart étaient ouverts à tout le monde, et souvent même avant le jour pour les plus matineux, qui y trouvaient des flambeaux allumés.

Enfin il faut remarquer qu'il y avait à Rome des temples particuliers nommés curies, qui répondaient à nos paroisses, et des temples communs à tous les Romains, où chacun pouvait à sa dévotion aller faire des vœux et des sacrifices, mais sans être pour cela dispensé d'assister à ceux de sa curie, et surtout aux repas solennels que Romulus y avait institués pour entretenir la paix et l'union.

Ces temples communs étaient desservis par différents collèges de prêtres ; au lieu que chaque curie l'était par un seul qui avait inspection sur tous ceux de son quartier. Ce prêtre ne relevait que du grand curion, qui faisait alors toutes les fonctions du souverain pontife. (D.J.)

TEMPLE des assemblées du sénat, (Antiquité romaine) selon les règles de la religion, le sénat ne pouvait s'assembler dans aucun lieu profane ou privé ; il fallait toujours que ce fût dans un lieu séparé, et solennellement consacré à cet usage par les titres et les cérémonies des augures. Au rapport des anciens auteurs, on en voyait plusieurs de cette espèce dans les différentes parties de la ville. Le sénat s'y assemblait ordinairement selon la destination des consuls et la commodité particulière de ces magistrats, ou celles des sénateurs, ou selon la nature de l'affaire qu'on y devait proposer ou terminer. Ces maisons ou ces lieux d'assemblée du sénat furent appelés curies ; telle était la curie calabre bâtie, suivant l'opinion commune, par Romulus, la curie hostilienne bâtie par Tullius Hostilius, et la curie pompeïenne, par Pompée.

Mais les assemblées du sénat furent le plus souvent tenues dans certains temples dédiés à des divinités particulières, tels que celui d'Apollon Palatin, de Bellone, de Castor et Pollux, de la Concorde, de la Foi, de Jupiter Capitolin, de Mars, de Tellus, de Vulcain, de la Vertu, etc. Voyez-en les articles.

Tous les temples que nous venons de nommer, ont été célébrés par les anciens auteurs, parce que le sénat y fut souvent convoqué. Dans chacun de ces temples on voyait un autel, et une statue élevée pour le culte particulier de la divinité dont il portait le nom. On les appelait curies, à raison de l'usage qu'on en faisait ; ce nom leur était commun avec les curies propres ou les maisons du sénat, qui à cause de leur dédicace solennelle, furent souvent appelées temples ; car le mot temple dans le premier sens qu'on y avait attaché, ne signifiait rien de plus qu'un lieu séparé et consacré par les augures, soit qu'il fût ouvert ou fermé, ou qu'il se trouvât dans la ville ou dans la campagne. En conséquence de cette idée, nous voyons que le sénat s'assemblait dans certaines occasions en un lieu découvert, principalement dans les temps où les esprits étaient ébranlés par des récits de prodiges ; mais on était bien guéri de cette vaine superstition dans les siècles polis de la république ; les Romains, du temps de Séneque, ne donnaient plus dans ces erreurs populaires.

La politique en rendant les temples propres à l'usage du sénat, était de graver aussi fortement qu'il se put, dans l'esprit des sénateurs, l'obligation de se conduire selon les lois de la justice et de la religion, ce qu'on pouvait en quelque manière se promettre de la sainteté du lieu et de la présence, pour ainsi dire, des dieux. Ce fut l'objet de l'un des censeurs, lorsqu'il enleva la statue de la déesse Concorde d'un quartier de la ville où elle se trouvait placée, et qu'il la fit porter dans la curie qu'il consacra à cette divinité ; il présumait ainsi, dit Ciceron, qu'il bannirait toute dissension de ce temple destiné au conseil public, et qu'il avait consacré au culte de la Concorde.

Lorsque pour assembler le sénat, on choisissait les temples des autres divinités, tels que celui de Bellone, de la Foi, de la Vertu, de l'Honneur, c'était toujours dans l'objet d'avertir les sénateurs par la sainteté du lieu, du respect et de la vénération dû. à ces vertus particulières, que leurs ancêtres avaient déifiées, à raison de leur excellence. Ce fut pour accréditer de plus en plus cette maxime religieuse, qu'Auguste ordonna que chaque sénateur, avant que de prendre place, adressât la prière à la divinité du temple où le sénat était assemblé, et qu'il lui offrit de l'encens et du vin.

Le sénat en deux occasions particulières s'assemblait hors les portes de Rome, ou dans le temple de Bellone, ou dans celui d'Apollon ; premièrement, lorsqu'il était question de recevoir les ambassadeurs, particulièrement ceux qui venaient de la part des ennemis, et auxquels on n'accordait pas la liberté d'entrer dans la ville ; en second lieu, pour donner audience aux généraux romains, et régler avec eux quelque affaire importante ; car il ne leur était pas permis de venir au-dedans des murs, tant que leur commission durait, ou qu'ils avaient le commandement actuel d'une armée. (D.J.)

TEMPLE D'ADONIS, (Antiq. égypt. et grecq.) ce prince de Byblos dut son apothéose et l'étendue de son culte aux soins d'une épouse passionnée. On lui bâtit des temples en Syrie, en Palestine, en Perse, en Grèce et dans les îles de la Méditerranée ; Amathonte, entr'autres, bâtit un temple célèbre à ce nouveau dieu. Je ne dirais rien ici des honneurs que lui rendait la ville de Dion en Macédoine, ni du temple qu'on lui avait élevé dans cette ville, sans une particularité qui mérite quelque attention. Hercule passant auprès de ce temple, fut invité d'y entrer, pour assister à la fête d'Adonis ; mais ce héros se mocqua des habitants, et leur dit ces mots qui devinrent dans la suite un proverbe, , nihil sacrum. Ce propos dans la bouche d'un de nos philosophes modernes passerait pour une belle impiété, mais Hercule était bien éloigné d'en dire ; il voulut au contraire faire entendre par ce discours qu'Adonis n'avait pas mérité d'être mis au nombre des dieux, et assurément il avait raison. Si l'on doit honorer la mémoire de quelqu'un, c'est sans contredit de celui qui par ses travaux, ses bienfaits, ses lumières, ou qui par des découvertes utiles, a rendu d'importants services aux hommes ; mais il était honteux de déifier un jeune efféminé connu seulement par l'amour d'une déesse insensée, dont les galantes aventures devaient plutôt être ensevelies dans l'oubli, qu'immortalisées par des fêtes qui en rappelaient à jamais le souvenir. (D.J.)

TEMPLE D'ALEXANDRIE, (Antiquité, Egypte) c'est ainsi qu'on nommait par excellence du temps des Ptolomées, les Sérapéon. Voyez SERAPEON, MPLE de Sérapisapis. (D.J.)

TEMPLE D'ANAÏTIS, (Antiq. cappadoc.) il est vraisemblable que cette déesse des Cappadociens est Diane, ou la lune ; Plutarque ne laisse aucun lieu d'en douter, puisqu'il dit dans la vie d'Artaxerxès Mnémon, que ce prince établit à Aspasie sa concubine, prêtresse de la Diane que les habitants d'Ecbatane appellent Anaïtis. De plus, Pausanias nous apprend que les Lydiens avaient un temple de Diane sous le nom d'Anaïtis.

Mais l'anecdote la plus curieuse sur cette déesse, soit qu'elle fût Diane, la lune ou Vénus, nous la devons à Pline, liv. XXXII. ch. xxiij. " Dans une expédition, dit-il, que fit Antoine contre l'Arménie, le temple d'Anaïtis fut saccagé, et sa statue qui était d'or mise en pièces par les soldats, ce qui en enrichit plusieurs. Un d'eux qui s'était établi à Boulogne en Italie, eut l'honneur de recevoir un jour Auguste dans sa maison, et de lui donner à souper. Est-il vrai, lui dit ce prince, pendant le repas, que celui qui porta les premiers coups à la déesse, perdit aussi - tôt la vue, fut perclus de tous ses membres, et expira sur le champ ? Si cela était, répondit le soldat, je n'aurais pas le bonheur de voir aujourd'hui Auguste chez moi, étant moi-même celui qui lui donnai le premier coup, dont bien m'en a pris ; car si je possède quelque chose, j'en ai obligation à la bonne déesse, et c'est d'une de ses jambes, seigneur, que vous soupez aujourd'hui ". (D.J.)

TEMPLE D'APOLLON, (Antiquité grecque et romaine) le fils de Jupiter et de Latone eut des temples sans nombre dans toute la Grèce, surtout à Delphes, à Claros, à Ténédos et à Milet. Ce dernier temple était un des quatre qui faisait l'admiration de Vitruve. On l'avait bâti d'ordre ionique, ainsi que celui de Claros ; mais l'un et l'autre n'étaient pas encore achevés du temps de Pausanias.

Apollon eut aussi des temples dans toute l'Italie, et principalement à Rome. Entre ceux qui embellissaient cette capitale, le premier et le plus renommé est sans-doute celui qu'Auguste lui consacra sur le mont Palatin, après la victoire d'Actium.

Ce temple fut construit de marbre blanc et de forme ronde. Il était par ses ornements l'un des plus magnifiques de Rome. Le char du soleil en or massif, décorait le frontispice, les portes étaient d'ivoire ; en entrant dans le temple, on voyait une belle statue d'Apollon, ouvrage du célèbre Scopas ; un chandelier à plusieurs branches, suspendu à la voute, éclairait l'intérieur de l'édifice ; ces ouvrages des plus célébres artistes avaient été enlevés des temples de la Grèce. Le sanctuaire du dieu était orné de plusieurs trépiés d'or.

Auguste déposa dans la base de la statue d'Apollon les livres des Sibylles enfermés dans des cassettes dorées. Le jeune Marcellus son neveu, consacra dans ce temple, une précieuse collection de pierres gravées. L'édifice étant achevé, l'empereur en fit la dédicace l'an 726 de Rome, trois ans après la bataille d'Actium. Horace composa dans cette occasion l'ode qui commence par ces mots :

Quid dedicatum poscit Apollinem

ates !

Le temple d'Apollon Palatin était précédé d'une cour de figure ovale, environnée d'une superbe colonnade de marbre d'Afrique ; les statues des Danaïdes remplissaient les autres colonnes. On avait placé au milieu de cette cour les statues équestres des fils d'Egyptus ; l'autel du dieu était accompagné des statues des filles de Proetus, ouvrage de l'artiste Myron, armenta Myronis, dit joliment Properce.

Auguste fit bâtir près du temple une galerie qui contenait deux magnifiques bibliothèques ; l'une pour les ouvrages de poésie et de jurisprudence écrits en latin ; l'autre était destinée aux ouvrages des auteurs grecs. Ces édifices devaient être fort élevés, car il y avait dans la bibliothèque grecque une statue d'Apollon, haute d'environ quarante-cinq pieds ; Lucullus l'avait enlevée de la ville d'Apollonie du Pont, et cette ville l'avait payée cinq cent talents, environ deux millions cinq cent mille livres de notre monnoye. Les savants de Rome s'assemblaient ordinairement dans ces bibliothèques ; on décidait dans ces assemblées des nouveaux ouvrages de poésie.

Le sénat fut souvent convoqué par Auguste dans le temple d'Apollon ; il ordonna même que la distribution des parfums pour purifier le peuple, et le disposer à la solennité des jeux séculaires, se ferait devant ce temple, comme devant le temple du capitole ; et cet usage était encore observé sous le règne de Domitien.

La dernière assemblée de la fête séculaire, fut aussi convoquée dans ce temple ; les chœurs des enfants y chantèrent des hymnes sacrés en l'honneur d'Apollon, adoré sous le nom et l'emblême du soleil, dont le char décorait comme nous l'avons dit le frontispice de l'édifice ; après ces chants, ils firent des vœux pour la prospérité de l'état.

Alme sol, curru nitido diem qui

Promis et celas, aliusque et idem

Nasceris ; possis nihil urbe Româ

Visere majus.

....

Si Palatinas videt aequus arces,

em que Romanam, Latiumque felix ;

Alterum in lustrum, meliusque semper

Proroget aevum.

Le soleil, au bout d'un certain nombre de révolutions dans le zodiaque, devait ramener la même solennité et les mêmes vœux pour la puissance éternelle de l'empire romain.

Sur l'une des portes du temple d'Apollon Palatin, on voyait les Gaulois qui tombaient du capitole, et sur l'autre les quatorze enfants de Niobé, fille de Tantale, qui périrent misérablement pour l'orgueil de leur mère, qui avait irrité la colere de Latone et d'Apollon.

Au reste Properce, liv. II. éleg. xxxj. a fait la description de ce temple, on peut la lire ; j'ajouterai seulement que c'était aux branches du magnifique candelabre de ce temple, et qui en éclairait tout l'intérieur, que les poètes attachaient leurs ouvrages, après que le public les avait couronnés.

Lorsque l'académie française fut placée au louvre, elle fit frapper une médaille qui n'est pas trop modeste. L'on voit sur cette médaille Apollon tenant sa lyre, appuyé sur le trépié d'où sortent ses oracles ; la légende est, Apollon au palais d'Auguste. (D.J.)

TEMPLES DE BACCHUS, (Antiquité) on reconnaissait ce dieu dans toutes ses statues, à sa couronne de pampre, à son air de jeunesse, à ses longs cheveux, à la beauté de son visage, à l'embonpoint de son corps, qu'Orphée et Théocrite ont tant célébrée, et qui a fait dire à Ovide.

... Tibi enim inconsumpta juventa est.

Tu puer aeternus, tu formosissimus alto

Conspiceris coelo.

C'était l'assesseur de Cérès. Virgile leur fait en commun une invocation au commencement de ses géorgiques, parce que leurs fêtes se célébraient en même temps, et que leurs temples étaient communs. Bacchus en eut dans toute la Grèce, qui de plus institua en son honneur ces fêtes tumultueuses si connues sous le nom d'orgyes. Téos lui rendait un culte particulier ; il avait un temple à Eleusis et dans d'autres villes, sous le nom d'Iacchus. Dans son temple à Phigalie, le bas de sa statue était toute couverte de feuilles de lierre et de laurier ; le reste était enluminé de vermillon.

Enfin ce dieu était extrêmement honoré dans les Gaules, ainsi que le prouvent plusieurs monuments trouvés en différents endroits ; mais il l'était surtout dans une petite île située à l'embouchure de la Loire, où il avait une espèce de chapelle, desservie par des femmes qui célébraient ses orgyes. Strabon qui parle de cette ile, liv. IV. et du culte qu'on y rendait à Bacchus, ajoute que les femmes dont je viens de parler, enlevaient tous les ans, avant que le soleil fût couché, et remettaient dans le même lieu, le toit de cette chapelle. (D.J.)

TEMPLE DE BELLONE, (Antiquité romaine) ce temple était selon Donat hors la ville, près de la porte Carmentale, et du Cirque de Flaminius, au lieu où l'on voit le palais Savelli et l'église saint Ange in Pescheria. Dans le vestibule de ce temple, était placée la colonne bellique, contre laquelle les consuls, toutes les fois qu'on avait résolu la guerre, tiraient une flèche, ou frappaient d'une javeline, vers la partie où répondait le peuple qu'on allait attaquer. Ce temple fut bâti par le censeur Appius Claudius, vers l'an de Rome 457, et servit quelquefois aux assemblées du sénat. (D.J.)

TEMPLE DE BELUS, (Antiq. babyloniennes.) si ce temple était le plus ancien de tous ceux du paganisme, comme on a lieu de le penser, il était aussi le plus singulier par sa structure. Berose, au rapport de Josephe, en attribue la construction à Bélus, qui y fut lui-même adoré après sa mort ; mais il est certain que si le Bélus de cet historien est le même que Nemrod, comme plusieurs savants le croient, son dessein ne fut pas de bâtir un temple, mais d'élever une tour qui put le mettre à couvert, lui et sa suite, des inondations ou autres désastres.

Cette fameuse tour qu'on appelle vulgairement la tour de Babel, formait dans sa base un carré, dont chaque côté contenait un stade de longueur, ce qui lui donnait un demi-mille de circuit. Tout l'ouvrage était composé de huit tours, bâties l'une sur l'autre, et qui allaient toujours en diminuant. Quelques auteurs, comme le remarque M. Prideaux, trompés par la version latine d'Hérodote, prétendent que chacune de ces tours ait été haute d'un stade, ce qui monterait à un mille de hauteur pour le tout ; mais le texte grec ne porte rien de semblable, et il n'y est fait aucune mention de la hauteur de cet édifice. Strabon qui a décrit ce temple, ne lui donne qu'un stade de haut, et un de chaque côté.

Le savant éditeur de l'impression de l'ouvrage de M. Prideaux, faite à Trevoux, dit qu'en suivant la mesure des stades qui étaient en usage du temps d'Hérodote, le seul des anciens qui parle pour avoir Ve cet édifice, il ne devait avoir que 69 taises de hauteur ou environ, c'est-à-dire un peu plus d'une fois la hauteur des tours de l'Eglise de Paris ; ce qui n'est pas si excessif, Ve la magnificence de quelques bâtiments de l'Europe.

Le même éditeur remarque encore, que comme cet ouvrage n'était fait que de briques, que des hommes portaient sur leur dos, comme nous l'apprenons des anciens, sa construction n'a rien qui doive surprendre ; et quoiqu'il fût plus haut de 119 pieds que la grande pyramide, comme elle était bâtie, ou dumoins couverte de pierres d'une longueur excessive, qu'il fallait guinder à une si prodigieuse hauteur, elle doit avoir été infiniment plus difficîle à construire.

Quoi qu'il en sait, nous apprenons d'Hérodote, qu'on montait au haut de ce bâtiment par un degré qui allait en tournant, et qui était en-dehors. Ces huit tours composaient comme autant d'étages, dont chacun avait 75 pieds de haut, et on y avait pratiqué plusieurs grandes chambres soutenues par des piliers, et de plus petites, où se reposaient ceux qui y montaient. La plus élevée était la plus ornée, et celle en même temps pour laquelle on avait le plus de vénération. C'est dans cette chambre qu'étaient, selon Hérodote, un lit superbe, et une table d'or massif, sans aucune statue.

Jusqu'au temps de Nabuchodonosor, ce temple ne contenait que la tour et les chambres dont on vient de parler, et qui étaient autant de chapelles particulières ; mais ce monarque, au rapport de Berose, lui donna beaucoup plus d'étendue, par les édifices qu'il fit bâtir tout-au-tour, avec un mur qui les enfermait, et des portes d'airain, à la construction desquelles le même métal et les autres ustensiles du temple de Jérusalem avaient été employés. Ce temple subsistait encore du temps de Xerxès, qui au retour de sa malheureuse expédition dans la Grèce, le fit démolir après en avoir pillé les immenses richesses, parmi lesquelles étaient des statues d'or massif, dont il y en avait une, au rapport de Diodore de Sicile, qui était de 40 pieds de haut, et qui pouvait bien être celle que Nabuchodonosor avait consacrée dans la plaine de Dura. L'Ecriture, à la vérité, donne à ce colosse 90 pieds de haut ; mais on doit l'entendre de la statue et de son pié-destal pris ensemble.

Il y avait dans le même temple plusieurs idoles d'or massif, et un grand nombre de vases sacrés du même métal, dont le poids, selon le même Diodore, allait à 5030 talents ; ce qui joint à la statue, montait à des sommes immenses. C'était au reste, du temple agrandi par Nabuchodonosor, qu'Hérodote, qui l'avait vu, fait la description dans son premier livre ; et son autorité doit l'emporter sur celle de Diodore de Sicile, qui n'en parlait que sur quelques relations. Hérodote dit, à la vérité, que dans une chapelle basse de ce temple, était une grande statue d'or de Jupiter, c'est-à-dire de Bélus ; mais il n'en donne ni le poids, ni la mesure, se contentant de dire que la statue, avec une table d'or, un trône et un marche-pié, étaient tous ensemble estimés par les Babyloniens, huit cent talents (175 mille liv. sterlings).

Le même auteur ajoute que hors de cette chapelle, était aussi un autel d'or, et un autre plus grand sur lequel on immolait des animaux d'un âge parfait, parce qu'il n'était pas permis d'en offrir de pareils sur l'autel d'or, mais seulement de ceux qui tetaient encore ; et qu'on brulait sur le grand autel chaque année le poids de cent mille talents d'encens. Enfin, il fait mention d'une autre statue d'or massif, qu'il n'avait pas vue, et qu'on lui dit être haute de douze coudées, c'est-à-dire de 18 pieds. C'est sans-doute de la même, que parle Diodore, quoiqu'il lui donne 40 pieds de hauteur, en quoi il est plus croyable, si c'était celle de Nabuchodonosor, comme il y a toute sorte d'apparence.

Quoi qu'il en sait, j'ai dit d'après Hérodote, que dans la plus haute tour, il y avait un lit magnifique ; et cet auteur ajoute, qu'il n'était permis à personne d'y coucher, excepté à une femme de la ville que le prêtre de Bélus choisissait chaque jour, lui faisant accroire qu'elle y était honorée de la présence du Dieu. (D.J.)

TEMPLE de bonus eventus, (Antiquité romaine) ce dieu du bon succès avait à Rome un temple fort fréquenté, dans lequel on voyait une de ses statues faite de la main de Praxitele. Cette statue ingénieuse avait un bandeau sur le front, tenait une patère de la main droite ; et de la gauche, un épi et un pavot. (D.J.)

TEMPLE DE CARDIA, (Antiquité romaine) cette déesse allégorique eut un temple sur le mont Caelius, que Brutus lui bâtit, après avoir chassé Tarquin le superbe, de Rome. (D.J.)

TEMPLES DE CASTOR ET DE POLLUX, (Antiquité grecque et romaine) Pausanias, dans son voyage de Corinthe, l. II. c. xxij. décrit le temple de Castor et de Pollux, où l'on voyait de son temps les statues, non seulement de ces dieux, et de leurs femmes, Hilaire et Phébé, mais de leurs enfants ; ces statues, ainsi que leurs chevaux, paraissent avoir été les plus anciennes statues équestres qu'il y eut en Grèce, car elles étaient d'ébene, de la main de Dipoenus et de Scyllis.

Le principal temple des Dioscures à Rome, et dans lequel le sénat s'assemblait quelquefois, était dans le cirque de Flaminius. Les Romains dans leurs serments, juraient d'ordinaire par ces deux divinités, qu'ils regardaient comme de surs garants de la vérité de leurs démarches. On trouve dans les anciens poètes comiques des vestiges de ces serments. Pol. Per. Ecastor. Mehercle, Medius Fidius.

Dans un quartier de Naples, entre la vicairerie et le château ; on voit encore le portique d'un fameux temple, bâti en l'honneur de Castor et Pollux, par Tibere Jule, achevé et consacré par Pélagon, affranchi d'Auguste, ainsi qu'il parait par l'inscription grecque qui s'y lit aujourd'hui, et que je rapporte en latin.

Tiberius Julius, Tarsus, Jovis filiis et urbis,

Templum, et quae in templo,

Pelagon Augusti libertus,

Et procurator persiciens,

Ex propriis conservavit.

Le portique est corinthien : les entre - colonnes ont plus d'un diamètre et demi. Les bases sont attiques, et les chapiteaux à feuilles d'olive, travaillés par excellence.

L'invention des caulicoles sous la rose, est belle et particulière, en ce qu'ils s'entrelacent, et semblent sortir des feuilles montantes sur d'autres caulicoles, qui portent les cornes du tailloir du chapiteau. Cet exemple, et quelques autres encore prouvent qu'un architecte peut quelquefois s'écarter des régles ordinaires, pourvu qu'il le fasse avec jugement, et toujours conformément à la nature des choses qu'il imite. Le frontispice est enrichi de la représentation d'un sacrifice en bas-relief. (D.J.)

TEMPLES DE CERES, (Antiquité grecque et romaine)

Prima Ceres ferro mortales vertère terram

Instituit.

Géorg. liv. I.

elle mériterait toujours le titre de déesse du blé et de la terre, quand même elle n'aurait fait qu'établir des lois sur la propriété des terres, afin que chacun put recueillir le blé qu'il avait semé, &, pour m'exprimer avec Virgile, partiri limite campum.

Aussi toute la Grèce, la Sicîle et l'Italie instituèrent des fêtes en son honneur, et élevèrent des temples à sa gloire. Les seuls Phénéates lui en consacrèrent plusieurs dans un petit espace de terrain.

On voyait, du temps de Pausanias, à Stiris, un de ses temples bâti de briques crues ; mais la déesse était du plus beau marbre, et tenait un flambeau à la main.

Elle avait un temple à Thebes, sous le nom de Cérès Thesmophore, ou la législatrice ; on y gardait des boucliers d'airain, qu'on disait être ceux des principaux officiers de l'armée lacédémonienne qui furent tués à Leuctres.

Un feu éternel brulait dans son temple à Mantinée ville d'Arcadie.

Son temple, aux Thermopyles, était bâti au milieu d'une grande plaine près du fleuve Asope, et c'était-là que s'assemblaient les Amphictions, et qu'ils lui offraient à leur arrivée un sacrifice solennel.

La même déesse avait à Rome plusieurs temples, dont le plus beau était dans la onzième région de la ville. Différentes classes de ministres, et ses seules prêtresses, jouirent à Rome jusqu'au règne de Néron, du privilège d'assister au combat de la lutte.

Ciceron vous donnera une belle description des statues de Cérès, que Verrès enleva des temples de la Sicile. Il est heureux qu'il n'ait pas été nommé préteur d'Eleusis, il en aurait pillé le beau temple, dont il ne reste plus de vestiges, ainsi que de tous les autres élevés à la gloire de cette grande divinité.

Plus de nouvelles de celui qu'elle avait à Sparte, et dont les cérémonies empruntées d'Orphée, donnèrent lieu au bon mot de LÉotichidas rapporté par Plutarque. Le sacrificateur de ce temple appelé Philippe, initiait les hommes dans les cérémonies d'Orphée. Il était réduit à une vie si nécessiteuse, qu'il mendiait son pain ; cependant il publiait que les Lacédémoniens qui entreraient par son ministère dans ses solennités, seraient assurés après leur mort d'une félicité sans pareille. Eh ! fou que tu es, lui dit LÉotichidas, que ne te laisses-tu donc vitement mourir, pour prendre pour toi la félicité que tu promets aux autres. (D.J.)

TEMPLE DE LA CONCORDE, (Antiquité romaine) curia concordiae ; on trouve à la descente du capitole des débris de ce temple dédié solennellement à la Concorde par Camille. Il servait de lieu d'assemblée du sénat pour y traiter des affaires publiques, d'où l'on voit qu'il avait été consacré, parce que le sénat ne s'assemblait dans aucun temple pour les affaires d'état, si ce temple n'avait été consacré, c'est-à-dire, bâti en conséquence de quelque vœu ou de quelque augure.

Parmi le grand nombre de statues dont il était enrichi, les historiens ont principalement mentionné celle de Latone, tenant dans ses bras Apollon et Diane ses deux enfants ; celle d'Esculape et de la déesse Hygéa ; celle de Mars et de Minerve ; celle de Cérès et Mercure ; enfin celle d'une victoire. Cette dernière pendant le consulat de M. Marcellus et de M. Valérius, fut frappée d'un coup de foudre. On voit par l'inscription qui subsiste encore dans la frise, que ce temple ayant été consumé par une incendie, le sénat et le peuple romain le firent rebâtir : voici l'inscription. S. P. Q. R. incendio consumptum restituit.

Les entre-colonnes ont moins de deux diamètres ; les bases sont composées de l'antique et de l'ionique, et diffèrent en quelque chose de la manière ordinaire ; mais elles ne laissent pas d'être belles. Les chapiteaux sont aussi composés de l'ordre dorique et ionique ; et sont très - bien travaillés ; l'architrave avec la frise dans la partie extérieure de la façade, ne sont qu'une bande toute unie, sans aucune distinction de leurs moulures, ce qui fut fait pour y mettre l'inscription ; mais par dedans, c'est-à-dire, sous le portique, ils ont toutes leurs moulures distinctes, comme on le peut remarquer dans le dessein qu'on en a fait. La corniche est simple sans ornements ; il ne reste plus aucune partie antique des murs de la nef, et même ils ont été mal réparés.

Il y avait un autre petit temple de la Concorde bâti par l'édîle Flavius, et joint au graecostase ; c'était le lieu où les ambassadeurs envoyés vers le sénat attendaient sa réponse. Le sénat y rendait aussi quelquefois des jugements ; Pline, l. XXXIII. dit coenaculum suprà graecostasim, ubi aedes Concordiae, et basilica Opimia. Il avait été réparé par Opimius. (D.J.)

TEMPLES DE CYBELE, (Antiquité grecque et romaine) la mère des dieux fut extrêmement honorée en Phrygie, et eut le plus superbe de ses temples à Pessinunte, capitale du pays. Les Romains ne reconnurent cette divinité que vers l'année 548, sous le consulat de Cornelius Scipion, surnommé l'Africain, et P. Licinus, au sujet d'une pluie de pierres durant la seconde guerre punique. Ils eurent recours aux livres de la Sibylle, et on trouva que pour chasser les Carthaginois d'Italie, il fallait faire venir la mère des dieux de Pessinunte à Rome. On dépêcha donc aussi-tôt des ambassadeurs au roi Attalus, qui leur fit délivrer la déesse représentée par une grosse pierre informe et non taillée. M. Valerius, l'un des députés, étant arrivé à Terracine avec cette pierre, en donna avis au sénat, et lui manda qu'il était nécessaire d'envoyer avec les dames le plus homme de bien de toute la ville pour la recevoir.

Le sénat jeta les yeux sur P. Cornelius Scipion Nasica ; il alla la recevoir avec les dames romaines au port d'Ostie, qui l'apportèrent à Rome, et la mirent dans le temple de la victoire sur le mont Palatin.

L'année suivante M. Livius et Claudius censeurs, firent bâtir un temple particulier pour elle, et treize ans après, M. Junius Brutus le dédia. (D.J.)

TEMPLES DE DAGON, (Antiq. phéniciennes) cette divinité célèbre des Philistins, et dont l'Ecriture parle souvent, avait des temples magnifiques en Phénicie, entr'autres à Gaza et à Azoth. Dagon est un nom phénicien, qui veut dire froment ; Dagon le dieu du blé, l'inventeur du labourage, méritait bien après sa mort, les honneurs divins. (D.J.)

TEMPLE DE DELPHES, (Antiquité grecque) Voyez DELPHES, temple de ; il nous manque une description détaillée de ce temple célèbre, bâti par les Amphictions, et qui subsistait encore du temps de Pausanias ; mais, il n'était pas aussi magnifique pour sa structure que celui de Jupiter Olympien à Athènes, il possédait du-moins un chef-d'œuvre de Phidias, et de plus il était inestimable par les présents immenses que lui procurait son oracle ; toute la terre y avait apporté ses offrandes, il fallait bien que le nombre en fût infini, puisque malgré tous les pillages qu'en firent consécutivement tant de peuples et de rais, Néron dans son voyage de la Grèce, quarante ans après que les Thraces eurent saccagé et brulé ce fameux temple, y trouva et en enleva encore cinq cent statues de bronze. (D.J.)

TEMPLES DE DIANE, (Antiquité grecque et romaine) cette grande divinité des Ephésiens était encore honorée dans toute la Grèce par quantité de temples, dont Pausanias vous donnera la description : bornons-nous à parler de ceux qu'elle avait à Rome.

Le premier temple qu'on lui bâtit fut sur le mont Aventin, sous le règne de Servius Tullius, à la persuasion duquel les Romains et les Latins lui élevèrent ce temple à frais communs ; ils s'y assemblaient tous les ans, y faisaient un sacrifice au nom des deux peuples, et y vuidaient tous leurs différends : et afin qu'il restât un monument éternel de cette confédération, on fit graver sur une colonne d'airain les conditions de cette alliance avec les noms de toutes les villes qui y étaient comprises, et des députés qui les avaient signées.

Ce temple était garni de cornes de vaches, dont Plutarque et Tite-Live rapportent le sujet. Ils nous disent qu'un certain sabin, nommé Autro Coratius, ayant une vache d'une beauté extraordinaire, un devin l'avertit que s'il immolait cette vache à Diane dans son temple du mont Aventin, il ne manquerait jamais de rien, et que sa ville soumettrait toute l'Italie sous son empire. Autro étant venu à Rome pour ce sujet, un de ses valets avertit le roi Servius de la prédiction du devin ; ce prince ayant consulté sur cet article le pontife Cornelius, il fit avertir Autro de s'aller laver dans les eaux du Tibre, avant de sacrifier cette vache, et cependant le roi Servius la sacrifia lui-même, et en attacha les cornes aux murailles du temple.

Auguste éleva un temple à Diane dans la Sicile, après la défaite de Sextus Pompeius et le recouvrement de cette province. Il fit graver au frontispice de ce temple trois jambes, qui sont le symbole de la Trinacrie ou de la Sicile, avec cette inscription, imperator Caesar.

Strabon, liv. IV. de la description du monde, raconte qu'en l'île d'Icarie on voyait un temple de Diane nommé , et Tite-Live, l. IV. de la cinquième décade, appelle ledit temple Tauropolium, et les sacrifices qui s'y faisaient tauropolia ; toutefois Denis dans son livre de situ orbis, dit que Diane n'a pas été nommée Tauropola du peuple, mais des taureaux dont il y avait grande abondance dans le pays. (D.J.)

TEMPLE DE TOUS LES DIEUX, (Antiquité romaine) le temple de tous les Dieux, était l'édifice le plus superbe et le plus solidement bâti de la ville de Rome ; il est vrai que j'en ai déjà parlé au mot PANTHEON [c'était son nom], mais j'ai beaucoup de choses à rectifier et à ajouter à cet article.

Le corps de l'ouvrage subsiste encore aujourd'hui sous le nom de Rotonde ou d'église de tous les Saints, auxquels ce temple est consacré, comme il l'était dans le paganisme à tous les dieux : on en trouvera le dessein dans le II. tom. de l'Antiq. expliq. par le père Montfaucon, qui l'a pris pour le plan de Serlio, et pour le profil dans Lafreri.

Ce superbe édifice ne reçoit le jour que par un trou fait au milieu de la voute, mais si ingénieusement ménagé, que tout le temple en est suffisamment éclairé. Sa forme est de figure ronde, et il semble que l'architecte ait voulu, comme en un grand nombre d'autres temples de la première antiquité, imiter en cela la figure qu'on donnait au monde : quod forma ejus convexa, fastigiatam coeli similitudinem ostenderet.

La bâtisse de ce temple est fort ancienne ; on ignore le temps de sa construction. Agrippa, gendre d'Auguste, ne fit que le réparer, le décorer, et y ajouter le portique que l'on admire aujourd'hui, et sur la frise duquel il a fait mettre son nom ; de-là vient qu'on nomme ce temple le Panthéon d'Agrippa.

Son portique est composé de seize colonnes de marbre granit, chacune d'une seule pierre : ces colonnes ont cinq pieds de diamètre, et plus de trente-sept pieds d'hauteur, sans y comprendre la base et le chapiteau. De ces seize colonnes il y en a huit de face et huit derrière, le tout d'ordre corinthien. Comme on trouva, du temps du pape Eugène, près de cet édifice, une partie de la tête d'Agrippa en bronze, un pied de cheval et un morceau de roue du même métal, il y a apparence que ce grand homme était représenté lui-même en bronze sur ce portique, monté sur un char à quatre chevaux.

Diogène, athénien, dit Pline, décora le Panthéon d'Agrippa, et les caryatides, qui servent de colonnes au temple, sont mises au rang des plus belles choses, ainsi que les statues posées sur le haut du temple, mais elles sont trop élevées pour qu'on puisse leur rendre toute la justice qui leur est dû..

Septime Sévère fit encore dans la suite des réparations considérables à ce beau monument de la piété des anciens ; mais le temple est toujours demeuré tel qu'il était au temps de Pline, avec la seule différence qu'il a été dépouillé de ses statues, et de cette grande quantité d'ornements de bronze dont il était enrichi. On ne voit pas même où pouvaient être placées les caryatides dont Pline fait mention ; on a soupçonné qu'elles avaient occupé l'attique qui règne au-dessus des colonnes, dans l'intérieur de l'édifice. On ignore le temps auquel elles ont été supprimées, et on n'est pas plus instruit du motif de leur destruction. Il y a cependant apparence qu'on est venu à cette extrémité lorsque le temple a été converti en église, il a fallu en ôter les statues des divinités ; et les caryatides furent mises apparemment au rang des statues, par des gens qui ne savaient pas que les caryatides étaient un ordre d'architecture, et n'avaient aucun rapport avec le culte religieux.

Les plaques de bronze dorées qui couvraient toute la voute, furent enlevées par l'empereur Constance III. Le pape Urbain VIII. se servit des poutres du même métal pour faire le baldaquin de S. Pierre, et les grosses pièces d'artillerie qui sont au château Saint-Ange ; en un mot, toutes les choses précieuses dont ce temple était rempli ont été dissipées. Les statues des dieux, qui étaient dans les niches qu'on voit encore dans l'intérieur du temple, ont été ou pillées ou enfouies ; et il n'y a pas bien longtemps encore, qu'en creusant près de cet édifice, on trouva un lion de Basalte, qui est un beau marbre d'Egypte, et puis un autre, qui servirent à orner la fontaine de Sixte V. sans parler d'un grand vase de porphire, qu'on plaça près du portique. (D.J.)

TEMPLE D'ELEUSIS, (Antiquité grecque) un des plus célèbres du monde, élevé en l'honneur de Cerès et de Proserpine. Hetinus le fit d'ordre dorique, et d'une si vaste étendue, qu'il était capable de contenir trente mille personnes ; car il s'en trouvait dumoins autant, et souvent plus, à la célébration des mystères de ces deux déesses ; c'est un fait que certifient Hérodote, l. VIII. ch. lxv. et Strabon, l. IX. pag. 365. Vitruve observe que ce temple était d'abord sans colonnes au-dehors, pour laisser plus de place et de liberté aux cérémonies religieuses qui se pratiquaient dans les sacrifices éléusiniens ; mais Philon dans la suite y ajouta un portique magnifique. (D.J.)

TEMPLE D'ÉPHESE, (Antiquité grecque) Voyez ÉPHESE, temple d '.

Le premier temple d'Ephèse, qui fut brulé par Erostrate, passait pour une des sept merveilles du monde : on avait employé 220 ans à l'élever. Les richesses de ce temple devaient être immenses, puisque tant de rois avaient contribué à l'embellir, et qu'il n'y avait rien de plus fameux en Asie que cet édifice.

Le second temple d'Ephèse fut construit par Cheiromocrate, le même qui bâtit la ville d'Alexandrie, et qui du mont Athos voulait faire une statue d'Alexandre. Ce dernier temple, que Strabon avait vu, n'était ni moins beau, ni moins riche, ni moins orné que le premier. Xénophon parle d'une statue d'or massif qui y était. Strabon assure aussi que les Ephésiens, par reconnaissance, y avaient placé une statue d'or en l'honneur d'Artémidore. Le concours du monde qui se rendait à Ephèse pour voir ce temple, était infini. Ce que raconte saint Paul, Act. 19. de la sédition tramée par les orfévres d'Ephèse, qui gagnaient leur vie à faire de petites statues d'argent de Diane, est bien propre à nous prouver la célébrité du culte de cette déesse.

Vitruve observe que le temple dont nous parlons était d'ordre ionique et diptérique, c'est-à-dire qu'il regnait tout-à-l'entour deux rangs de colonnes, en forme d'un double portique ; il avait 71 taises de longueur, sur plus de 36 de largeur, et l'on y comptait 127 colonnes de 60 pieds de haut.

Ce temple était un asîle des plus célébres, qui s'étendait à 125 pieds aux environs. Mithridate l'avait borné à l'espace d'un trait de flèche. Marc Antoine doubla cette étendue ; mais Tibere pour éviter les abus qui se commettaient à l'occasion de ces sortes de droits, abolit cet asîle : aujourd'hui on ne trouve plus, d'un si superbe édifice, que quelques ruines, dont on peut voir la relation dans le voyage de Spon. (D.J.)

TEMPLES D'ESCULAPE, (Antiquité grecque et romaine) ce dieu de la santé fut premièrement honoré à Epidaure, ville d'Esclavonie, où il avait un temple magnifique et une statue d'or et d'ivoire d'une grandeur extraordinaire, sculptée par Trasimède de l'île de Paros. Le dieu était représenté assis sur un trône, tenant d'une main un bâton, et s'appuyant de l'autre sur la tête d'un dragon, avec un chien à ses pieds. Pausanias dit que ce chien était mis aux pieds d'Esculape, parce qu'un chien l'avait gardé lorsqu'il fut exposé ; on pourrait aussi penser, dit M. le Clerc, que ce chien était l'emblême de l'attachement, du zèle, et des autres qualités nécessaires à un médecin dans sa profession.

Les Romains élevèrent un temple à Esculape dans l'île du Tibre. L'occasion en fut extraordinaire au récit d'Aurélius Victor.

Rome et le territoire qui l'environnait, étaient ravagés par la peste. Dans cette désolation, on envoya dix ambassadeurs à Epidaure avec Q. Ogulnius à leur tête, pour inviter Esculape à venir au secours des Romains. Les ambassadeurs étant arrivés à Epidaure, comme ils s'occupaient à admirer la statue extraordinaire d'Esculape, un grand serpent sortit de dessous son autel, et traversant le temple, il alla dans le vaisseau des Romains, et entra dans la chambre d'Ogulnius. Les ambassadeurs comblés de joie à ce présage, mirent à la voile, et arrivèrent heureusement à Antium, où les tempêtes qui s'élevèrent alors, les retinrent pendant quelques jours. Le serpent prit ce temps pour sortir du vaisseau ; et il alla se cacher dans un temple situé dans le voisinage, qui était dédié à Esculape. Le calme étant revenu sur la mer, le serpent rentra dans le vaisseau, et s'avança sur le rivage où on lui bâtit un temple, et la peste cessa.

Pline dit qu'on bâtit un temple d'Esculape en cet endroit par une espèce de mépris pour l'art qu'il avait inventé, comme si les Romains avaient envoyé à Epidaure une ambassade solennelle, à dessein d'injurier le dieu dont ils avaient alors besoin.

Plutarque a rendu une meilleure raison au jugement de M. le Clerc, du choix qu'on faisait de certains lieux, pour y bâtir les temples d'Esculape. Il a pensé que celui des Romains, et presque tous ceux de la Grèce, avaient été situés sur des lieux hauts et découverts, afin que les malades qui s'y rendaient, eussent l'avantage d'être en bon air.

Il n'y a pas de doute que ce ne fût à l'imitation des Grecs, que les Romains placèrent le temple d'Esculape hors de Rome ; et l'on pourrait apporter une excellente raison de la préférence que les Grecs donnèrent à cette situation : ils avaient éloigné le temple d'Esculape des villes, de peur que la corruption occasionnée par la foule des malades qui s'adressaient aux prêtres de ce dieu pour être guéris, ne passât dans les lieux qu'ils habitaient, si les temples en avaient été voisins, ou qu'ils n'eussent respiré un air empesté par la même cause, s'ils avaient été élevés dans les villes. (D.J.)

TEMPLE DE LA FELICITE, (Antiquité romaine) templum Felicitatis. Les Romains dressèrent un temple et un autel à cette déesse, et firent faire sa statue par Archésilas statuaire ; elle avait couté à Lucullus soixante grands sesterces, c'est-à-dire environ 6000 francs. (D.J.)

TEMPLE DE LA FOI, (Antiquité romaine) le temple de la Foi, bâti sur le mont Capitolin, et dans lequel le sénat s'assemblait quelquefois, n'était pas éloigné du temple d'Apollon. Numa Pompilius avait placé la Fidélité parmi les dieux, dans l'objet d'engager chaque citoyen, par l'appréhension de cette divinité, à garder la foi dans les contrats, ce qui est confirmé par Ciceron, liv. III. des Off. et par Pline, liv. XXXV. ch. Xe

TEMPLE DE LA FORTUNE, (Antiquité grecque et romaine) jamais divinité n'eut plus de temples, et sous plus de noms différents. Les Romains surtout se distinguèrent en ce genre dans la vue de se la rendre favorable. Servius Tullius lui éleva le premier temple dans le Forum, mais il fut incendié.

Cette déesse avait un célèbre temple à Antium sur le bord de la mer ; on l'appelait le temple des Fortunes antiatines. Mais le temple de la Fortune le plus renommé dans l'antiquité, est celui que Sylla lui fit à Préneste ; le pavé de ce temple était de marqueterie. L'on voyait dans ce même temple une figure équestre de la déesse toute dorée, et c'est assurément son apanage. Celui qui lui fit bâtir Q. Catullus, était dédié à la Fortune du jour, Fortunae hujusce diei, et cette idée est ingénieuse.

Si celui que lui consacra Néron n'était pas le plus magnifique, il était du-moins le plus singulier, et le plus brillant par la matière qui y fut employée. Il fut entièrement construit d'une sorte de pierre trouvée en Cappadoce, et que Pline nomme phingias, laquelle à une blancheur éblouissante, joignait la dureté du marbre ; ensorte, dit-on, que les portes fermées on y voyait clair. Ce temple se trouva dans la suite renfermé dans l'enceinte de la maison d'or de cet empereur.

Cette déesse en avait un dans la rue neuve, sous le titre de la Fortune aux mamelles, qu'on représentait à-peu-près comme la Diane d'Ephèse, et comme Isis, dont elle a la coiffure sur quelques figures que le temps nous a conservées.

Domitien en fit construire un autre à la Fortune de retour, Fortunae reduci, expression qui se trouve souvent sur des médailles, et celle de Fortuna redux.

Le baron Herbert de Cherburi, auteur d'un savant traité sur la religion des gentils, prétend que les Orientaux ni les Grecs n'avaient jamais rendu aucun culte à la Fortune ; et que les Romains étaient les seuls qui l'eussent adorée. Mais ignorait-il que les habitants d'Antioche avaient dans leur ville un temple magnifique de cette divinité ; que ceux de Smyrne lui avaient consacré la belle statue que Bubalus en avait fait ; et qu'enfin, au rapport de Pausanias, la Grèce était remplie de temples, de chapelles, de statues, de bas-reliefs et de médailles de cette même déesse. (D.J.)

TEMPLE DES FURIES, (Antiquité grecque et romaine) ces déesses redoutables avaient dans plusieurs endroits de la Grèce des autels et des temples, sur lesquels, dit Euripide, presque personne n'osait jeter les yeux. Le temple qu'elles avaient en Achaïe, dans la ville de Ceryme, passait pour un lieu fatal à ceux qui y entraient étant coupables de quelque crime. Oreste leur fit bâtir trois temples célèbres, un auprès de l'Aréopage, et les deux autres en Arcadie. Tous leurs temples étaient un asîle assuré pour ceux qui s'y retiraient. La déesse Furine que Ciceron croit avoir été la même que les Furies, avait un temple à Rome dans la quatorzième région. (D.J.)

TEMPLES DES GRACES, (Antiquité grecque et romaine) des divinités si aimables n'ont manqué ni de temples, ni d'autels. Etéocle, roi d'Orchomene, fut, dit-on, le premier qui leur en éleva dans sa capitale, et qui régla ce qui concernait leur culte. Près du temple qu'il fit bâtir en l'honneur des Graces, on voyait une fontaine que son eau pure et salutaire rendait célèbre par tout le monde. A quelques pas de-là coulait le fleuve Céphise, qui par la beauté de son canal et de ses bords, ne contribuait pas peu à embellir un si charmant séjour. L'opinion commune était que les Graces s'y plaisaient plus qu'en aucun autre lieu de la terre. De-là vient que les anciens poètes les appellent ordinairement déesses de Céphise, et déesses d'Orchomene.

Cependant toute la Grèce ne convenait pas qu'Etéocle eut été le premier à leur rendre les honneurs divins. Les Lacédémoniens en attribuaient la gloire à Lacédémon leur quatrième roi. Ils prétendaient qu'il avait bâti un temple aux Graces dans le territoire de Sparte, et sur les bords du fleuve Tiase, et que ce temple était sans contredit le plus ancien de tous ceux où elles recevaient des offrandes.

Quoi qu'il en sait, elles avaient encore d'autres temples à Elis, à Delphes, à Pergé, à Perinthe, à Byzance, et en plusieurs autres endroits de la Grèce et de la Thrace. Dans l'île de Paros une des Cyclades, elles avaient un temple, et un prêtre à vie.

Non-seulement elles avaient des temples particuliers, elles en avaient aussi de communs avec d'autres divinités. Les temples consacrés à l'Amour et à Vénus, l'étaient aussi ordinairement aux Graces. Assez souvent elles avaient place dans ceux de Mercure, pour nous apprendre que le dieu de l'éloquence ne pouvait se passer de leur secours. Mais surtout les Muses et les Graces n'avaient d'ordinaire qu'un même temple, à cause de l'union intime qui était entre ces deux sortes de divinités. Pindare invoque les Graces presqu'aussi souvent que les Muses, il confond leurs juridictions ; et par une de ces expressions heureuses qui lui sont familières, il appelle la poésie le délicieux jardin des grâces.

Il serait trop long de parler des autels qui leur furent consacrés, Pausanias vous en instruira ; je dirai seulement qu'aucune divinité n'en méritait davantage, puisqu'une de leurs prérogatives était de présider à la reconnaissance. On sait que Démosthènes rapporte dans sa harangue pour la couronne, que les Athéniens ayant secouru les habitants de la Chersonese dans un besoin pressant, ceux-ci pour éterniser le souvenir d'un tel bienfait, élevèrent un autel avec cette inscription, : autel consacré à celle des Graces qui préside à la reconnaissance. (D.J.)

TEMPLES D'HERCULE, (Antiq. phénic. grecq. et rom.) le culte d'Hercule fut porté en Grèce, à Rome, dans les Gaules, en Espagne, et s'étendit, selon Pline, jusque dans la Taprobane, île entre l'Inde et le Gange.

Son temple de Tyr était célèbre ; Hérodote qui y fut attiré par curiosité, nous dit qu'il trouva ce temple orné de magnifiques présents et qu'il y avait deux statues de ce dieu, une d'or, et l'autre d'une pierre précieuse qui jetait pendant la nuit un grand éclat ; qu'il avait demandé aux prêtres si ce temple était ancien, et qu'ils lui avaient répondu qu'il l'était autant que la ville, qui avait été bâtie depuis deux mille trois cent ans ; époque plus ancienne que les Grecs.

Il ajoute qu'il y avait dans la même ville un autre temple dédié à Hercule Thasius, et que s'étant transporté à Thase, il y avait Ve un temple bâti en l'honneur de ce dieu par ceux qui enlevèrent Europe, événement qui précède de cinq générations la naissance de l'Hercule grec : d'où il conclut qu'Hercule est une ancienne divinité, et que les Grecs font bien d'en honorer deux, l'un comme un dieu immortel, l'autre comme un héros.

Les habitants de Gadès (Cadix) firent ériger à Hercule un temple magnifique à quelque distance de leur ville ; la situation de ce temple dans un lieu si éloigné, son ancienneté, le bois incorruptible dont il était construit, ses colonnes chargées d'anciennes inscriptions et d'hiéroglyphes, les travaux d'Hercule qui y étaient représentés, les arbres de Géryon, qui, selon Philostrate, jetaient du sang, les cérémonies singulières qui s'y pratiquaient ; tout cela le rendait fort célèbre, et la ville de Gadès se croyait en sûreté sous la protection du héros. Aussi Théron, roi d'Espagne, ayant voulu piller ce temple, une terreur panique dispersa ses vaisseaux qu'un feu inconnu dissipa tout - d'un - coup.

Hercule eut aussi plusieurs temples à Rome, entr'autres deux assez célèbres ; le temple du cirque de Flaminius, qu'on appelait le temple du grand Hercule, gardien du cirque ; et le temple qui était au marché aux bœufs, dans lequel, dit Pline, il n'entrait jamais ni chiens, ni mouches. (D.J.)

TEMPLES DE JANUS, (Antiquité romaine) il y avait trois temples dans Rome en l'honneur de Janus ; le premier de ces temples fut bâti par Romulus après la paix des Sabins : il fit mettre dans ce temple la statue de Janus à deux visages, pour dire que la nation romaine et la sabine s'étaient unies ensemble, et que les deux rais, Romulus et Tatius, ne faisaient qu'un chef pour gouverner. Ce temple n'avait que deux portes, qui étaient ouvertes en temps de guerre et fermées en temps de paix.

C'était dans ce temple que les consuls, après la guerre déclarée, se rendaient accompagnés du sénat et des soldats, et qu'ils en ouvraient les portes ; c'était-là aussi où ils prenaient possession de leur charge, et conséquemment on disait qu'ils ouvraient l'année.

Le second temple de Janus fut construit par Cn. Duillius dans le marché aux poirées, après la première guerre de Carthage : mais étant à demi-ruiné par la longueur du temps, il fut rebâti par l'empereur Tibere, comme dit Tacite, l. II. de ses annales.

Le troisième, sous le nom de Janus, quadrifrons, à quatre visages, fut élevé dans le marché aux bœufs, en une petite vallée, appelée le Vélabre, entre le mont Palatin et le capitole. Voici quel en fut le sujet : les Romains, dit Servius, représentèrent d'abord Janus à deux visages ; mais, après la prise de Falérie en Toscane, ayant rencontré une statue de Janus à quatre faces, ils voulurent en avoir une pareille à Rome ; et pour l'honorer davantage, ils lui bâtirent un temple à quatre faces, chacune était de douze niches, avec une grande porte, ce qui marquait les quatre saisons de l'année et les douze mois. Varron dit qu'il y avait douze autels dédiés à Janus, et que chacun d'eux représentait un mois de l'année.

Outre ces trois temples, il y avait une chapelle sous le titre, aedes Jani curiatii, dédiée à Janus, par cet Horace qui défit les trois Curiaces. On parle encore d'un Janus Septimianus, qu'on croit avoir été un bâtiment ouvert aux allans et venans, et qui avait été édifié par Septimius Severus. (D.J.)

TEMPLES D'ISIS, (Antiquité, Egypte) on a découvert dans la basse Thébaïde, au village de Bhabéit, c'est-à-dire en arabe maison de beauté, les restes d'un des plus beaux, des plus vastes et des plus anciens temples d'Egypte, qu'on juge avoir été un de ceux qui ont été autrefois élevés en l'honneur d'Isis.

Les pierres de ces ruines sont d'une longueur, d'une épaisseur énorme, et de marbre granit, ornées la plupart de sculptures qui représentent en demi-reliefs des hommes, des femmes, et des hiéroglyphes. Plusieurs de ces pierres portent la figure d'un homme debout, un bonnet long et pointu en tête, tenant deux gobelets, et les présentant à trois ou quatre filles qui sont debout l'une derrière l'autre. Ces filles ont un javelot dans une main, un bâton plus court dans l'autre, et sur la tête une boule entre deux cornes déliées. D'autres pierres sont gravées d'images hiéroglyphiques d'oiseaux, de poissons et d'animaux terrestres. Un pilier de granit fort haut et fort massif, ayant dans sa partie supérieure quatre entaillures aux quatre faces, parait avoir été construit pour soutenir les arcades et les voutes de ce grand édifice. Chaque face du pilier présente aux yeux une tête de femme gravée plus grande que nature.

Hérodote, avec toute l'antiquité, fait mention d'un temple construit au milieu du Delta, dans le village de Busiris, consacré à la déesse Isis, femme d'Osiris ; il parait assez probable que l'édifice ruiné qui se voit à Bhabeit était ce temple même de la déesse Isis, et que la ville dont parle Hérodote est le village de Bhabeit, situé au milieu du Delta, proche Sebennythus ou Sammanoud. Cette opinion est d'autant plus croyable, que dans le reste de l'île on n'a point encore trouvé de vestiges d'aucun monument de marbre ou de pierre qui puisse convenir à d'autres divinités qu'à la déesse Isis.

Les ruines du temple de cette déesse ont environ mille pas de tour. Elles sont à une lieue du Nil, et à deux ou trois lieues de Sammanoud et de la grande Méhalée, vers le nord, à vingt-cinq ou trente lieues du Caire. Dans le monceau de ces ruines, on ne voit que grosses masses de marbre. Recueil d'observat. curieuses, tome III. (D.J.)

TEMPLES DE JUNON, (Antiquité grecque et romaine) Junon avait des temples dans toute la Grèce, celui d'Argos était célèbre, Pausanias, in Corinth. en parle ainsi. En entrant dans le temple, dit-il, on voit sur un trône la statue de cette déesse d'une grandeur extraordinaire, toute d'or et d'ivoire. Elle a sur la tête une couronne, surmontée des grâces et des heures. Elle tient d'une main une grenade, et de l'autre un sceptre, au bout duquel est un coucou. Près de cette statue, sculptée par Polyclete, il y en avait une autre fort ancienne faite en colonne de bois de poirier sauvage. Un certain Buneus, fils de Mercure, fit élever à la déesse un magnifique temple à Corinthe. Celui de Samos était renommé par le culte que les habitants lui rendaient, comme on peut le voir dans Virgile. En un mot, de toutes les divinités du paganisme il n'y en eut point dont le culte fût plus solennel que celui de Junon. On trouvait par-tout dans la Grèce des temples, des chapelles ou des autels qui lui étaient dédiés.

L'Italie ne marqua pas moins de respect à une déesse, qui était tout ensemble la sœur et la femme de Jupiter. Elle avait trois fameux temples, entr'autres, sous le nom de Junon sospita, l'un de ces temples était à Lanuvium, les deux autres se voyaient à Rome ; Ciceron dit, dans la harangue pour Murena, que les consuls, avant que d'entrer en charge, devaient y offrir un sacrifice à la déesse. La statue que Junon reine avait à Veïes, fut transportée sous la dictature de Camille sur le mont Aventin, où elle fut consacrée par les dames de la ville dans le temple que le même Camille lui dédia : on respectait tellement cette statue, qu'il n'y avait que son prêtre qui put la toucher. Junon, sous le nom de Lucine, avait un temple près de Rome dans un bois sacré ; c'est Ovide qui le dit.

Gratia Lucinae dedit haec tibi nomina lucus,

Vel quia principium, tu dea, lucis habes.

Elle avait, sous le nom d'Ilithie, un temple, dans lequel, pour tous ceux qui naissaient à Rome, qui y mouraient, ou qui y prenaient la toge virile, on devait porter une pièce de monnaie.

La même déesse avait, sous le nom de Juga ou de Pronuba, selon Virgile, un autel dans la rue appelée Jugaria, et un autre autel sous le nom de Licinia. Pline observe qu'elle avait un temple orné de peintures, sous le nom de Junon Ardia. Le temple de Junon Matura est connu des antiquaires ; celui de Junon Moneta l'est encore davantage, parce qu'elle est représentée sur les médailles avec les instruments de la monnaie.

Tite-Live, l. IV. nous apprend que, sous le nom de Lacinia, elle avait un temple sur ce promontoire d'Italie, et que ce temple n'était pas moins respectable par sa sainteté, que célèbre par les riches présents dont il était orné : Inclytumque templum divitiis etiam, non tantum sanctitate suâ. (D.J.)

TEMPLES DE JUPITER, (Antiquité grecque et romaine) entre les temples que toute l'antiquité payenne éleva dans le monde en l'honneur du maître des dieux, sideream mundi qui temperabat arcem, je dois au-moins décrire les deux plus beaux, je veux dire celui de Jupiter olympien à Athènes, et celui de Jupiter capitolin à Rome.

Le premier, selon Pausanias, in Eliac. était le fruit des dépouilles que les Eléens avaient remportées sur les Pisans lorsqu'ils saccagèrent la ville de Pise. Ce temple, dont Libon originaire du pays avait été l'architecte, était d'ordre dorique et tout environné de colonnes par-dehors, en sorte que la place où il était bâti formait un superbe péristyle. On avait employé à cet édifice des pierres d'une nature et d'une beauté singulière.

La hauteur de ce temple, depuis le rez-de-chaussée jusqu'à sa couverture, était de soixante et huit pieds, sa largeur de quatre-vingt-quinze, et sa longueur de deux cent trente. La couverture était d'un beau marbre tiré du mont Pentélique et taillé en tuiles. Du milieu de la voute pendait une victoire de bronze doré, et au-dessous de cette statue était un bouclier d'or, sur lequel on voyait la tête de Méduse ; aux deux extrémités de la même voute étaient aussi suspendues deux chaudières dorées. Par-dehors, au-dessus des colonnes, regnait au-tour du temple un cordon auquel étaient attachés vingt-un boucliers dorés, consacrés à Jupiter par Mummius après le sac de Corinthe.

Sur le fronton de devant était représenté le combat de Pélops avec Oenomaus, et Jupiter au milieu. Stérope, une des filles d'Atlas, le char à quatre chevaux, étaient à la droite du dieu ; Pélops, Hippodamie occupaient la gauche. Le fronton de derrière, ouvrage d'Alcamene, le meilleur statuaire de son temps après Phidias, représentait le combat des Centaures et des Lapithes à l'occasion des noces de Pirithous.

Une grande partie des travaux d'Hercule se voyait sculptée dans l'intérieur de cet édifice ; et sur les portes qui étaient toutes d'airain, on remarquait entr'autres choses la chasse du sanglier d'Erymanthe, et les exploits du même Hercule contre Diomède, roi de Thrace, contre Géryon, etc. Il y avait deux rangs de colonnes qui soutenaient deux galeries fort exhaussées, sous lesquelles on passait pour arriver au trône de Jupiter.

Ce trône et la statue du dieu étaient le chef-d'œuvre de Phidias, et l'antiquité n'offrait rien de plus magnifique. La statue d'une immense hauteur était d'or et d'ivoire, si artistement mêlés, qu'on ne pouvait la regarder sans être frappé d'étonnement. Jupiter portait sur sa tête une couronne qui imitait la feuille d'olivier ; il tenait à sa main droite une victoire, et de la gauche un sceptre d'une extrême délicatesse, qui soutenait une aigle. La chaussure et le manteau du dieu étaient d'or ; et sur le manteau étaient gravés toutes sortes de fleurs et d'animaux.

Le trône brillait d'or et de pierres précieuses. L'ivoire, l'ébene, les animaux et plusieurs autres ornements y faisaient par leur mélange une agréable variété. Aux quatre coins de ce trône étaient quatre victoires, qui semblaient se donner la main pour danser ; les pieds du trône, du côté de devant, étaient ornés de sphinx, qui arrachaient de tendres enfants du sein des thébaïdes ; au-dessous on voyait Apollon et Diane qui tuaient à coups de flèches les enfants de Niobé.

Quatre traverses du même trône, et qui allaient d'un bout à l'autre, étaient ornées d'une infinité de figures d'une extrême beauté ; sur une étaient représentés sept vainqueurs aux jeux olympiques ; on voyait sur une autre, Hercule prêt à combattre contre les Amazones, et le nombre des combattants de part et d'autre, était de vingt-neuf. Outre les pieds du trône, il y avait encore des colonnes qui le soutenaient.

Enfin une grande balustrade, ornée de figures, enfermait tout l'ouvrage. Panénus, habîle peintre de ce temps-là, y avait représenté avec un art infini, Atlas qui soutient le ciel sur ses épaules, Thésée et Pirithous, le combat d'Hercule contre le lion de Némée, l'attentat d'Ajax sur Cassandre, Hippodamie avec sa mère, Prométhée enchainé, et mille autres sujets de l'histoire fabuleuse. A l'endroit le plus élevé du trône, au-dessus de la tête du dieu, étaient les grâces et les heures, les unes et les autres au nombre de trois.

Le piédestal qui soutenait toute cette masse, était aussi orné que le reste. Phidias y avait gravé sur or, d'un côté le soleil conduisant son char, de l'autre Jupiter et Junon, les grâces, Mercure et Vesta. Vénus y paraissait sortir du sein de la mer, et être reçue par l'Amour, pendant que Pitho, ou la déesse de la persuasion, lui présentait une couronne. Apollon et Diane n'avaient pas été oubliés sur ce bas-relief, non-plus que Minerve. On remarquait au bas de ce piédestal, Amphitrite, Neptune, et Diane ou la Lune, qui paraissait galoper sur un cheval. Enfin, un voîle de laine teint en pourpre et brodé magnifiquement, présent du roi Antiochus, pendait du haut jusqu'en bas.

Je ne dis rien des autres ornements de ce superbe édifice, ni du pavé qui était du plus beau marbre, ni des présents que plusieurs princes y avaient consacrés, ni du nombre infini de statues qui l'embellissaient. On peut sur tout cela consulter Pausanias, ou, si vous l'aimez mieux, les marbres d'Arondel de Prideaux.

C'est assez pour moi de remarquer que ce temple, plus grand qu'aucun dont on ait connaissance, excepté le seul temple de Bélus à Babylone, pouvait passer pour une des merveilles du monde. Il avait été entrepris par Pisistrate, et continué par ses enfants Hippias et Hipparque ; mais la grandeur du dessein de ce temple fut cause qu'il demeura imparfait plus de 700 ans, quoique de puissants princes, tels que Persée roi de Macédoine, Antiochus Epiphane roi de Syrie, eussent contribué par des sommes considérables à le finir.

Ce fut l'empereur Adrien qui eut cette gloire. Il lui en couta pour l'achever plus de dix-huit millions de notre monnaie. Ce temple avait au-delà de cinq cent pas géométriques de circuit, et tout cet espace était orné de statues plus admirables encore pour la délicatesse de l'ouvrage que pour l'or et l'ivoire qu'on y avait prodigués. Tite-Live a peint en deux mots bien élégamment la magnificence de ce temple : templum in terris inchohatum pro magnitudine dei ; car de son temps il n'était pas achevé, et du nôtre il reste à-peine quelques traces de ses ruines.

On bâtit à Rome en l'honneur de Jupiter plusieurs temples sous divers noms. Tels ont été celui de Jupiter le vainqueur, que L. Papyrius Cursor lui voua à la journée des Samnites, et que Fabius fit exécuter après leur défaite ; celui de Jovis tonantis, Jupiter tonnant, qu'Auguste fit construire en la montée du capitole ; et celui de Jupiter ultor, ou le vengeur, que M. Agrippa lui dédia ; mais aucun de ces temples n'égala celui de Jupiter Capitolin, dont nous avons promis de tracer l'histoire.

Il fut ainsi nommé du capitole sur lequel on le bâtit, comme on le voit par la médaille d'Aurelia Quirina vestale, où Jupiter est représenté aussi au milieu de son temple, qui est de figure carrée. Il tient son foudre d'une main, et son sceptre de l'autre, avec cette légende, Jupiter optimus, maximus, capitolinus.

Ce temple fut voué par le vieux Tarquin, et édifié par Tarquin le superbe, qui paya pour sa construction le poids de quarante mille livres en argent, deux millions. Il n'eut pas cependant la gloire de le dédier, parce qu'il fut chassé de Rome peu de temps avant qu'il l'eut entièrement achevé.

L'ouvrage ayant été fini depuis avec tous les ornements qu'on avait dessein d'y mettre, Publicola désirait passionnément de le consacrer, mais Horatius lui disputant cet avantage, eut le secret de faire ordonner par le peuple qu'il en ferait la consécration, et sur l'heure même il l'exécuta. En vain Marcus Valerius, frère de Publicola, qui se tenait sur la porte du temple, lui cria, pour l'en détourner : " Horatius, on vient d'apprendre que votre fils est mort de maladie dans le camp ". Horatius, sans se troubler, répondit, " qu'on l'enterre ", et acheva la consécration.

Ce temple ayant été brulé pendant les guerres civiles, Sylla le rebâtit, et l'orna de colonnes de marbre qu'il avait fait apporter d'Athènes du temple de Jupiter Olympien ; mais la mort l'ayant surpris avant que d'en faire la dédicace, il avoua que c'était la seule chose qui manquait à son bonheur. Catullus le consacra 67 ans avant J. C.

Ce second temple fut encore incendié l'an 69 de N. S. lorsque Vitellius assiégea Flavius Sabinus dans le capitole. Tacite dit qu'on ne sait si ce furent les assiégeants qui y mirent le feu pour pouvoir forcer plus aisément la place, ou si ce furent les assiégés pour pouvoir mieux se défendre ; quoiqu'il en sait, l'historien indigné contre les auteurs de cet embrasement, s'exprime ainsi : id facinus, post conditam urbem luctuosissimum, foedissimumque reipublicae populi romani accidit ; nullo externo hoste, propitiis, si per mores nostros liceret, diis, sedem Jovis optimi, maximi, auspicato à majoribus, pignus imperii, conditam quam non Porsenna deditâ urbe, neque Galli captâ, temerare potuissent, furore principum exscindi.

L'année qui suivit la mort de Vitellius, Vespasien releva le temple de Jupiter de fond en comble, l'exhaussa plus que les deux autres n'avaient été, le consacra, et mourut avant que de le voir périr par l'embrasement qui consuma le capitole peu de temps après son décès.

Domitien rebâtit le même temple superbement pour la quatrième fais, et en fit la dédicace. La hauteur de ce temple était proportionnée symétriquement à sa grandeur, qui était de 200 pieds de face de chaque côté ; la longueur surpassait la largeur presque de 15 pieds, selon Denis d'Halicarnasse, qui dit : latera singula ducentorum ferè pedum sunt, exiguâ longitudinis, et latitudinis differentiâ ; nisi quod ista illam vincit pedibus ferè quindenis.

Ce temple était si magnifique, que la seule dorure couta plus de douze mille talents, c'est-à-dire, plus de deux millions 572 mille livres sterlings. Ses colonnes, dit Plutarque, sont de marbre pentelique, et étaient dans leur origine d'une longueur admirablement proportionnée à leur grosseur ; nous les avons vues à Athènes, continue-t-il ; on a voulu les retailler et les repolir à Rome ; travail qui a gâté leur symétrie, parce qu'en les rendant trop menues, il leur a fait perdre toute leur grâce qui consistait dans la proportion. Ce trait nous apprend combien du temps de Domitien, Rome était inférieure à la Grèce pour le goût des beaux arts ; mais on sait qu'en tout temps elle lui a cédé cet avantage ; Horace et Virgile en conviennent eux - mêmes. (D.J.)

TEMPLES DE LATONE, (Antiquité grecque) cette fille de Saturne eut le bonheur d'être aimée de Jupiter, et d'être admise au rang des déesses malgré la haine de Junon. Elle eut plusieurs temples dans la Grèce, entr'autres un dans l'île de Délos auprès de celui de son fils. Pausanias fait mention d'un autre temple de Latone à Argos ; sa statue même était un ouvrage de Praxitele. Les Egyptiens lui bâtirent un temple dans la ville de Butis. Quelques français ont écrit, peut-être pour se divertir sur des jeux de mots, que Latone avait un temple chez les Gaulois dans un bourg du comté de Bourgogne appelé Laone (aujourd'hui S. Jean de Laulne ou Laône), en retranchant le t du mot latin Latona. (D.J.)

TEMPLES DE LA LIBERTE, (Antiquité romaine) Un peuple aussi justement idolâtre de la liberté, que le peuple romain, ne pouvait pas manquer d'en faire une divinité, et de lui consacrer des temples et des autels. Aussi cette déesse qu'on invoquait pour conserver cette même liberté que l'extinction de la royauté avait procurée, en avait - elle plusieurs dans la ville.

Ciceron, l. II. de nat. deor. fait mention d'un de ces temples. Publius Victor en avait fait construire un sur le mont Aventin, avec un vestibule qu'on nommait le vestibule de la Liberté. Les anciens qui parlent souvent de ce vestibule, ne nous apprennent pas à quel usage on le destinait. Mais on peut croire qu'on y faisait les ventes publiques, comme dans les autres. Tite-Live parlant du temple que Tibérius Gracchus avait consacré à la même déesse, dit que les colonnes en étaient de bronze, et qu'on y voyait de très-belles statues. Lorsque Ciceron partit pour son exil, P. Clodius son persécuteur consacra la maison de ce grand homme à la Liberté.

Enfin Dion nous apprend que les amis d'Antoine, par un décret public, firent ériger à la même déesse un temple en faveur de Jules-César ; action bien digne de ces derniers romains, qui élevaient un temple à la Liberté en l'honneur de celui qui leur avait fait perdre les restes de cette précieuse prérogative, que les Marius et les Sylla leur avaient encore laissée, et dont jusqu'alors ils avaient été si jaloux. (D.J.)

TEMPLES DE MARS, (Antiquité grecque et romaine) le culte de Mars était peu répandu dans la Grèce, cependant Athènes avait dédié un temple célèbre à ce dieu des batailles.

On admirait dans ce temple cinq statues ; une du dieu, ouvrage d'Alcamène ; une de Pallas, par Locrus, statuaire de Paros ; une de Bellone, par les enfants de Praxitele, et deux de Vénus. Devant la porte du temple on voyait un Hercule, un Thésée et un Apollon dont les cheveux étaient noués avec un ruban. Outre ces divinités, quelques hommes illustres avaient aussi leurs statues dans ce temple ; Colliadès, archonte d'Athènes et l'un de ses législateurs, Harmodias, Aristogiton et Pindare. Xerxès avait enlevé toutes ces statues ; mais Alexandre les ayant trouvées dans le palais de Darius, les renvoya aux Athéniens.

C'est chez les Romains principalement que Mars était honoré, car ils le regardaient comme le protecteur de leur empire. Auguste lui bâtit deux temples célèbres, l'un sur le capitole, d'après le modèle de Jupiter Férétrius, et à l'occasion des étendards rapportés par les Parthes. Il éleva l'autre dans son forum, et le dédia à Mars vengeur, Marti ultori, en mémoire de la bataille de Philippes, selon le témoignage d'Ovide :

Templa feres, et me victore vocaberis ultor ;

Voverat, et fuso laetus ab hoste redit.

Dion, liv. L. de son histoire, ajoute qu'on déposa dans ce temple les enseignes enlevées aux défenseurs de la liberté romaine, et le sénat ordonna que le char sur lequel César avait triomphé, serait mis dans le temple de Mars, pour conserver la mémoire des victoires de l'empereur. Ce temple de Mars était soutenu de cent colonnes. On prétend que c'est sur ses ruines qu'on a bâti dans Rome moderne l'église de Sainte Marie des Palmes.

Il y avait encore dans l'ancienne Rome un autre temple de Mars hors de la ville et sur la voie Appienne, où le sénat s'assembla quelquefois. La remarque de Vitruve est en général vraie ; il dit qu'ordinairement les temples de Mars étaient hors des murs, afin de servir de rempart aux villes contre les périls de la guerre ; cependant outre qu'Auguste s'écarta de cette règle, nous savons du même Vitruve, qu'à Halicarnasse le temple de Mars était situé au milieu de la forteresse ; mais ce qu'on observa plus régulièrement, fut l'ordre dorique dans les temples de ce dieu. (D.J.)

TEMPLES DE MERCURE, (Antiquité grecque et romaine) ce dieu semble avoir été inventé pour le bien des hommes, si toutes les louanges que lui donne Horace dans une de ses odes (ode Xe l. I.) sont vraies. Quoiqu'il en sait, les Grecs et les Romains eurent Mercure en vénération, et lui dressèrent dans les carrefours et sur les grands chemins ces statues nommées hermes. Il avait plusieurs temples en différentes villes de la Grèce, dont quelques-uns cependant étaient déjà en ruine du temps de Pausanias ; mais ce dieu était particulièrement honoré à Cyllene en Elide, où il avait un temple célèbre, et à Tanagre où il en avait deux. Il eut en Achaïe un temple et un oracle qu'on consulta longtemps. Mercure avait encore à Rome dans le grand cirque un fort beau temple qui lui fut dédié l'an 675 de la fondation de cette ville. Enfin, si nous en croyons Tacite, les Germains l'adoraient comme le souverain des dieux, et lui immolaient des victimes humaines : Deorum maximum Mercurium colunt, cui humanis quoque hostiis litare fas habent. (D.J.)

TEMPLES DE MINERVE, (Antiquité grecque et romaine) le culte de Minerve apporté d'Egypte dans la Grèce, passa dans la Samothrace, et de-là dans l'Asie mineure. Les Rhodiens furent les premiers peuples de ces cantons, qui dressèrent des temples à Minerve, pour leur avoir enseigné l'art de faire des statues colossales ; mais ayant manqué de feu dans un sacrifice qu'ils lui faisaient, la fable dit qu'elle se retira de dépit en la ville d'Athènes, où elle fut adorée sous le nom de , c'est-à-dire, la déesse vierge. Les Athéniens lui firent bâtir un temple immortel, et lui dressèrent une statue de la main de Phidias, toute d'or et d'ivoire, de 39 pieds de haut. Nous en avons parlé au mot STATUE, et au mot SCULPTEURS anciens, à l'article de Phidias.

La déesse, car c'est ainsi qu'on la nommait par excellence, ne regnait pas moins souverainement dans la Laconie que dans l'Attique ; en effet il n'est pas étonnant que celle qui présidait aux combats, fût singulièrement honorée par les Lacédémoniens ; aussi avait-elle sept ou huit temples dans Sparte ; mais le plus célèbre (& peut - être de l'ancienne Grèce), fut commencé par Tyndare, qui en jeta les fondements ; Castor et Pollux y travaillèrent après lui, et entreprirent d'y employer le prix des dépouilles qu'ils avaient remportées sur les Aphidnéens ; cependant comme leur entreprise était restée fort imparfaite, les Lacédémoniens longtemps après construisirent un nouveau temple à Minerve, qui était tout d'airain, ainsi que la statue de la déesse, et ce n'est pas le seul temple de l'antiquité qui ait été de ce métal. Ce fameux temple porte le nom de Chalcioecos : on sait que signifie de l'airain, et une maison. Thucydide, Polybe, Diodore, Plutarque, Tite-Live, en un mot, presque tous les auteurs grecs et latins ont parlé du temple Chalcioecos de Sparte, mais Pausanias l'a décrit.

L'artiste, dit-il, dont les Lacédémoniens se servirent, fut Gitiadas, originaire et natif du pays. Au-dedans du temple la plupart des travaux d'Hercule sont gravés sur l'airain, tant les aventures qu'on connait sous ce nom, que plusieurs autres que ce héros a courues volontairement, et dont il est glorieusement sorti. Là sont aussi gravés les exploits des Tyndarides, et surtout l'enlevement des filles de Leucippe. Ensuite vous voyez d'un côté Vulcain qui dégage sa mère de ses chaînes, d'un autre côté Persée prêt à partir pour aller combattre Méduse en Libye ; des nymphes lui mettent un casque sur la tête et des talonnières aux pieds, afin qu'il puisse voler en cas de besoin. On n'a pas oublié tout ce qui a rapport à la naissance de Minerve, mais ce qui efface tout le reste, c'est un Neptune et une Amphitrite qui sont d'une beauté merveilleuse. On trouve ensuite la chapelle de Minerve.

Aux environs du temple il y a deux portiques, l'un au midi et l'autre au couchant. Vers le premier est le tombeau de Tyndare ; sur le second portique on voit deux aigles éployées, qui portent chacune une victoire ; c'est un monument de celles que Lysandre remporta, l'une près d'Ephèse sur Antiochus, lieutenant d'Alcibiade qui commandait les galeres d'Athènes ; l'autre sur la flotte athénienne qu'il défit entièrement à Aigospotamos. A l'autel du temple de Minerve il y a deux statues de Pausanias qui commandait l'armée de Lacédémone au combat de Platée. A l'aîle gauche du temple d'airain, il y a une chapelle qui est consacrée aux Muses, parce que les Lacédémoniens marchent à l'ennemi au son des flutes et de la lyre.

Les Spartiates élevèrent un autre temple à Lacédémone à leur retour de Colchos, en l'honneur de Minerve Asia.

On voyait encore dans la rue Alpia le fameux temple de Minerve dit Ophtalmitis, Minerve conservatrice des yeux ; c'est Lycurgue lui-même qui consacra ce temple à la déesse, en mémoire de ce que dans une émeute, ayant eu un oeil crevé par Alcandre à qui ses lois déplaisaient, il fut sauvé en ce lieu là par le peuple, sans le secours duquel il aurait peut-être perdu l'autre oeil, et la vie même.

L'histoire parle beaucoup du temple que Minerve avait à Sunium ; il en reste encore dix-sept colomnes entières d'un ouvrage tout semblable à celui du temple de Thésée à Athènes. On y voit sur un bas-relief de marbre de Paros, une femme assise, avec un petit enfant, qui, comme elle, lève les bras, et parait regarder avec effroi un homme nud qui se précipite du haut d'un rocher.

Minerve eut aussi plusieurs temples à Rome, entr'autres celui du mont Aventin, dont Ovide fait mention dans le liv. VI. de ses Fastes.

Mais le plus célèbre temple de la déesse était à Saïs, métropole de la basse Egypte dans le Nôme qui en prenait le nom, Saïtes Nomos. Hérodote dit que ce superbe temple avait été embelli par les soins d'Amasis, d'un vestibule qui surpassait de beaucoup en grandeur et en magnificence, tous les monuments que les rois ses prédécesseurs avaient laissés. Ce même prince y ajouta des statues d'une grandeur prodigieuse ; car les Egyptiens aimaient les figures colossales, sans parler des pierres immenses pour leur énorme grosseur, et qui venaient la plupart d'Elephantine, ville éloignée de Saïs de vingt journées de navigation.

La chapelle de ce temple offrait en particulier quelque chose d'unique en son genre ; cette chapelle était d'une seule pierre taillée dans les carrières de la haute Egypte, et qu'Amasis avait fait venir avec des soins et des peines incroyables, jusqu'à Saïs où elle devait être placée dans le temple de Minerve. " Ce que j'admire par-dessus tous les autres ouvrages d'Amasis, dit Hérodote, c'est cette maison d'une seule pierre qu'il fit transporter d'Elephantine, et que deux mille hommes, tous pilotes et marins ne purent amener qu'en trois ans. Cette maison avait de face vingt et une coudées de largeur et huit de hauteur, et dans œuvre cinq coudées de haut, et dix-huit de longueur ". Cependant cette maison n'entra point dans le temple de Minerve, où était inhumé Psamméticus ; elle fut laissée à la porte, soit qu'Amasis fût piqué des plaintes de l'architecte, sur la fatigue que lui avait causé cet ouvrage, soit par les accidents déjà arrivés à ceux qui le conduisirent sur le Nil, soit enfin par d'autres raisons qu'Hérodote n'a pu savoir. (D.J.)

TEMPLES DE LA MISERICORDE, (Antiquité grecque et romaine) Voilà les temples les plus dignes de l'humanité. Les Athéniens ont eu les premiers la gloire de diviniser cette vertu, de construire dans Athènes un temple à son honneur, et d'en faire un lieu d'asile. Les Romains eux-mêmes frappés de cette belle idée, bâtirent dans Rome le second temple à la Miséricorde. Il eut été beau d'en élever à cette vertu dans tous les pays du monde. (D.J.)

TEMPLES DE NEPTUNE, (Antiquité grecque et romaine) nous avons peu de détails sur les temples que Neptune avait à Rome : dans le dernier siècle, lorsqu'on fouillait des fondements ; on y aperçut quantité de morceaux de marbre excellemment travaillés : et comme parmi des débris des corniches on trouva des dauphins et des tridents, on conjectura que c'était un temple consacré à Neptune.

Sa façade était périptère, et sa forme pycnostyle, ou à colonnes pressées. Ses entre-colonnes avaient un diamètre et demi moins un onzième, ce qui mérite d'être remarqué, Ve qu'il n'y en a peut-être jamais eu de si pressées dans aucun autre édifice. De tout ce temple, il ne reste plus aucune partie sur pied : mais Palladio, en examinant de près ces ruines, est parvenu à la connaissance de ses dimensions, dont il a donné les desseins dans son architecture : j'y renvoie les lecteurs.

Il est certain néanmoins que Neptune fut un des dieux du paganisme des plus honorés ; car indépendamment des Libyens qui le regardaient comme leur grande divinité, il avait dans la Grèce et dans les lieux maritimes d'Italie un grand nombre de temples élevés en son honneur. Les Atlantides, dit Platon dans son Critias, lui en consacrèrent un magnifique, dans lequel il était représenté dans un char tiré par quatre chevaux ailés, dont il tenait les rênes, et sa statue touchait la voute du temple. Hérodote, l. VII. fait mention du temple que les Pasidéens lui avaient consacré, et Pline, l. XXXI. parle de celui qu'il avait chez les Cariens. Pausanias en décrit aussi plusieurs. (D.J.)

TEMPLE DE LA PAIX, (Antiquité romaine) on voit à Rome des vestiges de ce temple proche Sainte-Marie-la-Neuve, sur le chemin qu'on appelle la Via sacra. On prétend qu'il est bâti dans le même lieu où était anciennement le palais de Romulus.

Ce temple fut commencé par l'empereur Claude, et conduit à sa perfection par Vespasien, après la conquête de la Judée. Ce prince y fit mettre en dépôt toutes les riches dépouilles qu'il avait tirées du temple de Jérusalem.

Le temple de la paix passait pour être le plus vaste, le plus superbe et le plus riche de Rome ; il avait trois cent pieds de long, et deux cent de large. Tout ruiné qu'il est, les vestiges qui nous en restent encore suffisent pour juger de son ancienne grandeur.

A la face d'entrée il y avait une loge à trois ouvertures bâtie de brique, et le reste de la largeur de la façade était un mur continu. Les pilastres des arcades de la loge avaient des colonnes par-dehors qui leur servaient d'ornement, et qui régnaient le long du mur continu. Sur cette première loge, il y en avait une autre découverte avec une balustrade ; et au-dessus de chaque colonne était une statue.

Au dedans du temple il y avait huit grandes colonnes de marbre d'ordre corinthien, de cinq pieds quatre pouces de diamètre, dont la hauteur compris la base et le chapiteau, faisait cinquante-trois pieds. L'entablement avait dix pieds et demi, et portait la voute de la nef du milieu.

Les bases de ces colonnes étaient plus hautes que la moitié de leur diamètre, et la plinthe en emportait plus du tiers ; ce qu'on fit apparemment pour leur donner plus de force ; leur saillie était d'une sixième partie de leur diamètre. La modénature était d'une fort belle invention, et la cimaize de l'architecture était d'un dessein peu commun. La corniche avait des médaillons au lieu de larmier.

Les murs de ce temple étaient enrichis de statues et de peintures. Toutes les voutes avaient des compartiments de stuc, et généralement tout y était fort riche. Cet édifice périt par une incendie, ou par quelqu'autre accident, sous l'empereur Commode. (D.J.)

TEMPLES DES PARQUES, (Antiquité grecque et romaine) on ne crut pas dans tout le monde payen qu'il fût nécessaire de se mettre en dépense pour des déesses inéxorables qu'il était impossible de fléchir ; de-là vient qu'elles n'eurent que des statues en plusieurs endroits et peu de temples dans la Grèce. Athènes n'en éleva point à leur honneur, Sicyone leur consacra seulement un temple dans un bois sacré, et les Lacédémoniens leur en bâtirent un autre dans leur capitale auprès du tombeau d'Oreste. (D.J.)

TEMPLE DE LA PIETE, (Antiquité romaine) templum pietatis, dédié par Attilius dans la place romaine, à l'endroit où demeurait cette femme qui avait nourri son père prisonnier du lait de ses mamelles. (D.J.)

TEMPLES DE POMONE, (Antiquité romaine) cette belle nymphe qui plut à Vertumne, et qu'il rendit sensible à force de soins, de louanges et de respects, est une pure divinité des poètes latins ; cependant elle eut à Rome des temples et des autels. Son prêtre portait le nom de Flamen Pomonalis, et lui offrait des sacrifices pour la conservation des fruits de la terre. (D.J.)

TEMPLES DE PROSERPINE, cette fille de Cérès enlevée pour sa beauté par Pluton, avait plusieurs temples en Sicile, lieu de sa naissance. Strabon, l. VII. parle des prairies d'Enna, où Pluton la vit, et en devint amoureux. Ciceron lui-même dans sa sixième Verrine, nous a laissé de ce lieu charmant, une description aussi élégante que fleurie ; mais enfin comme le destin avait prononcé que Proserpine fût souveraine des enfers, les Grecs et les Romains bâtirent peu de temples en l'honneur d'une divinité inexorable. Pausanias ne cite que celui qu'elle avait à Sparte sous le nom de Proserpine conservatrice. Il avait été bâti, selon les uns, par Orphée de Thrace ; et selon d'autres, par le scythe Abaris. Proserpine n'avait aussi qu'un seul temple à Rome, dans la cour duquel on allait acheter tout ce qui était nécessaire pour les funérailles. Je ne sais pourquoi les Gaulois regardaient Proserpine comme leur mère ; mais Strabon, l. IV. nous apprend que depuis la conquête des Romains, cette déesse avait un temple dans les Gaules desservi à la manière des Samothraces. (D.J.)

TEMPLE DE LA PUDICITE, (Antiquité romaine) la pudeur est une vertu trop essentielle au beau sexe, pour qu'on ne l'ait pas érigée en divinité. Aussi l'histoire nous apprend-elle que les Romains l'honoraient sous le nom de la Pudicité ; et cette déesse avait dans leur ville des temples et des autels, sur lesquels on lui offrait des sacrifices. Mais comme si les grands devaient avoir d'autres dieux que le peuple, on distinguait à Rome la Pudicité des dames patriciennes d'avec celle des plébéiennes. Nous avons indiqué ailleurs l'origine de cette orgueilleuse et singulière distinction. (D.J.)

TEMPLE DES DIEUX PURS, (Antiquité grecque) Pausanias est le seul auteur qui en parle. " On voit, dit-il, sur la hauteur qui commande la ville de Pallantium, un temple bâti à ces divinités qu'ils appellent pures, et par lesquelles ils ont coutume de jurer dans leurs plus importantes affaires ; du reste, ils ignorent quelles sont ces divinités, ou s'ils le savent, c'est un secret qu'ils ne révelent point. S'il est donc permis de deviner, continue Pausanias, je croirais que ces dieux ont été appelés purs, parce que Pallas ne leur sacrifia pas de la même manière qu'Evandre son père, avait sacrifié à Jupiter Lycéus ". Voyages de l'Arcadie, l. VIII. c. xliv. (D.J.)

TEMPLE DE LA DEESSE QUIES, (Antiquité romaine) cette déesse, car son nom féminin indique que c'en était une, avait un temple chez les Romains hors la porte Colline, et un autre, selon Tite-Live, lib. IV. dans la rue Labicane ; on l'invoquait pour jouir du repos, et ceux qu'elle exauçait, étaient assurément bienheureux. (D.J.)

TEMPLES DE LA RENOMMEE, (Antiquité) il est sur que la Renommée eut un culte établi dans la Grèce, surtout à Athènes, comme nous l'apprenons de Pausanias ; et un temple fameux, ainsi que le dit Plutarque dans la vie de Camillus. Il serait inutîle de chercher des figures de cette déesse, plus ressemblantes que le portrait qu'en a fait Virgile, liv. IV. de son Enéide.

Ex templo Libyae magnas it Fama per urbes, &c.

(D.J.)

TEMPLE DE ROMULUS, (Antiquité romaine) Numa Pompilius éleva un temple à ce fondateur de Rome, et prescrivit qu'il fût honoré sous le nom de Quirinus, par des sacrifices solennels. C'est ainsi que fut faite l'apothéose de César, justement assassiné par les amateurs de la liberté ; mais l'apothéose de César vint trop tard, tout le monde s'en mocquait. Les uns, dit Pline, liv. II. c. XVe appelaient Auguste le faiseur de poupées ; les autres disaient qu'il achevait de peupler le ciel, qui depuis longtemps n'avait reçu de membre d'aucune colonie romaine. (D.J.)

TEMPLES DE SATURNE, (Antiquité romaine) je sais que la tradition grecque portait que dès l'âge d'or, le fils de Caelus et de Vesta avait un temple à Olympie ; mais Rome lui rendit le culte le plus religieux, et lui dédia divers temples.

Le premier temple qui fut bâti à Saturne, fut celui que lui fit élever T. Tatius roi des Sabins, au Capitole, après la paix faite entre lui et Romulus. Le second fut voué par Tullus Hostilius, après avoir triomphé trois fois des Sabins, et deux fois des Albins : il le dédia, et institua les saturnales. Le troisième fut dédié par les consuls A. Sempronius Atratinus et M. Minutius. D'autres disent néanmoins que ce fut Tarquin le superbe qui le bâtit, et que selon l'avis de Valerius Publicola, on en fit le lieu du trésor public. C'était dans ce temple que les ambassadeurs étrangers étaient premièrement reçus par les questeurs romains, qui écrivaient leurs noms dans les régistres de l'état, et fournissaient aux frais de leur séjour. C'était encore là où se gardaient les minutes des contrats, et de tous les actes que les pères et mères faisaient, comme aussi les noms de tous les citoyens romains, écrits dans les livres éléphantins. Ceux qui avaient recouvré leur liberté, y allaient pendre leurs chaînes et les lui consacrer, selon le témoignage de Martial.

Has cum geminâ compede dedicat catenas,

Saturne, tibi zoilus annulos priores.

(D.J.)

TEMPLES DE SERAPIS, (Antiq. égyptien.) ce dieu avait des temples en Asie, dans la Grèce et à Rome ; mais les Egyptiens, dont Sérapis était une des principales divinités, élevèrent sur tout autre peuple, plusieurs temples en son honneur. Le plus ancien se voyait à Memphis ; il n'était pas permis aux étrangers d'y entrer, et ses propres prêtres n'avaient ce droit qu'après avoir enterré le bœuf Apis. Cependant le plus renommé de tous les temples de Sérapis, était celui que Ptolomée Soter lui consacra ; on l'appelait Sérapéon, et j'en ai donné l'article qu'il faut remplir ici, parce que c'était un des plus superbes édifices, et des plus respectés qu'il y eut dans le monde.

Ce temple, dit Denys le géographe, est tout éclatant d'or, et l'on n'en trouve aucun sur la terre pour lequel on ait plus de dévotion. Il n'était point dans l'enceinte de la ville d'Alexandrie, mais hors des murs, ainsi que celui de Saturne ; la raison en est que les lois de l'Egypte défendaient d'immoler des victimes sanglantes à ces deux divinités dans l'enclos des villes, de peur de les profaner par le sang de telles hosties.

Suivant quelques historiens, le simulacre du dieu Sérapis touchait de chacune de ses mains, sur un des côtés du temple, et était un assemblage de tous les métaux et de tous les bois. On avait pratiqué à l'orient, ajoute-t-on, une petite fenêtre avec tant de justesse, qu'à un certain jour bien connu des prêtres, quelques rayons du soleil s'échappaient par cette étroite ouverture, et venaient tomber sur les lèvres de la statue de Sérapis. Le peuple crédule pensait que l'astre du jour venait baiser la bouche de cette divinité.

Selon Strabon, il n'y avait rien de plus gai que les pélerinages qui se faisaient au temple de Sérapis. " Vers le temps de certaines fêtes, dit-il, on ne saurait croire la multitude de gens qui descendent sur un canal d'Alexandrie à Canope, où est le temple. Jour et nuit, ce ne sont que des bateaux pleins d'hommes et de femmes qui chantent et qui dansent avec toute la liberté imaginable. A Canope il y a sur le canal une infinité d'hôtelleries, qui servent à retirer ces voyageurs, et à favoriser leurs divertissements ".

Le temple de Sérapis fut détruit par l'ordre de l'empereur Théodose, et alors on découvrit, dit un écrivain ecclésiastique, l'effronterie des prêtres de cette divinité, qui avaient pratiqué un grand nombre de chemins couverts, et disposé une infinité de machines pour tromper les peuples par la vue de faux prodiges.

Sérapis avait un oracle fameux dans un de ses temples à Babylone, où il rendait ses réponses en songe. Pendant la dernière maladie d'Alexandre, quelques chefs de son armée allèrent passer une nuit dans ce temple célèbre, pour consulter la divinité s'il serait avantageux d'y transporter Alexandre. Il leur fut répondu en songe, qu'il valait mieux ne le point transporter, et peu de temps après ce conquérant mourut. La réponse était excellente à tout événement. (D.J.)

TEMPLE DU SOLEIL, (Antiquité) l'astre du jour fut la grande divinité des Phéniciens, des Egyptiens, des Atlantides, et pour le dire en un mot, de presque tous les peuples, barbares et policés de l'univers. Par-tout on reconnut, par-tout on éleva des temples en l'honneur du Soleil, et on les dirigea du côté de l'orient. Les Ammonites l'adorèrent sous le nom de Moloch ; les Phéniciens sous celui de Thamus ; les Chaldéens l'honorèrent sous ceux de Bélus ou de Baal ; les Arabes leurs voisins lui offraient des parfums, et l'appelaient Adonée ; les Moabites Belphegor ; les Perses Mitras ; les Ethiopiens Asabinus ; les Grecs et les Romains Apollon ou Phoebus. Les Massagetes, selon Hérodote, lui sacrifiaient des chevaux, les Germains, dit César, n'ont d'autres dieux que ceux dont ils reçoivent quelque bien, le Soleil, la Lune et le Feu : deorum numero eos solùm ducunt quorum opibus apertè juvantur, Solem, Vulcanum et Lunam. Enfin, si nous en croyons le père Laffiteau, il n'y a dans le vaste continent de l'Amérique, aucuns peuples connus qui n'adorent le Soleil.

On connait la médaille d'Héliogabale, qui porte pour légende : Sancto deo Soli. On sait que cet empereur se glorifia toujours d'avoir été prêtre du Soleil dans la Syrie, et que son nom fait allusion à cette dignité ; mais nous ne devons pas oublier, qu'il consacra à Rome un temple au Soleil, où, dans le dessein de le rendre plus respectable, il fit transporter le culte de Cybèle ou de Vesta, le palladium et les anciles. Il voulut même y joindre le culte que rendaient au vrai Dieu les Samaritains, les Juifs et les Chrétiens.

Hérodien nous a conservé l'histoire du culte que cet empereur rendait au Soleil dans ce temple. " Héliogabale, dit-il, érigea un temple magnifique à ce dieu (le Soleil), et y plaça plusieurs autels, sur lesquels il immolait tous les matins des hécatombes de taureaux, et un grand nombre de brebis ; et après y avoir répandu une profusion d'aromates, il y faisait des libations de vins vieux des plus excellents ; en sorte qu'on voyait le vin et le sang ruisseler de tous côtés. Des chœurs de musique, rangés au-tour de ces autels, augmentaient la célébrité de ce culte. Des femmes phéniciennes avec leurs instruments de musique, qui étaient des cymbales et des tympanons, dansaient en cercle ; et les entrailles des victimes ainsi que les aromates, étaient portées dans des bassins d'or, par tout ce qu'il y avait de plus qualifié à Rome ".

Ant. Varius, au rapport de Lampride, fit aussi construire dans la même ville, un temple en l'honneur du Soleil, mais qui fut moins célèbre que celui d'Héliogabale. (D.J.)

TEMPLES DE TELLUS, (Antiquité grecque et romaine) la terre avait des temples dans plusieurs lieux de la Grèce, et entr'autres à Sparte, voyez ce qu'en dit Pausanias. Il est parlé de celui que la déesse Tellus avait à Rome dans la première philippique de Ciceron, où il raconte ce qui s'était passé dans le sénat, lors de la mort de César, sur la proposition faite par Antoine, d'abolir à jamais la charge de dictateur, qui avait usurpé dans la république toute l'autorité du pouvoir des rais. On rendit dans ce temple un décret, tel qu'Antoine le désirait, et dans les termes qu'il avait lui-même conçus. (D.J.)

TEMPLES DE THEMIS, (Antiquité) cette déesse de la justice n'eut que peu de temples après sa mort. Ovide parle des oracles qu'elle rendait sur le parnasse, mais c'est un poète qui parle ; Pausanias nous apprend que les Athéniens lui élevèrent un temple dans leur ville assez près de la citadelle ; il ne nous reste ni monuments, ni statues de cette divinité, tout a péri avec elle. (D.J.)

TEMPLE DE THESEE, (Antiquité grecque) on avait élevé à Athènes un temple à la gloire de Thésée. Ce temple était remarquable par les fêtes que les anciens y solennisaient en l'honneur de ce héros, et par des distributions de farine qu'on y faisait aux pauvres de la ville ; mais ce qui prouvait encore mieux la vénération des Athéniens pour leur fondateur, c'est qu'ils avaient fait de ce temple un asîle inviolable, où venaient se réfugier les esclaves maltraités de leurs patrons. Il fut bâti après la bataille de Marathon, consacré pendant les victoires de Cimon, réparé comme les autres, par les soins d'Hadrien, et ensuite apparemment, par les libéralités des princes chrétiens qui en firent une église. Aujourd'hui la voute en ruine ne sera jamais rétablie, que par un nouvel événement qui changera ce temple en mosquée. (D.J.)

TEMPLE DE VACUNE, (Antiquité romaine) Vacune était adorée particulièrement dans le pays des Sabins, où elle avait un temple sur le mont Fiscellus, aux confins du Picenum, vers les sources du Nar. Cette même déesse des vacations, avait un autre temple entre Caspérie et Otricule, avec un bois et une ville du même nom. La ville subsiste encore aujourd'hui, et s'appelle Vaccuna. (D.J.)

TEMPLES DE VENUS, (Antiq. égypt. grecq. et rom.) cette déesse dont Homère parait avoir dérobé la ceinture, est des plus célèbres dans l'antiquité payenne, par le nombre et la beauté de ses temples. Strabon, liv. XVII. nous apprend qu'elle en avait un superbe à Memphis ; il serait bien difficîle d'en découvrir aujourd'hui quelque reste, puisque les ruines même de cette capitale de l'Egypte, ne sont plus que des masures fort peu distinctes, quoiqu'elles continuent jusque vis-à-vis du vieux Caire. Les Memphites avaient aussi construit un temple à la fille de Jupiter et de Dioné, et nourrissaient dans ce temple une génisse qui lui était consacrée.

Son culte passa de Phénicie, dans les îles de la Grèce, et de-là en Sicile, et chez les Romains. Cythere, Amathonte, Gnide, Paphos, Idalie, lui élevèrent des temples qui apprirent au monde corrompu, que pour célébrer la déesse de l'amour, il était permis de s'affranchir des règles de la pudeur.

Le temple de Vénus à Cythere, passait pour le plus ancien, et le plus célèbre de tous ceux que Vénus eut dans la Grèce ; sa statue la représentait armée. Les Eginetes lui avaient bâti dans leur ile, un temple magnifique, dont M. Fourmont a encore Ve vingt-une colonnes subsistantes. Elle avait aussi un temple en Laconie, sous le nom de Vénus Ambollogera, c'est-à-dire qui éloigne la vieillesse, et à ce sujet on lui fit une hymne qui commençait par ces mots : belle Vénus, éloignez de nous la triste vieillesse ; c'est Plutarque qui nous apprend cette particularité dans le liv. III. quest. 6. de ses propos de table. Tacite a décrit la situation du temple de Paphos, et la statue singulière de la déesse.

Les Siciliens bâtirent à Vénus un temple célèbre sur la montagne Eryx ; ce temple était rempli de femmes qu'on y consacrait par vœu, et qui de leurs galanteries, enrichissaient le trésor de la déesse. Du temps de Diodore, qui a fait une exacte description de ce temple, il était encore dans son premier éclat ; mais cette splendeur ne fut pas de longue durée, puisque Strabon qui a suivi de près Diodore, écrit que de son temps, ce temple était presque désert.

Enée apporta de Sicîle en Italie, une statue de Vénus Erycine, à qui l'on fit depuis bâtir un temple à Rome avec de très-beaux portiques, hors de la porte Colline : mais ce temple n'approchait point de celui que cette déesse avait dans le huitième quartier de la ville ; c'était un magnifique édifice, auquel la place dite forum Caesaris, elle-même superbement ornée, servait comme de parvis. Il semble, selon les termes d'Appien, que le forum n'ait été fait que pour le temple. César, dit-il, ajouta au temple de Vénus une place consacrée, , dont il fit un forum, non pas pour la vente des choses nécessaires à la vie, mais pour les affaires, comme était chez les Perses la place où l'on venait apprendre la justice.

A l'entrée de ce temple, s'élevait une basilique où l'on regardait les jugements. Vitruve le cite pour exemple des pycnostyles, c'est-à-dire des temples, où les colonnes ne sont éloignées l'une de l'autre, que d'un diamètre et demi ; peut-être est-ce ce temple qui se voit dans une médaille du même Jules César, qualifié imp. IV. avec cette légende Veneri victrici vota ; il est à six colonnes ; la statue de la déesse parait au milieu, tenant à la main une victoire.

Victor nous apprend, que dans le forum de César, et apparemment dans le temple de Vénus genitrix, étaient deux statues de Vénus ; l'une revêtue d'une cuirasse, et l'autre de la main du fameux sculpteur Arcésilaus : celle-ci peut fort bien être celle de deux médailles qui nous restent. Pline en parle au XXXV. liv. La première de ces deux statues peut être cette Vénus parfaitement belle, qui fut envoyée à César par Cléopatre. César paya cette galanterie par une autre ; il fit placer à côté de la déesse une belle statue de la reine d'Egypte, qui s'y voyait encore du temps d'Appien.

Ovide dit, que l'aqueduc de l'eau Appia passait sous ce temple, dont la situation est encore marquée par ces mots qui désignent le forum Caesaris : c'est-là, ajoute-t-il, que le jurisconsulte devient souvent la dupe de l'amour, et celui qui fait fournir aux autres des moyens de défense, n'en trouve aucun pour lui-même. Vénus, du milieu de son temple, rit de le voir dans ses piéges ; c'était tout-à-l'heure un présomptueux avocat, il ne veut maintenant être qu'un client soumis.

Subdita quà Veneris facto de marmore templo

Appias expressis aèra pulsat aquis.

....

Illo saepe loco capitur consultus amore,

Quique aliis cavit, non cavet ipse sibi.

....

Hunc Venus e templis quae sunt confinia, ridet

Qui modò patronus, nunc cupit esse cliens.

Le culte de Vénus genitrix s'étendit dans les provinces avec celui de Jules-César ; une inscription d'Ebora en Espagne, nous montre les décurions de la ville, érigeant un monument à César, et les dames portant un présent à sa mère.

DIVO JULIO LIB. JUL. EBORA OB. ILLIUS. IN. MUN. ET MUN. LIBERALITATEM EX D. D. D. QUOJUS. DEDICATIONE VENERI GENITRICI CAESTUM MATRONAE DONUM TULERUNT.

Ce fut dans les jeux qui se faisaient pour la première fois en l'honneur de Vénus genitrix, que parut pendant sept jours la fameuse comete, qui fut regardée par le peuple, comme le signe de l'apothéose de César. Jules-César ayant achevé le temple, avait, peu de jours avant sa mort, établi un collège de prêtres pour faire les jeux de la dédicace ; Octavien les fit célébrer ; et en mémoire de cette comete, il fit placer dans le même temple une statue d'airain de César avec la comete sur la tête ; ces jeux devinrent annuels, et les consuls furent chargés d'en faire la dépense.

Ce temple fut bâti l'an de Rome 708 ou quarante-cinq ans avant J. C. Il fut consumé ou du-moins fort endommagé dans l'incendie arrivée sous Néron. (D.J.)

TEMPLE DE LA VERTU ET DE L'HONNEUR, (Antiquité romaine) templum Virtutis et Honoris ; Marius le fit bâtir par l'architecte Mutius. Ce temple pourrait être mis au nombre des plus excellents ouvrages, s'il avait été fait de marbre, et que la magnificence de la matière eut répondu à la grandeur du dessein.

S. Augustin, en parlant de ce temple, fait entendre qu'on en peut tirer une belle moralité, à laquelle Vitruve donne encore matière par une particularité qu'il en cite, et que S. Augustin ne savait pas : c'est que ce temple n'avait point de posticum, ou de porte de derrière, comme la plupart des autres ; car cela nous apprend que non-seulement il faut passer par la vertu pour parvenir à l'honneur, mais que l'honneur oblige encore de repasser par la vertu, c'est-à-dire, d'y persévérer.

Le sénat fut assemblé dans le temple bâti par Marius à la Vertu et à l'Honneur, lorsqu'on voulut rappeler ce grand homme de son exil. Le sénatus-consulte qu'on fit à cet égard, fut rédigé en loi dans l'assemblée des centuries tenue au champ de Mars le 4 Aout de l'an 696, sous le consulat de C. Lentulus Spinter et de Q. C. Metellus Nepos. (D.J.)

TEMPLE DE VERTUMNE, (Antiquité romaine) je croirais bien que ce dieu champêtre avait plusieurs temples chez les Romains ; cependant l'histoire ne parle que de celui qu'on éleva en son honneur dans le marché de Rome où il avait aussi une statue, dont Ciceron dit, à l'occasion des rapines de Verrès : y a-t-il quelqu'un, qui dans le chemin qui conduit de la statue de Vertumne au grand cirque, n'ait trouvé sur chaque degré des marques de ton avarice ? (D.J.)

TEMPLE DE VESTA, (Antiquité grecque et romaine) son temple à Athènes était dans l'enceinte du prytanée, et l'on y conservait à l'honneur de la déesse un feu perpétuel, comme dans celui qu'elle avait à Rome, et dont nous allons parler. On le nommait aedes Vestae ; Numa lui fit bâtir ce fameux temple proche de son palais, au milieu du marché romain, entre le mont Palatin et le mont Capitolin ; c'est le sentiment de Denys d'Halicarnasse, l. II. sect. 65. et 76. C'est aussi dans ce même endroit que Plutarque met le temple de Vesta.

Horace le place sur le bord du Tibre opposé à l'autre bord du fleuve qui Ve se jeter dans la mer : nous avons Ve le Tibre, dit-il, repoussant avec furie ses eaux vers sa source, menacer d'engloutir le palais de Numa et le temple de Vesta.

Ire dejectum monumenta regis

Templaque Vestae.

ode 2, l. I.

Ovide met ce temple à un des bouts de la rue neuve, qui est joint au marché romain.

Quà nova romano nunc via juncta foro est.

Publius Victor met ce temple dans le huitième quartier où était le marché romain ; ces divers sentiments prouvent qu'il y avait à Rome plus d'un temple consacré à Vesta. Quant au plus célèbre de tous, j'entends celui qui fut construit par Numa ; l'entrée en était défendue aux hommes, et la déesse y était servie par les vestales ; c'était dans ce temple que Numa fonda un foyer de feu éternel, et sur lequel résida d'une manière sensible la majesté de la déesse. L'histoire et les médailles nous représentent ce temple de forme ronde ; toutes ses faces sont égales, dit Ovide ; il n'y a point d'angle tout-autour, et le dôme qui le couvre, le défend de la pluie :

Par facies templi : nullus procurrit in illis

Angulus, à pluvio vindicat imbre tholus.

On croit, dit Plutarque, que Numa Pompilius ne donna une forme ronde au temple qu'il fit bâtir à la déesse Vesta, que pour représenter la figure du monde universel, au milieu duquel les Pythagoriciens placent le siege du feu qu'ils appellent vesta, et disent être l'unité. Ovide donne en poète physicien, comme ferait M. de Voltaire, les raisons de la rondeur du temple de la déesse. Vesta, dit-il, est la même chose que la terre ; il y a pour l'une et pour l'autre un feu inextinguible, et la terre et le feu font connaître leur forme. La terre ressemble à une balle qui ne s'appuie sur rien ; son fardeau pesant se trouve suspendu ; l'air qui environne son globe, le presse également de tous côtés, tel au-moins qu'il nous est représenté dans une petite figure où l'art de Syracuse, c'est-à-dire, d'Archimède, nous a rendu l'immensité du ciel, etc.

Arte syracosiâ suspensus in aère clauso

Stat globus, immensi parva figura poli.

Ce qu'il y a de particulier, c'est qu'un lieu si saint et le centre même de la religion, n'était pas un temple dans toutes les formes, parce qu'il n'avait pas été consacré par les augures ; mais la cour ou l'enclos était proprement le temple, parce que les augures en avaient fait la consécration. Numa, dit Servius, voulut éviter par ce défaut d'inauguration, s'il est permis de parler ainsi, que le sénat ne s'y assemblât, ne senatus ibi haberi posset. Ce prince craignit les inconvénients que le tumulte de ces sortes d'assemblées pouvait occasionner dans une maison de filles du plus haut rang, dont la conduite était délicate, et devenait l'affaire de tout l'empire.

On ne sait pas bien encore, dit Denys d'Halicarnasse, ce qui est gardé si secrètement dans l'intérieur du temple, outre le feu sacré que tout le monde peut voir ; Quelques-uns, ajoute-t-il, ont osé avancer qu'indépendamment du feu sacré, il se trouve encore dans le temple de la déesse certaine chose dont la garde et la connaissance est réservée au seul pontife et aux seules vestales. La preuve qu'ils en apportent, c'est ce qui arriva pendant la première guerre punique. Le feu ayant pris au corps de l'édifice, les vestales tout éperdues se retirèrent en désordre ; et Lucius Caecilius Metellus, pontife, homme consulaire, qui après une victoire signalée avait triomphé des Carthaginois, et dans la pompe de son triomphe avait donné cent trente-huit éléphans en spectacle au peuple romain ; Lucius Metellus, dis-je, comptant pour rien le péril où s'il s'exposait, et sacrifiant sa vie au bien public, traversa cet incendie, pénétra jusqu'au fond du sanctuaire, et fut assez heureux pour sauver les choses sacrées qui allaient être réduites en cendres, ce qui lui valut les honneurs extraordinaires qui se lisent encore aujourd'hui sur la base de sa statue au capitole.

A cette vérité tout le monde mêla ses conjectures pour deviner ce secret de la république ; Denys d'Halicarnasse condamne leur curiosité comme contraire au respect que tout homme pieux doit aux choses divines ; mais nos savants n'ont pas été si scrupuleux que l'historien des antiquités romaines. Sans être entrés dans le sanctuaire du temple, ils ont eu l'art de dévoiler le mystère, et ont découvert que ce gage de la perpétuité de l'empire romain, ce pignus imperii qu'on gardait si religieusement et avec tant de secret dans le temple de Vesta, était le palladium ; il parait même par des passages d'Ovide, de Properce, de Pline et de Lucain, que sous les empereurs le voîle était levé ; cependant les Romains ne laissèrent échapper le secret, que quand ils virent leurs frontières assez fortes pour ne plus appréhender qu'on vint évoquer leur divinité protectrice, et dévouer leur ville, comme ils en avaient usé à l'égard de leurs ennemis.

C'est un des beaux temples de Rome consacrés à Vesta, que celui qui se nomme aujourd'hui l'église de S. Etienne située sur le bord du Tibre.

L'ordre de ce temple est corinthien ; les entre-colonnes n'ont qu'un diamètre et demi, et la hauteur des colonnes, y compris la base et le chapiteau, est de douze diamètres. Les bases n'ont point de plinthe, mais les marches où elles posent, leur en servent ; l'architecte a usé de cet artifice afin que l'entrée de son portique restât plus libre, parce que les colonnes y sont fort pressées. Le diamètre de la nef, en y comprenant l'épaisseur des murs, est égal à la hauteur des colonnes. Les chapiteaux sont taillés à feuilles d'olive. On n'y voit plus rien de la corniche ; mais Palladio la supplée dans le plan qu'il nous a donné de cet édifice, et en a ajouté une de son dessein. Les ornements de la porte et des fenêtres sont fort simples et de bon gout. Sous le portique et au-dedans du temple, les fenêtres sont soutenues par des cimaises qui vont regnant tout-autour ; elles forment comme une espèce de piédestal, ou d'embasement au mur et à la couverture. Ce mur sous le portique est fait d'une maçonnerie de pierres divisées par carreaux depuis la corniche de l'embasement jusqu'au sofite. Il est tout uni par-dedans, avec une autre corniche, à dos de celle qui est sous le portique d'où commence la voute.

A Tivoli, à cinq ou six lieues de Rome, sur la cascade du Téveronne, on voit un autre temple de Vestae dont la forme est ronde. Les habitants disent que c'était autrefois la demeure de la sibylle Tiburtine ; il est assez vraisemblable que c'était un temple dédié à la déesse Vesta ; cet édifice est d'ordre corinthien. Les entre-colonnes ont deux diamètres ; le pavé est élevé au-dessus du rez-de-chaussée à la hauteur d'un tiers des colonnes ; les bases n'ont point de socle ; le but de l'architecte, en le supprimant, a été de rendre la promenade sous le portique plus libre. Les colonnes sont précisément aussi hautes que le diamètre de la nef est large, et penchant en-dedans vers le mur du temple, de telle sorte que le vif du haut des colonnes tombe à plomb sur le vif du pied de leur fût en-dedans. Les chapiteaux sont taillés à fleur d'olive et très-bien exécutés, d'où l'on peut conjecturer que cette fabrique a été faite dans un siècle de gout. L'ouverture de la porte et des fenêtres est plus étroite par le haut que par le bas, ainsi que Vitruve enseigne qu'on le doit pratiquer. La maçonnerie de ce temple est de pierre tiburtine incrustée de stuc si proprement, qu'il semble être tout de marbre. C'est là la description qu'en fait Palladio. (D.J.)

TEMPLES DE LA VICTOIRE, (Antiquité grecque et romaine) Pausanias nous apprend que cette divinité avait plusieurs temples dans la Grèce, et Tite-Live parle de ceux qu'elle avait à Rome ; il faut consulter ces deux auteurs ; les Romains lui bâtirent le premier temple durant la guerre des Samnites, sous le consulat de Lucius Posthumus et de M. Attilius Regulus. (D.J.)

TEMPLES DE VULCAIN, (Antiq. égypt. et rom.) Le temple de Vulcain où le sénat s'assemblait, était placé à côté de celui de la Concorde ; ils étaient tous deux situés dans le lieu appelé par les anciens, velia, à vellendis gregibus, qui, selon Varron, s'étendait depuis l'arc de Titus, jusqu'à celui de Constantin. Tatius, au rapport de Denis d'Halycarnasse, lui fit bâtir ce temple hors de l'enceinte de la ville, les augures ayant déclaré que le dieu du feu ne devait pas être dans la ville même.

Mais parmi les anciens peuples, les Egyptiens sont ceux qui ont le plus honoré ce dieu : il avait à Memphis ce temple magnifique décrit par Hérodote, et cette statue colossale renversée, qui était haute de soixante et quinze pieds, sur laquelle Amasis fit élever deux autres statues, chacune de vingt pieds de hauteur, et du même marbre que la grande ; cependant l'intérieur de cet édifice, bien loin de mériter l'admiration de ceux qui y entraient, ne fit qu'exciter les mépris et les railleries de Cambyse, qui se mit à éclater de rire en voyant la statue de Vulcain, et celles des autres dieux, semblables à des pygmées, lesquels véritablement devaient faire un contraste bien ridicule avec les colosses qui étaient dans les vestibules dont on vient de parler. (D.J.)

TEMPLES DES CHRETIENS, (Relig. chrétienne) au commencement du christianisme, les chrétiens n'avaient pour temples et pour autels que des cimetières, et des maisons particulières, où ils s'assemblaient. Ce fut sur ces cimetières qu'ils bâtirent leurs premières églises, lorsque Constantin leur en eut donné la liberté.

Ils nommèrent ces églises, titres, tituli ; oratoires, domus oratoriae ; dominiques, dominicae ; martyres, martyria ; conciles des saints, concilia sanctorum ; basiliques, basilicae : tous ces mots s'entendent aisément ; mais Licinius qui était en guerre contre l'empereur Constantin, ordonna d'abattre, en orient, l'an 379. de Jésus-Christ, la plupart de ces nouvelles églises. L'an 484, Huneric, roi des Vandales, les fit fermer en Afrique ; cependant elles se multiplièrent avec l'accroissement du christianisme, surtout dans les siècles d'ignorance ; voici en général quelle en était la disposition.

On les tournait vers l'orient, symbole de la lumière ; la porte était précédée d'un vestibule, où se tenaient les pénitens, et à l'entrée une grande place pour les laïques ; c'est ce que nous appelons la nef ; il y avait ensuite un lieu nommé sancta, où les prêtres se plaçaient, c'est le chœur ; et enfin le sancta sanctorum, qui est cette enceinte de l'autel que l'on nomme aujourd'hui le sanctuaire ; il y avait de plus dans les églises, certains endroits particuliers pour prier ; c'est ce que l'on nomme aujourd'hui des chapelles ; on y faisait encore ce qu'on appelle une sacristie, où l'on serrait les ornements et les vases sacrés.

On mettait plusieurs autels dans la même église, car comme on y enterrait les martyrs, on élevait un autel sur le sépulcre des plus distingués. Au-devant de la porte était un grand vaisseau plein d'eau, dont les prêtres, et ceux qui venaient pour prier, se lavaient les mains et le visage : voilà l'origine de l'eau benite.

Il faut encore remarquer qu'il y avait dans chaque église des endroits séparés par des planches, les uns destinés pour les hommes, et les autres pour les femmes ; le côté droit était pour les femmes, et le côté gauche pour les hommes, parce que le côté gauche, dit Baronius, était censé le plus noble dans l'église.

Enfin, les mendiants se tenaient dans le vestibule, parce qu'il leur était défendu d'entrer dans l'église, pour ne point causer, en demandant l'aumône, de distractions aux fidèles qui priaient.

Quant aux ornements des églises, il y avait dans chacune des lampes et des vases sacrés, qu'on fit d'argent, et même d'or, à mesure que le christianisme s'accrut et s'enrichit. Il parait par l'hymne de Prudence, sur S. Cassien, que Paulin, évêque de Nôles, dans la province du royaume de Naples, orna de peintures les oratoires de S. Félix, pour instruire les paysans qui nouvellement convertis, se rendaient dans ces oratoires ; c'est ainsi qu'il parait que dès le cinquième siècle, les images furent introduites dans les églises.

Le lecteur peut consulter sur tous ces détails, Hospinianus, de templis, Bingham, antiquités ecclésiastiques, en anglais ; et George Whéler, descript. des églises des anciens chrétiens. (D.J.)

TEMPLES DES CHINOIS, (Histoire de la Chine) parmi les édifices publics où les Chinois font paraitre le plus de somptuosité, on ne doit pas obmettre les temples, ou les pagodes, que la superstition des princes et des peuples a élevés à de fabuleuses divinités : on en voit une multitude prodigieuse à la Chine ; les plus célèbres sont bâtis dans les montagnes.

Quelque arides que soient ces montagnes, l'industrie chinoise a suppléé aux embellissements et aux commodités que refusait la nature ; des canaux travaillés à grands frais, conduisent l'eau des montagnes dans des bassins destinés à la recevoir ; des jardins, des bosquets, des grottes pratiquées dans les rochers, pour se mettre à l'abri des chaleurs excessives d'un climat brulant, rendent ces solitudes charmantes.

Les bâtiments consistent en des portiques pavés de grandes pierres carrées et polies, en des salles, en des pavillons qui terminent les angles des cours, et qui communiquent par de longues galeries ornés de statues de pierre, et quelquefois de bronze ; les toits de ces édifices brillent par la beauté de leurs briques, couvertes de vernis jaune et verd, et sont enrichis aux extrémités, de dragons en saillie de même couleur.

Il n'y a guère de ces pagodes où l'on ne voie une grande tour isolée, qui se termine en dôme : on y monte par un escalier qui règne tout-au-tour ; au milieu du dôme est d'ordinaire un temple de figure carrée ; la voute est souvent ornée de mosaïque, et les murailles sont revêtues de figures de pierres en relief, qui représentent des animaux et des monstres.

Telle est la forme de la plupart des pagodes, qui sont plus ou moins grands, selon la dévotion et les moyens de ceux qui ont contribué à les construire : c'est la demeure des bonzes, ou des prêtres des idoles, qui mettent en œuvre mille supercheries, pour surprendre la crédulité des peuples, qu'on voit venir de fort loin en pélérinage à ces temples consacrés à la superstition ; cependant comme les Chinois, dans le culte qu'ils rendent à leurs idoles, n'ont pas une coutume bien suivie, il arrive souvent qu'ils respectent peu et la divinité et ses ministres.

Mais le temple que les Chinois nomment le temple de la Reconnaissance, mérite en particulier que nous en disions quelque chose. Ce temple est élevé sur un massif de brique qui forme un grand perron, entouré d'une balustrade de marbre brut : on y monte par un escalier de dix à douze marches, qui règne tout le long ; la salle qui sert de temple, a cent pieds de profondeur, et porte sur une petite base de marbre, haute d'un pied, laquelle en débordant, laisse tout-au-tour une banquette large de deux ; la façade est ornée d'une galerie, et de quelques piliers ; les toits, (car selon la coutume de la Chine, souvent il y en a deux, l'un qui nait de la muraille, l'autre qui la couvre), les toits, dis-je, sont de tuiles vertes, luisantes et vernissées ; la charpente qui parait en dedans, est chargée d'une infinité de piéces différemment engagées les unes dans les autres, ce qui n'est pas un petit ornement pour les Chinois. Il est vrai que cette forêt de poutres, de tirants, de pignons, de solives, qui règnent de toutes parts, a je ne sais quoi de singulier et de surprenant, parce qu'on conçoit qu'il y a dans ces sortes d'ouvrages, du travail et de la dépense, quoiqu'au fond cet embarras ne vient que de l'ignorance des ouvriers, qui n'ont encore pu trouver cette simplicité qu'on remarque dans nos bâtiments européens, et qui en fait la solidité et la beauté : la salle ne prend le jour que par ses portes ; il y en a trois à l'orient, extrêmement grandes, par lesquelles on entre dans la fameuse tour de porcelaine, et qui fait partie de ce temple. Voyez TOUR DE PORCELAINE. (D.J.)

TEMPLES DES GAULOIS, (Antiq. gauloises.) Les Gaulois n'avaient anciennement d'autres temples que les bois et les forêts, ni d'autres statues de leurs dieux, ni d'autres autels, que les arbres de ces bois ; on a cent preuves de cette vérité, et César en effet ne dit pas un mot de leurs temples, ni des statues de leurs dieux. On objecte que Suétone observe que ce même Jules César pilla les temples des Gaulois, qui étaient remplis de trésors. On objecte encore que Strabon fait aussi mention des temples des Gaulois ; mais on peut répondre que ces auteurs parlent le langage de leur nation, et conformément à leurs préjugés.

Il est vrai, dit l'abbé Banier, que les Gaulois avaient des lieux consacrés spécialement au culte de leurs dieux ; que c'était dans ces lieux que se pratiquaient les cérémonies religieuses, qu'on y offrait les sacrifices, etc. mais ces temples, si on veut les appeler ainsi, n'étaient pas des édifices comme ceux des Grecs et des Romains : c'étaient des bois, c'étaient, à Toulouse, les bords d'un lac consacré par la religion, qui servaient de temples. Dans ces lieux, on renfermait les trésors : ainsi les auteurs que j'ai cités ont eu raison en un sens, de dire que César avait pillé les temples des Gaulois, c'est-à-dire, les lieux qui leur en servaient ; c'est suivant cette distinction, qu'il faut entendre ce que dit Strabon, que c'était dans leurs temples que les Gaulois crucifiaient les hommes qu'ils immolaient à leurs dieux, c'est-à-dire dans ces forêts mêmes qui leur servaient de temples ; car comment seraient entrés dans des édifices, quelque spacieux qu'on les supposât, ces colosses d'osier dans lesquels ils mettaient les criminels et les captifs, et quel désordre n'y aurait pas causé le feu qui les consumait ?

Les Semnons, Celtes d'origine, et qui suivaient la même religion que les Gaulois, n'avaient aussi d'autre temple qu'une forêt : personne, dit Tacite, n'a son entrée dans cette forêt, s'il ne porte une chaîne, marque du domaine suprême que le dieu a sur lui. Ce ne fut que depuis l'entrée des Romains dans les Gaules, qu'on commença à y bâtir des temples ; l'usage même en fut rare, et l'on continua malgré ces nouveaux temples, à sacrifier dans les forêts, et à représenter les dieux du pays, par des troncs d'arbres ; pratique qui subsista dans quelques cantons des Gaules longtemps après que le christianisme y eut triomphé de l'idolâtrie, et on en découvrait encore quelques restes du temps de Charlemagne.

Enfin les Gaulois s'accoutumant aux mœurs et aux usages de leurs vainqueurs, élevèrent un grand nombre de vrais temples, où furent déposées les statues qui représentaient également les anciens dieux du pays, et ceux des Romains. Les antiquaires, et surtout le père dom Bernard Montfaucon, ont fait dessiner les restes de plusieurs de ces temples, qu'on peut voir dans leurs ouvrages. On remarque qu'ils sont presque tous de figure ronde ou octogone, comme si ces deux figures étaient les plus propres à renfermer les maîtres du monde. (D.J.)

TEMPLES DES JAPONOIS, (Idolat. asiatiq.) on doit distinguer dans le Japon les temples des Sintoïstes et ceux des Budsoïstes.

Les sectateurs de la religion du Sintos appellent leurs temples mia, mot qui signifie la demeure des âmes immortelles, et ils nomment siusja, la cour du mia, avec tous les bâtiments qui en dépendent.

Leurs mias ont beaucoup de rapport aux fana des anciens Romains ; car généralement parlant, ce sont des monuments élevés à la mémoire des grands hommes. Les mias sont situés dans les lieux les plus riants du pays, sur le meilleur terrain, et communément au-dedans ou auprès des grandes villes. Une allée large et spacieuse, bordée de deux rangs de cyprès extrêmement hauts, conduit à la cour du temple, où se trouvent quelquefois plusieurs mias ; et dans ce cas-là l'allée dont on vient de parler mène tout droit aux principaux mias ; la plupart sont situés dans un bois agréable, quelquefois sur le penchant d'une colline tapissée de verdure, où l'on monte par des marches de pierre.

L'entrée de l'allée qui conduit au temple, est distinguée du grand chemin ordinaire par un portail de pierre ou de bois d'une structure fort simple ; deux piliers posés perpendiculairement soutiennent deux poutres mises en travers, dont la plus haute est, par manière d'ornement, courbée vers le milieu, et s'élève aux deux extrémités. Entre ces deux poutres il y a une table carrée, qui est ordinairement de pierre, où le nom du dieu à qui le mia est consacré, est écrit en caractères d'or. Quelquefois on trouve une autre porte faite de la même manière, devant le mia, ou devant la cour du temple, s'il y a plusieurs mias dans une cour ; à quelque distance du mia, il y a un bassin de pierre plein d'eau, afin que ceux qui vont faire leurs dévotions puissent s'y laver. Tout contre le mia, il y a un grand coffre de bois pour recevoir les aumônes.

Le mia est un bâtiment simple, sans ornement ni magnificence, communément carré, fait de bois, et dont les poutres sont grosses et assez propres. La hauteur n'excède guère celle de deux ou trois hommes, et la largeur n'est que de deux ou trois brasses. Il est élevé d'environ une verge et demi au - dessus de la terre, et soutenu par des piliers de bois. Autour du mia il y a une petite galerie où l'on monte par quelques degrés.

Le frontispice du mia est d'une simplicité qui répond au reste ; il consiste en une ou deux fenêtres grillées, qui découvrent le dedans du temple à ceux qui viennent faire leurs dévotions, afin qu'ils se prosternent devant le lieu sacré ; il est toujours fermé, et souvent il n'y a personne qui le garde.

Le toit est couvert de tuiles, de pierre ou de coupeaux de bois, et il s'avance beaucoup de chaque côté pour couvrir cette espèce de galerie qui règne tout-autour du temple. Il diffère de celui des autres bâtiments, en ce qu'il est recourbé avec plus d'art, et composé de plusieurs couches de poutres, qui s'avançant par-dessous, ont quelque chose de fort singulier. A la cime du toit, il y a quelquefois une poutre plus grosse et plus forte que les autres, posée en long, et à ses extrémités deux autres poutres toutes droites qui se croisent.

Cette structure est faite à l'imitation, aussi-bien qu'en mémoire de celle du premier temple ; et quoiqu'elle soit fort simple, elle est néanmoins très-ingénieuse et presque inimitable, en ce que les poids et la liaison de toutes ces poutres entrelacées, sert à affermir tout l'édifice.

Sur la porte du temple il pend une grosse cloche plate, qui tient à une corde longue, forte et pleine de nœuds : ceux qui viennent faire leurs dévotions frappent la cloche, comme s'ils voulaient avertir les dieux de leur arrivée : mais cette coutume n'est pas ancienne, et on ne la pratiquait pas autrefois dans la religion du Sintos ; elle a été empruntée du Budso, ou de la religion idolâtre étrangère.

Dans le temple, on voit du papier blanc suspendu et coupé en petits morceaux, et par-là on veut donner au peuple une idée de la pureté du lieu. Quelquefois on place un grand miroir au milieu du temple, afin que les dévots puissent s'y voir et faire réflexion, que comme ils aperçoivent très-distinctement les taches de leur visage dans ce miroir, de même les taches de leur cœur les plus secrètes paraissent à découvert aux yeux des dieux immortels.

Il y a un grand nombre de ces temples, qui n'ont aucune idole ou image du Cami auquel ils sont consacrés ; et en général l'on peut dire qu'ils n'ont point d'images dans leurs temples, à moins que quelque incident particulier ne les engage à y en mettre ; tels par exemple, que la grande réputation et la sainteté du sculpteur, ou quelque miracle éclatant qu'aura fait le Cami. Dans ce dernier cas, on place dans le lieu le plus éminent du temple, vis-à-vis de l'entrée, ou du frontispice grillé, une châsse appelée fonga, c'est-à-dire, le véritable temple, et devant cette châsse les adorateurs du Cami se prosternent ; l'idole y est enfermée, et on ne l'en tire qu'à la grande fête du Cami, qui ne se célèbre qu'une fois tous les cent ans. On enferme aussi dans cette châsse des reliques du même dieu, comme ses os, ses habits, ses épées, et les ouvrages qu'il a travaillés de ses propres mains.

Le principal temple de chaque lieu a plusieurs chapelles qui en dépendent, qui sont ornées par-dehors de corniches dorées. Elles sont soutenues par deux bâtons pour être portées avec beaucoup de pompe à la grande fête du dieu auquel le temple est consacré.

Les ornements du temple sont ordinairement des dons qui ont été faits en conséquence de quelque vœu, ou par d'autres raisons pieuses.

Les temples du Sintos sont desservis par des laïques, qui sont entretenus ou par des legs, ou par des subsides, ou par des contributions charitables. Ces desservants du temple sont soumis pour le temporel aux juges impériaux des temples que nomme le monarque séculier.

Quant à ce qui regarde les temples des budsdos, c'est-à-dire, des sectateurs du paganisme étranger reçu au Japon, nous nous contenterons de remarquer que ces temples ne sont pas moins magnifiques que ceux des sintaistes. Ils sont également remarquables par leur grandeur, par leur situation charmante, et par leurs ornements : mais les ecclésiastiques qui les desservent, n'ont ni processions, ni spectacles publics, et ne se mêlent d'autre chose que de faire leurs prières dans le temple aux heures marquées. Leur supérieur relève d'un général qui réside à Miaco. Ce général est à son tour soumis aux commissaires de l'empereur, qui sont protecteurs et juges de tous les temples de l'empire ; voyez de plus grands détails dans Kaempfer. J'ajouterai seulement que tous les temples du Japon ressemblent beaucoup aux pagodes des Chinois ; que ces temples sont extrêmement multipliés, et que leurs prêtres sont sans nombre ; pour prouver ce dernier article, il suffira de dire qu'on compte dans Miaco et aux environs 3894 temples, 37093 prêtres pour y faire le service. (D.J.)

TEMPLES DES INDIENS, les Européens les nomment pagodes. Voyez PAGODE.

TEMPLES DES JUIFS MODERNES, voyez SYNAGOGUE.

TEMPLES DES MAGES, (Histoire des Perses) c'est Zoroastre qui les éleva. Il fleurissait pendant que Darius Hystaspe occupait le trône de Perse, 486 ans avant J. C. Après être devenu le plus grand mathématicien et le plus grand philosophe de son siècle, il reforma le magisme, et établit sa nouvelle religion chez les Perses, les Parthes, les Bactriens, les Chowaresmiens, les Saces, les Medes, et dans une partie des Indes.

Avant lui les Mages dressaient des autels pour y conserver leur feu sacré en plein air ; mais la pluye, les tempêtes, les orages, éteignaient souvent ce feu, et interrompaient le culte ; Zoroastre pour remédier à cet inconvénient, ordonna d'ériger partout des temples ; et pour rendre plus vénérable le feu des temples qu'il avait érigés, il feignit d'en avoir apporté du ciel, et le mit sur l'autel du premier temple dans la ville de Xis en Médie, d'où on dit que le feu fut répandu dans tous les autres temples des Mages.

Ayant divisé les prêtres en trois ordres, il fit bâtir trois sortes de temples, dont le principal fut élevé à Balch, où il résida lui-même en qualité d'archimage. Mais après que les mahométants eurent ravagé la Perse dans le VIIe siècle, l'archimage fut obligé de se retirer dans le Kerman, sur les bords de l'Océan méridional vers les Indes, et c'est-là que jusqu'ici ses successeurs se sont maintenus.

Le temple de Kerman n'est pas moins respecté de nos jours de ceux de cette secte, que celui de Balch l'était autrefois. (D.J.)

TEMPLES DES MAHOMETANS, voyez MOSQUEE.

TEMPLES DES PERUVIENS, (Antiq. péruviennes) leurs temples étaient consacrés au Soleil et à la Lune. Garcilasso de la Vega nous a donné la description de celui de Cusco, capitale du Pérou ; on sera peut-être bien-aise d'en trouver ici le précis.

Le grand autel était du côté de l'Orient, et le toit de bois fort épais, couvert de chaume par-dessus, parce qu'ils n'avaient point l'usage de la tuîle ni de la brique. Les quatre murailles du temple, à les prendre du haut en-bas, étaient lambrissées de plaques d'or. Sur le grand autel on voyait la figure du Soleil, marquée sur une plaque d'or ; cette figure s'étendait presque d'une muraille à l'autre ; elle échut par le sort à un gentilhomme castillan, qui la joua, et la perdit dans une nuit.

On peut juger par cet échantillon qui échut en partage à cet officier, combien était grand le trésor que les Espagnols trouvèrent dans ce temple. Aux deux côtés de l'image du Soleil, étaient les corps de deux de leurs yncas, artistement embaumés, et assis sur des trônes d'or, élevés sur des plaques de même métal.

Les portes de ce temple étaient toutes couvertes de lames d'or. A côté du temple on voyait un cloitre à quatre faces, et dans sa plus haute enceinte, une couronne d'or fin, qui pouvait bien avoir une aune de large. Tout-autour de ce cloitre regnaient cinq pavillons en carré, couverts en forme de pyramide.

Le premier était destiné à loger la Lune femme du Soleil ; ses portes avec son enclos étaient tapissés de plaques d'argent, pour donner à connaître par la couleur blanche, que c'était l'appartement de la Lune, laquelle était représentée sur une plaque d'argent, et avait le visage d'une femme.

L'appartement le plus proche de celui de la Lune était celui de Vénus, des Pléiades, et d'autres étoiles. Ils honoraient extrêmement l'astre de Vénus, parce qu'ils le regardaient comme le messager du Soleil, allant tantôt devant lui, tantôt après. Ils ne respectaient pas moins les Pléiades à cause de la disposition de ses étoiles, qui leur semblaient toutes égales en grandeur.

Pour les autres étoiles en général, ils les appelaient les servantes de la Lune, et elles étaient logées près de leur dame, pour obéir commodément à ses ordres. Cet appartement et son portail étaient couverts de plaques d'argent comme celui de la Lune. Son toit était semé d'étoiles d'argent de différentes grandeurs.

Le troisième appartement était consacré à l'éclair, au tonnerre et à la foudre. Ils ne regardaient point ces trois choses comme des dieux, mais comme des génies subordonnés au Soleil, et toujours prêts à exercer sa justice sur la terre.

Ils consacraient à l'arc-en-ciel le quatrième appartement, parce que ce météore procede du Soleil. Cet appartement était tout enrichi d'or, et sur les plaques de ce métal, on voyait représentées au naturel avec toutes ses couleurs, dans l'une des faces du bâtiment, la figure de l'arc-en-ciel qui s'étendait d'une muraille à l'autre.

Le cinquième et dernier appartement du temple était celui du grand sacrificateur, et des autres prêtres qui assistaient au service du temple, et qui devaient être tous du sang royal des Yncas. Cet appartement enrichi d'or, comme les autres, depuis le haut jusqu'au bas, n'était destiné ni pour y manger, ni pour y dormir, mais servait de salle pour y donner audience, et y délibérer sur les sacrifices qu'il fallait faire, et sur toutes les autres choses qui concernaient le service du temple. (D.J.)

TEMPLES, (Histoire des Arts) après avoir parlé des temples en littérature, il faut terminer ce vaste sujet par considérer leur mérite et leurs défauts, du côté des beaux arts. Salomon fit construire dans la terre promise un temple magnifique, qui fut l'ornement et la consolation de Jérusalem. Depuis cette époque, le peuple choisi a toujours soupiré pour la montagne de Sion ; mais la décoration de cet édifice n'est pas assez connue, pour que nous puissions la faire entrer dans l'histoire des gouts.

On ne saurait remonter en ce genre avec certitude, au-delà des Grecs ; l'ouvrage dogmatique le plus ancien que nous ayons dans cet art, est celui de Vitruve, qui vivait sous Auguste, et qui ne dit presque rien des monuments qui avaient pu précéder ceux de la Grèce.

Les Grecs n'ornèrent jamais d'enjolivements de sculpture l'intérieur de leurs temples ; les murs étaient élevés perpendiculairement, et voilà tout ; l'enceinte avait la figure d'un parallélogramme régulier ; les portes et les frontons étaient sur les deux petits côtés opposés ; il n'y avait presque que le seul temple de la Vertu qui n'eut point de porte de derrière.

Ces temples qui dans leur simplicité intérieure, pouvaient laisser à l'esprit, le recueillement qu'il doit apporter dans son humiliation ; ces temples, dis-je, étaient au-dehors d'une architecture magnifique. La plupart étaient environnés de péristiles à plusieurs rangs de colonnes ; les deux petits côtés portaient des frontons ; sur le tympan de ces frontons, on représentait en bas-relief des combats, et des sacrifices.

Toutes les colonnes étaient à une même hauteur, et on ne les plaça jamais les unes sur les autres ; les temples les plus simples n'avaient que quatre colonnes, c'est-à-dire, deux sur le devant, et deux sur le derrière ; les temples plus ornés étaient entourés de péristiles à un ou deux rangs de colonnes. La profondeur de ces péristiles ne pouvait produire d'obscurité incommode ; car ces temples n'étaient point éclairés par les côtés ; ils recevaient le jour, ou parce qu'ils étaient découverts, ou par les portes, ou par des croisées pratiquées au-dessus de l'édifice. Quelquefois enfin, le temple était séparé des colonnes ; tel était à Athènes celui de Jupiter Olympien ; entre le péristîle et le temple, il y avait comme une cour.

Dans les temples de Jupiter, on employait l'ordre dorique, qui pouvait rendre la majestueuse simplicité du maître des dieux. On faisait ceux de Junon d'ordre ionique, dont l'élégance pouvait convenir à une déesse ; le temple de Diane d'Ephèse avait un double péristile, et était selon quelques auteurs, de ce même ordre ionique, qui par sa légèreté pouvait avoir été choisi comme étant le plus convenable à la divinité des chasseurs. Enfin, on doit dire à la louange des Grecs, qu'ils furent toujours très-attentifs dans la construction de leurs temples, à faire choix des ordres qui convenaient le mieux aux différents caractères des divinités.

Les Romains qui dans tous les arts, s'étaient efforcés de suivre les traces des Grecs, surent quelquefois égaler leurs maîtres dans l'Architecture. Les richesses immenses de l'empire laissaient aux artistes qui s'y rendaient de toutes parts, la facilité de se livrer à la beauté de leurs compositions, ou des modèles de la Grèce ; une sorte d'élévation d'ame, qui portait les Romains à faire élever de superbes édifices ; une politique sage, qui encourageait la vertu et les talents par des arcs de triomphe, ou par des statues ; en un mot, toutes ces vues de grandeur, multiplièrent étonnamment des monuments respectables, que le temps ni la barbarie n'ont pu détruire encore entièrement.

Les temples romains, quoique plus grands et plus magnifiques que ceux de la Grèce, avaient à-peu-près les mêmes décorations extérieures. Ceux de Jupiter foudroyant, du ciel, de la terre, et de la lune, étaient découverts. Pour les dieux champêtres, on construisait des grottes dans le goût rustique. Au milieu de ces temples, on plaçait la statue du dieu qu'on voulait honorer ; au pied de la statue, était un autel pour les sacrifices ; les autels des dieux célestes étaient fort exhaussés ; ceux des dieux terrestres, étaient un peu plus bas ; et ceux des dieux infernaux, étaient enfoncés.

Les Romains eurent aussi des basiliques d'une belle architecture ; c'étaient des lieux publics destinés à assembler le peuple, lorsque les rois ou les principaux rendaient la justice. Ces édifices étaient ornés intérieurement par plusieurs rangs de colonnes. Lorsqu'on eut commis à de petits magistrats le soin et l'emploi de juges, les marchands commencèrent à fréquenter les basiliques ; enfin, ces édifices furent destinés à célébrer les mystères des nouveaux chrétiens.

Dès que le Christianisme eut pris faveur, il abandonna les basiliques, pour décorer intérieurement les églises de son culte ; et ces ornements intérieurs dont on les chargea, servirent de modèle pour toutes celles qu'on fit construire dans la suite. On s'éloigna de la simplicité intérieure des temples antiques ; on n'eut plus d'attention à conserver dans des maisons d'adoration, une sorte de dignité majestueuse, de laquelle les idolâtres ne s'étaient jamais éloignés. Dans la Grèce, il n'y avait qu'un ou deux temples, dont l'intérieur fût orné par des colonnes ; mais ces temples n'étaient point fameux, et ne méritent pas de faire d'exception.

Un temple grec était dans la simplicité de quatre murs élevés perpendiculairement ; il était entouré de colonnes toutes égales, et qui soutenaient un même entablement. D'un premier regard, on ne disait point comme dans le gothique, par quelle adresse étonnante a-t-on pu élever un édifice si peu soutenu, tout découpé à jour, et qui cependant dure depuis plusieurs siècles ? Mais plutôt l'esprit se reposant dans la solidité apparente et réelle de toutes les parties, s'occupait agréablement à développer les sages ressources que l'art avait su se faire, pour mettre un certain accord entre des beautés constantes, et qui à chaque fois qu'on les voyait, savaient produire une nouvelle satisfaction.

Lors du renouvellement des arts et des sciences, le goût gothique se trouva généralement répandu dans l'Architecture ; les Artistes ne purent employer les beautés de l'antique, qu'en les rapprochant de la dégradation, que l'instinct habituel faisait applaudir. Ainsi, en conservant le fond de l'architecture des Goths, on chercha à y introduire les plus belles proportions des anciens.

Dans la construction des églises modernes, on a donné au plan la forme d'une croix ; on a réservé tous les ornements pour l'intérieur. On a ouvert plusieurs portes ; on a fait des bas côtés ; il y a eu des fenêtres sur toute la longueur et à toute hauteur ; et c'est ce qu'on ne voyait point aux temples des Grecs ; mais aussi on a mis le cœur et la nef dans une même direction ; on a supprimé les faisceaux des colonnes, pour n'en admettre qu'un seul ordre avec un entablement régulier ; les vitres ont été laissées dans leur transparence ; les ornements n'ont été employés qu'avec économie, et ce sont-là tout autant de corrections des erreurs gothiques.

Les modernes, ajoutera quelqu'un, pratiquent encore de belles décorations ; j'en conviens : mais elles sont rarement à leur place. Ainsi, quoique plus rapprochés en apparence des Grecs, que ne l'étaient les Goths, nous pourrions à certains égards, nous en être fort éloignés. Je le crois d'abord par la vérité du fait ; en second lieu, parce que nous nous en croyons plus près ; enfin, parce que nous sommes venus après les Goths, et que la succession des gouts pourrait nous avoir détourné de la pureté primitive.

Quoiqu'il ait paru de temps à autres des artistes très-habiles, avec un peu d'attention, on ne peut méconnaître la dégradation du gout, et cette fatalité qui a toujours interrompu l'esprit dans sa marche. Dans tous les arts, il a fallu pendant longtemps, se trainer dans la carrière fatigante et incertaine des essais mal conçus, avant que de franchir l'intervalle immense qui peut conduire à quelque perfection. Lorsque l'esprit a atteint à quelques beautés vraies et constantes, rarement sait-il s'y reposer. De fausses subtilités se présentent ; on croit en s'y abandonnant, renchérir sur la belle simplicité de la nature ; et les arts retombent dans la période des erreurs, que l'imbécillité d'un instinct perverti fait néanmoins applaudir.

L'architecture des temples mahométants n'est pas propre à rectifier notre goût ; car ce sont des ouvrages communément tout ronds avec plusieurs tours. Quelques-unes de ces tours qui sont à la mosquée de Médine, où est le tombeau de Mahomet, sont torses, non pas cependant comme nos colonnes, dont les spires sont dans différents plans ; ce sont plutôt comme des courbes, qui rampent autour de ces tours circulaires. Cette figure des temples mahométants, aux tours près, est celle que les anciens avaient constamment employée dans les temples de Vénus. Se serait-t-on asservi à cette similitude, parce que le ciel de Mahomet est celui de la déesse des plaisirs ? (Le chevalier DE JAUCOURT.

TEMPLES DES SIAMOIS, (Idolat. asiat.) Voyez SIAM. (Géographie moderne)

TEMPLE DE LA GLOIRE, (Morale) le temple de la gloire est une belle expression figurée qui peint la haute considération, et pour ainsi dire le culte que méritent ceux qui se sont rendus célèbres par de grandes et de belles actions.

La gloire est une illustre et large renommée de plusieurs et grands bienfaits exercés sur notre patrie, ou sur toute la race du genre humain ; telle est la belle définition qu'en donne Ciceron ; ce n'est pas, ajoute-t-il, le vain souffle d'une faveur populaire, ni les applaudissements d'une imbécile multitude que les sages dédaignent, qui constitue la place dans le temple de la gloire ; mais c'est l'approbation unanime des grandes actions, approbation donnée par tous les honnêtes-gens, et par le suffrage incorruptible de ceux qui peuvent juger de l'excellence du mérite, car des témoignages de cette espèce répondent toujours à la vertu, comme l'écho répond à la voix.

Puisque la vraie gloire est la récompense générale des belles actions, on conçoit sans peine qu'elle sera chère aux gens de bien, et qu'ils la préféreront à toute autre. Ceux qui y aspirent, ne doivent point attendre pour prix de leurs travaux le plaisir des sens ni la tranquillité de la vie ; au contraire, ils doivent sacrifier leur propre tranquillité pour assurer celle des autres, s'exposer aux tempêtes et aux dangers pour le bien public, soutenir des combats avec ceux qui veulent le détruire, avec les audacieux, et même avec les plus puissants.

Ils doivent marcher dans cette carrière par amour pour la vertu, et non pour captiver l'affection et les louanges d'un peuple volage. Ceux qui sont touchés de la vaine gloire, disent, comme Philippe : " ô Athéniens, si vous saviez tout ce que je fais pour être loué de vous ". Mais ceux qui ne goutent que la vraie gloire, disent avec Socrate : " ô Athéniens, ce n'est pas pour être loué de vous que je suis le pénible chemin de la vertu, c'est pour la vertu seule ".

Voilà les notions que Ciceron inculque pour engager les hommes à tâcher de mériter une place dans le temple de la gloire, dont il avoue qu'il était amoureux ; eh quel amour peut être mieux placé ? Cette passion est surement un des plus nobles principes qui puissent enflammer une belle âme. Elle est plantée par Dieu dans notre nature pour la dignifier, si je puis parler ainsi, et elle se trouve toujours la plus forte dans les âmes sublimes. C'est à elle que nous devons les grandes et admirables choses dont parle l'histoire dans tous les âges du paganisme.

Il n'y a peut-être point d'exemple qu'aucun homme sensible aux périls de son pays, n'ait été porté à le servir par la gloire qu'il acquerrait. Donnez-moi un enfant que la gloire échauffe, disait Quintilien, et je répondrai du succès de mes leçons. Je ne sai, dit Pline, si la postérité daignera jeter quelques regards sur moi ; mais je suis sur d'en mériter quelque chose, non pas par mon esprit et par quelques faibles talents, ce serait pur orgueil ; mais par le zèle et par le respect que je lui ai toujours voué.

Il ne paraitra point étrange, que les plus sages des anciens aient considéré la gloire comme la plus grande récompense d'une belle vie, et qu'ils aient poussé ce principe aussi loin qu'il était possible, quand on réfléchira que le grand nombre d'entr'eux n'avait pas la moindre notion d'aucune autre récompense ; si quelques-uns goutaient l'opinion d'un état à venir de félicité pour les gens vertueux, ils la goutaient plutôt comme une chose désirable, que comme une opinion fondée ; c'est pour cela qu'ils s'efforçaient de tenir leur gloire et leur immortalité des suffrages de leurs descendants ; ainsi par une fiction agréable, ils envisageaient cette renommée à venir, comme une propagation de leur vie, et une éternisation de leur existence ; ils n'avaient pas une petite joie d'imaginer, que si ce sentiment n'atteignait pas jusqu'à eux, du-moins il s'étendrait aux autres, et qu'ils feraient encore du bien étant morts, en laissant l'exemple de leur conduite à imiter au genre humain.

Tous ces grands hommes ne regardaient jamais que ce fût proprement leur vie, celle qui était bornée à un cercle étroit d'années sur la terre ; mais ils envisageaient leurs actions comme des graines semées dans les champs immenses de l'univers, qui leur porteraient le fruit de l'immortalité à-travers de la succession des siècles.

Telle était l'espérance de Ciceron, et il faut convenir qu'il n'a pas été déçu dans son espoir. Quoi qu'en disent de prétendus beaux esprits modernes, qui nomment le sauveur de la république, le plus vain des mortels ; tant que le nom de Rome subsistera, tant que le savoir, la vertu et la liberté auront quelque crédit dans le monde, Ciceron sera grand et couvert d'actions glorieuses.

Si quelqu'un demandait à-présent, quelles sont les places du temple de la gloire, on pourrait peut-être mettre au premier rang les fondateurs des empires, tels que Cyrus et Romulus ; au second rang paraitraient les législateurs qui sont comme des souverains éternels ; tels étaient Lycurgue, Solon, Alphonse de Castille. Au troisième rang, seraient placés les libérateurs de leur pays opprimé par des partis étrangers ; tel fut Henri IV. quand il éteignit la ligue. Les conquérants qui ont étendu les limites de leur empire pour rendre heureux par des lois immuables, les peuples qu'ils ont soumis, se trouveraient placés au quatrième rang ; les noms de ces derniers échappent à mon souvenir.

Mais la place du temple de la gloire, émanée du mérite le plus cher à l'humanité, sera conservée à ces princes sages, justes, vigilans, qui par une certaine tendresse d'entrailles, ont acquis le titre de pères de la patrie, en faisant le bonheur des citoyens ; Trajan, Marc Aurele, Alfred, occupent cette place isolée, qui est supérieure à toute autre.

Si Alexandre succédant à Philippe, se fût déclaré le protecteur de tous les états et de toutes les villes de la Grèce, pour leur assurer leurs libertés, et les laisser vivre selon leurs lois ; que content des bornes légitimes de son empire, il eut mis toute sa joie à le rendre heureux, à y procurer l'abondance, à y faire fleurir les lois et la justice, aussi-bien qu'il fit fleurir les arts et les sciences, il eut exercé sur tous les cœurs l'empire le plus durable, il eut acquis la sublime gloire, il serait devenu à tous égards l'admiration de l'univers ! Infinitae potentiae domitor ac fraenator, ipsâ vetustate magis ac magis florescit !

Après les places des souverains, viennent celles des sujets dans le temple de la gloire. Les premiers sujets dignes de cet honneur, seront ces grands ministres, ces bras droits du prince, qui le consolent ou le soulagent, sans accabler le peuple, partagent et souvent portent seuls le fardeau de l'empire, en conservant toujours leur vertu et leur intégrité. Ces sortes de ministres paraissent rarement sur la terre ; la France nomme Sully sous Henri IV. Ils étaient dignes l'un de l'autre.

Ensuite il faut placer les capitaines, les généraux d'armée qui se sont rendus célèbres sur terre ou sur mer, par leurs belles actions ou leurs victoires ; l'histoire grecque et romaine en fournissent le plus grand nombre, et les monuments qui parlent de leur renommée, ont passé jusqu'à nous ; les particularités qui concernent celle de Philopoemen, par exemple, ne nous sont point inconnues.

Ce généralissime des Achéens ayant gagné la bataille de Messene, le musicien Pylade qui chantait sur la lyre, la pièce intitulée les Perses, prononça par hazard un vers qui dit :

C'est moi qui couronne vos têtes

Des fleurons de la liberté.

Tous les Grecs jetèrent les yeux sur Philopoemen avec des applaudissements et des battements de mains qui ne finissaient point, rappelant dans leur esprit les beaux siècles de la Grèce, et se flattant de la douce espérance que leur vertueux chef, ferait revivre ces anciens temps.

Après les grands capitaines, il faut placer dans le temple de la gloire, ces magistrats et ces hommes laborieux, qui chargés du dépôt des lois et de l'administration de la justice, s'y dévouent avec héroïsme. Tel était parmi nous un chancelier de l'Hôpital, il n'a point eu de successeurs.

Je n'assignerai point les autres rangs ; c'est assez de dire que ceux qui dans tous les ordres de l'état, cultivent éminemment les fruits de la sagesse, des sciences et des beaux arts, ont des places distinguées dans le temple de la gloire.

Mais quelques personnes à l'opinion desquels je suis prêt de me ranger, mettent dans le sanctuaire de ce temple, au-dessus des sujets et des souverains mêmes, ces généreuses victimes, telles que les Regulus et les Decius qui se sont immolés volontairement, et par le plus beau des sacrifices, pour le salut de leur patrie.

Le chancelier Bacon remarque, qu'il y a deux sortes d'immortalité, celle du sang et celle de la gloire ; la première, dit-il, se communique par la propagation, et nous est commune avec les bêtes ; la seconde n'appartient qu'à l'homme, et c'est par de grands services, de grandes et bonnes actions, qu'il doit chercher à se perpétuer. Les ouvrages des historiens, des poètes et des orateurs sont les vrais temples de la renommée. Le temps vient à bout du bronze et du marbre ; il ne peut rien sur les ouvrages d'esprit. Voilà les ailes sur lesquelles les grands hommes sont portés éternellement et rappelés à la mémoire des hommes. (D.J.)

TEMPLES, nom que les Anglais donnent à deux collèges, où les chevaliers du temple faisaient autrefois leur demeure. Voyez TEMPLIERS.

Après la suppression de l'ordre des Templiers, quelques professeurs en droit achetèrent ces maisons, et ils les convertirent en auberges ou hôtelleries. Voyez AUBERGE.

On appelle un de ces bâtiments le temple intérieur, relativement à l'hôtel d'Essex, qui faisait aussi partie de la demeure des Templiers ; et l'autre s'appelle le temple extérieur, comme étant situé hors de la barre du temple.

Du temps des Templiers, le trésor du roi d'Angleterre était gardé dans le temple intérieur, comme celui du roi de France au temple à Paris.

Le chef de cette maison s'appelait le maître du temple, qui fut cité au parlement la 49e année du règne d'Henri III. et le principal ministre de l'église du temple, s'appelle encore aujourd'hui du même nom. Voyez MAITRE.

Nous avons aussi à Paris une espèce d'ancienne forteresse nommée le temple, qui était la maison ou le monastère des chevaliers Templiers. Après la destruction de ceux-ci, elle a passé avec leurs autres biens à l'ordre de saint Jean de Jérusalem ou de Malte ; mais elle a toujours conservé le nom de temple. C'est dans son enceinte qu'est situé le palais du grand prieur de la langue de France, qui y a un bailli, d'autres officiers, et une juridiction particulière. L'enceinte du temple est un lieu privilégié pour des ouvriers et artisans qui n'ont pas droit de maitrise dans Paris. On ne peut pas non plus y arrêter un homme pour dettes. L'église est desservie par des chapelains de l'ordre de Malte, les archives et la chancellerie de la langue de France y sont aussi renfermées, et le chapitre général s'y tient tous les ans le 11 de Juin.

TEMPLE, s. m. (outil de Charron) c'est un morceau de bois, de la longueur de trois pieds ou environ, qui est gros de deux pouces, large à-peu-près de-même par en-bas, plus plat que rond, dont la tête est plus plate et plus large, un peu ronde, percée au milieu d'un petit trou. Voyez la fig. Pl. du Charron.

Les Charrons se servent de cet outil pour enrayer, c'est-à-dire, pour marquer, quand les raies sont placées dans le moyeu, la distance à laquelle il faut former les mortaises dans les jantes. Cela s'éxécute en plaçant le bout large et plat du rabat sur le milieu du moyeu, en faisant passer une petite cheville de fer dans le trou de la tête du rabat et ensuite dans le trou qui est au milieu du moyeu, de façon que le rabat peut tourner autour de la roue prête à être montée, et alors l'ouvrier marque les places des mortaises sur les jantes avec de la pierre noire.

TEMPLE, s. m. (terme de Férandin.) crémaillere composée de deux petites lames de bois dentelées, arrêtées l'une contre l'autre par une boucle coulante et terminées par des pointes d'épingle. (D.J.)

TEMPLE, (terme de Tisserand) ce sont deux barres de bois attachées l'une à l'autre par une ficelle, et dont les extrémités sont garnies de petites pointes de fer. On accroche les deux bouts du temple aux deux lisières de la toîle auprès de l'endroit que l'ouvrier travaille. Le temple est garni dans le milieu de petits crants, pour pouvoir en éloigner ou écarter les deux barres, selon la largeur de la toile. Il a outre cela une espèce d'anneau de cuir mobile, appelé le cuiret, pour embrasser les deux barres à-la-fais et les empêcher de s'écarter.