A proprement parler, la mumie n'est point le cadavre, mais la composition avec laquelle il est embaumé ; cependant ce mot se prend ordinairement pour signifier le cadavre même.

L'art de préparer les momies est si ancien, qu'il était en usage en Egypte dès avant le temps de Moïse. Le cercueil dans lequel on les enfermait, était de bois de sycomore, qui, comme on l'a trouvé, se conserve sain pendant l'espace de 3000 ans ; mais cet arbre est fort différent de notre sycomore.

Les momies, dit-on, ont été mises en usage pour la première fois dans la Médecine, par un médecin juif, qui prétendit que la chair des cadavres ainsi embaumés, était un excellent remède contre plusieurs sortes de maladies, principalement contre les contusions, pour prévenir l'amas et la coagulation du sang. Les Turcs empêchent autant qu'il leur est possible le transport des momies d'Egypte en Europe.

Il y a deux sortes de corps qu'on appelle momies. Les premiers sont des squeletes desséchés par la chaleur du soleil, et préservés par ce moyen de la putréfaction. On en trouve fréquemment dans les déserts sablonneux de la Lybie. Quelques-uns prétendent que ce sont des squeletes des cadavres qui ont été enterrés dans ces déserts, afin de les pouvoir conserver en entier sans les embaumer ; d'autres, que ce sont des squeletes de voyageurs étouffés et accablés par les nuées de sable qu'élèvent dans ce désert de fréquents ouragans. Quoi qu'il en sait, ces momies ne sont d'aucun usage en Médecine, et on ne les conserve que pour la curiosité.

Les momies de la seconde espèce sont des corps tirés des fosses ou catacombes qui se trouvent proche le grand Caire, et où les Egyptiens enfermaient les cadavres, après les avoir embaumés. Ce sont-là ces momies qu'on recherche avec tant de soin, et auxquelles on a attribué des vertus si extraordinaires.

On assure que toutes les momies qui se vendent dans les boutiques des marchands, soit qu'elles viennent de Venise ou de Lyon, soit qu'elles viennent même directement du Levant par Alexandrie, sont factices, et qu'elles sont l'ouvrage de certains juifs qui, sachant le cas que font les Européens des vraies momies d'Egypte, les contrefont en desséchant des squeletes dans un four, après les avoir enduits d'une poudre de myrrhe, d'aloès caballin, de poix noire, et d'autres drogues de vil prix et mal-saines.

Il parait que quelques charlatants français ont aussi un art particulier de préparer des momies. Leur méthode est assez simple. Ils prennent le cadavre d'un pendu, en tirent la cervelle et les entrailles, dessechent le reste dans un four, et le mettent tremper dans de la poix fondue, et d'autres drogues, pour les vendre ensuite comme des vraies momies d'Egypte.

Paré a fait un traité fort curieux sur les momies, où il explique tous les abus qu'on en fait, et démontre qu'elles ne peuvent être d'aucun usage dans la Médecine.

Serapion et Matthiolus, après lui, sont du même sentiment. Ces deux auteurs prétendent que les momies d'Egypte même, ne sont que des corps embaumés avec le pissasphalte.

Momie, mumia, se dit aussi en particulier de la liqueur, ou de l'espèce de suc qui sort des corps humains embaumés ou aromatisés, et qu'on a enfermés dans les tombeaux. Ce mot a été employé souvent par les anciens écrivains dans le sens dont il s'agit ici.

Momie signifie aussi une espèce de drogue, ou composition visqueuse faite avec du bitume et de la poix, qu'on trouve dans les montagnes ou forêts d'Arabie, et dans d'autres pays chauds du Levant : on en fait usage pour embaumer les corps. Dioscoride parle d'une momie, trouvée sur le bord de la mer proche Epidaure, qui y avait été apportée par les torrents qui descendent des monts Cerauniens, et avait été desséchée par la chaleur du soleil sur le sommet de ces montagnes.

Son odeur est à-peu-près semblable à celle du bitume mêlé avec la poix. Le peuple des environs l'appelle cire minérale. En latin, ou plutôt en grec on l'appelle pissasphaltus. Voyez PISSASPHALTE.

Momie, mumia, est aussi un mot dont quelques Physiciens se servent pour signifier je ne sai quel esprit, qui se trouve dans les cadavres lorsque l'âme les a quittés.

L'esprit ou l'âme qui anime les sujets vivants est aussi appelé par eux momie ; et ils supposent que cet esprit, ainsi que l'autre, sert beaucoup à la transplantation. Voyez TRANSPLANTATION.

Une plante, par exemple, portant cette momie d'un sujet dans un autre, elle se joint et s'unit immédiatement avec la momie, ou l'esprit du nouveau sujet ; et de cette union nait une inclination naturelle et commune dans les deux sujets. C'est par ces principes que quelques-uns expliquent les vertus sympathiques et magnétiques dans la guérison des maladies. Voyez SYMPATHIQUES.

Momie se dit aussi dans le jardinage d'une espèce de cire dont on se sert dans la plantation et la greffe des arbres. Voyez CIRE.

Voici la manière de la préparer que donne Agricola. Prenez une livre de poix noire commune, un quarteron de terebenthine commune ; mettez-les ensemble dans un pot de terre, que vous mettrez sur le feu en plein air, ayant quelque chose à la main pour l'éteindre, et couvrir le feu de temps en temps ; vous allumerez et éteindrez ainsi le feu alternativement, jusqu'à ce que toutes les parties nitreuses et volatiles de la matière soient évaporées, enfin vous y mêlerez un peu de cire commune, et la préparation sera faite, et pourra être mise en usage.

Pour appliquer cette composition à la racine d'un arbre, tondez-la, et trempez-y les deux bouts de la racine l'un après l'autre ; ensuite mettez la racine dans l'eau, et enfin plantez-la en terre de manière que le plus petit bout soit en bas, afin que le plus grand ait moins de chemin à faire pour sortir de terre, et recevoir les influences de l'air ; après quoi vous recouvrirez la racine de terre, que vous foulerez le plus que vous pourrez, afin que la racine ne reçoive point trop d'humidité. Voyez ACTION DE PLANTER.