Il est très-essentiel que les troupes soient bien exercées aux évolutions, pour exécuter facilement toutes celles qui leur sont ordonnées. Il en est, disait Démetrius de Phalere, suivant que Polybe le rapporte, d'une armée comme d'un édifice. Comme celui-ci est solide lorsqu'on a soigneusement travaillé en détail sur toutes les parties qui le composent ; de même une armée est forte lorsque chaque compagnie, chaque soldat a été instruit avec soin de tout ce qu'il doit faire.

L'officier particulier, dit M. Bottée, doit savoir les mêmes choses que le soldat, et connaître de plus les usages particuliers de chaque évolution, pour se servir des moyens les plus simples dans l'exécution des ordres qui peuvent lui être donnés par ses supérieurs ; car rien n'est plus nécessaire à l'heureux succès des entreprises, que l'habileté des officiers particuliers. C'était-là, selon Polybe, le sentiment de Scipion.

Toutes les nations policées ont eu dans tous les temps des règles pour la formation, l'arrangement, et les mouvements des troupes. Sans la connaissance et la pratique de ces règles, une troupe de gens de guerre ne serait qu'une masse confuse, dont toutes les parties s'embarrasseraient réciproquement.

Par le moyen des évolutions on remédie à cet inconvénient. On donne à toutes les parties d'une troupe des mouvements réguliers, qui la maintiennent toujours dans l'ordre qu'elle doit observer, tant pour soutenir les efforts de l'ennemi, qu'afin que les différentes parties qui le composent puissent concourir également à en augmenter la force et la solidité.

Les évolutions de l'infanterie sont plus aisées à exécuter que celles de la cavalerie ; car, outre que le cheval ne se meut pas de tout sens avec la même facilité qu'un homme à pied, l'inégalité de ses deux dimensions, c'est-à-dire de sa largeur et de sa longueur, oblige à différentes attentions pour le faire tourner dans une troupe ; attentions qui ne seraient point nécessaires pour faire mouvoir de la même manière un homme à pied.

On donnera dans cet article le détail des principales évolutions de l'infanterie, qui servent, pour ainsi dire, de règles ou de modèles à celles de la cavalerie, et on le terminera par un précis de celles de la cavalerie.

ÉVOLUTIONS DE L'INFANTERIE.

Observations préliminaires.

I. Toute troupe qu'on assemble pour quelqu'objet que ce sait, doit d'abord être mise en bataille, c'est-à-dire former des rangs et des files. Voyez RANGS et FILES.

Si l'on place plusieurs rangs de suite les uns derrière les autres, les files seront composées d'autant d'hommes qu'il y aura de rangs. Voyez BATAILLON.

Lorsqu'une troupe est en bataille, dans l'ordre où elle doit combattre, les files et les rangs sont serrés autant qu'il est possible pour donner plus de force à la troupe, en réunissant ainsi toutes ses parties pour en former une espèce de corps solide.

Dans cet état de pression, la troupe ne se meut pas aussi facilement que s'il y avait quelqu'intervalle entre les rangs et les files. C'est pourquoi lorsqu'il ne s'agit pas d'attaquer l'ennemi ou d'en soutenir les efforts, les hommes de la troupe ou du bataillon peuvent être dans une situation moins gênante pour marcher plus commodément et plus légèrement.

De cette considération naissent deux sortes de dispositions de files et de rangs ; savoir, des files serrées et ouvertes, et des rangs serrés et ouverts.

Les files sont serrées, lorsque les soldats de chaque rang se pressent tellement les uns et les autres, qu'il ne leur reste que la liberté du coude pour se servir de leurs armes.

Lorsque les soldats d'un même rang sont ainsi pressés, on peut évaluer environ à deux pieds l'espace qu'ils occupent chacun dans le rang. Si l'on veut faire serrer les soldats en marchant, autant qu'il est possible, cet espace peut se reduire à 18 pouces ; mais alors bien des officiers croient qu'ils sont trop gênés pour se servir aisément de leurs armes : et comme ils ne sont pas dans le bataillon pour présenter uniquement leur corps à l'ennemi, qu'ils ont besoin de l'usage de leurs bras, il suit de-là qu'on ne doit serrer les files qu'autant qu'on le peut sans aucun inconvénient à cet égard.

Lorsque les files sont ouvertes, il doit y avoir entr'elles, pour l'exécution des différents mouvements dont on parlera dans la suite, un espace égal, ou à-peu-près égal, à celui qu'elles occupent étant serrées.

Ainsi l'épaisseur d'une fîle serrée étant à-peu-près de deux pieds, les files auront à-peu-près ce même intervalle entr'elles lorsqu'elles seront ouvertes.

Il y a des cas particuliers où les files sont beaucoup plus ouvertes, comme lorsqu'il s'agit de faire l'exercice, ou le maniement des armes, d'occuper un espace déterminé avec peu de troupes, etc. mais il n'est point question alors de les faire manœuvrer comme si elles étaient en présence de l'ennemi. C'est pourquoi ces différents cas qui sortent de la loi générale, ne peuvent être ici d'aucune considération.

Si l'union ou la pression des files est nécessaire pour donner de la solidité à un corps de troupes, il est clair que celle des rangs ne l'est pas moins, et par conséquent qu'ils doivent se serrer les uns sur les autres autant qu'il est possible pour se soutenir réciproquement. Il serait à souhaiter pour la solidité de la troupe, qu'ils fussent, pour ainsi dire, collés les uns sur les autres ; mais alors la troupe ne pourrait marcher qu'avec beaucoup de peine et pendant peu de temps. Si on la suppose immobile, ou qu'on veuille la faire tirer arrêtée, elle pourra se tenir ainsi, afin que le quatrième rang, si elle a quatre rangs, puisse tirer sans incommoder le premier, c'est-à-dire que le bout des fusils des soldats du quatrième rang dépasse les hommes du premier (voyez EMBOITEMENT) : mais il s'agit de marcher, il faut que l'épaisseur du rang, en y comprenant l'intervalle qui le sépare du rang qui suit immédiatement, soit d'environ trois pieds. Dans cette position, on dit que les rangs sont serrés à la pointe de l'épée (a), parce que le bout des épées des soldats de chaque rang touche le devant de la jambe des soldats du rang qui est derrière.

Cette pression de rang ne devrait se faire que lorsqu'on est prêt à combattre, ou qu'on veut marcher dans l'ordre propre au combat, parce qu'elle gêne toujours un peu la marche du soldat, et que d'ailleurs il ne faut qu'un instant pour faire serrer à la pointe de l'épée quatre ou cinq rangs éloignés les uns des autres, par exemple, de 12 pieds ; car alors le dernier rang n'est éloigné du premier que de huit taises. C'est pourquoi, comme il est remarqué dans une note de l'Art de la guerre de M. le maréchal de Puysegur (tom. I. pag. 194.), si l'ennemi est à 15 ou 16 taises, la troupe qui a ses rangs ouverts a encore le temps de se serrer avant d'être jointe par l'ennemi, et à plus forte raison si l'on en est à une plus grande distance. On observe dans la note qu'on vient de citer, qu'il y a cependant une attention à faire sur ce sujet, " c'est que s'il y avait de la cavalerie à portée, comme elle peut marcher fort vite, il faut se serrer plutôt ; mais il n'y a que les Hussards ou de la cavalerie de pareille espèce, qui puissent parcourir cent pas, qui font 50 taises, avant que votre bataillon ait serré ses rangs, le dernier n'ayant que huit taises à parcourir ".

On peut voir dans l'article 5. tom. I. du dixième chapitre de l'Art de la guerre, les différents inconvénients qui resultent de marcher toujours à rangs serrés. Quel que puisse être l'usage contraire, comme un usage ne tient pas lieu de raison, nous croyons que ceux qui liront avec attention ce que M. le maréchal de Puysegur a écrit sur ce sujet, douteront au moins de la plupart des avantages qu'on attribue à la méthode de marcher et de faire toutes les évolutions à rangs serrés.

Quoi qu'il en sait, comme les évolutions que nous allons expliquer, exigent dans différents cas que les rangs soient un peu ouverts, nous appellerons rangs ouverts, ceux qui avec leur intervalle occuperont un espace double de celui qu'ils occupent étant serrés, c'est-à-dire six pieds ou environ.

L'ordonnance du 6 Mai 1755, prescrit douze pieds ou six pas de deux pieds chacun pour l'intervalle des rangs ouverts. C'est à-peu-près la même distance qu'on observait autrefois en conformité du règlement du 2 Mars 1703, rapporté dans le code militaire de M. Briquet.

Ce serait peut-être ici le lieu d'examiner quel est le nombre des rangs qu'on doit donner à une troupe d'infanterie, pour lui donner la formation la plus avantageuse pour le combat ; mais c'est ce qu'on ne peut guère fixer par des raisonnements solides et démonstratifs.

(a) L'expression de serrer les rangs à la pointe de l'épée, commence à n'être plus d'un usage général dans les troupes. On lui substitue celle de serrer les rangs en-avant.

La raison de ce changement, c'est que le Roi ayant ordonné de renouveller les ceinturons de l'Infanterie (ce qui doit être fini dans l'espace de trois ans), les nouveaux ceinturons seront faits de manière que le soldat portera l'épée sur le côté le long de la cuisse, à-peu-près de la même manière qu'on porte les couteaux de chasse. Or lorsque toute l'Infanterie portera ainsi l'épée, l'expression de serrer les rangs à la pointe de l'épée, ne sera plus exacte, parce que les soldats de chaque rang ne pourront plus toucher le bout des épées du soldat du rang qui les précédera. Cependant comme cette expression est ancienne, et qu'il ne serait pas impossible qu'elle prevalut sur la nouvelle, nous continuerons de nous en servir, mais ne lui donnant la même signification qu'a celle de serrer les rangs en-avant, par laquelle on entend qu'il faut les serrer autant qu'il est possible les uns sur les autres, sans gêner la marche du soldat.

Tout le monde convient qu'il faut nécessairement plusieurs rangs les uns derrière les autres, pour que la troupe ou le bataillon soit capable de résistance, et d'attaquer avec fermeté une troupe qu'il veut combattre. Mais cette considération ne fixe pas le nombre de ces rangs.

L'usage a beaucoup varié sur ce sujet. Chez les Grecs la phalange était à seize de hauteur, c'est-à-dire qu'elle avait seize rangs de soldats (voyez PHALANGE) : chez les Romains, les corps particuliers d'infanterie étaient à dix de hauteur. En France, ainsi que dans le reste de l'Europe, du temps de M. de Turenne et de Montecuculli, l'infanterie était rangée en bataille sur huit et sur six rangs.

Ce dernier général dit dans ses mémoires, qu'il faut que l'infanterie soit à six de hauteur, afin qu'elle puisse faire un feu continuel dans l'occasion. S'il y avait moins de six rangs, dit cet auteur célèbre, le premier ne pourrait pas avoir rechargé quand le dernier aurait tiré ; ainsi le feu ne serait pas continuel : et si au contraire il y en avait plus de six, le premier serait obligé de perdre du temps, et d'attendre que les derniers eussent tiré pour recommencer.

Si le feu continuel par rangs avait été la seule raison qui eut fait mettre l'infanterie à six de hauteur du temps de Montecuculli, on aurait dû l'arranger sur trois depuis la suppression des mousquets (voyez MOUSQUET ], c'est-à-dire depuis environ 1704 ; car l'expérience a prouvé qu'on peut aisément tirer deux coups de fusils contre un de mousquet.

C'est pourquoi trois rangs de soldats armés de fusils, seront en état de tirer autant de coups dans le même temps, que six rangs de même nombre d'hommes armés de mousquets, c'est-à-dire de faire également un feu continuel par rangs. Mais ce petit nombre de rangs n'a pas paru suffisant pour donner de la solidité au bataillon. L'usage plutôt que le raisonnement, semble avoir décidé depuis longtemps que l'infanterie doit être en bataille sur quatre rangs. Cependant comme il y a des occasions où une plus grande profondeur est nécessaire, et que c'est au général à en juger, il paraitrait assez naturel de s'en rapporter à lui pour la fixation du nombre de rangs sur lequel il veut combattre, et de n'avoir un ordre général que pour mettre les troupes uniformément en bataille dans toutes les occasions ordinaires.

Cette observation parait d'autant mieux fondée, que la plupart des évolutions dont on Ve donner le détail, consistent à augmenter et à diminuer le front et la profondeur du bataillon ; ce qui suppose que le nombre des rangs sur lesquels on met une troupe en bataille n'est jamais fixé invariablement.

On peut répondre à cela, que l'objet de ces évolutions est principalement de faire marcher les troupes dans toutes sortes de passages et de défilés, et pour cet effet de réduire leur front ordinaire à la largeur du lieu où elles doivent passer, ce qui ne peut se faire qu'en augmentant le nombre des rangs de la troupe, etc. Mais il y a un grand nombre d'autres circonstances à la guerre, où la profondeur du bataillon doit varier ; comme, par exemple, dans l'attaque des postes, des retranchements ; lorsqu'il s'agit de rompre une troupe, de forcer un passage, etc. Dans ces occasions, il est clair que les troupes doivent avoir plus de profondeur que lorsqu'elles se bornent à se fusiller ou à se passer réciproquement par les armes ; car dans ce dernier cas leur trop de hauteur peut nuire, et nuit effectivement à la célérité et à la sûreté de leur feu. Voyez EMBOITEMENT.

Il suit de ces différentes observations, que peut-être serait-il avantageux d'avoir deux ordres de bataille différents ; savoir, l'un pour paraitre dans les revues et pour tirer, et l'autre pour charger la bayonnette au bout du fusil.

Dans le premier, il serait suffisant de mettre les troupes à trois de hauteur conformément à l'instruction du 14 Mai 1754, qui porte : que toutes les fois que l'infanterie prendra les armes, pour quelqu'occasion que ce sait, elle soit formée sur trois rangs.

Dans le second ordre on pourrait, en suivant la même instruction, mettre les troupes sur six rangs, ainsi qu'elle le prescrit lorsqu'il s'agit de les exercer aux évolutions.

L'ordre de bataille sur six rangs, qui était en usage du temps de M. de Turenne, comme nous l'avons déjà observé, est sans-doute meilleur pour charger l'ennemi que celui de quatre rangs. Cependant comme ce dernier est le plus généralement établi par l'usage, et qu'il tient d'ailleurs une espèce de milieu entre les deux ordres de trois et de six rangs dont on vient de parler, ce sera celui dont on se servira dans cet article, où l'on trouvera d'ailleurs les règles nécessaires pour le changer comme on voudra, c'est-à-dire pour mettre une troupe qui est en bataille sur quatre rangs, sur un plus grand ou un plus petit nombre de rangs.

Après ces notions générales sur l'arrangement et la formation des troupes, nous allons entrer dans le détail des principales motions ou évolutions du bataillon : mais nous observerons auparavant qu'elles peuvent être considérées de trois manières différentes.

1°. En mouvements qui s'exécutent homme par homme.

2°. En mouvements qui se font par tout le bataillon ensemble.

Et 3°. en mouvements qui s'exécutent par différentes parties ou divisions du bataillon.

Les mouvements qui s'exécutent homme par homme, sont ceux que les hommes qui composent le bataillon font chacun en particulier, indépendamment les uns des autres. Ils se meuvent néanmoins tous ensemble, de la même manière et dans le même temps ; mais chacun exécute son mouvement en entier, sans considérer celui de son camarade que pour le faire uniformément avec lui.

Les mouvements qui se font par tout le bataillon ensemble, sont ceux dans lesquels on le considère comme un corps solide ou un seul tout, dont toutes les parties se meuvent par un mouvement commun. Chaque homme n'agit alors que comme partie du tout, en suivant le mouvement ou la détermination générale de tout le bataillon.

Enfin les mouvements par parties ou par divisions, sont ceux dans lesquels chaque division se meut avec les hommes qui la composent, comme dans les mouvements de la troupe entière ; et cela sans considérer le mouvement particulier des autres parties que pour agir uniformément avec elles lorsqu'elles se meuvent toutes du même sens ou de la même manière.

ARTICLE II.

Du mouvement d'homme par homme. Le mouvement d'homme par homme a pour objet de faire trouver la face du bataillon de tel côté que l'on veut, sans lui faire changer de terrain, ce qui sert à le faire marcher vers la droite ou vers la gauche, ou en-arrière.

Ce mouvement peut s'exécuter également, les files et les rangs étant serrés ou ouverts.

Nous supposerons sur les Planches, que les files et les rangs sont serrés ; et afin que les figures occupent moins d'espace, nous prendrons une partie du bataillon pour la représentation du bataillon entier.

Sait donc (fig. 1. Pl. I. des évolutions) le bataillon A B C D, ou une de ses parties quelconque, rangée en bataille sur quatre rangs ; les soldats sont marqués par de gros points noirs, qui désignent le centre de l'espace qu'ils occupent : comme on suppose qu'ils se touchent, il ne faudrait pas d'intervalle entr'eux ; mais alors les figures seraient trop confuses. On a tiré sur chacun de ces points une petite ligne droite, pour exprimer les armes du soldat et le côté où il fait face, qu'on a supposé être le haut de la planche.

Si l'on veut que cette troupe fasse face du côté du flanc droit B C, on fait le commandement à droite ; alors tous les hommes de la troupe tournent sur eux-mêmes, jusqu'à ce qu'ils aient en face le terrain opposé au flanc droit B C de la troupe, fig. 2.

Pour faire ce mouvement, les soldats s'appuient sur une seule jambe, et tournent sur un talon comme sur un pivot. On pourrait tourner également sur l'une ou l'autre jambe ; mais l'usage a décidé pour la gauche : ainsi c'est sur cette jambe que tournent tous les hommes du bataillon. Ils doivent commencer et achever ce mouvement sans interruption, et dans le même temps le faire brusquement, sans que les armes et les bras changent de situation.

Suivant l'instruction du 14 Mai 1754, il doit y avoir un intervalle de deux pouces entre les deux talons de chaque soldat.

Il est évident que si l'on fait exécuter quatre fois de suite ce même mouvement, et toujours de même sens, que le quatrième remettra le bataillon dans sa première position ; et que tous les hommes qui le composent, auront chacun décrit la circonférence d'un cercle, dont chaque mouvement particulier est le quart. Ce mouvement s'appelait autrefois par cette raison, quart de tour à droite ou à gauche ; à-présent on le nomme simplement à-droite ou à-gauche.

Il est d'usage lorsqu'on fait faire à-droite à une troupe, de lui faire exécuter les quatre parties de ce mouvement : ainsi au premier commandement à droite, la troupe fait face au terrain du flanc droit ; au second, elle fait face à la queue du bataillon ; au troisième, au terrain du flanc gauche ; et au quatrième, elle se remet dans sa première position.

La deuxième figure de la I. Planche représente la troupe qui a fait un à-droite.

La troisième figure de la même Planche, la même troupe qui a fait deux à-droite.

La quatrième, la troupe qui en a fait trois : le quatrième à-droite, qui la remet dans sa première position, peut être représenté par la première figure.

Il est évident que les mêmes mouvements que l'on vient d'expliquer pour faire tourner le bataillon vers sa droite, peuvent s'exécuter également en tournant vers la gauche.

Pour cet effet, la troupe étant en bataille (fig. 1. Pl. I.), le commandant dit à gauche ; alors chaque soldat tourne à gauche, comme il tournait à droite dans le mouvement précédent : ce qui peut être représenté par la quatrième figure, &c.

REMARQUES.

I. Ayant expliqué les quatre mouvements à droite, il est aisé, sans le secours de nouvelles figures, de concevoir la manière dont les mêmes mouvements s'exécutent à gauche ; c'est pourquoi on a cru qu'il était inutîle de les multiplier sans nécessité à cette occasion. On se contentera de même dans la suite de ne donner des figures que pour les mouvements d'un seul côté, c'est-à-dire pour la droite ou pour la gauche.

II. Le tour entier que l'on exécute par quatre à-droite, comme on vient de l'expliquer, peut se faire en deux fais, en faisant faire un demi-tour par un seul mouvement à tous les soldats du bataillon.

Pour cet effet, on commande au bataillon de faire demi-tour à droite (c'est ainsi qu'on s'exprime pour faire décrire une demi-circonférence à tous les soldats de la troupe ou du bataillon) ; alors en se tournant vers la droite, et faisant le demi-tour d'un seul mouvement sur le talon gauche, ils font face au côté opposé au front du bataillon. Un second demi-tour exécuté de même, les remet dans leur première position.

Le demi-tour à gauche s'exécute également, en faisant tourner les hommes de la troupe vers la gauche, au lieu de la droite.

L'instruction du 14 Mai 1754 ordonne d'exécuter ce mouvement en trois temps : au premier, le soldat doit porter le pied droit derrière le gauche, les deux talons à quatre pouces de distance l'un de l'autre : au deuxième, le soldat doit tourner sur les deux talons, jusqu'à ce qu'il fasse face du côté opposé ; et au troisième, reporter le pied droit à côté du gauche.

III. Lorsqu'une troupe a fait un mouvement à droite ou à gauche, et qu'on veut qu'elle reprenne sa première position, on lui dit remettez vous ; ce que la troupe exécute en faisant un mouvement opposé à celui qu'elle a d'abord fait, ou en revenant sur ses pas de la même manière.

Ainsi la troupe ayant d'abord fait, par exemple, un demi-tour à droite, elle se remettra en faisant un demi-tour à gauche ; et si elle en avait fait un à gauche, elle se remettrait en en faisant un autre à droite.

Si elle a fait un à-droite ou un à-gauche, elle se remettra de même, par un autre quart de tour opposé au premier, c'est-à-dire à gauche ou à droite.

IV. On ne fait point faire trois quarts de tour par un seul commandement ; parce que les hommes de la troupe auraient trop de peine à l'exécuter de suite et avec exactitude.

V. Ce mouvement des à-droite et des à-gauche s'enseigne ordinairement dans l'exercice ou le maniement des armes, auquel il parait appartenir particulièrement ; parce qu'il n'est pas possible de faire faire l'exercice sans le secours de cette évolution, attendu qu'elle apprend à se tourner de tous les sens pour charger le fusil, le manier, et le présenter : mais son usage indispensable dans l'exercice, n'empêche point qu'elle ne soit comprise dans les différentes motions du bataillon, dont elle est la première et la plus simple. On a cru par cette raison qu'elle devait précéder ici les autres, d'autant plus que l'on ne parle point du maniement des armes dans cet article.

ARTICLE III.

De la manière de serrer le bataillon. On serre le bataillon en avançant les files et les rangs les uns sur les autres, et on l'ouvre en les éloignant pour lui donner plus de front ou plus de profondeur.

Il faut supposer que le bataillon dont on veut serrer les rangs, les a d'abord assez éloignés les uns des autres, pour qu'ils puissent s'approcher davantage : car il est évident que s'ils étaient à trois pieds de distance, c'est-à-dire serrés à la pointe de l'épée, le mouvement dont il s'agit serait impossible.

Il faut aussi pour serrer les files, qu'elles soient assez distantes les unes des autres pour qu'on puisse les approcher davantage, c'est-à-dire qu'elles occupent un espace de plus de deux pieds dans le rang.

On peut serrer le bataillon de plusieurs manières :

Pour serrer le bataillon par rangs en avant, on ordonnera au premier de ne pas bouger ; et aux autres de s'approcher de ce rang, jusqu'à une distance déterminée quelconque.

Le second rang doit marcher très-lentement, afin que les autres serrent insensiblement, et que tout le resserrement des rangs soit fait dans le même temps.

La cinquième figure représente une partie du bataillon en bataille à rangs ouverts, et qui n'a point fait de mouvement.

La figure sixième fait voir ce même bataillon dont les quatre derniers rangs ont serré sur le premier ; de manière que le second s'étant approché du premier, le troisième a pris la place du second ; et que le quatrième s'étant approché du troisième, le cinquième a pris la place qu'occupait le troisième rang.

Il est clair que par ce mouvement, le bataillon a diminué de moitié l'espace qu'il occupait en hauteur ou en profondeur.

Dans cette figure, les points noirs représentent les hommes après le resserrement du bataillon ; et les zéros, les places qu'occupaient ceux du quatrième et cinquième rang, lesquelles demeurent vides par le serrement des rangs de la troupe sur le premier.

On se servira de ces deux sortes de points dans les figures suivantes, et on les emploiera dans le même sens.

REMARQUES.

I. Il est assez d'usage dans les différents mouvements que l'on fait exécuter aux troupes, pour les exercer aux évolutions, et lorsque la manœuvre ou l'évolution qu'on veut leur faire exécuter ensuite, ne demande pas une position ou un arrangement différent de celui que le bataillon avait d'abord, de le faire remettre après chaque mouvement dans sa première position : ainsi après avoir fait serrer les rangs en avant, on les fait ouvrir en arrière, pour les remettre comme ils étaient d'abord.

Pour cet effet on ordonne au premier de ne point bouger ; on fait faire aux autres demi-tour à droite, et on les fait marcher chacun en avant, jusqu'à ce qu'ils occupent le même terrain sur lequel ils avaient d'abord été placés. On fait faire ensuite à ces rangs demi-tour à gauche, pour faire face du même côté que le premier rang : et la troupe est ainsi remise dans sa première position.

Dans ce mouvement, les rangs qui vont en avant pour se remettre marchent d'un pas égal : mais le second ne se met en mouvement, que lorsque le premier s'est avancé de l'intervalle qui doit être entre les rangs. Le troisième, que quand le second s'est avancé de la même quantité ; et ainsi du quatrième.

II. On peut faire serrer les rangs en avant en marchant. Pour cet effet le premier rang marche très-doucement, ou il fait des pas d'environ un pied ; les autres rangs vont plus vite, ou ils font de plus grands pas, jusqu'à ce qu'ils soient entièrement serrés les uns sur les autres.

Pour serrer le bataillon par rangs en arrière, on ordonne au dernier rang A B (fig. 7.) de ne pas bouger, et aux quatre autres de faire demi-tour à droite ; ce que les lignes qui représentent les armes ou le devant des rangs font voir exécuté dans la figure.

On fait ensuite serrer ces rangs sur le dernier A B, de même manière que dans le mouvement précédent : ce qui étant fait (fig. 8.), on ordonne aux quatre premiers rangs de faire demi-tour à gauche, pour faire face au terrain opposé au front du bataillon. Ce qui est exécuté, fig. 9.

Par ce mouvement, ce bataillon laisse vers le front une étendue vide, égale à celle qu'il occupe après l'avoir exécuté, et il diminue l'espace qu'il occupait en profondeur de la moitié, comme dans le mouvement précédent.

Pour faire remettre le bataillon, on commandera au dernier rang de ne point bouger, et l'on ordonnera aux autres de marcher en-avant, jusqu'à ce qu'ils aient repris chacun leur première position.

Pour serrer le bataillon par rangs sur son centre, on le supposera sur cinq rangs en bataille, ou sur un autre nombre quelconque impair.

On ordonnera au rang du milieu A B (fig. 10.) de ne pas bouger ; on fera faire demi-tour à droite au premier et deuxième rang ; on les fera ensuite marcher, ainsi que le quatrième et cinquième rangs, pour serrer sur le troisième A B : ce qui étant fait, le premier et deuxième rangs feront demi-tour à gauche, pour faire face au même côté que le reste du bataillon.

REMARQUES.

I. Il est aisé de serrer le bataillon par la même méthode, sur tel rang que l'on veut ; il suffit d'ordonner au rang sur lequel on veut serrer, de ne pas bouger, et de faire avancer sur lui les autres, comme on vient de l'exécuter.

II. Pour remettre le bataillon dans son premier ordre, ou sa première position, on ordonnera aux deux derniers rangs de faire demi-tour à droite, ensuite de marcher, ainsi qu'aux deux autres de la tête pour reprendre le terrain qu'ils occupaient d'abord. Lorsque les deux derniers rangs y seront parvenus, ils feront demi-tour à gauche, et la troupe sera alors dans son premier état.

Pour serrer le bataillon par files, c'est-à-dire pour diminuer l'étendue de son front, il faut, comme on l'a déjà remarqué, que les files soient assez espacées les unes des autres, pour qu'elles puissent se rapprocher ; car il est évident que si elles sont si proches, que les soldats n'aient que la liberté du coude, c'est-à-dire si chaque fîle n'occupe qu'environ deux pieds, le resserrement ne serait pas possible. Nous supposerons dans les exemples suivants, qu'elles ont quatre pieds de largeur, y compris l'épaisseur des hommes de la fîle ; c'est environ deux pieds d'intervalle de l'une à l'autre. Les suppositions différentes qu'on pourra faire à cet égard, ne changeront rien à l'exécution des mouvements que l'on Ve expliquer.

Nous avons dit qu'on serre le bataillon par files sur la droite, sur la gauche, et sur le centre ; ces différents mouvements n'ont, pour ainsi dire, besoin ni d'explication, ni de figures, après ce qu'on a Ve ci-devant sur la manière de serrer les rangs du bataillon.

En effet, il n'y a qu'à regarder les files comme des rangs, et faire ensuite sur ces files considérées comme rangs, les mêmes opérations par lesquelles on a serré les rangs.

Ainsi pour serrer le bataillon A B C D (fig. 11.) sur la fîle B C de la droite, il faut commander à cette fîle de ne pas bouger ; à toutes les autres de faire à-droite et de s'approcher, ou se serrer ensuite sur B C.

La figure 12. fait voir ce mouvement exécuté. On ordonne après cela à toutes les files qui ont marché, de faire à-gauche, pour faire face du même côté que la fîle B C ; et l'on a le bataillon serré sur cette file, réduit à la moitié de son front. Fig. 13.

On serrera le bataillon de la même manière sur la fîle de la gauche.

Pour le serrer sur la fîle du centre E F (fig. 14.), on ordonnera à cette fîle de ne pas bouger, aux files de la droite de faire à-gauche sur le talon droit, et à celles de la gauche de faire à-droite sur le talon gauche ; après quoi on commandera aux files de la droite et de la gauche, de se serrer sur la fîle du centre E F ; les files de la droite partiront du pied droit, et celles de la gauche du pied gauche : elles marcheront le pas ordinaire sur celles du centre, et elles s'arrêteront successivement à mesure qu'elles joindront celle qui les précède.

On fera ensuite remettre les files de la droite et de la gauche dans la même position que celle du centre, en faisant faire un à-droite sur le talon droit, aux files de la droite, et un à-gauche sur le talon gauche, aux files de la gauche ; alors tout le bataillon fera face du même côté A B, et il aura diminué également son étendue vers la droite et la gauche.

REMARQUES.

I. Il est évident qu'on serrera de la même manière le bataillon sur telle autre fîle qu'on voudra.

II. On peut serrer le bataillon de pied ferme sur telle de ses files que l'on veut, comme on vient de l'expliquer ; mais on peut aussi le serrer de même en marchant ; alors les files s'approchent en marchant autant qu'il est possible, de celle sur laquelle elles doivent se serrer.

ARTICLE IV.

Des différentes manières d'ouvrir le bataillon. Les mouvements nécessaires pour ouvrir le bataillon sont absolument les mêmes que ceux qui servent à le serrer ; mais ils s'exécutent en sens contraire. Ainsi on peut ouvrir le bataillon :

Pour ouvrir le bataillon A B C D (fig. 15.) par rangs en-avant, on ordonne au dernier rang D C de ne point bouger ; aux autres de marcher en-avant.

On observe de ne faire marcher le second rang, qu'après que le premier est avancé d'une distance convenable ; le troisième, qu'après que le deuxième a marché un peu en-avant ; et ainsi des autres rangs.

Lorsque le premier rang est aussi avancé qu'on le veut, et qu'ils se trouvent à-peu-près également espacés ou distants les uns des autres, le commandant du bataillon leur ordonne de s'arrêter, en disant halte.

La figure fait voir ce mouvement achevé ; le premier rang A B C étant parvenu en F G, le dernier n'a point bougé.

Les zéros marquent la place que le second et le quatrième rangs occupaient avant de marcher en-avant.

On suppose dans la figure que l'on a doublé l'intervalle des rangs : ainsi le premier A B s'est avancé d'un intervalle A F : égal à la profondeur du bataillon ; le second s'est avancé du premier à la distance d'un intervalle, double de celui qui était d'abord entre les rangs ; le troisième est venu occuper la place A B du premier ; et le quatrième, celle du troisième ; le cinquième D C n'a pas bougé.

On ouvrira de la même manière le bataillon par rangs en-arrière.

On ordonnera au premier rang de ne pas bouger ; on fera faire demi-tour à droite aux autres rangs ; et l'on commandera ensuite au dernier rang de marcher devant lui autant qu'on le jugera nécessaire ; et aux autres rangs de marcher à sa suite comme dans le mouvement pour ouvrir les rangs en-avant.

Lorsqu'on les trouvera assez avancés, on leur ordonnera de s'arrêter et de faire demi-tour à gauche, pour faire face du même côté que le premier rang.

Pour ouvrir le bataillon A B C D (figure 16.) en-avant et en-arrière, on ordonnera au rang du centre F G de ne point bouger ; et à ceux de derrière, de faire demi-tour à droite. On fera ensuite marcher les premiers et derniers rangs en-avant ; dans le même temps, autant qu'on le jugera nécessaire ; on les fera ensuite arrêter en disant halte. On commandera aux derniers rangs de faire demi-tour à gauche : alors le bataillon A C B D occupera l'espace H I L K, c'est-à-dire qu'il aura augmenté en-avant et en-arrière l'espace qu'il occupait d'abord.

Pour ouvrir les bataillons par files, il faut regarder les rangs comme des files, en faisant faire à droite ou à gauche aux files, suivant les mouvements qu'elles doivent faire en-avant ou en-arrière ; et faisant ensuite tout ce qui a été pratiqué ci-devant pour ouvrir les rangs du bataillon ; on ouvrira également les files.

Ainsi pour ouvrir le bataillon X (fig. 17.) par files vers la droite, on ordonnera à la fîle A B de la gauche de ne pas bouger, et aux autres de faire à-droite. On les fera ensuite marcher en-avant ; observant que la seconde ne se mette en marche, que lorsque la première aura fait quelques pas en avant. La troisième de même après la deuxième ; ainsi de suite. Lorsque la fîle de la droite sera assez avancée, on ordonnera à toutes les files de s'arrêter, ou de faire halte ; on fera faire à gauche, sur le talon droit, à toutes les files, excepté la première A B qui n'a pas bougé ; et le bataillon fera face alors du même côté A C.

On ouvrira de la même manière le bataillon par files vers la gauche, et vers la droite et la gauche en même temps, en ordonnant à la fîle du centre de ne pas bouger, etc.

Il est évident que par ce mouvement on augmente le front du bataillon, de la même manière que par celui de l'article précédent, on augmente sa profondeur : c'est pourquoi si l'on veut faire écarter les files, de manière que leur intervalle soit double de celui qu'elles ont ordinairement quand elles sont serrées, il faut que la fîle de la droite, si l'on ouvre le bataillon de ce côté, marche devant elle d'un espace égal à celui du front de la troupe ; et que les autres qui la suivent règlent leurs pas, de manière qu'elles laissent insensiblement entr'elles un intervalle double de celui qu'elles avaient d'abord.

Si l'on voulait que l'intervalle des files devint triple ou quadruple, etc. il faudrait que la fîle du flanc du bataillon, du côté qu'on veut l'ouvrir, s'avançât d'un espace triple ou quadruple, etc. du front qu'il avait avant ce mouvement.

Lorsqu'on veut doubler l'intervalle des files, ou au lieu de deux petits pas d'un pied et demi qu'elles occupent étant serrées, leur en donner un de quatre, le soldat qui suit la première fîle qui marche en avant sur la droite ou la gauche du bataillon, commence à marcher au troisième pas de la fîle qui le précède : au cinquième, lorsque l'intervalle des files doit être triple, etc. et cela afin que toutes les files marchent ensemble, et que le mouvement soit plus promptement exécuté.

REMARQUE.

Dans les différents mouvements exécutés dans les articles précédents, on a toujours observé de faire marcher les soldats en avant, et non pas de côté, ou par pas obliques, afin de rendre ces mouvements plus simples et plus réguliers. On se dispense néanmoins quelquefois de cette simplicité de mouvement, qui n'est pas, à la vérité, d'une nécessité absolue, mais qu'il est bon de conserver pour accoutumer les troupes à exécuter avec grâce et précision les commandements qu'on leur fait pour changer leur ordre de bataille ou leur première formation. Cette méthode est d'ailleurs très-ancienne, puisqu'elle était observée dans les mouvements de la phalange des Grecs.

ARTICLE V.

De la manière de doubler les rangs et les files d'une troupe ou d'un bataillon, et de les dédoubler.

Doubler les rangs d'une troupe, ce n'est pas lui en donner huit lorsqu'elle n'en a que quatre ; et doubler les files, ce n'est pas non plus si elles sont, par exemple, au nombre de 120 en former 240 ; mais doubler les rangs, c'est doubler le nombre d'hommes de chaque rang ; et doubler les files, c'est également doubler le nombre d'hommes dont elles sont composées.

Ainsi si l'on a un bataillon dans lequel les rangs soient de 120 hommes ; doubler les rangs de ce bataillon, c'est les mettre à 240 ; et doubler les files, si elles sont à quatre hommes, c'est les mettre à huit.

Il est évident qu'en doublant les rangs, on augmente le front du bataillon de moitié : mais qu'on diminue aussi ses files de moitié, et qu'en doublant les files, on diminue le front du bataillon de moitié, mais qu'on augmente sa hauteur de moitié : car comme le bataillon est composé de deux dimensions, savoir, de son étendue de front, et de sa hauteur ou profondeur, et que dans les différents mouvements, dont nous venons de parler, on n'y ajoute pas de nouveaux soldats ; il est clair qu'on ne peut augmenter une dimension qu'aux dépens de l'autre, c'est-à-dire le front que par la hauteur, et celle-ci par le front.

Comme ces manœuvres d'augmenter et de diminuer les rangs et les files du bataillon se font plus commodément, et par cette raison plus ordinairement en les augmentant ou diminuant de la moitié, que si on les augmentait ou diminuait de toute autre partie, elles ont été appelées doublements et dédoublements : de-là vient qu'on les énonce par ces expressions, doubler et dédoubler les rangs, doubler et dédoubler les files.

Ces différentes évolutions ont pour objet d'étendre ou de resserrer le bataillon, pour augmenter la force de l'une ou de l'autre de ses dimensions, suivant le terrain qu'il doit occuper, et la position de l'ennemi qu'il doit combattre. On Ve donner la manière de les exécuter.

On peut doubler les rangs en avant et en arrière, et les différentes manœuvres de faire ce mouvement, peuvent, suivant M. Bottée, se réduire à cinq principales.

1°. Par rangs.

2°. Par demi-files.

3°. Par quart de files.

4°. Sur les ailes.

5°. En-dedans ou dans le centre.

Par le premier doublement, on double l'intervalle des rangs en doublant leur étendue.

Par le deuxième, on conserve le même intervalle des rangs en les doublant.

Par le troisième, on partage la troupe en deux parties, lorsqu'elle a beaucoup de hauteur, en sorte qu'il y a entre ces deux parties un intervalle capable de contenir plusieurs rangs.

Par le quatrième, on ouvre les files lorsqu'elles sont trop serrées, de manière qu'on puisse passer dans les intervalles, et l'on met les chefs de demi-files au premier rang.

Enfin le cinquième, c'est lorsque les files sont trop serrées, et qu'on veut que le premier rang occupe les ailes ou les flancs du bataillon.

PREMIER PROBLEME.

Doubler les rangs à droite en-avant.

On commandera au premier et au troisième rangs de ne point bouger, et au deuxième et au dernier de marcher ensemble ; savoir, le second, pour entrer dans les intervalles des hommes du premier, et le quatrième, pour entrer de même dans le troisième.

Pour entrer ainsi les uns dans les autres, chaque soldat du second rang Ve se placer à la droite de son chef de fîle dans le premier, de même chaque soldat du quatrième à la droite du troisième rang qui est dans la même file.

Si le doublement se faisait à gauche, chaque soldat du deuxième et quatrième rang se placerait à la gauche du soldat qui est vis-à-vis de lui dans le rang qui doit être doublé.

Si la troupe était sur un plus grand nombre de rangs que quatre, par exemple sur six, il faudrait ordonner alors au premier, au troisième et au cinquième de ne point bouger, ou ce qui est plus commode, ordonner, comme on le fait dans l'usage ordinaire, aux rangs impairs de ne point bouger, et aux autres, c'est-à-dire aux rangs pairs, de doubler, etc.

On double plus communément les rangs à gauche qu'à droite, mais ce mouvement n'a pas plus de difficulté d'un côté que de l'autre.

Sait la troupe ou le bataillon A B C D, (fig. 18.), dont on veut doubler les rangs à droite, on commandera donc au premier A B, et au troisième E F, ou aux rangs impairs, de ne point bouger, et aux deux autres, de doubler ; savoir, le second G H, dans le premier A B, et le dernier D C, dans le troisième E F ; alors les soldats de G H iront se mettre chacun à la droite de leur chef de fîle dans le rang A B, pendant que ceux de D C feront de même dans E F.

Pour faire remettre cette troupe dans sa première position, on dira : rangs qui avez doublé, remettez-vous ; alors les rangs qui ont doublé, font demi-tour à droite sur le talon droit, lorsque le doublement a été fait à droite, comme on le suppose ici, et à gauche sur le talon gauche, lorsqu'il a été fait à gauche ; et au mot de marche, les soldats des rangs qui ont doublé, partant du pied gauche, font autant de pas pour reprendre les places qu'ils occupaient d'abord, qu'ils en font pour joindre les rangs qu'ils ont doublé.

Lorsqu'ils y sont parvenus, on leur ordonne de s'arrêter, et ensuite de faire face en tête par un demi-tour à droite sur le pied droit, ou par un demi-tour à gauche sur le talon gauche.

On doublera de la même manière les rangs en arrière ; et pour cet effet, on fera entrer le troisième rang dans le quatrième, et le premier dans le second.

REMARQUES.

I. Plusieurs officiers font remettre par un à-droite ou par un à-gauche, les rangs qui ont doublé ; et cela, parce que les soldats de ces rangs n'ont pas ordinairement assez de place dans les rangs qu'ils ont doublés, pour faire commodément le demi-tour à droite ou à gauche : d'ailleurs la marche en devient un peu plus aisée, le soldat se présentant alors plus directement à la ligne oblique qu'il doit décrire pour se remettre, et que de plus, il ne s'agit plus, lorsqu'il est parvenu à son premier poste, que de faire un à-gauche sur le talon gauche, pour faire face à son chef de file.

II. Il est évident que pour doubler les rangs, il faut qu'ils soient en nombre pair dans le bataillon ; c'est pourquoi s'il devient en nombre impair, comme, par exemple cinq ou sept, on supprimerait le dernier rang, et l'on en formerait des files à la droite ou à la gauche du bataillon.

II. PROBLEME.

Doubler les rangs par demi-files à droite en-avant.

Sait le bataillon A B C D (fig. 19.), rangé à l'ordinaire sur quatre rangs, on ordonnera aux deux premiers A B, E F, de ne pas bouger, et l'on fera aux autres ce commandement : à droite par chefs de demi-files, doublez vos rangs en-avant ; alors les soldats du troisième rang G H, qui est formé ou composé des chefs de demi-files, avanceront pour se mettre chacun à la droite de leurs chefs de files dans le premier rang ; ceux du quatrième le suivront, et se placeront derrière eux dans le second rang.

Pour les faire remettre, on ordonnera aux rangs qui ont doublé, de faire demi-tour à droite ou à gauche, et alors les soldats du quatrième rang sortiront du second pour aller reprendre leur premier poste ; ceux du troisième les suivront pour aller aussi reprendre leur premier terrain ; lorsqu'ils y seront parvenus les uns et les autres, on leur fera faire face en tête par un demi-tour à droite sur le talon droit. Voyez sur ce mouvement la première remarque du problème précédent, sur la manière de faire remettre les rangs qui ont doublé ; elle peut également s'appliquer ici.

On doublera de la même manière les rangs par demi-files à gauche, et par demi-files en-arrière, à droite ou à gauche.

III. PROBLEME.

Doubler les rangs par quarts de files en-avant.

Si la troupe ou bataillon est rangé sur quatre rangs, ce mouvement est absolument le même que le premier de cet article : si on le suppose sur un plus grand nombre de rangs, comme, par exemple, sur huit, elle se réduira au précédent.

Pour cet effet, on le supposera partagé en deux troupes de quatre rangs chacune : la première sera composée des quatre premiers rangs A B, E F, G H, et I L ; et la seconde, des quatre derniers K M, N P, R S, et C D, (fig. 20.)

On doublera les deux premiers rangs A B et E F, par demi-files à droite ou à gauche, c'est-à-dire par les deux rangs G H et I L.

On doublera de même les deux rangs K M et N P par les demi-files qui forment les rangs R S et C D, et l'on aura le bataillon, dont les rangs seront doublés par quarts de files en-avant.

On fera remettre chaque rang dans sa première position comme dans le second mouvement de cet article.

Il est évident que ce mouvement s'exécutera en-arrière avec la même facilité qu'en-avant : il en sera de même de celui de doubler les rangs sur le centre ou sur les quarts de files du milieu, par quarts de files de la tête et de la queue, ou bien sur la tête et sur la queue, par quarts de files du milieu.

IV. PROBLEME.

Doubler les rangs en-avant par demi-files sur les ailes.

Sait le bataillon ou une partie du bataillon A B, C D (fig. 21.), rangés sur quatre rangs, et dont on veut doubler les rangs en-avant par demi-files sur les ailes.

On commandera aux deux premiers rangs A B, E F, de ne point bouger, et aux deux derniers G H et D C, de se serrer à la pointe de l'épée : on fera faire à droite à chacun de ces demi-rangs de la droite, et à gauche à chacun de ceux de la gauche : on fera ensuite marcher ces demi-rangs devant eux, jusqu'à ce que les files du centre ou du milieu L M et N P, soient à la droite et à la gauche des demi-files du bataillon, c'est-à-dire L M à la droite de C F, et N P à celle de A F.

On fera faire après cela un à droite et un à-gauche à ces demi-rangs ainsi avancés, et on les fera marcher devant eux jusqu'à ce qu'ils soient dans la direction des deux rangs A B et E F, qui n'ont point bougé.

Un mouvement opposé à celui qu'on vient de décrire, les fera remettre dans leur première position.

Il est évident qu'on doublera de la même manière les rangs en-arrière ; car si l'on fait faire un demi-tour à droite ou à gauche à la troupe, pour qu'elle fasse face à la queue du bataillon, on pourra alors regarder les derniers rangs comme les premiers, et ceux-ci comme les derniers : il ne s'agit plus après cela que de répeter ou exécuter sur la troupe, ainsi tournée, le mouvement qu'on vient d'expliquer.

On pourra ainsi doubler, par ce même problème, les rangs en-avant ou en-arrière par quarts de files.

Pour exécuter ce mouvement, la troupe doit être rangée sur huit, douze, seize, etc. de hauteur, c'est-à-dire que le nombre de ses rangs doit être multiple de quatre, ou qu'il puisse se diviser par quatre : supposons le bataillon C D E F (fig. 22.), rangé sur huit de hauteur, on imaginera une ligne droite quelconque A B, qui le partagera en deux troupes de quatre de hauteur chacune.

On regardera chacune de ces troupes, comme une troupe dont il faut doubler les rangs par demi-files sur les ailes ; ce qu'on exécutera facilement par le moyen du problème précédent.

Il est évident que ce mouvement ayant été exécuté sur chacune des deux parties du bataillon C D E F, dans le même temps ce bataillon aura doublé ses rangs par quarts de files sur les ailes.

La figure rend cela trop sensible pour s'y arrêter plus longtemps.

On doublera également les rangs de cette même troupe par quarts de files de la tête et de la queue.

Pour cet effet, on considérera encore la troupe ou le bataillon A B C D (fig. 23.), qu'on suppose toujours à huit de hauteur, divisé en deux troupes particulières de quatre rangs chacune ; on ordonnera aux quatre rangs du milieu de ne point bouger, et l'on fera doubler les deux premiers rangs de la troupe de la tête, c'est-à-dire le premier et le second, par demi-files de cette troupe sur les ailes en-arrière : on fera également doubler les deux derniers rangs de la seconde troupe en-avant par demi-files sur les ailes ; et lorsque ce mouvement sera exécuté sur chacune des deux troupes, ce qui doit se faire dans le même temps, la troupe entière aura doublé ses files par quarts de files de la tête et de la queue, ce qui est évident.

Dans la figure les deux premiers demi-rangs de la tête à droite, ont fait à droite pour s'avancer vers la droite ; et ceux de la gauche, à gauche pour s'avancer aussi de ce côté : les deux derniers demi-rangs de la queue, ont fait aussi chacun le même mouvement.

Les lignes ponctuées représentent le chemin qu'ils font à droite et à gauche, pour aller occuper les ailes des quatre rangs du milieu.

On doublera encore les files par quarts de files sur les ailes en tête et en queue, en se servant de la même méthode ; car supposant toujours la troupe à huit de hauteur, et divisée en deux troupes de quatre rangs chacune, le troisième et le quatrième rang de la première partie, doubleront le premier et le deuxième en-avant, par demi-files sur les ailes ; le cinquième et le sixième, c'est-à-dire les deux premiers de la deuxième troupe, doubleront également les deux derniers en-arrière, par demi-files sur les ailes, etc.

V. PROBLEME.

Doubler les rangs en-dedans par demi-files.

Pour exécuter ce mouvement, soit la troupe A B C D (fig. 24.) ; on ordonnera aux deux derniers rangs, si la troupe est rangée sur quatre rangs, comme on le suppose ici, aux trois derniers, si elle est sur six, etc. de ne point bouger, et aux deux premiers rangs de faire à-droite et à-gauche par demi-rang : chaque demi-rang de la tête marchera ensuite devant lui, c'est-à-dire ceux de la droite, vers la droite, ceux de la gauche, vers ce côté, et cela jusqu'à ce que les files du centre de la droite et de la gauche débordent la droite ou la gauche des deux derniers rangs, qui n'ont point bougé de l'épaisseur d'une file. On fait faire après cela face en tête par un à-droite et un à-gauche aux deux rangs qui ont marché ; et l'on fait avancer les deux derniers dans l'intervalle qui se trouve ainsi entre les deux parties des premiers, et le mouvement est achevé (fig. 25.).

Ce mouvement s'exécutera en-arrière avec la même facilité ; car faisant faire face à tous les rangs à la queue du bataillon, par un demi-tour à droite ou à gauche, les deux derniers rangs pourront alors être regardés comme les premiers : c'est pourquoi ce qu'on vient d'expliquer pour doubler ces rangs en-dedans, s'appliquera également à doubler les deux derniers rangs de la même manière.

Pour doubler les rangs en-dedans par quarts de files, lorsque la troupe A B C D (fig. 26.) est, par exemple, à huit de hauteur.

On la considérera comme séparée en deux parties, chacune de quatre de hauteur ; et alors on fera pour chaque partie ce qui vient d'être enseigné ci-devant. La figure 26 représente ce mouvement exécuté.

On a marqué par des zéros la place qu'occupaient les rangs qui ont doublé.

On doublera également les rangs du centre en-dedans, par quarts de files de la tête et la queue.

Pour cet effet on fera marcher à droite les quatre demi-rangs du centre de la droite, et à gauche ceux de la gauche, jusqu'à ce que les files du centre de ces rangs se trouvent dans l'alignement de la fîle de la droite et de la gauche des rangs de la tête et de la queue : après quoi on fera faire un demi-tour à droite aux deux rangs de la tête ; on les fera marcher devant eux, pour aller se placer dans l'intervalle des deux premiers demi-rangs du centre, où étant parvenus, ils feront face en tête par un demi-tour à gauche. Pendant que ces deux rangs s'avanceront ainsi vers le troisième et le quatrième, le septième et le huitième marcheront devant eux, pour aller se mettre à la hauteur du cinquième et du sixième rang : lorsqu'ils y seront arrivés, le mouvement dont il s'agit sera exécuté. Voyez la figure 27.

On doublera de même les rangs de la tête et de la queue par quarts de files du centre ou du milieu.

Pour faire ce mouvement (fig. 28.) on fera marcher sur la droite et sur la gauche chacun des demi-rangs de la droite et de la gauche du premier et du second rang ; et de même ceux du septième et du huitième, qui marcheront en-avant jusqu'à ce que les files du centre qui les terminent, se trouvent dans l'alignement des files de la droite et de la gauche des rangs du centre, etc.

ARTICLE VI.

Du doublement des files. Tout ce que l'on a dit sur le doublement des rangs, peut s'appliquer au doublement des files, et s'exécuter de la même manière.

Car si l'on fait faire à-droite ou à-gauche aux rangs d'une troupe en bataille, elle fera face à l'une de ses ailes ; et alors les files pourront, comme on l'a déjà dit, être considérées comme des rangs, et les rangs comme des files.

C'est pourquoi on pourra doubler les files en autant de manières qu'on a doublé les rangs ; savoir

1°. Par files à droite et à gauche.

2°. Par files en tête.

3°. Par files en queue.

4°. Par tête et par queue.

5°. En-dedans.

Pour doubler les files à droite et à gauche, il faut que les rangs soient assez ouverts pour qu'un autre rang puisse se placer dans leur intervalle.

Il faut remarquer que ce qu'on appelle ici doubler les files, s'exprimerait plus exactement par doubler le nombre des rangs, puisqu'on ne saurait doubler le nombre d'hommes des files, qu'on ne double le nombre des rangs de la troupe ou du bataillon ; mais comme il ne s'agit pas d'introduire de nouveaux termes dans les évolutions, mais de bien expliquer ceux qui sont en usage, nous entendons donc par doubler les files, doubler leur étendue, ou le nombre d'hommes dont on les avait composées d'abord.

Lorsque les rangs sont serrés à la pointe de l'épée, et qu'on ne veut point les ouvrir, on ne peut doubler les files que par l'une des quatre dernières manières qu'on vient de déterminer, c'est-à-dire par tête ou par queue, par tête et par queue, et en-dedans. Quand ils sont ouverts, on peut se servir de toutes les différentes manières du doublement ; mais c'est tout au plus dans l'exercice, dit M. Bottée : car comme les dernières sont moins simples que la première, celle-ci doit être préférée toutes les fois qu'on veut imiter les mouvements ou les manœuvres qu'on exécute à la guerre.

PREMIER PROBLEME.

Un bataillon ou une troupe quelconque étant en bataille, doubler les files à droite.

Sait la troupe A B C D (fig. 29.) rangée sur quatre rangs, il s'agit de doubler ses files à droite.

Si les rangs de cette troupe sont serrés, on les fera ouvrir par ce commandement : ouvrez vos rangs. Alors le premier rang marchera en-avant de trois fois l'espace nécessaire pour l'intervalle d'un rang et son épaisseur, c'est-à-dire, dans cet exemple, de 9 pieds : le second s'avancera seulement de 6, et le troisième de 3 : le dernier ne bougera pas.

Si la troupe était rangée sur six rangs, le premier s'avancerait de 15 pieds, le second de 12, le troisième de 9, le quatrième de 6, le cinquième de 3, et le sixième ne bougerait point.

On suppose dans la figure que les rangs sont ouverts, et qu'il ne s'agit plus que de faire doubler les files.

On ordonnera pour cet effet aux files qui doivent être doublées, de ne point bouger. Ces files sont la première à droite, lorsque le doublement se fait à droite ; puis la troisième, la cinquième, la septième, etc. afin que les files qui doivent être doublées, se trouvent chacune entre celles qui doivent doubler.

On commandera ensuite aux files qui doivent doubler, de faire à-droite sur le talon gauche, et d'entrer dans celles qui n'ont point bougé à leur droite ; ce qui peut se faire de deux manières.

1°. Lorsque les chefs de files qui doublent, se mettent devant les chefs de files qui sont doublés.

2°. Lorsque les chefs de files qui doublent, se mettent derrière ceux des files qu'on veut doubler.

Cette dernière méthode parait préférable à la première, parce qu'il est plus aisé aux chefs de files qui doivent doubler, de se placer directement derrière ceux des files qu'on veut doubler, que de se mettre directement devant eux : c'est aussi celle qui est d'un usage plus commun. Mais quelle que soit celle de ces deux manières qu'on adopte, les files qui doublent doivent toujours entrer dans celles qu'elles doivent doubler en partant du pied gauche, et en marchant de côté sans tourner le corps.

Ce mouvement peut s'exécuter sans que les files qui doivent doubler fassent à-droite, surtout lorsque le doublement se fait en-avant ; car on peut faire marcher les soldats, pour leur faire joindre les files qu'ils doivent doubler, par un pas oblique ou de côté. Mais le mouvement qu'on leur fait d'abord faire à droite, les met en état de marcher plus facilement, et par conséquent avec plus de grâce, pour s'avancer dans les files qu'ils doivent doubler.

Quoi qu'il en sait, chaque soldat doit observer d'occuper le milieu de l'intervalle qui se trouve entre les hommes des files qui sont doublées.

Lorsque les files qui doublent sont ainsi entrées dans celles qu'elles doivent doubler, on les fait arrêter en disant, halte.

Si elles ont fait un à-droite pour s'avancer dans les files voisines, on leur fait faire face en tête par un à-gauche sur le talon gauche.

Pour faire reprendre à la troupe son premier arrangement, on ordonne aux files qui ont été doublées de ne point bouger, et l'on fait aux autres ce commandement : à gauche, remettez vos files.

Alors les files qui ont doublé font à-gauche, et elles vont, en marchant de côté, reprendre la place qu'elles avaient d'abord occupée, etc.

Il est évident qu'on doublera les files à gauche de la même manière, en faisant faire du côté du flanc gauche ce que l'on vient de faire exécuter vers le droit.

Lorsque les files sont doublées, il est clair que l'on a diminué le nombre des hommes du front du bataillon de moitié : si après cela elles se trouvent encore en nombre pair, et qu'on les redouble une seconde fais, elles seront quadruplées, et le front du bataillon réduit au quart de celui qu'il avait d'abord ; ce qui est évident.

SECOND PROBLEME.

Doubler les files par demi-rangs vers l'aîle droite ou gauche.

Sait la troupe ou le bataillon A B C D (fig. 30.) dont on veut doubler les files par demi-rangs ; par exemple, de la gauche A D vers la droite B C.

On commandera aux demi-rangs de la droite de ne pas bouger, et à ceux de la gauche de faire à-droite sur le talon gauche, et de marcher ensuite tous ensemble de côté, pour entrer dans les intervalles des demi-rangs qu'ils doivent doubler ; savoir le premier dans le milieu de l'intervalle du premier et du second demi-rang de la droite ; le second dans l'intervalle des second et troisième, etc. Lorsqu'ils seront exactement placés derrière les demi-rangs dont ils doivent doubler les files, on leur fera faire face en tête par un à-gauche.

On fera remettre la troupe dans sa première position, en ordonnant aux demi-rangs qui ont doublé de faire à-gauche ; et de marcher ensuite de côté, en faisant face à l'aîle gauche, pour aller reprendre leur premier poste à cette aîle : lorsqu'ils y seront parvenus, on leur commandera de faire halte ou de s'arrêter, et on leur fera faire face en tête par un à-droite.

Il est évident qu'on doublera les files de la gauche par demi-rangs de la droite, de la même manière.

REMARQUES.

Au lieu de faire marcher par le côté les demi-rangs qui doivent doubler les files des autres, ainsi que les auteurs qui ont écrit sur la Tactique, le prescrivent ; on pourrait, ayant d'abord fait faire un demi-tour à droite ou à gauche à ces demi-rangs, les faire marcher ensuite devant eux, c'est-à-dire faisant face à la queue du bataillon, jusqu'au milieu de l'intervalle des rangs dont ils doivent doubler les files ; après quoi leur faisant faire à droite ou à gauche pour faire face à l'aîle dans laquelle ils doivent entrer, leur ordonner de marcher dans l'intervalle des demi-rangs de cette aile, jusqu'à ce que les chefs de files de ces demi-rangs soient parvenus dans la première fîle de la droite ou de la gauche de ce bataillon : alors les demi-rangs qui auront ainsi marché, feront face en tête par un à-droite ou un à-gauche.

Ce mouvement s'exécuterait de cette manière avec plus de grâce, de régularité et de facilité, qu'en faisant marcher les soldats de côté, comme il est enseigné dans les différents traités d'évolutions. Voyez la figure 31.

II. Il est clair qu'au lieu de doubler ainsi les files en-dedans, c'est-à-dire en faisant placer les chefs de files des demi-rangs qui doivent doubler, derrière ceux des demi-rangs qui ne doivent pas bouger, on peut faire ce mouvement en-avant, en faisant placer les chefs de files des demi-rangs qui doivent marcher, devant les demi-rangs dont les files doivent être doublées, etc.

TROISIEME PROBLEME.

Doubler les files à droite ou à gauche par quarts de rangs.

Ce problème peut être considéré comme entièrement semblable au précédent, et par conséquent il peut s'exécuter de la même manière.

Pour le démontrer, soit le bataillon A B C D (fig. 32.) dont on veut doubler les files par quarts de rangs à droite.

On imaginera la troupe partagée en deux parties égales X et Y, par une ligne droite F G, tirée de la tête à la queue.

Alors les quarts de rangs de la troupe entière seront les demi-rangs de la moitié de chacune de ces deux parties ; c'est pourquoi doublant les files de ces parties par demi-rang à droite, il est évident qu'on aura doublé les files de la troupe entière par quarts de rangs à droite ; ce qu'il fallait exécuter.

Il est évident que ce mouvement s'exécutera de la même manière à gauche, et qu'il partage la troupe en deux parties, éloignées l'une de l'autre de l'étendue d'un quart de rang.

QUATRIEME PROBLEME.

A droite et à gauche, par quarts de rangs des ailes, doubler les files sur les quarts de rangs du milieu.

Il s'agira, comme dans le problème précédent, de considérer la troupe comme divisée en deux parties égales par une ligne tirée de la tête à la queue, et de faire doubler les files de la gauche des demi-rangs de la droite, par les demi-rangs de la droite de cette partie ; et les files de la droite des demi-rangs de la gauche, par les demi-rangs de la gauche de cette partie, et le mouvement sera exécuté. Voyez la figure 33.

CINQUIEME PROBLEME.

A droite et à gauche, par quarts de rangs du milieu, doubler les files des quarts de rangs des ailes.

Pour exécuter ce mouvement, on considérera encore la troupe comme divisée en deux parties égales par le centre ; et l'on doublera les files des demi-rangs à droite, de la partie de la droite, par les demi-rangs de la gauche de cette même partie ; et les files des demi-rangs à gauche, de la partie de la gauche, par les demi-rangs de la droite de cette même partie.

Par ce dernier mouvement la troupe se trouve séparée en deux parties éloignées l'une de l'autre de l'intervalle d'un demi-rang. Voyez la figure 34.

SIXIEME PROBLEME.

Doubler les files en tête ou en-avant.

On suppose toujours la troupe rangée sur un nombre de files pair, c'est-à-dire qui peuvent se diviser exactement en deux parties égales.

Sait la troupe A B C D (figure 35.) dont on veut doubler les files en-avant. Ce mouvement peut s'exécuter vers la droite B C ou la gauche A D : nous supposerons qu'on veut le faire vers B C.

On commandera à la fîle B C de ne point bouger, ainsi qu'à la troisième, cinquième, septième, et ainsi de suite ; en sorte que chaque fîle qui doit se mouvoir, se trouve toujours entre deux files qui ne bougent point.

On fera ensuite marcher en-avant les files qui doivent doubler, jusqu'à ce que les serre-files débordent le premier rang de l'intervalle qui est entre les rangs.

On commandera à toutes les files qui auront marché de faire à-droite, et de s'avancer devant elles jusqu'à ce qu'elles soient chacune vis-à-vis la fîle qu'elles avaient à droite, et qui n'a pas bougé ; ce qui étant exécuté, on leur fera faire face en tête par un à-gauche, et le mouvement proposé sera achevé.

Pour faire remettre cette troupe dans sa première position, les files qui auront doublé feront à gauche, et elles marcheront devant elles jusqu'à ce qu'elles soient parvenues vis-à-vis le milieu des intervalles des files qu'elles ont doublées, là elles feront à gauche, pour faire face à la queue du bataillon ; et elles marcheront ensuite devant elles, pour reprendre leur première place entre les files qui n'ont point bougé. Elles feront après cela face en tête par un demi-tour à droite.

Ce mouvement s'exécutera de la même manière à gauche.

REMARQUES.

I. Il est d'usage, avant de doubler les files en-avant, de faire serrer les rangs à la pointe de l'épée. Cette attention, qui n'est point absolument nécessaire, donne néanmoins plus de facilité pour executer ce mouvement avec précision : car les soldats n'ayant entr'eux que l'intervalle dont ils ont besoin pour marcher, sont moins exposés à se déranger de l'ordre qu'ils doivent observer.

II. On peut doubler de la même manière les files en-arrière.

Car ayant fait faire demi-tour à droite ou à gauche aux files qui doivent doubler, elles n'ont plus qu'à faire les mêmes manœuvres en-arrière qu'on vient de leur faire faire en-avant.

III. On doublera aussi, en suivant la méthode de ce problème, les files en-avant et en-arrière, ou en tête et en queue en même temps.

Pour cet effet on supposera la troupe partagée en deux parties égales par une ligne droite, parallèle à la tête ou à la queue du bataillon, qui coupera les files en deux également : alors il ne s'agira plus que de doubler la partie de la tête par les files de cette partie en-avant, et de doubler celle de la queue en-arrière ; ce qui étant fait, la troupe aura doublé ses files en-avant et en-arrière.

SEPTIEME PROBLEME.

Doubler les files en-dedans vers la droite ou vers la gauche.

Sait le bataillon A B C D (fig. 36.) dont on veut doubler les files en-dedans vers la droite B C.

On distinguera d'abord les files qui doivent doubler, de celles qui doivent être doublées : ces dernières sont dans ce problème les première, troisième, cinquième, etc. On ordonnera à ces files, c'est-à-dire à celles qui doivent être doublées, de s'ouvrir en-avant et en arrière, jusqu'à ce que les demi-files de la tête débordent le premier rang de l'intervalle qui doit être entre les rangs, et que celles de la queue débordent également le dernier rang.

Ce mouvement étant exécuté, les files qui doivent doubler font à droite, et elles vont ensuite occuper la place ou l'intervalle laissé par les files qui se sont ouvertes, et qui doivent être doublées.

Lorsqu'elles sont parvenues dans la direction des demi-files qui ont marché en-avant et en-arrière, on leur fait faire face en tête par un à-gauche, et le mouvement est achevé.

Pour remettre la troupe, les files qui ont doublé font à-gauche, et ensuite elles vont reprendre leur première place, et les files qui se sont ouvertes en-avant et en-arrière font les mouvements nécessaires pour reprendre leur première place ; c'est-à-dire que celles qui ont été en-avant font un demi-tour à droite ou à gauche pour faire face à la queue du bataillon, et marcher ensuite vers le centre pour reprendre la place qu'elles y occupaient d'abord, pendant que celles qui se sont ouvertes en-arrière ; marchent en-avant, pour se rejoindre aux précédentes.

VIII. PROBLEME.

Doubler les files par demi-rangs.

On peut doubler les files par demi-rangs.

1°. En-avant, ou en-arrière.

2°. Par la tête, et par la queue en même temps.

3°. En-dedans.

Sait la troupe F G H K (fig. 37.) dont on veut doubler les files par demi-rangs en-avant, par exemple vers la droite G K.

Ce doublement peut se faire de deux manières.

Dans la première, tous les demi-rangs de la droite G K doivent marcher en-avant jusqu'à ce que les serre-files débordent les chefs de files des demi-rangs de la gauche de l'intervalle qui doit être entre les rangs. Après quoi l'on fait faire à-droite aux demi-rangs de la gauche, et on les fait marcher devant eux jusqu'à ce qu'ils soient parvenus derrière les demi-rangs qui ont marché en-avant, lorsqu'ils en occupent exactement la place, on leur fait faire face en tête par un à-gauche, et le mouvement est achevé.

Dans la seconde manière les demi-rangs de la droite ne doivent pas bouger. A l'égard de ceux de la gauche, on les fait marcher en-avant jusqu'à ce que les serre-files débordent les chefs de files des demi-rangs de la droite de l'intervalle qui doit être entre les rangs. On commande alors aux demi-rangs qui ont marché, de faire à-droite, et d'aller devant eux jusqu'à ce que la fîle qui mène la tête se trouve alignée sur la fîle de la droite qui n'a point bougé, et les autres files qui la suivent, sur toutes celles qui composent les demi-rangs de la droite. Alors on ordonne aux files qui ont marché de faire à-gauche pour faire face à la tête du bataillon, et le mouvement est exécuté.

REMARQUES.

I. Cette seconde manière de doubler les files par demi-rangs est plus simple que la première, parce qu'il n'y a que la moitié du bataillon qui se meut, pour exécuter le mouvement dont il s'agit ; au lieu que dans la première, la troupe entière a besoin de se mouvoir : mais on peut faire exécuter les mouvements de chacune de ces parties dans le même temps.

II. On ne parlera pas de la manière de faire remettre la troupe après qu'elle a exécuté le mouvement précédent. Cette opération parait trop aisée pour s'arrêter à la détailler. On en usera de même dans les mouvements suivants.

Il est évident que le mouvement qu'on vient d'expliquer s'exécutera à gauche comme on vient de le faire à droite ; et qu'on doublera aussi également les files en-arrière ou en queue par demi-rangs de la même manière, qu'en avant ou en tête.

Pour les doubler en-dedans, par exemple vers la droite.

Les demi-rangs de la droite s'ouvriront en-avant et en-arrière, c'est-à-dire que les demi-files des demi-rangs de la tête marcheront en-avant jusqu'à ce que les serre-files de ces demi-rangs débordent les chefs de files des demi-rangs de la gauche, de l'intervalle qui doit être entre les rangs, et les demi-files des demi-rangs de la queue feront demi-tour à-droite pour faire face à la queue.

Ces demi-rangs marcheront ensuite devant eux, sur le derrière du bataillon, jusqu'à ce qu'ils débordent le dernier des demi-rangs qui doivent doubler les files, de l'intervalle qu'on doit laisser entre les rangs.

On fera faire demi-tour à gauche à ces demi-rangs pour qu'ils fassent face en tête, et l'on commandera aux demi-rangs qui doivent doubler, de faire à droite et de marcher ensuite devant eux pour aller se placer dans l'intervalle des demi-rangs de la tête et de la queue de la droite du bataillon. Lorsqu'ils y seront parvenus, on leur fera faire face en tête par un à-gauche, et le mouvement sera exécuté.

On doublera de la même manière les files de la gauche en-dedans par demi-rangs de la droite.

IX. PROBLEME.

Doubler les files par quarts de rangs.

Ce problème peut s'exécuter en autant de manières que le précédent et par les mêmes mouvements.

Sait la troupe ou le bataillon A B C D (fig. 38.) dont on veut doubler les files, par exemple à droite en-avant, par quarts de rangs.

On le supposera partagé en deux également de la tête à la queue par une ligne droite quelconque FG.

On considérera alors chaque moitié comme une troupe particulière dont les demi-rangs seront les quarts de rangs de la troupe entière.

Présentement si l'on fait doubler les files de chaque demi-troupe par demi-rangs vers la droite, il est évident que la troupe ou le bataillon préposé A B C D aura doublé ses files par quarts de rangs à droite.

On voit par cet exemple qu'il ne s'agit dans ce problème que de répéter les mêmes manœuvres du précédent. C'est pourquoi l'on se dispensera, pour abréger, d'entrer dans un plus grand détail des autres mouvements qui le concernent.

Pour doubler les files de la même troupe en tête ou en queue, à-droite et à-gauche par quarts de rangs du milieu.

On la supposera encore divisée en deux parties égales par la ligne droite F G (fig. 39.) qui coupe les rangs en deux également.

On ordonnera aux quarts de rangs de la droite et à ceux de la gauche de ne point bouger, et aux quarts de rangs du milieu de marcher en-avant, jusqu'à ce que leurs serre-files débordent les chefs de files des quarts de rangs de la droite et de la gauche, de l'intervalle qui est entre les rangs.

On commandera alors aux quarts de rangs du milieu vers la droite, de faire à-droite, et à ceux de la gauche de faire à-gauche, et de marcher ensuite devant eux jusqu'à ce qu'ils soient vis-à-vis les quarts de rangs dont ils doivent doubler les files.

Lorsqu'ils seront exactement placés vis-à-vis ces files, on leur fera faire face en tête ; savoir, aux quarts du milieu à-droite par un à-gauche, et à ceux de la gauche par un à-droite, et le mouvement sera exécuté.

Il est évident que ce mouvement s'exécutera en arrière de la même façon.

Par ce mouvement la troupe se trouve partagée en deux parties à droite et à gauche, éloignées l'une de l'autre de l'intervalle d'un demi-rang.

Si l'on veut doubler les files du milieu à droite et à gauche par quarts de rangs des ailes, il faut faire faire à ces quarts de rangs ce qu'on vient de faire exécuter à ceux du milieu.

On doublera de même les files sur les ailes, par tête et par queue ; par quarts de rangs du milieu, soit à droite ou à gauche, ou bien à droite et à gauche en même temps. On les doublera également par quarts de rangs en-dedans soit vers la droite ou vers la gauche, soit en-avant ou en-arrière, et soit enfin par la tête et par la queue. Tout cela parait trop aisé à exécuter après ce qui précède, pour s'y arrêter plus longtemps.

ARTICLE VII.

Des Conversions.

Nous avons déjà expliqué en quoi consiste le mouvement appelé conversion. Voyez CONVERSION. C'est pourquoi il ne s'agit guère ici que d'en donner la figure.

Sait pour cet effet le bataillon A B C D (fig. 40.) qui a fait un quart de conversion à gauche sur le soldat A de la gauche du premier rang.

On a marqué par des zéros la place des soldats de ce bataillon avant le quart de conversion, et par des points noirs à l'ordinaire celle qu'ils occupent chacun après l'exécution des quarts de conversion ; c'est-à-dire lorsque le bataillon est parvenu en A E F G où il fait face à l'aîle gauche de la première position.

Le rectangle ou carré long A I K H, représente l'espace ou le terrain qu'il occuperait s'il faisait un second quart de conversion, et ALMN, le lieu où il se trouverait s'il en exécutait un troisième. Un quatrième quart de conversion remettrait le bataillon dans sa première position.

Si l'on tire la diagonale A C du rectangle ou carré long A B C D, et que du point A pris pour centre et de l'intervalle de cette diagonale, on décrive l'arc C F, il exprimera le chemin du serre-fîle du flanc opposé à celui sur lequel se fait le mouvement. C'est pourquoi si l'on acheve de décrire la circonférence du cercle dont A C est le rayon, elle renfermera le terrain nécessaire pour exécuter la conversion entière du bataillon A B C D.

Si l'on tire la diagonale A F de la seconde position du bataillon, on verra facilement que l'angle F A C, formé par les deux diagonales A C et A F, est droit, et qu'ainsi dans chaque quart de conversion le soldat du dernier rang de la fîle de l'aîle opposée au mouvement, décrit un quart de circonférence dans chaque quart de conversion, comme tous les autres soldats du bataillon.

Dans le quart de conversion l'aîle qui soutient, c'est-à-dire la fîle dans laquelle se trouve le pivot, et les files voisines jusqu'au tiers à-peu-près du front du bataillon, doivent marcher très-lentement, et observer le mouvement de l'aîle opposée pour se régler sur elle, de manière que les rangs soient toujours en ligne droite, comme s'ils étaient autant de lignes inflexibles mouvantes autour du centre ou du pivot.

Le quart de conversion s'exécute d'autant plus aisément que les troupes sont placées sur moins de rangs, que ces rangs sont moins étendus, et qu'ils sont plus serrés les uns sur les autres.

ARTICLE VIII.

De la conversion avec pivot au centre. Comme on trouve dans le quart de conversion tout ce qui concerne la conversion entière, il suffira de considérer ici le quart de conversion, lorsque le pivot est au centre.

Cette espèce particulière de quart de conversion, en prenant pour pivot le soldat du centre du premier rang, se nomme ordinairement le moulinet, quelquefois aussi conversion centrale ; on peut l'exécuter pour plusieurs raisons.

1°. Parce que dans cette manœuvre il faut moins de terrain pour tourner le bataillon, que s'il tournait sur un de ses angles, et qu'il peut se rencontrer des terrains serrés et coupés, où un bataillon aurait à peine l'espace nécessaire pour tourner, le pivot étant au centre, et dans lesquels il ne l'aurait pas, si le pivot était à un de ses angles.

2°. Pour accélérer l'exécution du quart de conversion. Car en prenant le pivot au centre, on diminue la moitié du chemin que font les soldats, lorsque le pivot est aux flancs ; et l'on diminue par conséquent de moitié le temps du mouvement : ce qui est très-important dans plusieurs occasions, principalement, " lorsque l'ennemi marchant pour tomber sur le flanc qui est toujours le plus proche de lui, et qui est celui sur lequel il faut que le bataillon tourne pour lui faire front, ce flanc demeure longtemps exposé ; et le bataillon court risque d'être attaqué avant qu'il ait achevé son tour : auquel cas il ne peut soutenir le choc ". Art de la guerre, de M. le maréchal de Puysegur, tome I. page 258.

3°. Pour maintenir des troupes qui marchent en colonne, ou les unes derrière les autres, sur la même direction où on les a mises d'abord ; et cela si par quelques raisons on est obligé de leur faire faire un quart de conversion, pour faire face à un flanc de la marche, et qu'ensuite on leur fasse faire un autre quart de conversion pour reprendre leur chemin. Si on fait tourner ces bataillons sur le centre, on ne change pas la direction de leur marche, parce que les pivots restent sur la même ligne ; ce qui n'arrive pas lorsqu'on fait le quart de conversion en prenant l'un des angles pour pivot ; c'est ce qui peut se démontrer très-aisément de cette manière.

Saient les bataillons A B, A B, etc. (fig. 41.) qui marchent à la suite l'un de l'autre dans la ligne droite X Y, qui passe par leur centre. Si l'on suppose que chaque bataillon fasse un quart de conversion sur le centre, pour faire face à l'un de ses flancs, par exemple au flanc A, ils seront portés en a b, a b, etc. si on leur fait faire ensuite un autre quart de conversion, dans le sens opposé au premier, c'est-à-dire de gauche à droite ; si le premier a été fait de droite à gauche, il est évident que tous ces bataillons reprendront leur première position.

Si G H (fig. 42) est la direction du chemin que suivent les mêmes bataillons A B, A B, etc. et que le flanc gauche, par exemple, dans ces bataillons soit sur cette ligne, si on leur fait faire face en flanc par un quart de conversion de droite à gauche, ils seront placés sur la même ligne en a b, a b, etc. et si ensuite on veut les remettre en marche, suivant leur première direction, on ne pourra le faire qu'en leur faisant exécuter un quart de conversion de gauche à droite, sur l'angle opposé au premier pivot : alors ils se trouveront placés en C D, C D. etc. où les gauches c C etc. sont éloignées de leur première position de l'intervalle du front du bataillon. Comme on suppose l'ennemi sur le flanc gauche de la marche de ces bataillons, cette manœuvre en approche les bataillons de l'étendue de leur front : si elle était répétée deux fais, ils s'en approcheraient de deux fois cette même étendue ; ce qui serait un inconvénient fort considérable.

Si l'on veut faire reprendre aux troupes en marche leur première direction, elles ne sont plus en ligne droite les unes à la suite des autres, principalement s'il y a un grand nombre de troupes en marche, et qu'il n'y en ait qu'une partie qui ait fait la manœuvre qu'on vient d'expliquer : dans ces sortes de circonstances, le quart de conversion, le pivot au centre, est donc plus avantageux que celui qui est à l'un des angles ; il s'agit de donner la manière de l'exécuter.

On prend pour pivot le chef de fîle qui est au milieu ou au centre du bataillon : on considère ensuite la troupe comme séparée ou divisée en deux parties ; à l'une desquelles on fait faire le quart de conversion en-avant, et à l'autre en-arrière. La fîle où est le pivot est celle qui termine la partie du bataillon qui fait le quart de conversion en-avant, laquelle partie l'exécute de la même manière qu'on l'a expliqué ci-devant : le plus difficîle de cette manœuvre se fait par la partie du bataillon qui fait le quart de conversion en arrière.

Cette partie fait d'abord un demi-tour à droite, pour faire face à la queue du bataillon, et ensuite un quart de conversion du même côté que le fait l'autre partie du même bataillon, c'est-à-dire qu'elle le fait à droite, si la première partie le fait de ce côté, ou à gauche, si cette même partie l'a fait vers la gauche.

Supposons que le bataillon A B D E, (fig. 43.) qui fait le quart de conversion sur le centre C, le fasse de droite à gauche, le chef de fîle placé au milieu ou au centre du premier rang A B, servira de pivot ; et la partie du bataillon de la droite de la fîle C M, fera le quart de conversion en-avant de droite à gauche, à la manière ordinaire, c'est-à-dire que cette partie C B D M viendra se placer en C F G N, par un quart de conversion de droite à gauche.

Pendant le temps que cette moitié du bataillon fera cette manœuvre, l'autre, après avoir fait un demi-tour à droite, fera un quart de conversion de droite à gauche : ce qu'il y a de particulier dans ce mouvement, c'est que le soldat M, serre-fîle de la fîle de la droite du milieu du bataillon dans sa première position, qui devrait servir de pivot au quart de conversion de la partie C A E M du bataillon, ne le peut, parce que le bataillon se trouverait alors avoir ses deux parties séparées entr'elles de l'intervalle de la hauteur ou profondeur du bataillon.

Pour éviter cet inconvénient, le soldat C, qui a servi de pivot au quart de conversion de la première partie du bataillon, en sert encore à la seconde. Pendant qu'il tourne avec la droite du bataillon, le soldat marqué M décrit un quart de cercle autour du pivot C, tel qu'il est marqué dans la figure. Les autres soldats de la partie A C M B, en font de même, en se jetant sur la droite, et en marchant de manière que chaque demi-rang de la gauche se trouve toujours en ligne droite avec les demi-rangs de la droite. Lorsque cette partie aura décrit le quart de conversion, celle de la gauche aura ainsi également fait le sien ; c'est pourquoi il ne s'agira plus que de lui faire faire un demi-tour à gauche, pour que tout le bataillon entier se trouve faire face du même côté I F.

REMARQUES.

I. On peut faire faire non-seulement le quart de conversion à un bataillon, sur un pivot pris au milieu ou au centre du premier rang, mais encore à tel endroit de la troupe qu'on veut, comme au tiers ou au quart. Il suffit pour cet effet d'exécuter tout ce qu'on vient d'expliquer pour le quart de conversion sur le centre, et d'observer que la fîle où l'on prendra le pivot termine la partie de la troupe qui fait le quart de conversion en avant. Mais on remarquera qu'en changeant ainsi la position du pivot, il en résulte quelque changement au terrain que la troupe occupe ; c'est-à-dire qu'elle se trouve après le quart de conversion plus avancée ou reculée que si on avait pris le pivot au centre : c'est pourquoi lorsqu'il n'y a pas de raison particulière pour changer ainsi la position du pivot, il parait qu'il est plus à propos, pour conserver le même terrain autant qu'il est possible, de prendre plutôt le pivot au centre du bataillon que dans tout autre point, conformément à la méthode que l'on vient d'expliquer, qui est la plus usitée et la plus simple.

II. Le pivot pourrait aussi être pris dans celui des rangs que l'on voudrait du bataillon, comme au troisième, au quatrième, etc. en avertissant seulement les rangs qui se meuvent dans la même file, de faire aussi leur quart de conversion autour de lui. Mais cette méthode n'est pas d'usage, à cause de son peu d'utilité.

III. Lorsqu'un bataillon est en bataille, et qu'on veut le faire marcher sur l'un de ses flancs par deux divisions, chacune de la moitié du front du bataillon, on peut, comme le dit M. le maréchal de Puysegur, faire exécuter à chacune de ces parties un quart de conversion sur le centre, c'est-à-dire sur deux pivots pris chacun au milieu de chaque demi-rang du front du bataillon. Lorsque ce mouvement est exécuté, les deux divisions du bataillon se mettent en marche, observant de garder toujours la même distance entr'elles, afin qu'elles puissent se mettre en bataille exactement, par un autre quart de conversion sur le centre, exécuté dans un sens opposé au premier.

Par ce mouvement, on diminue le chemin que feraient les soldats les plus éloignés du pivot, si on faisait le quart de conversion ordinaire ; et on se tourne ainsi en bien moins de temps.

ARTICLE IX.

Des conversions à plusieurs pivots, ou par différentes divisions du bataillon. On appelle divisions d'une troupe ou d'un bataillon, les différentes parties dans lesquelles on le partage. Voyez DIVISION.

Pour faire tourner le bataillon sur plusieurs pivots à la fais, il faut qu'il soit rompu ou partagé en divisions : et toutes les divisions tournant ensemble du même côté, par un quart de conversion, elles font face à l'un des flancs du bataillon, et elles se trouvent placées les unes derrière les autres ; ce qui les met en état de marcher vers le terrain du flanc du bataillon auquel elles font face.

Le quart de conversion à plusieurs pivots ou par divisions, demande quelques observations particulières dont voici les deux principales.

1°. Il faut que les divisions du bataillon aient plus d'étendue de la droite à la gauche que de profondeur de la tête à la queue ; parce que le quart de conversion, après qu'il est fait, mettant les files de chaque division dans la direction des rangs, il arriverait, si les files occupaient plus d'espace que les rangs, étant serrées autant qu'elles peuvent l'être, qu'elles ne pourraient être renfermées dans l'étendue du front du bataillon : c'est pourquoi le quart de conversion par division serait alors impossible.

Sait supposé, par exemple, un bataillon de 480 hommes, à huit de hauteur, les rangs seront de 60 hommes : supposons qu'on veuille le rompre par dix divisions, elles auront chacune 6 hommes de front et 8 de profondeur. Si on les conçoit à la suite l'une de l'autre, les files de ces dix divisions seront ensemble de dix fois 8 hommes, c'est-à-dire de 80. Mais le front du bataillon n'étant que de 60, les 80 hommes de fîle ne pourront se tenir dans cette même étendue : donc etc.

2°. En supposant les divisions plus étendues en largeur qu'en profondeur, comme dans la troupe A B C D, (fig. 44.) divisée en trois parties égales, A E, E F, et F B, il arrivera encore très-souvent que si chaque homme décrit exactement le quart de cercle, comme on le décrit dans le quart de conversion ordinaire, que les soldats les plus éloignés du pivot de chaque division, anticiperont sur le terrain de la division voisine ; ce qui ne peut manquer de rendre leur mouvement impossible, ou du moins très-défectueux.

La figure précédente rend cet inconvénient très-sensible. On a tracé les quarts de cercle que décrivent les chefs de files et les serre-files, qui terminent la droite de chacune de ces divisions.

Or l'on voit que les arcs qui marquent le chemin des serre-files, anticipent sur le terrain des divisions de leur droite ; ce qui fait voir que ces serre-files doivent être fort gênés ou embarrassés dans l'exécution de leur mouvement.

Cette observation a été faite par M. le maréchal de Puysegur, dans son Traité de l'Art de la guerre.

L'inspection de la figure 45, dans laquelle on a marqué le bataillon précédent arrêté au milieu de son mouvement, suffit pour en démontrer la justesse.

On a tracé dans cette figure le chemin que fait chaque soldat de la droite du premier et du dernier rang de chaque division, afin de faire voir que le premier rang de toutes ces divisions fait son mouvement sans aucun obstacle ; mais qu'il n'en est pas de même des soldats de la droite des trois derniers rangs de chaque division, qui étant plus éloignés du pivot que les soldats de la gauche du premier rang, ne peuvent passer le premier front du bataillon ou la ligne sur laquelle sont les pivots sans se rompre. C'est pourquoi les soldats de ces droites, au lieu de se tenir toujours derrière leurs chefs de files, doivent aller droit devant eux jusqu'à ce que la droite de chacun de ces derniers rangs ait passé au-delà du pivot de la division qui le suit immédiatement à droite. Alors ils peuvent s'ouvrir ou se jeter sur leur droite autant qu'il est nécessaire pour bien achever leur mouvement, en se redressant sur la gauche de leur division, dont les soldats ont dû exécuter le quart de conversion sans être obligés de s'ouvrir ni de se resserrer.

Plus la troupe qui fait ainsi le quart de conversion sur plusieurs pivots a de rangs, et plus il faut d'attention pour le faire exécuter exactement.

M. le maréchal de Puysegur remarque encore à ce sujet, que si l'on s'aperçoit de quelqu'imperfection dans l'exécution de ce mouvement, on ne doit pas l'attribuer aux troupes qui le font, mais au mouvement même qui ne peut se faire sans qu'il y paraisse un peu de confusion ; mais qu'il n'en est pas pour cela moins utile, parce que cette espèce d'irrégularité ne parait que dans le temps du mouvement : car aussi-tôt qu'il est fini, les troupes se trouvent en bataille comme elles doivent l'être sur des lignes droites.

Du mouvement d'un bataillon sur sa droite ou sur sa gauche sans s'allonger, ou sans augmenter l'étendue de son front. On trouve dans l'Art de la guerre de M. le maréchal de Puysegur, la description d'un mouvement propre à faire marcher, lorsqu'on est proche de l'ennemi, un bataillon sur l'un de ses flancs, sans augmenter l'étendue du front du bataillon, ou sans s'allonger de droite à gauche.

Dans la circonstance de la proximité de l'ennemi, il n'est pas possible de faire le quart de conversion ordinaire pour se mouvoir vers la droite ou la gauche du bataillon, parce que l'ennemi pourrait l'attaquer pendant le mouvement ou avant qu'il fût remis en bataille, auquel cas il pourrait le défaire très-facilement.

Pour éviter cet inconvénient, M. de Puysegur suppose un bataillon de dix compagnies rangées sur six rangs de douze hommes chacun, et il propose de faire faire un quart de conversion à droite ou à gauche par demi-rang de compagnie, c'est-à-dire dans cet exemple par six hommes ; alors chaque compagnie forme deux rangs vers la droite ou la gauche du bataillon. Et dans cet état, on peut le faire marcher vers l'un de ces deux côtés sans qu'il augmente l'étendue de son front (pourvu que toutes les files observent entr'elles en marchant la même distance), et le faire remettre ensuite dans sa première position en un instant.

Si le bataillon a marché ainsi vers la droite, on lui fera faire face en tête par un quart de conversion à gauche, que feront chacun des demi-rangs de compagnies qui en ont fait un à droite ; ou bien comme le dit M. le maréchal de Puysegur, chaque partie qui a fait le quart de conversion pour faire face à droite, achevera le cercle entier, et elle fera ensuite demi-tour à gauche, etc. Voyez l'Art de la guerre, tome I. p. 265. et la fig. 2. de la pl. 13. du même livre.

REMARQUES.

I. Pour faire ce mouvement tel qu'on vient de l'expliquer, il faut que les rangs aient un intervalle égal au front des demi-rangs de chaque compagnie. Si cet intervalle est plus petit, il faut fixer le nombre d'hommes de chaque rang qui doivent tourner, ou faire le quart de conversion à droite ou à gauche, relativement à l'espace qui est entre les rangs.

II. Si la troupe était à quatre de hauteur, il est évident que ce mouvement se réduirait à doubler les files à droite ou à gauche, et ensuite à faire marcher le bataillon vers celui de ces côtés qu'on voudrait, et le faire ensuite remettre en dédoublant les files.

ARTICLE X.

De la contre-marche. On appelle contre-marche, la marche qu'on fait faire à des soldats d'une troupe ou d'un bataillon, dans un sens opposé à la position des autres soldats de la même troupe.

Ainsi dans la contre-marche, une partie du bataillon marche vers la queue du bataillon, ou vers la droite ou la gauche, c'est-à-dire dans un sens ou une direction opposée à la face du bataillon : aussi le nom de contre-marche est-il composé de contre et de marche, qui est la même chose que si on disait marche contraire, ou contre les uns et les autres.

La contre-marche se fait de plusieurs façons.

1°. Par files à droite ou à gauche.

2°. Par rangs à droite ou à gauche.

La contre-marche sert à placer la tête du bataillon à la queue, sans se servir du quart de conversion qui fait changer de terrain au bataillon, c'est-à-dire qui le place à la droite ou à la gauche de sa première position, et qui d'ailleurs ne peut se faire lorsqu'on est à portée de l'ennemi, parce qu'il pourrait tomber sur le flanc du bataillon pendant le mouvement, et le détruire ou le dissiper très-facilement dans cet état. Elle sert aussi à changer la position du bataillon, c'est-à-dire à lui faire occuper un autre terrain à sa droite ou à sa gauche, d'une manière plus simple et plus sure que par le quart de conversion.

S'il faut se retirer de devant l'ennemi " rien n'est plus dangereux (dit M. Bottée, Exercice de l'infanterie) que de commander le demi-tour à droite ; à peine le soldat entend-t-il ce commandement qu'il fuit en confusion. Dans la contre-marche, il est occupé du soin de garder son rang et sa file, ce qui le dissipe d'une partie de sa crainte. Il se rassure quand il voit que celui qui le commande manœuvre toujours, et ne s'abandonne point au sort. De même, s'il faut tourner tête à l'ennemi (dit ce même auteur) qui marche à vous pour vous attaquer en queue, vous ne le pouvez faire de bonne grâce et promptement que par la contre-marche : car le demi-tour de conversion demande trop de temps, vous fait prêter le flanc, et outre cela, vous laissez votre premier terrain à droite ou à gauche, si vous tournez sur une aile. Si vous vous contentez de faire demi-tour à droite, vos chefs de files se trouvent en queue, aussi-bien que les officiers qui doivent être à la tête ".

Par la contre-marche, on évite ces inconvéniens. Malgré cet avantage, comme elle exige que les files soient ouvertes, elle n'est plus guère d'usage à présent, ainsi que nous l'avons déjà observé au mot CONTRE-MARCHE.

Elien, auquel on renvoye dans cet endroit, en traite avec un grand détail. M. de Bombelles s'est aussi fort étendu sur cette manœuvre, dans son Traité des évolutions militaires. Il prétend que pour peu qu'on en connut l'utilité, l'on prendrait un soin particulier d'accoutumer l'infanterie à la savoir parfaitement. Il est vrai que presque tous les auteurs militaires paraissent en faire cas, et qu'ils donnent tous la manière de l'exécuter. M. Bottée qui avait de l'expérience dans la guerre, et qui s'était acquis beaucoup de distinction dans la place de major du régiment de la Fere, regarde cette évolution comme fort utile. Par toutes ces considérations, nous croyons devoir en donner une idée plus détaillée que nous ne l'avons fait au mot CONTRE-MARCHE.

La contre-marche se fait 1°. en conservant le même terrain, 2°. en gagnant du terrain, et 3°. en le perdant.

PREMIER PROBLEME.

Faire la contre-marche par files, en conservant le même terrain.

Cette évolution peut se faire également à droite et à gauche : nous supposerons qu'on veut la faire à gauche.

Sait pour cet effet, le bataillon A B C D (fig. 46.) dont les files sont ouvertes de manière à laisser passer un soldat dans leur intervalle. On commandera à tous les chefs de file, c'est-à-dire aux soldats du premier rang A B, de faire demi-tour à gauche sur le pied gauche, pour se placer, par ce mouvement, dans l'intervalle des files ; après quoi on leur ordonnera de marcher : ce qu'ils feront devant eux dans l'intervalle ou l'ouverture des files, jusqu'à ce qu'ils soient parvenus à la place du dernier rang. Pendant que le premier gagnera ainsi la queue du bataillon, les autres rangs s'avanceront successivement jusqu'à la place du premier, où étant arrivés, ils feront de même un demi-tour à gauche, et ils suivront le premier rang pour se placer derrière lui, comme dans leur première position.

Ce mouvement étant ainsi exécuté, le premier rang se trouvera placé sur le terrain du dernier, le second sur celui du troisième, le troisième sur celui du second, et le quatrième sur le terrain du premier.

Lorsque les troupes sont exercées à faire ce mouvement, on leur ordonne de l'exécuter en disant : à gauche, ou bien, à droite par files, faites la contre-marche. A ce premier commandement, les chefs de fîle font demi-tour à droite ou à gauche.

On dit ensuite, marche. A ce second commandement, toutes les files se mettent en marche, pour occuper le terrain des rangs qu'elles doivent remplir.

Lorsqu'elles y sont parvenues, on leur ordonne de s'arrêter, en disant, halte.

La contre-marche se fera par files à droite, de la même manière.

REMARQUES.

I. On fait remettre le bataillon par une seconde contre-marche, exécutée dans le même sens ou du même côté que la première, c'est-à-dire à droite, si la première a été faite à droite, etc.

II. Quelques auteurs font avancer deux pas aux chefs de file, avant de leur faire faire le demi-tour à droite ou à gauche ; mais ces pas en avant ne sont pas nécessaires. Au contraire, il parait plus simple de laisser le premier rang à la même place, et de lui faire faire à-droite ou à-gauche ; parce que, par ce mouvement, il se trouve d'abord dans l'intervalle où il doit marcher, c'est-à-dire, entre la fîle qu'il quitte et celle qui la suit immédiatement du côté où se fait la contre-marche.

III. Nous avons dit que la contre-marche exigeait que les files fussent ouvertes, et que c'était là un des principaux inconvénients que les tacticiens modernes trouvaient dans l'exécution de ce mouvement. Mais, comme le dit M. de Bombelle, lorsqu'un régiment sera bien exercé, il fera presque aussi facilement la contre-marche à files et rangs serrés, que quand ils sont ouverts, pourvu néanmoins qu'on ne presse pas les files autant qu'on le fait aujourd'hui, c'est-à-dire que relativement à l'ancien usage, on laisse assez d'espace à chaque soldat dans le rang, pour qu'il ait la liberté de charger et de tirer facilement. D'ailleurs, comme l'épaisseur d'un homme, mesurée de la poitrine au dos, est assez ordinairement la moitié de l'étendue qu'il occupe de front, ou d'un coude à l'autre, si dans l'exécution de la contre-marche, les soldats qui veulent passer dans les intervalles des files, se mettent, lorsqu'elles sont serrées, un peu de côté, et que ceux de ces files en fassent de même, par un à-droite ou un à-gauche, il est clair que le passage entre les files n'aura rien de difficîle ni d'embarrassant.

SECOND PROBLEME.

A droite ou à gauche par files ; faire la contre-marche en quittant ou en perdant le terrain, ou la fîle après soi.

Supposons qu'un bataillon A B C D, (fig. 47.) s'éloigne de l'ennemi, en s'avançant sur le terrain X, que A B soit le premier rang ou la tête de ce bataillon.

Supposons aussi que l'ennemi qui vient du terrain Y poursuive ce bataillon.

Si l'on fait avancer le premier rang A B, pour occuper la place du dernier, c'est-à-dire si l'on exécute la contre-marche, conformément au problème précédent, le bataillon ne changera pas de terrain, mais seulement de position.

Si le premier rang A B restant dans la même place, les autres vont se mettre derrière lui, il est évident alors que le bataillon abandonnera le terrain occupé par les derniers rangs, et qu'ainsi il quitte ou il perd ce terrain.

Il est aisé, après cette explication, de comprendre en quoi consiste la contre-marche en quittant ou en perdant le terrain. C'est cette contre-marche que les anciens appelaient évolution macédonique, parce qu'elle avait été imaginée par les Macédoniens.

Pour exécuter cette contre-marche, le premier rang A B fait demi-tour à droite, si la contre-marche doit se faire à droite, et à gauche, si elle se fait de ce côté, afin de faire face à la queue du bataillon. Nous supposerons que la contremarche se fait à droite.

Lorsque le premier rang A B a fait ce mouvement, il reste à la même place, et les soldats des autres rangs passent successivement à la droite des chefs de files et dans leur intervalle, de manière que chaque soldat Ve se placer derrière son chef de file, comme dans la première disposition du bataillon ; c'est-à-dire que les soldats du second rang G H, vont se placer derrière le premier en I L ; ceux du troisième M N, en O P ; et ceux du quatrième D C, en R S.

Lorsqu'ils sont ainsi tous arrivés dans les places ou sur le terrain qu'ils doivent occuper, ils font demi-tour à droite sur le pied droit pour faire face du même côté que les chefs de file, c'est-à-dire au terrain de la queue du bataillon qu'ils viennent de quitter.

Il est évident que cette contre-marche se fera à gauche, de la même manière qu'on vient de l'expliquer pour la droite : toute la différence qu'il y aura, c'est que les soldats des rangs qui suivent le premier, au lieu de passer à la droite des chefs de files, pour aller se placer derrière eux, passent à la gauche.

Pour faire remettre la troupe ou le bataillon, on ordonne au premier rang de faire demi-tour à droite, et on commande aux autres rangs d'aller se placer derrière leurs chefs de files, comme dans le premier mouvement, pour y reprendre leur première position. Ils font ensuite un demi-tour à droite pour faire face du même côté que le premier rang.

III. PROBLEME.

A-droite par files ; faire la contre-marche en gagnant le terrain.

Sait le bataillon A B C D (fig. 48), dont le premier rang est A B, qui s'avance sur le terrain X, et qui par conséquent fait face à ce terrain. Sait supposé que l'ennemi poursuit ce bataillon et qu'il s'approche de la queue, la contre-marche en gagnant du terrain consiste à faire revenir le bataillon sur ses pas, de manière que le dernier rang D C restant à la même place, les autres viennent se mettre devant lui en s'approchant de l'ennemi de la hauteur du bataillon : on dit alors qu'on gagne du terrain, parce que l'on s'approche de l'ennemi ; au lieu que dans la contre-marche précédente on dit qu'on en perd, par la raison que le bataillon s'en éloigne, et qu'il lui quitte ou abandonne le terrain qu'il occupait.

Cette contre-marche était appelée chez les anciens évolution laconique, parce qu'elle est de l'invention des Lacédémoniens.

Résolution. On ordonne au premier rang A B de faire demi-tour à droite, et à la troupe de marcher : ce qui se fait par ce commandement, marche.

Alors chaque soldat du premier rang s'avance vers la queue du bataillon ; savoir, le premier de la droite, en marchant à côté de la fîle de la droite, et les autres dans les intervalles des files qui les joignent immédiatement de ce même côté.

Lorsque le premier rang a ainsi passé l'intervalle qui est entre lui et le second, le second fait aussi demi-tour à droite, et tous les soldats dont il est composé marchent à la suite de ceux du premier rang, en observant de s'en tenir toujours éloigné de la distance qui doit être entre les rangs, ou de les suivre le plus près qu'il est possible, si les rangs sont serrés à la pointe de l'épée, ce qui donne plus de facilité à exécuter cette contre-marche avec précision.

Quand les soldats du second rang ont passé le troisième rang, ceux de ce dernier rang font demi-tour à droite, et ils suivent ceux du second jusqu'à ce qu'ils aient passé le quatrième rang : alors on fait faire halte à tout le bataillon, et le mouvement est exécuté.

REMARQUES.

I. Le premier rang ne doit s'avancer au-delà du dernier, que de l'épaisseur du bataillon. C'est pourquoi si l'on suppose que les rangs étant serrés occupent un pas de trois pieds, le premier rang ne marchera au-delà du dernier que de trois de ces pas.

II. Comme les soldats du premier rang, et ceux des rangs qui le suivent, ayant fait demi-tour à droite, se trouvent à côté de la fîle qu'ils occupaient d'abord, et qu'ils marchent ensuite devant eux, il suit de-là qu'après l'exécution de la contre-marche le bataillon se trouve plus avancé sur le terrain de sa droite, de l'épaisseur d'un homme, que dans sa première position.

III. Cette contre-marche peut s'exécuter aisément à files serrées.

IV. Elle s'exécutera à gauche de la même manière qu'à droite ; toute la différence qu'il y aura, c'est qu'il faudra faire d'abord le demi-tour à gauche au lieu de le faire à droite.

Pour faire remettre la troupe ou le bataillon, on ordonnera aux soldats du premier rang de faire demi-tour à gauche, et de marcher ensuite devant eux dans les intervalles des files des autres rangs, pour aller reprendre leur premier terrain A B. Lorsqu'ils auront passé le second rang, les soldats de ce rang feront aussi le demi-tour à gauche, et ils suivront ceux du premier. Le troisième rang fera de même à l'égard du second, et ils marcheront tous jusqu'à ce qu'ils aient repris leur première position, etc.

IV. PROBLEME.

A droite par chefs de files et de demi-files, faire la contre-marche.

Sait le bataillon A B C D (fig. 49.) rangé sur six de hauteur, auquel on veut faire faire la contremarche par chefs de files et de demi-files, c'est-à-dire par les soldats du premier rang A B et du quatrième E F.

Il faut considérer la troupe comme divisée en deux également, par une ligne droite quelconque E H, qui coupe les files en deux également, et ordonner ensuite à chaque demi-troupe, considérée comme troupe entière, de faire la contre-marche du premier problème, ou celle du second ou du troisième.

Si l'on veut exécuter celle du premier, les chefs des files et ceux de demi-files feront demi-tour à droite sur le pied droit ; ce qui étant fait, les chefs de files marcheront devant eux jusqu'au terrain du troisième rang, et les chefs de demi-files jusqu'à celui du sixième. Chaque demi-fîle suivra son chef de file, en sorte que le premier rang occupera la place du troisième, le troisième celle du premier : le second se retrouvera sur son même terrain, mais seulement plus à droite de l'épaisseur d'un homme. Le quatrième rang occupera la place du sixième, le sixième celle du quatrième, et le cinquième se retrouvera, comme le second, sur son terrain.

Par cette contre-marche les chefs de files se trouvent chefs de demi-files, et ceux-ci chefs de files.

Cette évolution s'exécutera à gauche de la même manière qu'à droite. Il est clair qu'elle est exactement conforme à celle du premier problème, c'est pourquoi on ne s'y arrêtera pas davantage.

On ne parlera pas non plus de la contre-marche par chefs de demi-files et par serre-files, qui n'a pas plus de difficulté ; ni de celle par quart de files, qu'on reduira, en supposant les files divisées en quatre parties, à celle des contre-marches qu'on voudra, expliquées dans les trois premiers problèmes précédents.

De la contre-marche par rangs. Après avoir expliqué la contre-marche par files, il est aisé de concevoir la manière d'exécuter cette évolution par rangs ; car faisant faire à droite ou à gauche au bataillon, les rangs deviennent des files, avec lesquelles on peut faire les mêmes évolutions des précédents problèmes. Mais comme malgré cette identité de mouvements, les Tacticiens traitent ordinairement de la contre-marche par rangs comme de celle par files, nous croyons par cette considération devoir entrer dans quelques détails particuliers sur la contre-marche par rangs, quoique ce détail nous paraisse assez peu utîle lorsqu'on a bien conçu les trois premiers problèmes de cette évolution par files.

V. PROBLEME.

A droite par rangs, faire la contre-marche.

Ce problème a pour objet de faire passer la droite du bataillon à la gauche, ou la gauche à la droite.

Il peut se résoudre en conservant le même terrain ou en le quittant, pour en occuper un pareil sur la droite ou sur la gauche.

Nous supposerons d'abord que la troupe doit conserver le même terrain.

Sait le bataillon A B C D (fig. 50.) dont on veut transporter la droite B C, à la gauche A D par la contre-marche.

Pour exécuter cette évolution, tout le bataillon fera d'abord à droite sur le talon droit ; le pied droit restera sur l'alignement de chaque rang, et le corps se trouvera en-dehors.

On commandera ensuite au bataillon de marcher. Au commandement, chaque soldat de la fîle B C de la droite, marchera directement devant lui un ou deux petits pas, et il fera après demi-tour à droite sur le talon droit, pour se trouver vis-à-vis l'intervalle du rang qui suit le sien. Ils marcheront ensuite tous ensemble, chacun dans l'intervalle opposé, suivis de tous les soldats de leur rang, qui feront chacun demi-tour à droite dans le même endroit du premier : ils marcheront ainsi jusqu'à ce qu'ils soient parvenus sur le terrain de la fîle A D de la gauche, où étant arrivés on fera arrêter le bataillon par ce commandement, halte. On lui ordonnera ensuite de faire à droite sur le pied droit, pour qu'il fasse face en tête, et le mouvement sera exécuté.

La contre-marche s'exécutera à gauche par rangs de la même manière.

Pour cet effet les soldats de la fîle A D de la gauche feront d'abord à gauche : ensuite ils avanceront un ou deux petits pas, et ils feront demi-tour à gauche sur le pied gauche. Ils marcheront après cela dans les intervalles des rangs, suivis des soldats des rangs auxquels ils appartiennent ; jusqu'à ce qu'ils soient sur le terrain de la fîle B C de la droite, et ils acheveront ce mouvement comme le précédent.

REMARQUE.

Lorsqu'une troupe fait la contre-marche par rangs, le premier A B peut marcher dans l'intervalle qui le sépare du second, comme on l'a enseigné dans le problème précédent ; mais il peut marcher aussi en dehors du rang, et cela en faisant demi-tour à gauche sur le pied gauche ; alors le pied gauche des soldats reste dans l'alignement du rang, et leur corps est en-dehors. Les autres rangs faisant le même mouvement, marchent ; savoir, le second dans l'intervalle qui le sépare du premier ; le troisième dans l'intervalle qui le sépare du second, et ainsi de suite.

En exécutant ainsi la contre-marche, la troupe se trouve plus avancée vers la tête de l'intervalle ou de l'espace qu'un homme occupe dans le rang ; et en la faisant de la première manière, elle se trouve reculée ou éloignée de la tête du même espace, qu'on peut évaluer environ à un pied et demi ou deux pieds.

VI. PROBLEME.

Faire la contre-marche par rangs en changeant de terrain, ou, comme on le dit ordinairement, en gagnant le terrain.

La troupe qui veut faire la contre-marche par rangs en changeant de terrain, peut en changer en se plaçant sur le terrain de sa droite, ou sur celui de sa gauche. Nous supposerons que c'est vers la gauche.

On commencera l'exécution de cette contre marche comme dans le problème précédent ; mais au lieu de faire arrêter les soldats de la fîle B C de la droite (fig. 51.), sur le terrain A D de celle de la gauche, on les fera avancer au-delà en F G, c'est-à-dire jusqu'à ce que les soldats des différents rangs du bataillon qui forment la fîle A D, se retrouvent sur leur même terrain A D.

On fera alors arrêter toute la troupe, et on lui fera faire à droite sur le pied droit, pour qu'elle fasse face en tête comme dans sa première position.

La troupe ou le bataillon changera de terrain de la même manière sur la droite, par une contre-marche exécutée vers ce côté, comme on vient de l'expliquer vers la gauche.

VII. PROBLEME.

Faire la contre-marche par demi-rangs, partant des ailes ou des flancs du bataillon.

Sait le bataillon ou la troupe A B C D (fig. 52.) : on la supposera divisée en deux également par une ligne droite quelconque E F, tirée de la tête à la queue du bataillon. Alors il ne s'agira plus, pour résoudre le problème proposé, que de faire exécuter à la moitié de la troupe à droite, la contre-marche à gauche par rangs, et à la partie de la gauche, la contre-marche à droite aussi par rangs, expliquée au cinquième problème.

Ainsi, pour exécuter cette contre-marche, on ordonnera aux demi-rangs à droite de faire à droite, et à ceux de la gauche de faire à gauche.

Les soldats de la fîle B C de la droite avanceront ensuite un ou deux petits pas, ainsi que les soldats de la fîle A D de la gauche.

Ils feront ensuite les uns et les autres un demi-tour ; savoir, ceux de la droite, à droite sur le pied droit ; et ceux de la gauche, à gauche sur le pied gauche. Ils avanceront après cela dans les intervalles des rangs suivis des soldats des demi-rangs, qui feront le demi-tour à droite et à gauche où les premiers l'ont fait, et ils marcheront jusqu'à ce qu'ils soient parvenus de part et d'autre sur le terrain des deux files du centre G H et I K. Lorsqu'ils y seront arrivés, les demi-rangs de la droite feront à droite, et ceux de la gauche à gauche, pour faire face du même côté ; ce qui étant fait le mouvement sera exécuté.

Il est évident que l'on fera la contre-marche de la même manière par demi-rangs partant du centre, par quarts de rangs, &c.

ARTICLE XI.

De la manière de border la haie, et de former des haies.

Nous avons déjà dit que border la haie ou se mettre en haie, c'est disposer plusieurs rangs ou plusieurs files sur une ligne droite. Voyez BORDER LA HAIE. Ce qui a donné lieu au nom que porte cette évolution, c'est qu'on se sert effectivement du mouvement dans lequel elle consiste, pour disposer une troupe le long d'une rue, d'un retranchement, etc.

Former des haies, c'est, dit M. de Bombelles (traité des évolutions militaires), composer plusieurs haies avec un nombre donné de files.

Ainsi on peut former des haies par compagnie, et par telle autre division que l'on veut.

M. Bottée ne fait point de distinction entre l'expression de border la haie et de former des haies, ce qui est assez conforme à l'usage ; mais il parait qu'il devrait être rectifié à cet égard, pour ne point exposer les officiers à regarder ces deux évolutions comme ne faisant qu'un même mouvement.

Pour éviter cet inconvénient, nous allons en parler séparement.

PREMIER PROBLEME.

Par rangs border la haie.

Sait le bataillon ou la troupe A B C D (fig. 53.) à laquelle on veut faire border la haie par rangs.

On commencera par faire ouvrir les rangs en-avant, en sorte que leur intervalle soit à-peu-près égal à l'étendue de chaque rang.

On fera faire ensuite un quart de conversion à chaque rang et du même côté, c'est-à-dire à droite ou à gauche, après quoi la troupe ne formera qu'un seul rang L H (fig. 54.).

Pour faire remettre le bataillon, on fait faire demi-tour à droite au rang, ou à la haie L H (fig. 54.), et ensuite un quart de conversion à tous les rangs particuliers dont il est composé, et dans le sens opposé à celui qu'ils ont fait d'abord ; après quoi faisant serrer les rangs en-arrière, la troupe se trouvera dans sa première position.

II. PROBLEME.

A droite par rangs, border la haie en tête.

Pour faire cette évolution, tous les rangs qui suivent le premier, doivent faire à-droite, et aller ensuite se placer sur l'alignement du premier A B (fig. 55.) ; savoir, le second immédiatement à côté en E F ; le troisième à côté du second, etc.

REMARQUE.

M. Bottée dit que cette évolution ne vaut rien, lorsque les rangs sont fort grands ; la raison en est sans-doute la lenteur de son exécution, et la difficulté de faire arriver tous ces différents rangs en même temps sur l'alignement du premier A B.

Si l'on suppose que le bataillon soit composé de quatre rangs de cent vingt hommes chacun, il aura 40 taises de front, en donnant 2 pieds à chaque homme dans le rang. Lorsque ces quatre rangs seront réduits à un seul, ils occuperont une étendue de 240 taises ; et comme les lignes obliques que décrivent les soldats du quatrième rang seront encore plus grandes que cette étendue, il est aisé de concevoir qu'il faudrait un temps considérable à ces soldats pour parcourir un aussi grand espace.

Si malgré cet inconvénient on veut exécuter cette évolution, elle se fera à gauche de la même manière qu'on vient de l'enseigner à droite ; elle se fera aussi également en queue, à droite et à gauche en tête, et de même en queue : dans cette dernière manière on diminue le temps de son exécution de moitié.

III. PROBLEME.

A droite par files, border la haie en tête.

Cette évolution est absolument la même que celle du premier problème, en regardant les files comme des rangs, c'est-à-dire après avoir fait faire à-droite ou à-gauche au bataillon.

Ainsi pour exécuter ce mouvement, on fera d'abord serrer les rangs, et l'on fera ouvrir les files d'un intervalle à-peu-près égal à leur longueur ou leur étendue.

Ensuite on fera décrire, en même temps, un quart de conversion à droite à toutes les files, chaque chef de fîle étant pris pour pivot ; alors elles ne formeront qu'un seul rang à la tête du bataillon. Voyez la fig. 56.

Ce mouvement s'exécutera de la même manière à gauche. Il se fera aussi également en queue ; mais alors ce seront les serre-files qui serviront de pivot au quart de conversion que feront chacune des différentes files du bataillon.

IV. PROBLEME.

Une troupe ou un bataillon étant rangé en bataille à l'ordinaire, en former des haies.

Pour former des haies il faut diviser les rangs du bataillon en autant de parties égales qu'on veut avoir de haies ; et faisant ensuite border la haie à chaque partie, on aura autant de haies que les rangs auront de divisions.

Ainsi si l'on veut former deux haies, il faut diviser les rangs en deux également ; si l'on en veut trois, en trois, etc.

Si l'on veut former des haies par compagnies il faut diviser les rangs par compagnie, et l'on aura autant de haies qu'il y aura de compagnies.

Sait la troupe ou le bataillon A B C D (fig. 57.) auquel on veut faire former, par exemple, quatre haies.

On divisera les rangs en quatre parties égales, et on les ouvrira en-arrière, en sorte que leur intervalle soit égal au front de chaque division, c'est-à-dire dans cet exemple au quart du rang A B.

On fera faire après cela demi-tour à droite à tout le bataillon.

Ensuite si l'on veut former les haies à gauche ; comme dans la figure, on prendra pour pivot les soldats qui terminent à gauche les divisions de chaque rang, et on fera faire un quart de conversion à gauche sur ces pivots à chaque division.

Lorsque ce mouvement sera exécuté, la troupe formera quatre haies, qui feront face à gauche, comme il est représenté dans la figure 56, où les zéros marquent la place des soldats avant le quart de conversion de chacune des divisions des rangs, et les points noirs les mêmes soldats formant les quatre haies demandées.

Pour remettre le bataillon, on fera faire demi-tour à droite aux haies, pour qu'elles fassent face à la droite B C. Chaque division fera ensuite un quart de conversion à droite, sur les mêmes pivots que celui qu'elle a fait à gauche, ce qui étant exécuté, la troupe sera alors dans sa première position.

REMARQUES.

Si les rangs du bataillon sont divisés par compagnies, et que chaque compagnie soit de quarante hommes rangés sur quatre rangs, elles auront dix hommes de front.

Si le front du bataillon est ainsi divisé de dix en dix hommes, et les rangs espacés de l'intervalle que ces dix hommes occupent dans le rang, il est clair qu'en faisant former des haies à tout le bataillon, chaque haie sera composée d'une compagnie, et qu'ainsi on aura formé des haies par compagnie.

II. Si l'on voulait former les haies vers la droite du bataillon, le premier soldat de la droite de chaque division servirait de pivot ; et toutes les divisions feraient chacune un quart de conversion à droite sur ce pivot : alors toutes les haies feraient face à la droite du bataillon.

V. PROBLEME.

Augmenter et diminuer le nombre des rangs d'une troupe en bataille, par le moyen de l'évolution précédente.

Sait la troupe ou le bataillon A B C D (fig. 58.) rangé sur quatre rangs, et qu'on veut mettre sur cinq.

On divisera les rangs en cinq parties égales ; et après les avoir ouverts de l'intervalle de chaque division, comme on le voit par les quatre rangées de zéros dans la figure 57, on leur fera former cinq haies par la méthode du problème précédent. Elles sont marquées par les points noirs de la figure.

Supposant qu'on ait formé ces haies de droite à gauche, on leur fera faire demi-tour à droite, pour qu'elles fassent face au flanc droit.

On divisera ensuite chaque haie en cinq parties égales, et on les fera serrer de manière qu'il n'y ait entre les haies qu'un espace égal à l'étendue de chaque division.

On commandera après cela aux divisions de former des rangs ; ce qu'elles feront en décrivant un quart de conversion de droite à gauche.

Elles formeront alors les cinq rangs représentés dans la figure par le premier A B du bataillon, et par les quatre lignes ponctuées E F, G H, I L, et M N.

Les quarts de cercle ponctués expriment le chemin du soldat de la droite de chaque division des haies pour former des rangs ; et les quarts de cercle en lignes pleines, ceux qui ont été décrits par les soldats de la droite des divisions des rangs, pour former les haies.

Pour diminuer par la même méthode le nombre des rangs d'un bataillon, soit la troupe A B C D (fig. 59.) rangée sur quatre rangs qu'on veut réduire à trois.

On divisera chaque rang en trois parties égales, pour en former autant de haies représentées par les trois lignes de points noirs A R, S T, et V X.

On divisera ensuite ces haies en autant de parties égales que l'on veut former de rangs, c'est-à-dire en trois dans ces exemples ; et après avoir augmenté leur intervalle de l'espace nécessaire pour le front de chaque division, ou avoir fait avancer S T en FG et V X en H I, on leur fera former des rangs qui occuperont l'étendue marquée par les lignes A M, NO et P Q.

REMARQUES.

I. Pour que cette évolution puisse s'exécuter avec précision, il faut que le nombre d'hommes des rangs du bataillon, et celui des haies, puissent se diviser exactement en autant de parties égales que l'on veut avoir de rangs.

Si le rang A B de la troupe A B C D (figure 59.) avait été de cinquante hommes, on n'aurait pu en former trois divisions égales ; s'il avait été de quarante-huit, on aurait eu trois divisions de seize hommes chacune. Ces divisions auraient formé, avec les quatre rangs de la troupe, des haies de soixante quatre hommes, dont on ne peut non plus prendre le tiers ; ce qui fait voir que la méthode précédente de changer le nombre des rangs d'une troupe, n'est pas générale ; comme le disent plusieurs auteurs, et notamment M. Bottée dans son traité des évolutions.

Lorsque les rangs peuvent être partagés en autant de parties égales qu'on en veut former, les haies seront toujours susceptibles d'être divisées par le même nombre, parce qu'elles en seront multiples, ou qu'elles contiendront chaque division de rang autant de fois qu'il y aura de rang.

C'est pourquoi la seule condition qu'exige le problème précédent pour être général, lorsqu'il s'agit d'augmenter le nombre des rangs d'une troupe ou d'un bataillon c'est que le rang puisse être divisé en autant de parties égales que l'on veut avoir de rangs ? mais pour le diminuer ce n'est pas assez de cette première condition, il faut encore que les haies se divisent par le même nombre.

Quelque nécessaires que soit cette circonstance, elle ne parait pas avoir été remarquée par les écrivains militaires.

II. Il y a des méthodes différentes dans plusieurs circonstances, pour changer le nombre des rangs du bataillon, c'est-à-dire pour les augmenter et pour les diminuer. Voici les exemples qu'en donne M. Bottée.

" Etant à 4 se mettre à 2 étant à 8 se mettre à 4, étant à 16 se mettre à 8, étant à 20 se mettre à 10, étant à 24 se mettre à 12, étant à 12 se mettre à 6, étant à 6 se mettre à 3, étant à 18 se mettre à 9, doublez les rangs par demi-files.

Au contraire, dit cet auteur, étant à 2 se mettre à 4, de 4 à 8, de 8 à 16, de 10 à 20, de 5 à 10, de 12 à 24, de 6 à 12, de 3 à 6 : doublez les files par le côté ou en queue.

Etant à 4 se mettre à 6 ou à 12 : à 3 à 9, et à 18 : triplez les files, vous serez à 12 : doublez les rangs par demi-files, vous serez à 6 : doublez-les encore de même, vous serez à 3 ; puis triplez les files, vous serez à 9 : enfin doublez les files, vous serez à 18.

Pour se remettre à 15 de hauteur, lorsqu'on est à 4, il faut se mettre à 5 par la règle générale " (c'est ainsi que M. Bottée appelle la méthode du problème précédent) ; " et à 15 en triplant les files ".

III. Malgré la simplicité et la facilité de ces méthodes, on peut en trouver d'autres dont l'éxécution, dans plusieurs cas, ne souffrira pas plus de difficulté.

Par exemple, si l'on a une troupe rangée sur quatre rangs, et qu'on veuille la mettre à cinq, on divisera les rangs en cinq parties égales : on fera marcher la cinquième partie de la droite ou de la gauche du bataillon en arrière, jusqu'à ce que le premier rang de cette partie dépasse le dernier des quatre autres, de l'intervalle qui doit être entre les rangs : on fera faire un quart de conversion à cette partie, de manière que son dernier rang devenu le premier, soit dans l'alignement du flanc des quatre autres du même côté : on ouvrira les rangs de la cinquième partie, et on leur fera border la haie, et faire ensuite un quart de conversion, pour former le cinquième rang demandé.

Cette méthode sera toujours très facîle pour augmenter d'un rang le nombre des rangs d'un bataillon : elle peut servir aussi à les augmenter de deux rangs, en faisant sur deux divisions des rangs ce que l'on vient de faire sur une, mais elle a l'inconvénient de déranger l'ordre et l'arrangement des soldats d'une même compagnie ; inconvenient auquel on fait beaucoup plus d'attention à-présent qu'autrefois, et dont la rectification est vraisemblablement dû. aux observations de M. le maréchal de Puységur sur ce sujet. Voyez le chapitre XIe de l'art de la guerre de cet illustre auteur, tom. I. sur l'arrangement des compagnies et des officiers dans le bataillon.

Pour diminuer de même le nombre des rangs d'une troupe ou d'un bataillon ; par exemple, pour le mettre à trois lorsqu'il est à quatre.

On divisera le dernier rang C D (figure 60.) en deux également ; on leur fera faire demi-tour à droite, et l'on fera décrire un quart de conversion à chaque demi-rang CE, DF vers les ailes, les extrémités C et D étant prises chacune pour pivot. Ce mouvement étant exécuté, le demi-rang C E de la droite occupera la ligne droite C G, et celui de la gauche, DH.

On fera avancer ces demi-rangs d'un petit pas ou environ, et on les partagera en trois parties égales. On fera décrire un quart de conversion à chacune de ces parties ; savoir, à celle de la droite CG, à droite sur le talon gauche et à celle de la gauche D H, à gauche sur le talon droit ; et on leur ordonnera de marcher en avant, pour aller se placer à côté des ailes des trois premiers rangs ; etc.

IV. Ce mouvement peut être un peu long à exécuter lorsque les rangs du bataillon sont fort étendus ; car s'ils occupent, par exemple, un espace de quarante taises, les demi rangs en occuperont vingt ; et les soldats E et F les plus éloignés des pivots C et D, décriront chacun dans le quart de conversion des lignes d'environ soixante taises, ce qui ne peut manquer de rendre leur mouvement fort lent ? mais on peut en abreger l'exécution en faisant faire à-droite à la moitié du dernier rang de la droite, et à-gauche à celle de la gauche ; après quoi les faisant marcher devant eux, de manière que lorsque chaque tiers du demi-rang aura dépassé les files de la droite et de la gauche, il fasse un quart de conversion pour aller se placer à la droite et à la gauche des trois premiers rangs qui n'ont bougé, etc.

V. Il faut observer que pour que ce mouvement se fasse exactement, il faut que le nombre des soldats des rangs puisse se diviser en six parties égales ; autrement il y aura des divisions inégales qui rendront le mouvement dont il s'agit moins régulier.

ARTICLE XII.

De la formation des Bataillons.

I. Du bataillon carré. La formation ordinaire du bataillon sur deux dimensions inégales, est la plus ordinaire et la meilleure, lorsqu'on a plusieurs bataillons à placer les uns à côté des autres, ou lorsque les flancs ne peuvent être attaqués ? mais si l'on est exposé aux attaques de l'ennemi de différents côtés à-la fais, et dans un pays découvert, la forme ordinaire du bataillon n'est pas propre à en distribuer ou partager la force également ; il faut donc dans ces circonstances s'appliquer à réunir les soldats, pour les mettre en état de s'aider réciproquement pour soutenir les efforts de l'ennemi de tous les différents côtés qu'il peut attaquer.

De toutes les figures qu'on peut faire prendre alors au bataillon pour faire feu de tous côtés, la plus simple, et celle qui a été la plus estimée et la plus pratiquée jusqu'à présent, est celle du carré (voyez BATAILLON QUARRE), où l'on a donné la manière de trouver par le calcul le côté de ce bataillon, lorsque le nombre d'hommes dont on veut le composer, est donné. Il s'agit d'expliquer ici la méthode de changer sa forme ordinaire en carré par des mouvements réguliers.

PREMIER PROBLEME.

Un bataillon ou une troupe quelconque d'Infanterie étant en bataille, en former un bataillon carré à centre plein.

On suppose que celui qui veut faire exécuter cette évolution à une troupe, fait l'extraction de la racine carrée, pour trouver le côté du nombre carré donné, ou, ce qui est la même chose, du nombre d'hommes dont le bataillon est composé.

Résolution. On commencera par trouver par le calcul le côté du carré donné, ou le côté du plus grand carré contenu dans le nombre d'hommes donné, lorsque ce nombre ne forme pas un carré parfait.

On mettra ensuite la troupe par différents doublements de files, à la hauteur la plus approchante qu'on pourra de celle qu'elle doit avoir étant disposée en carré.

On prendra après cela la différence du front auquel elle sera réduite à celui qu'elle doit avoir dans le carré ? et l'on fera marcher cette différence sur le derrière de la troupe, pour y former autant de rangs qu'il sera nécessaire pour rendre les files de la troupe égales aux rangs, lorsque le nombre d'hommes dont elle sera composée, sera un carré parfait ; ou pour former autant de rangs qu'on pourra, lorsqu'il ne le sera pas.

Sait, par exemple, un bataillon de 400 hommes rangés à quatre de hauteur, ou sur quatre rangs dont on veut former un bataillon carré. Les rangs seront de cent hommes chacun, et les files de quatre.

On cherchera la racine carrée de ce nombre, et l'on trouvera 20 pour sa valeur, sans reste ; ce qui fait voir que le nombre proposé, 400, est un carré parfait : en effet, 20 multipliés par 20, donnent 400 pour produit.

Cette première opération fait voir que lorsque le bataillon sera disposé en carré, ses rangs et ses files seront chacun de 20 hommes, racine carrée de 400.

On doublera les files autant de fois qu'on le pourra, pour approcher de la hauteur du nombre 20.

Après le premier doublement, les rangs seront réduits à 50 hommes, et les files en auront huit.

En doublant les files encore une fais, les rangs auront vingt-cinq hommes, et les files seize, nombre le plus approchant de vingt qu'il est possible de trouver de cette manière ; car si on les doublait encore une fais, elles seraient à trente-deux, qui excède ou surpasse le nombre vingt qu'elles doivent avoir. D'ailleurs ce dernier doublement ne pourrait plus s'exécuter, à cause du nombre impair vingt-cinq auquel le second doublement a réduit les rangs, dont on ne peut prendre la moitié.

La troupe ou le bataillon étant par le second doublement à vingt-cinq de front et seize de hauteur, on ôtera de vingt-cinq le nombre d'hommes vingt du front du carré ; il restera cinq files de seize hommes chacune, qu'on fera marcher à la queue de la troupe, et dont on formera quatre rangs de vingt hommes chacun, etc.

Il est évident que par cette formation on construira toutes sortes de bataillons carrés à centre plein ; lorsque le nombre d'hommes qu'on aura, sera un carré parfait.

Cette même règle pourra même avoir lieu, quel que soit le nombre d'hommes du bataillon ; il en résultera seulement quelque petite différence dans ses deux dimensions, lorsque les hommes dont il sera composé n'auront point de racine carrée exacte, ou, ce qui est la même chose, ne formeront point un carré parfait.

Sait, par exemple, un bataillon de 480 hommes, dont la racine carrée est 21 avec le reste 39.

Supposons qu'on veuille en former un bataillon carré à centre plein.

Supposons aussi que ce bataillon soit d'abord rangé sur quatre rangs de 120 hommes chacun.

On doublera deux fois les files pour les mettre à seize, comme dans l'exemple précédent : les rangs seront réduits par ce doublement à trente soldats.

On ôtera de ce nombre trente le côté du carré vingt-un ; il restera neuf files de seize hommes chacune, qu'on fera passer à la queue, pour y former autant de rangs qu'elles contiennent de fois vingt-un, c'est-à-dire six rangs, qui étant ajoutés aux seize premiers, feront vingt-deux rangs : ainsi le bataillon formera dans cette position un carré long qui différera très-peu du carré, et qui en aura les mêmes propriétés et la même force, attendu que ses deux dimensions ne différeront que d'un seul homme ; l'une ayant vingt-un soldats, et l'autre vingt-deux, il reste après cette formation dix-huit hommes, dont on peut former un peloton sur quelqu'un des angles du bataillon.

On n'entre point dans le détail de la formation des rangs qu'on place à la queue du front de la troupe, pour rendre sa hauteur égale à ce front. On peut le faire de différentes manières ; la plus simple et la plus courte, parait être de faire faire d'abord demi-tour à droite à la partie du bataillon qui doit se poster ou se placer derrière l'autre partie ; et ensuite de faire marcher au dernier rang devenu le premier, un pas en-avant, et de lui faire faire un quart de conversion qui le place derrière la partie du bataillon dont il vient d'être séparé ; faire avancer de même le second rang, ou l'avant-dernier, à côté du premier, etc.

On peut former le bataillon à centre plein d'une autre manière, en faisant former des haies au bataillon, avec lesquelles on puisse ensuite former autant de rangs qu'il est nécessaire pour que les hommes de ces rangs soient en nombre égal à celui des files ; ce qui étant exécuté, il est évident qu'on a le bataillon carré.

Sait, par exemple, le bataillon donné de quatre cent hommes, dont le front est de cent, c'est-à-dire qui est rangé à quatre de hauteur. La racine carrée de ce nombre est vingt. On formera autant de haies que ce nombre est contenu dans le front cent, c'est-à-dire cinq dans cet exemple. Chacune de ces haies sera de quatre-vingt hommes : si on leur fait former des rangs par la vingtième partie de ce nombre, qui est quatre, il est évident que le bataillon aura pour front cinq fois quatre hommes, qui font vingt, et que chaque fîle sera aussi de vingt.

Dans les cas où les divisions ne seraient pas justes, c'est-à-dire dont le front du bataillon ne contiendrait pas exactement la racine carrée du nombre d'hommes dont il est composé, on se servirait, dit M. Bottée qui enseigne cette formation du bataillon carré, de la dernière division à gauche, pour former les rangs et les files qui manqueraient.

Cet auteur donne une autre manière de former le bataillon carré à centre plein, qui parait plus simple que les précédentes, et qui s'exécute par un seul commandement.

Il s'agit de rompre le bataillon par divisions égales à la racine carrée du nombre d'hommes dont est le bataillon, et de faire ensuite serrer les rangs à la pointe de l'épée.

Ainsi le bataillon étant, par exemple, de quatre cent hommes, dont la racine carrée est vingt, et ce bataillon étant à quatre de hauteur, on le rompra par divisions de vingt soldats de front, c'est-à-dire en cinq parties, qui étant placées les unes derrière les autres, les rangs serrés à la pointe de l'épée donneront le bataillon carré, qui aura vingt hommes de front et autant de profondeur.

Si le nombre d'hommes du bataillon que l'on veut former en carré, n'est pas un carré parfait ; qu'il sait, par exemple, de 480, dont la racine carrée est entre 21 et 22 ; si ce bataillon est à quatre de hauteur, ses rangs seront de 120 hommes : on le rompra par divisions de 21 hommes, racine du plus grand carré contenu dans 480.

Il y aura cinq divisions du front de 21, et une sixième de 15. Ces cinq premières divisions étant placées les unes derrière les autres, serrées à la pointe de l'épée, formeront une troupe de vingt-un hommes de front, et de vingt de hauteur ou profondeur. A l'égard de la sixième, de quinze de front, on la placera à la queue, en formant avec le nombre d'hommes qu'elle contient, autant de rangs qu'on pourra, c'est-à-dire deux dans cet exemple : il restera dix-huit hommes dont on pourra former des pelotons sur les angles, ou un dernier rang plus ouvert que les autres ; ce qui peut se faire sans inconvénient.

Lorsque le bataillon carré à centre plein est formé, il s'agit de lui faire faire face de tous côtés, de manière que chaque côté ait exactement la même défense et le même feu.

Rien n'est plus aisé que de donner cette disposition aux quatre premiers rangs qui forment les côtés extérieurs du carré : mais il n'en est pas de même pour la leur donner conjointement avec les côtés intérieurs.

Voici la méthode que prescrit M. Bottée pour cet effet.

Il faut d'abord faire présenter les armes en tête et en queue par demi-files.

Ensuite faire marquer par deux sergens, l'un en tête et l'autre en queue, les hommes qui doivent faire à-droite, et ceux qui doivent faire à-gauche ; savoir,

Au premier rang, un de l'aîle gauche à gauche.

Au second, deux à gauche et un à droite.

Au troisième, trois à gauche et deux à droite, et ainsi de suite dans le même ordre sur chaque demi-fîle de la tête et de la queue.

Pour aller plus vite on peut mettre deux sergens à chaque aile, dont l'un disposera les soldats de chaque demi-fîle de la tête, dans l'ordre qu'on vient d'expliquer ; et l'autre ceux de la queue, etc.

Il faut observer, 1°. à l'égard des demi-files du bataillon qui font face en queue, que leur aîle gauche est dans la fîle de l'aîle droite qui fait face en tête, et l'aîle droite dans la fîle de la gauche des demi-files de la tête.

2°. Que quand les files ou les rangs sont en nombre impair, il est indifférent que le rang du milieu se tourne pour faire face à la queue du bataillon, ou qu'il reste dans sa première position, parce qu'il se trouvera toujours que le soldat du milieu de ce rang fera indifféremment face en tête ou en queue, et que les deux parties ou les deux moitiés du même rang feront, l'une face à droite, et l'autre face à gauche.

Nous n'entrerons pas dans un plus grand détail sur le bataillon carré à centre plein.

Il est aisé d'observer que ce bataillon, pour peu qu'il soit un peu considérable, ne peut se mouvoir que très-difficilement ; que les soldats des rangs intérieurs au-delà du quatrième, ne peuvent faire usage de leur feu, et que le canon ne peut manquer d'y causer beaucoup de désordre.

Par ces differentes considérations nous ne parlerons point des autres bataillons à centre plein ; c'est-à-dire, ni des triangulaires, ronds, octogones, rhombes, etc. nous renvoyons ceux qui voudront en étudier la formation, au livre de M. Bottée, intitulé Etudes militaires.

Des bataillons à centre vide. Les bataillons à centre vide ont un plus grand front que les pleins, et par conséquent ils peuvent opposer un plus grand feu à l'ennemi : l'on peut d'ailleurs enfermer dans leur intérieur, ou dans le vide qui est au centre, l'artillerie, le trésor de l'armée, des bagages, et différentes autres choses que l'on veut conserver, et dont on veut dérober la connaissance à l'ennemi.

Formation du bataillon carré à centre vide. Sait supposé un bataillon ordinaire A B C D (fig. 61.) de quatre cent hommes, non compris les grenadiers et le piquet, rangé sur quatre rangs de cent hommes chacun.

On partagera le front A B en huit divisions égales, ou à-peu-près égales, s'il ne peut se partager exactement dans ce nombre de parties.

Par exemple, le front A B étant de cent hommes, sa huitième partie est de douze, et l'on a le reste quatre, c'est-à-dire que douze est contenu huit fois dans cent avec le reste quatre.

Pour faire disparaitre ce reste quatre, on marquera les deux divisions du centre E F, de treize hommes chacune, ainsi que la division B G de la droite, et A H de la gauche.

On ordonnera ensuite à tout le bataillon de faire demi-tour à droite, afin que lorsque le carré sera formé, le premier rang se trouve en-dehors du bataillon.

On commandera aux deux divisions du centre, que l'on considérera comme une seule division E F, de ne point bouger, et au reste du front de la droite et de la gauche, de faire ensemble un quart de conversion, savoir, au reste du front de la droite, devenu gauche par le demi-tour à droite, de faire un quart de conversion à droite ; et au côté de la gauche, devenu droite, de le faire à gauche.

Ce mouvement étant exécuté, l'on a trois côtés du bataillon ; pour avoir le quatrième, il ne s'agit plus que de replier une partie des deux côtés qui viennent de faire un quart de conversion, de manière qu'ils forment le quatrième côté opposé à la division du centre.

Pour cet effet, on ordonne aux deux premières divisions, de chacun de ces côtés, de ne point bouger, et aux divisions X et Y, qui les terminent, de faire ensemble un quart de conversion qui les joigne ensemble en V, pour fermer le bataillon.

Par ce dernier mouvement, les quatre côtés du bataillon sont formés, comme la figure le fait voir.

On ordonne à tous les hommes du bataillon de faire demi-tour à droite, pour faire face en-dehors du bataillon.

Le bataillon, après ces différents mouvements, n'est pas encore entièrement formé ; les angles ayant des espaces vides, il faut les remplir pour qu'il soit régulièrement carré.

Pendant que le bataillon se forme de la manière qu'on vient d'expliquer, les officiers des grenadiers et ceux du piquet, partagent chacun leur troupe en deux parties égales ; ce qui fait quatre troupes ou quatre pelotons (voyez PELOTONS), avec lesquels on remplit les angles du bataillon.

Pour évaluer le nombre d'hommes nécessaires pour remplir chacun de ces espaces, il faut en déterminer les dimensions.

Pour cet effet, soit l'un de ces angles rentrants à remplir a b c (fig. 62.) on imaginera une parallèle f g au côté a b, à la distance de ce côté de deux pieds, c'est-à-dire de l'épaisseur d'une fîle : on imaginera de même une autre parallèle h l au côté b c, également éloignée de ce côté : on prolongera par la pensée les lignes qui forment les deux fonds du bataillon, jusqu'à ce qu'elles se rencontrent en d. On aura alors le quadrilatère f l h d à remplir.

Si l'on suppose que les rangs soient serrés à la pointe de l'épée, ils occuperont chacun avec leur intervalle un espace de trois pieds ; ce qui donnera neuf pieds pour la dimension d f ou h l, qui est égale à l'épaisseur des quatres rangs du bataillon, et sept pieds pour l'autre d h ou f l, qui a deux pieds de moins.

Présentement il faut observer que les hommes qui doivent remplir le quadrilatère f l h d, doivent former des rangs des côtés d f et d h, et que comme chaque soldat occupe dans le rang un espace à-peu-près de deux pieds, le côté d f pourra contenir cinq hommes de front, et le côté d h, quatre en se serrant un peu sur a b et c g.

Ainsi il faudra huit hommes pour garnir les deux côtés d f et d h du quadrilatère f l h d, et le soldat qui sera en d, appartiendra également à chacun des côtés d f et d h.

On formera trois rangs en-dedans de ce quadrilatère, derrière chacun des deux premiers, à la distance de trois pieds de ces premiers ; le tout ainsi qu'on le voit dans la figure où les points blancs ou les zéros représentent les soldats du peloton que l'on veut former.

On aura dix-sept hommes pour remplir l'angle dont il s'agit : on leur fera présenter les armes, comme les petites lignes tirées sur les zéros l'indiquent. A l'égard du soldat du sommet d, il peut indifféremment présenter ses armes du côté d f ou d h, ou suivant la diagonale du petit quadrilatère d f h l.

REMARQUES.

I. Si le bataillon proposé était à plus ou moins de hauteur, on évaluerait le nombre d'hommes dont on aurait besoin pour en remplir les angles, de la même manière qu'on vient de le faire, en considérant quelles seraient les deux dimensions du quadrilatère qu'on voudrait remplir.

II. Lorsque le nombre d'hommes qu'on a pour chaque peloton des angles du carré, est plus grand qu'il n'est nécessaire pour les remplir, on peut faire entrer dans le vide du bataillon l'excédent, pour servir d'une espèce de réserve propre à suppléer aux hommes qui pourraient ensuite manquer aux troupes ou pelotons auxquels ils appartiennent.

III. Il y a une autre manière plus simple de former le bataillon carré, sans avoir la peine de remplir les angles, comme dans la formation précédente.

Pour cet effet, il faut comprendre les grenadiers et le piquet dans les divisions du bataillon, en mettant à l'ordinaire les grenadiers à la droite du bataillon, et le piquet à la gauche.

Supposons le bataillon de treize compagnies, y compris les grenadiers, et regardant le piquet comme une autre compagnie, on aura quatorze compagnies de front : comme ce nombre de compagnies ne peut se partager exactement en huit divisions d'un nombre de compagnies complete s, on les divisera en cinq parties ; savoir, la première division à droite de deux compagnies ; la seconde, de trois ; la troisième, de quatre ; la quatrième, de trois ; et la cinquième, de deux : cela posé, on fera faire demi-tour à droite à tout le bataillon : on ordonnera à la division du centre de ne point bouger, et aux deux autres divisions de la droite et de la gauche, de faire un quart de conversion, comme dans la formation précédente ; alors chaque division de deux compagnies, de la droite et de la gauche, fera un autre quart de conversion pour former le carré.

Ce qui étant exécuté, on fera avancer les deux côtés du carré de la droite et de la gauche en-dedans le bataillon, jusqu'à ce que le dernier rang de chacun de ces côtés, qui était le premier avant le demi-tour à droite, se trouve dans le prolongement ou l'alignement des files qui terminent la droite et la gauche de la division du centre, et le bataillon sera alors formé.

Si l'on suppose que les compagnies soient de quarante hommes, et qu'elles soient à quatre de hauteur, elles auront chacune dix hommes de front : la division du centre, composée de quatre compagnies, aura quarante hommes de front ; les deux côtés qui ont chacun trois compagnies, auront trente hommes de front ; mais étant entrées dans le bataillon, elles augmentent leur front de quatre hommes de l'aîle droite de la tête et autant de la queue, ce qui fait que ces côtés ont chacun trente-huit hommes de front ; mais les soldats de la droite et de la gauche de la tête et de la queue, qui augmentent le front des côtés, diminuent par-là la tête et la queue de deux soldats : donc il n'en reste que trente-huit pour ces côtés ; donc, etc.

REMARQUE.

L'instruction du 14 May 1754, se sert à-peu-près de cette même methode pour changer le bataillon ordinaire en colonne.

Cette colonne ou ce bataillon est à six de hauteur ; il est fermé du côté de la queue par le piquet : les grenadiers sont à la tête en-dehors ; ils ne font partie d'aucun des côtés du bataillon, et ils peuvent par conséquent se porter également vers celui de ces côtés qu'on juge à-propos. Voyez l'instruction qu'on vient de citer.

Il y a plusieurs autres manières de former le bataillon carré à centre vide ; on se bornera à en ajouter ici une, qui parait plus générale que celle qu'on vient d'expliquer, mais aussi qui exige la connaissance de l'extraction de la racine carrée que cette dernière ne suppose point.

Sait une troupe d'infanterie d'un nombre quelconque d'hommes, comme de douze cent, dont on veut faire un bataillon carré, qui paraisse, par exemple, de trois mille six cent hommes ; il s'agit d'abord de trouver la hauteur qu'on doit donner à ce corps de troupes.

On commencera par extraire la racine carrée de trois mille six cent : on la trouvera de soixante : on multipliera ce nombre par deux, ce qui donnera cent vingt pour le produit : on multipliera aussi soixante moins deux, ou cinquante-huit par deux, ce qui donnera cent seize, qui étant ajoutés à cent vingt, font deux cent trente-six : ce nombre est le front que doivent former les douze cent hommes proposés en bataille, pour les transformer ensuite en bataillon carré.

Le front du bataillon ou de la troupe de douze cent hommes, étant ainsi trouvé, on aura sa hauteur ou le nombre de ses rangs, en divisant douze cent par deux cent trente-six, c'est-à-dire la somme ou le nombre de tous les hommes de la troupe, par le nombre de ceux qui forment le front ; faisant cette division, on trouvera le nombre de cinq pour le quotient : c'est le nombre des rangs que doit former la troupe proposée : il reste vingt hommes, qu'on pourra, après la formation du bataillon, placer en pelotons à quelques-uns de ses angles pour le couvrir, ou mettre dans le vide ou le centre, pour servir à remplacer les pertes que peut faire le bataillon.

Maintenant pour former le bataillon carré, on fera mettre la troupe de douze cent hommes à cinq de hauteur : on la divisera ensuite en quatre parties ; savoir, la première à droite de cinquante-huit hommes de front, la seconde de soixante, la troisième de cinquante-huit, et la quatrième de soixante.

On fera faire demi-tour à droite à la partie de la droite et aux deux de la gauche, et l'on ordonnera à ces trois parties de faire un quart de conversion ; savoir, à la première de la droite, à droite, c'est-à-dire vers la gauche de la première position, et aux deux parties de la gauche, à gauche ou vers la droite de leur première position.

Ce premier mouvement étant exécuté, il ne s'agira plus pour former le bataillon carré, que de faire faire à la dernière division, un deuxième quart de conversion dans le même sens que le premier ; alors les divisions soixante et soixante seront opposées, ainsi que celles de cinquante-huit et cinquante-huit, qu'on fera entrer dans le bataillon, jusqu'à-ce que les premiers rangs de ces parties, devenus les derniers par le demi-tour à droite, se trouvants dans l'alignement des files qui terminent la droite et la gauche des deux derniers de soixante.

On fera faire après cela face en-dehors aux divisions qui ont fait le demi-tour à droite, et l'on aura le bataillon carré demandé, qui paraitra de trois mille six cent hommes, dont chaque côté sera de soixante hommes, et la hauteur de cinq.

Si l'on fixait la hauteur ou le nombre des rangs de chaque côté du bataillon ; si l'on voulait par exemple que les troupes y fussent à six de hauteur, il faudrait diviser le nombre d'hommes donnés douze cent par six. On aurait deux cent hommes pour chaque rang ou pour le front du bataillon à réduire en carré.

Pour le faire, il faut ajouter à ce nombre quatre unités, ce qui donnera deux cent quatre, dont le quart cinquante-un sera le côté du carré demandé.

On le formera comme le précédent en divisant le front réel deux cent en quatre parties, dont la première sera de quarante-neuf hommes, la seconde de cinquante-un, la troisième de quarante-neuf, et la quatrième de cinquante-un.

Si l'on voulait mettre le bataillon carré à quatre de hauteur, il faudrait donner d'abord cette hauteur à la troupe proposée douze cent, ajouter quatre unités à son front trois cent, ce qui fera trois cent-quatre, dont le quart soixante-seize sera le côté du carré cherché. On le formera comme les précédents, en divisant le front en quatre parties, dont la première et la troisième aient deux unités de moins que la seconde et la quatrième.

Si l'on veut savoir quel est le plus grand carré apparent qu'on peut former avec une troupe d'un nombre d'hommes donnés, comme par exemple de douze cent, il est clair que ce plus grand carré sera celui où les rangs de la troupe seront simples, c'est-à-dire dont chaque côté ne sera formé que d'un seul rang. C'est pourquoi comme le nombre d'hommes proposés composent le front de la troupe entière, il faudra lui ajouter quatre unités, ce qui donnera douze cent-quatre, dont le quart trois cent-un sera le côté du carré qu'on pourra former avec douze cent hommes, et qui serait, s'il était plein, de quatre-vingt-dix mille six cent-un hommes.

Après la formation du bataillon carré, on pourrait à l'imitation de la plupart des auteurs qui ont écrit sur les évolutions, donner celle des autres bataillons, comme celle des triangulaires, des ronds, des octogones, etc. Mais comme il ne doit pas être question ici d'un traité complet sur cette matière, on réserve ce détail pour un ouvrage particulier, que l'on se propose de donner incessamment sur cette matière, et qui aura pour titre Eléments des Evolutions, ou Motions militaires de l'Infanterie. On terminera ce long article par l'explication du mouvement appelé le Passage du défilé, ou du pont.

ARTICLE XIII.

Du Passage du défilé ou du pont.

Lorsqu'une troupe marche en ordre de bataille sur un grand front, et qu'elle est obligée de passer dans un lieu plus étroit, il faut nécessairement qu'elle se rompe pour proportionner son front à l'étendue ou à la largeur du passage ou du défilé dans lequel elle doit entrer. Ce passage est appelé défilé, lorsqu'il ne permet d'y passer que six ou huit hommes de front ; et comme la plupart des ponts qu'on rencontre en campagne, et qu'on fait exprès pour le passage des troupes, n'ont guère plus de largeur, de-là vient apparemment que le mouvement nécessaire pour faire passer une troupe dans ces sortes de lieux étroits, a été appelé le passage du défilé ou du pont.

Il y a des défilés plus petits et d'autres plus larges ; la méthode de faire passer une troupe par un défilé capable de contenir six ou huit hommes de front, s'applique aisément à tous les autres défilés.

Il est évident qu'on peut faire passer un défilé à une troupe, par sa droite, sa gauche, ou son centre ; mais la meilleure façon est de le lui faire passer par le centre, ce qui s'exécute aisément lorsque le défilé a de largeur le double de la hauteur de la troupe ou du bataillon, parce qu'on peut alors faire passer en même temps une fîle de la droite et de la gauche, qui faisant ensemble un quart de conversion pour entrer dans le défilé, forment un rang du double de la hauteur de la troupe ; ce qui en fait avancer également les deux parties de la droite et de la gauche dans le défilé.

Sait A B C D (fig. 63.) un bataillon auquel on veut faire passer le pont XY de douze pieds de largeur ; c'est-à-dire qui ne permet le passage qu'à six hommes de front à-la-fais. Sait supposé ce bataillon à trois de hauteur, et que le centre se trouve placé exactement devant le milieu du pont.

On prendra dans le centre une division de six hommes ; de façon qu'il y en ait trois du côté de la droite, et autant de celui de la gauche. On fera avancer cette division sur le pont, et l'on ordonnera au côté de la droite du reste du bataillon de faire à-gauche, et à celui de la gauche de faire à-droite ; chacune de ces ailes s'avancera ensuite d'un petit pas vers le centre, pour que les files qui suivent immédiatement celles de la droite et de la gauche de la division du centre qui occupe le pont, se trouvent dans le prolongement de ces files. Alors la fîle de la gauche de l'aîle droite, et celle de la droite de l'aîle gauche, feront chacune un quart de conversion pour former un rang de six hommes, qui marchera à la suite de la division du centre ; les autres files de chacune des ailes feront le même mouvement pour suivre les deux files précédentes ; et lorsqu'elles seront ainsi les unes derrière les autres, le bataillon formera une colonne dont le front sera double de la hauteur de la troupe, et la profondeur de la moitié du front du bataillon.

Cette colonne s'avance directement au-delà du pont autant qu'on le juge nécessaire pour pouvoir lui faire reprendre aisément son premier ordre de bataille.

On plante assez ordinairement des jalons a et b, dans l'alignement des deux côtés du pont, pour que la colonne ne s'écarte point dans sa marche de cette direction.

Lorsqu'on la trouve suffisamment avancée, on lui ordonne de s'arrêter.

On commande à la division du centre de ne point bouger ; aux demi-rangs de la droite de la colonne, de faire à-droite, et à ceux de la gauche, de faire à-gauche, et de former ensuite chacun un quart de conversion, savoir la division des demi-rangs de la droite à droite, et celle des demi-rangs de la gauche à gauche, pour aller reprendre leur première position à la droite et à la gauche de la division du centre, et la troupe se trouve ainsi remise dans le même ordre de bataille où elle était avant le passage du pont ou du défilé. Voyez la seconde disposition de la fig. 63.

Cette évolution peut s'exécuter encore de la manière suivante, par laquelle on augmente plus promptement le front de la division du centre, ce qui peut être plus avantageux lorsqu'on est à portée d'être attaqué au-delà du passage ou du défilé.

Sait encore (fig. 64) le bataillon A B C D qui doit passer le pont ou le défilé XY. On suppose que le centre de ce bataillon se trouve exactement placé vis-à-vis le milieu du défilé, qui peut contenir de front le double d'hommes de la hauteur du bataillon. On suppose aussi que ce bataillon est à trois de hauteur.

On marquera la division du centre composée dans ces exemples de six files dont trois seront du côté de la droite, et trois du côté de la gauche.

On fera avancer ces six files dans le défilé, et l'on ordonnera au reste des demi-rangs de la droite de faire à gauche, et à celui de la gauche de faire à-droite.

Alors les files de ces demi-rangs feront face l'une à l'autre ; et à mesure que celles du centre avanceront, celles de la droite et de la gauche qui suivent immédiatement la division du centre, marcheront jusqu'à ce qu'elles le trouvent dans l'alignement des files qui la terminent à droite et à gauche. Lorsqu'elles y seront parvenues, elles feront un quart de conversion de part et d'autre pour former un rang, et elles suivront la division du centre ; les autres files qui les suivent feront le même mouvement, comme dans l'exemple précédent. Mais ce qui rend cette évolution différente, c'est qu'au lieu de faire avancer la division du centre assez au-delà du défilé pour que tout le bataillon soit en colonne, on ne la fait marcher qu'à une distance un peu plus grande que le double de la hauteur du bataillon, et l'on ordonne à la division égale qui la suit, c'est-à-dire dans cet exemple aux trois rangs qui la suivent immédiatement, composés de trois files du côté droit, et d'autant de files du côté gauche, de faire à-droite et à-gauche par demi-rang, et de marcher ensuite devant eux pour aller se placer à la droite et à la gauche de la division du centre.

Les trois rangs qui les suivent immédiatement font le même mouvement, et de cette manière la troupe se reforme à droite et à gauche par des divisions de la hauteur du bataillon. Voyez la seconde disposition de la figure 64.

REMARQUES

I. Pour exercer les troupes à cette évolution, on fait placer à quatre ou cinq taises en-avant du centre six sergens à droite et autant à gauche, faisant face les uns aux autres.

Ils laissent entr'eux la largeur qu'on veut supposer à un défilé, et l'on y fait passer le bataillon de la manière qu'on vient de l'expliquer. On le fait reformer ensuite par la première ou la seconde des deux méthodes précédentes.

II. Il est évident que dans cette évolution on ne dérange point l'ordre des soldats, ni des compagnies. Elles se trouvent ensemble en colonne comme dans l'ordre de bataille ordinaire au bataillon.

III. Lorsque le défilé n'a de largeur que pour le passage d'une fîle de front, c'est-à-dire pour trois soldats, si le bataillon est à trois de hauteur, pour quatre s'il est à quatre, etc. on le passe par files de cette manière.

On fait marcher les trois files du centre dans le défilé, et l'on fait faire à-gauche à l'aîle droite, et à-droite à l'aîle gauche. La fîle qui suit immédiatement à droite la division du centre, fait un petit pas en-avant, et un quart de conversion à gauche, qui la met à la suite des divisions du centre avec lesquelles elle s'avance dans le défilé.

La fîle de la droite de l'aîle gauche s'avance aussi d'un petit pas comme la précédente, et elle se met à sa suite par un quart de conversion à droite.

Chacune des files de l'aîle droite et de l'aîle gauche du bataillon, fait alternativement le même mouvement pour entrer dans le défilé. Lorsque la première de la gauche de l'aîle droite se trouve au-delà, elle fait à droite, et elle marche devant elle jusqu'au serre-fîle où le soldat de la queue dépasse d'environ un petit pas le serre fîle de la droite de la division du centre. Alors elle fait un quart de conversion à gauche pour aller reprendre sa première position à côté de la fîle de la droite du centre.

La fîle de la droite de l'aîle gauche qui la suit immédiatement, fait aussi-tôt sa sortie du défilé, ou lorsqu'elle a joint la queue de la division du centre, un à-gauche. Ensuite elle marche devant elle, pour que le soldat qui la termine dépasse d'environ un pied le serre-fîle de la fîle de la gauche du centre ; puis elle fait un quart de conversion à droite pour reprendre sa première position à la gauche de la division du centre.

Ensuite la fîle de la droite qui suit immédiatement, Ve se replacer à la droite de la même manière ; celle de la gauche qui suit à la gauche, et toutes les files de la droite et de la gauche faisant ainsi le même mouvement, le bataillon se trouve reformé au-delà du défilé, comme dans la seconde méthode précédente.

IV. Quoique dans le passage du défilé précédent, on dise qu'on ne fait passer qu'une ou deux files, suivant sa largeur, il est aisé néanmoins d'observer, qu'il y en passe réellement autant que le défilé peut contenir d'hommes de front. Mais ces files ne sont point celles de la première disposition du bataillon. Elles sont formées des rangs qui deviennent files dans le défilé, comme les files y deviennent rangs. Or il n'y passe qu'un de ces rangs à la fais, composé d'une ou deux files, c'est-à-dire qu'il n'y passe qu'une ou deux files de la première position : mais il y en passe autant de la seconde, que la largeur du défilé peut en contenir.

V. Lorsqu'on a un bataillon en bataille sur quatre ou six de hauteur, on peut le mettre en colonne ou lui donner beaucoup plus de profondeur que de front, en se servant de l'évolution précédente, c'est-à-dire en faisant d'abord mouvoir le centre en-avant, et lui donnant pour front celui que doit avoir la colonne, et le faisant suivre ensuite par les ailes de la droite et de la gauche du bataillon de la même manière que pour le passage du défilé ou du pont.

M. Bottée, après avoir traité fort au long du passage du défilé, termine l'article où il en fait mention, par les réfléxions suivantes que nous croyons devoir rapporter.

" Ces choses paraissent si simples, dit cet auteur, qu'on croirait qu'il est presque superflu de les écrire ; mais ceux qui ont fait la guerre, connaissent de quelle importance il est de défiler avec ordre. On gagne un temps considérable par-là, et rien n'est plus précieux que le temps devant l'ennemi, soit pour ménager sa retraite, soit pour s'assurer de la victoire ".

Notre intention était de terminer ici cet article ; mais l'ordonnance sur l'exercice de l'infanterie du 6 Mai 1755, qui vient de paraitre, nous engage, pour le rendre plus complet, à y ajouter la formation de deux colonnes dont elle fait mention, c'est-à-dire de la colonne d'attaque, et de celle de retraite.

De la colonne d'attaque. Avant d'expliquer cette évolution, il faut observer :

1°. Que les bataillons, depuis la réforme faite après la paix d'Aix-la-Chapelle en 1748, sont de douze compagnies de quarante hommes chacune, en y comprenant deux sergens et un tambour, et qu'ils ont de plus une compagnie de grenadiers de quarante-cinq hommes.

2°. Que les douze premières compagnies qui forment le bataillon sont réunies deux à deux ; en sorte qu'elles divisent le bataillon en six parties, ou divisions de deux compagnies chacune, non compris les grenadiers.

Deux compagnies réunies sont appelées compagnies couplées, et le corps qui en résulte se nomme peloton.

Il suit de-là que le bataillon est composé de six pelotons, et d'une compagnie de grenadiers ; elle doit être immédiatement à la droite du bataillon quand il est formé par la droite, et à la gauche lorsqu'il est formé par la gauche.

Le piquet du bataillon est toujours, lorsque le bataillon est en bataille, au côté ou au flanc opposé à celui qu'occupent les grenadiers. Voyez PIQUET.

Les bataillons auxquels on veut faire former la colonne dont il s'agit ici, ou qu'on veut exercer aux autres évolutions, doivent être à six de hauteur, suivant l'ordonnance du 6 Mai 1755, qui confirme en cela la disposition de l'instruction du 14 Mai 1754. Cette colonne doit être de deux bataillons.

Formation de la colonne d'attaque. Saient les deux bataillons A B et C D (fig. 65.) rangés en bataille sur la même ligne, et éloignés l'un de l'autre de l'intervalle que les piquets, qu'on a supprimés dans cette figure, devraient occuper.

Ces deux bataillons sont divisés en pelotons, dans l'ordre prescrit par les règlements qu'on vient de citer ; savoir le premier peloton à la droite du bataillon A B, formé par la droite ; le second à la gauche, etc. et les grenadiers G à la droite du 1er peloton.

Le second bataillon formé par la gauche, a son premier peloton à la gauche, le second à l'aîle droite, et la compagnie de grenadiers à la gauche.

Le piquet du premier bataillon devrait être à la gauche de ce bataillon, et celui du second à la droite du sien ; ils ne s'y trouvent point, parce que lorsqu'on veut former la colonne, on le fait rentrer dans le bataillon.

Pour cet effet, le major ayant fait le calcul de la force des deux bataillons, en y comprenant les piquets, fait avertir les commandants des pelotons de les égaliser, en les mettant à un même nombre de files, lequel il fixera ; et chaque commandant de peloton doit en faire informer les officiers de serre-file.

" Aussi-tôt après cet avertissement, les capitaines des piquets leur feront faire demi-tour à droite, marcher huit pas en-arrière de deux pieds chacun, et faire ensuite à-droite et à-gauche, pour aller se disperser derrière leur bataillon, chaque soldat à portée de sa compagnie.

Les commandants des pelotons dont le nombre des files excédera celui que le major aura fixé, feront passer cet excédent derrière le sixième rang ; et dans les pelotons qui auront moins de files qu'il n'aura été ordonné, les officiers de serre-fîle feront entrer le nombre de soldats nécessaires pour les complete r, prenant de préférence ceux de leur peloton qui étaient de piquet, et après eux ceux des compagnies les plus voisines qui ne seront point employés. "

Pendant cette opération, le major fait ouvrir les bataillons à droite et à gauche, autant qu'il est nécessaire pour y introduire les files qui doivent servir à égaliser les pelotons.

A l'égard des soldats surnuméraires qui ne sont point admis dans les pelotons, dès que le major fait les commandements nécessaires pour former la colonne, ils font à-droite et à-gauche pour aller se former sur trois rangs au centre de l'intervalle des bataillons, c'est-à-dire vers V, " Ils doivent être commandés par un lieutenant, s'ils ne sont pas plus de trente hommes ; et par un capitaine avec un lieutenant, s'ils sont en plus grand nombre ; et ces officiers seront de ceux qui étaient auparavant de piquet, les autres se trouvant à leurs compagnies ".

Après cette préparation le major commandera.

1. Prenez garde à vous pour former la colonne d'attaque.

2. Je parle aux premiers pelotons.

3. Marche.

Au dernier commandement, les premiers pelotons de chacun des deux bataillons A B et C D, marcheront en-avant, en F et en H, par huit pas redoublés (a), qui font seize pieds, ou environ cinq pas de trois pieds.

Le premier F fera ensuite à gauche, et le second H à droite, et ils marcheront après cela pour se réunir en X et Y, vis-à-vis le centre de leur intervalle ; où s'étant joints, ils feront face en tête, et ils marcheront en-avant vers T, T ; pour former la tête de la colonne.

Les troisiemes pelotons de chaque bataillon feront de même que les deux précédents, huit pas redoublés en-avant, aussi-tôt que ces pelotons auront passé devant eux, et ils marcheront ; savoir, celui du bataillon de la droite par son flanc gauche, et celui de la gauche par le flanc droit, pour suivre les deux premiers pelotons, et se réunir derrière eux, après avoir fait face en tête étant arrivés en X et Y.

Cette manœuvre se fera de même successivement par les cinquiemes pelotons de chaque bataillon, puis par les sixiemes, les quatriemes, et les deuxiemes. Comme ces derniers doivent fermer la colonne, ils ne marchent point d'abord en-avant ; mais aussi-tôt que les quatriemes pelotons les ont dépassés, le premier A avance en Z par le flanc gauche, le second B par le flanc droit ; et lorsqu'ils se sont ainsi réunis, ils font face en tête, et ils marchent à la suite des quatriemes pelotons.

REMARQUES.

I. Il est évident qu'au lieu de faire passer ainsi successivement les pelotons devant le front du bataillon, on peut les faire passer à la queue, c'est-à-dire derrière le sixième rang : pour cet effet il suffit de commander aux deux bataillons de faire demi-tour à droite, avant de leur ordonner de marcher.

" Les officiers et sergens des premiers pelotons qui sont en serre-file, iront joindre au premier commandement ceux qui sont à la tête de leur premier rang ; ceux des deuxiemes pelotons passeront en serre-fîle : dans les autres pelotons, ils ne quitteront leur place ordinaire que lorsque leur peloton ayant longé le front du bataillon, la fîle de la gauche ou de la droite arrivera derrière le peloton qui le précède ; alors ils s'arrêteront pour se trouver tous en colonne lorsqu'elle sera formée, observant de s'y partager également, afin d'occuper les flancs de tous les pelotons. A l'égard des commandants des bataillons, ils se placeront à la tête de la colonne ". Ordonn. du 6 Mai 1755.

(a) On appelle pas redoublés, des pas de deux pieds, qu'on doit faire dans le temps qu'on ferait un pas ordinaire, c'est-à-dire pendant la durée d'une seconde. Voyez PAS.

III. Le peloton composé des soldats surnuméraires, se placera en S derrière la colonne, à quatre pas de deux pieds en-arrière de son dernier rang : ce peloton sera sur trois rangs.

IV. La compagnie G de grenadiers du bataillon A B de la droite, ayant fait à-gauche au commandement de marche, occupera successivement le vide que le départ des pelotons laissera à sa gauche, et elle arrivera ainsi sur le flanc droit de la queue de la colonne, au dernier rang de laquelle elle appuiera la fîle gauche de son premier rang à deux pas de deux pieds, en-dehors de l'éloignement du flanc droit de la colonne ; comme on le voit en G. A l'égard des grenadiers du bataillon de la gauche C D, ils viendront se placer de même en G sur le front gauche, à la queue de la colonne. Ces deux compagnies ont, dans la figure, plus de front que les pelotons ; parce qu'elles sont à trois de hauteur, et qu'elles sont plus nombreuses que les autres du bataillon.

V. Les tambours, à l'exception de deux qui se tiendront aux deux côtés de la colonne, se placeront à droite et à gauche du peloton surnuméraire S.

VI. La colonne ainsi formée, aura deux pelotons de front et six de profondeur ; c'est-à-dire environ vingt-quatre soldats de front, et trente-six de profondeur.

VII. La colonne se divise en trois sections ; la première, composée des premiers et troisiemes pelotons ; la seconde, des cinquiemes et sixiemes ; et la dernière, des quatriemes et deuxiemes. Ces sections, soit en marchant ou lorsque la colonne est arrêtée, doivent toujours conserver quatre pas de deux pieds, de distance entr'elles.

On peut voir dans l'ordonnance du 6 Mai 1755, que nous avons presque copiée jusqu'ici, quels sont les signaux prescrits pour la faire marcher de différents sens, et la manière de la rompre pour la remettre en bataille.

Ceux qui connaissent le traité de la colonne de M. le chevalier de Folard, s'apercevront aisément que la précédente a beaucoup de rapport à celle que propose cet habîle officier. Elle n'en diffère guère.

1°. Qu'en ce que M. de Folard compose la sienne depuis un bataillon jusqu'à six, et que celle dont il s'agit n'en doit avoir que deux.

Et 2°. en ce que cet auteur veut qu'on introduise des armes de longueur dans les corps qui composent sa colonne, comme des espèces de piques ou de pertuisanes de onze pieds de long. Ces armes doivent être dispersées, de manière qu'au premier rang de chaque section, et aux deux premières files des flancs, ou (comme l'auteur les appele) des faces de la colonne, il y ait un piquier entre deux fusiliers, afin de fraiser ainsi d'armes de longueur les côtés extérieurs de la colonne ; pour en rendre l'approche plus respectable à la cavalerie.

Il est certain qu'un corps d'infanterie comme la colonne, armé et disposé de même, ne pourra être entamé que très-difficilement par de la cavalerie, qu'il pourra percer, et culbuter les autres corps qui lui seront opposés, rangés à la methode ordinaire sur un grand front et peu de profondeur : c'est principalement dans ces sortes de cas, c'est-à-dire lorsqu'on peut approcher de l'ennemi et le charger, que l'on peut tirer de grands avantages de la colonne : car s'il s'agit d'action de feu, elle y est moins propre que le bataillon ordinaire, à cause de l'épaisseur de ses files, et du peu d'étendue de son front. " Aussi M. de Folard dit-il, que le propre de la colonne est dans l'action ; qu'il ne s'agit pas de tirailler, mais d'en venir d'abord aux coups d'armes blanches, et de joindre l'ennemi ; parce qu'alors le feu n'a plus lieu et qu'il n'y en a aucun à essuyer " Traité de la colonne, pag. 18.

Pour former la colonne, suivant M. le chevalier de Folard, il ne s'agit que de doubler, tripler, quadrupler, et quintupler les files ; c'est-à-dire les hausser ou les baisser, selon la force et la faiblesse des corps.

La méthode qui lui parait la plus simple pour cet effet, consiste à diviser le bataillon en autant de sections et sur autant de files ou de rangs de front, qu'on en veut mener à la charge.

M. de Folard suppose le bataillon de 550 fusiliers, les grenadiers compris. Ce nombre lui parait le plus parfait pour former le bataillon. Il suppose aussi qu'il est à cinq de hauteur ; ce qui est la moindre que le bataillon puisse avoir pour le choc.

Cela posé, l'armée étant en bataille sur deux lignes et une réserve, " la cavalerie sur les ailes, et l'infanterie au centre ; la distribution, l'ordonnance des troupes, et le choix des corps qui doivent former les colonnes sur le front étant fait, on séparera les grenadiers de chacun de ces corps ; on commencera par ce commandement :

A vous bataillons.

Attention.

A droite par manches (a) triplez vos files.

Au commandement, premièrement la manche du centre du bataillon rentre dans celle de la droite, le premier rang derrière le premier, le second derrière le second, et ainsi des autres.

En même temps la manche de la gauche entre dans les deux premières manches jointes ensemble ; le premier rang derrière le premier de la manche du centre, le deuxième derrière le deuxième, et ainsi du reste : de sorte que chaque bataillon se trouve à quinze de hauteur, étant rare qu'il y ait des surnuméraires. "

M. de Folard suppose que le bataillon ainsi mis en colonne, aura trente files de front. Il est évident qu'il en aurait trente-trois au lieu de trente : mais ce savant officier prend ici un nombre rond, qui approche très-sensiblement de la force du bataillon.

" Au commandement précédent, les deux ou les trois compagnies de grenadiers, supposé que la colonne soit de plus de deux bataillons, se porteront à la queue de la dernière section, chacune à cinq ou six de hauteur ". Voyez cette colonne, figure 66. des évolutions, divisée en trois sections avec les grenadiers à la queue.

Si les grenadiers ne font pas corps avec la colonne, c'est qu'il faut toujours, dit M. de Folard, séparer un corps d'élite et de réputation ; que d'ailleurs comme les bataillons ordinaires ne peuvent résister au choc de la colonne, quand même leur épaisseur serait triple de celle qu'on leur donne communément, lorsqu'elle les a rompus, on peut faire partir les grenadiers après les fuyards, les jeter dans les intervalles des bataillons ou des escadrons, ou pour tout autre usage que les commandants des colonnes jugeront à-propos.

" Si l'on veut former deux colonnes d'une seule, ou la couper en deux de tête à queue, on fait ce commandement :

A droite et à gauche formez deux colonnes.

Marche.

Halte.

Ce commandement se fait lorsqu'après avoir percé une ligne, on veut profiter de cet avantage pour tomber à droite et à gauche sur les flancs des bataillons qui sont à côté, et qui soutiennent encore contre ceux qui leur sont opposés. Ce mouvement ne doit se faire que lorsque la première ligne tient ferme encore aux endroits où il n'y a

(a) M. de Folard appelle manche, le tiers du front du bataillon : ainsi le bataillon a trois manches ; savoir celle de la droite, celle du centre, et celle de la gauche.

pas de colonnes. Traité de la colonne, page 70. Voyez ce traité et le livre intitulé, sentiments d'un homme de guerre sur le nouveau système du chevalier de Folard, par rapport à la colonne, etc. Voyez aussi la préface du sixième volume du commentaire sur Polybe.

De la colonne de retraite. La colonne de retraite ne diffère guère de celle d'attaque. Elle est composée de même de deux bataillons, divisés chacun en six pelotons, rangés à la fîle les uns des autres, à-peu-près dans le même ordre que dans cette première colonne.

Ainsi le front de la colonne de retraite est de deux pelotons, comme celui de la colonne d'attaque et sa profondeur est de six.

Dans cette colonne, les deux piquets de chaque bataillon ne sont pas confondus dans les bataillons, comme dans la précédente. Leur poste est à la tête et à la queue de la colonne, avec les grenadiers de chaque bataillon qui sont placés immédiatement devant le piquet qui appartient à leur bataillon.

Pour donner une idée de la formation de cette colonne, on supposera deux bataillons divisés dans leurs pelotons, comme dans la colonne précédente, rangés en bataille sur la même ligne, les grenadiers à la droite du bataillon de la droite, et le piquet à la gauche ; les grenadiers du bataillon de la gauche à gauche, et le piquet à la droite.

On fera d'abord marcher en-avant les grenadiers et le piquet du bataillon de la droite ; savoir les grenadiers de six pas de deux pieds, et le piquet de trois des mêmes pas. La compagnie des grenadiers s'étant ainsi avancée, fait à-gauche, et elle marche ensuite par son flanc gauche, pour aller se placer, par un à-droite, sur le piquet de son bataillon.

A l'égard du piquet du bataillon de la gauche, on lui fait faire demi-tour à droite, ainsi qu'aux pelotons des deux bataillons, à l'exception néanmoins des deuxiemes pelotons qui terminent à gauche le bataillon de la droite, et à droite celui de la gauche. Les grenadiers de ce dernier bataillon font aussi le même mouvement.

Le piquet du bataillon de la gauche, après le demi-tour à droite, fait un certain nombre de pas redoublés devant lui, pour s'éloigner de sa première position d'un espace à-peu-près égal au front de son bataillon afin qu'il y ait un intervalle suffisant pour former la colonne, entre cette première position et celle à laquelle il sera parvenu. Il Ve ensuite se placer, par deux quarts de conversion à gauche, vis-à-vis le piquet du bataillon de la droite.

Pendant ce temps-là, les cinq pelotons de chaque bataillon qui ont fait demi-tour à droite, font ensemble un quart de conversion qui les met en face les uns des autres ; c'est-à-dire que ceux du bataillon de la droite le font à droite, et ceux du bataillon de la gauche, à gauche. La compagnie de grenadiers qui y est jointe le fait également, en suivant les pelotons de son bataillon avec lesquels il est en bataille.

Lorsque ce mouvement est achevé, les deuxiemes pelotons qui n'ont point bougé font l'un à-gauche, et l'autre à-droite, et ils marchent après l'un et l'autre pour se rejoindre derrière le piquet, et la compagnie de grenadiers du bataillon de la droite ; et tout de suite, ils font à droite et à-gauche, pour se retrouver face en tête.

Les autres pelotons des deux bataillons, que le quart de conversion a mis en face les uns des autres, s'approchent ensuite, de manière que le dernier rang de ceux du bataillon de la droite se trouve aligné sur la fîle droite du second peloton de ce bataillon qui fait face en tête, et que le dernier rang de ceux du bataillon de la gauche le soit également sur la fîle gauche du second peloton de ce même bataillon.

Lorsque tout ceci est exécuté, les grenadiers du bataillon de la gauche se détachent de ce bataillon, et ils avancent par un pas oblique de gauche à droite, jusqu'à ce que la première fîle de la gauche soit alignée et joignant le rang extérieur du piquet du même bataillon. Ils font alors un quart de conversion qui leur fait couvrir le piquet de leur bataillon.

REMARQUES.

I. Il est évident, que par la formation que l'on vient d'expliquer, les cinq pelotons de chaque bataillon qui composent les flancs ou les faces de la colonne, laissent entr'eux un intervalle égal à l'excès du front des deux pelotons de la tête, c'est-à-dire des deuxiemes pelotons de chaque bataillon, sur le double de leur hauteur.

C'est pourquoi si ces pelotons ont ensemble 24 hommes de front, qui occupent environ 48 pieds d'étendue, les bataillons, à 6 de hauteur, en auront 15 de profondeur, les rangs étant serrés à la pointe de l'épée : ainsi il y aura, dans cette supposition, un intervalle de 18 pieds entre les deux flancs de la colonne.

II. Il suit aussi de la formation précédente de la colonne de retraite, que le front des deuxiemes pelotons de chaque bataillon, ne doit jamais être plus petit que le double de la hauteur de chaque bataillon. C'est apparemment par cette raison que l'ordonnance du 6 Mai 1755 porte, que si les deuxiemes pelotons des deux bataillons formaient ensemble moins de seize files, l'on y joindrait autant de files prises dans les quatriemes pelotons, qu'il serait nécessaire pour les porter jusqu'à ce nombre. (a)

III. Lorsque la colonne est entièrement formée, on fait faire demi-tour à droite à tous les hommes dont elle est composée, à l'exception de la compagnie de grenadiers, du piquet du bataillon de la droite, et des deuxiemes pelotons de chaque bataillon qui forment la tête ou plutôt la queue de la colonne : puisque cette colonne a pour objet de se retirer de devant l'ennemi, lesquels doivent continuer de faire face en tête. On observe seulement de faire faire face en-dehors aux deux files de la droite et de la gauche de ces pelotons, et cela par un à-droite et un à-gauche, afin que toute la longueur des flancs de la colonne ne forme qu'un seul et même rang en-dehors.

Les grenadiers et le piquet du bataillon de la gauche, lesquels sont devant le côté de la colonne opposé à celui que forment les deuxiemes pelotons de deux bataillons, font aussi face en-dehors de cette colonne.

IV. Il est évident que la colonne de retraite peut marcher de tous les sens, comme celle d'attaque. Voyez dans l'ordonnance du 6 Mai 1755, les différents commandements pour la former, la manière de la rompre, de la mettre en bataille, etc. Article de M. LE BLOND.

ÉVOLUTIONS DE LA CAVALERIE. Le nombre des auteurs qui ont écrit sur les évolutions de la cavalerie n'est pas fort considérable, et il n'y a guère que M. le maréchal de Puységur qui soit entré dans un détail raisonné sur ce sujet. On ne prétend point donner ici un traité sur cette matière ; on se propose seulement d'expliquer les règles et les principes des manœuvres qui servent de fondement ou d'éléments à tous les mouvements que la cavalerie peut exécuter.

Ces manœuvres peuvent se réduire aux suivantes.

(a) Ce nombre, suivant M. de Folard, est le plus petit front que la colonne puisse avoir. La colonne " dit cet auteur, peut se maintenir dans sa force depuis trente files ou trente-quatre, même jusqu'à seize ", il croit défectueux tout nombre plus grand ou plus petit. Tr. de la colonne, page 9.

1°. A serrer et à ouvrir les files et les rangs.

2° Au demi-tour à droite ou à gauche, qu'on appelle aussi volte-face.

3°. Aux à droite et aux à gauche par division du front de l'escadron.

4°. A la demi-conversion que la plupart des auteurs modernes appellent caracole.

5°. A faire marcher l'escadron par différentes divisions, pour le faire défiler, et le remettre ensuite en bataille.

Et 6°. à doubler et à dédoubler les rangs de l'escadron.

I. PROBLEME.

Un escadron étant en bataille, lui faire serrer ou ouvrir ses files.

Lorsque l'escadron étant en bataille, si les cavaliers occupent chacun plus de trois pieds, on peut les faire serrer les uns sur les autres, pour les réduire à cette distance.

Pour le faire, il faut observer que les chevaux ne peuvent pas tourner sur eux-mêmes dans le rang, comme le font les soldats dans le bataillon, à cause de l'inégalité de leurs deux dimensions, à moins que les files ne soient plus ouvertes que l'étendue de la longueur du cheval ; ce qu'on ne suppose point ici : c'est pourquoi la méthode pratiquée pour cet effet dans l'infanterie ne peut avoir lieu dans la cavalerie.

Quand même les files seraient plus espacées que de la longueur d'un cheval, on ne pourrait les serrer qu'à cette distance, en faisant tourner les chevaux du même côté, et en les faisant ensuite serrer les uns sur les autres ; ce qui laisserait encore occuper aux files environ 7 pieds ou 7 pieds et demi de largeur. Il faut donc avoir recours à une autre méthode : elle consiste, comme les chevaux ont la faculté d'aller de côté, à les faire serrer les uns sur les autres, en marchant un peu de côté ; c'est ce qui s'exécute très-promtement et très-facilement, lorsque les chevaux sont un peu dressés à cette manœuvre.

Il est clair qu'on peut ouvrir les files de la même manière, lorsqu'on les trouve trop serrées. A l'égard des rangs, s'ils sont plus éloignés les uns des autres qu'il ne convient, on fait avancer les derniers sur le premier ; et s'il s'agit de les ouvrir, le premier avance, et ceux qui le suivent prennent ensuite telle distance qu'on juge à-propos.

SECOND PROBLEME.

Un escadron étant en bataille, lui faire faire face du côté opposé à son front, ou, ce qui est le même, lui faire exécuter le demi-tour à droite.

Voyez DEMI-TOUR A DROITE, où l'on a donné la manière d'exécuter ce mouvement en doublant le nombre des rangs de l'escadron, pour laisser aux chevaux l'espace nécessaire pour tourner dans le rang, et en faisant rentrer ensuite les rangs les uns dans les autres, etc.

Il est aisé d'observer que par ce mouvement le premier rang devient le dernier ; ce qui est un inconvénient assez considérable, qu'on ne peut néanmoins éviter que par le quart de conversion : mais ce dernier mouvement a celui de faire changer la troupe de terrain, et d'exiger d'ailleurs de part et d'autre de l'escadron des intervalles égaux à son front.

Il y a une autre manière de faire tourner l'escadron de la tête à la queue, qui peut aussi servir à faire marcher la troupe par l'un de ses flancs ; ce qui ne se peut point par le demi-tour à droite qu'on a déjà expliqué. Cette méthode consiste à diviser le front de l'escadron en divisions qui aient au moins la longueur du cheval, et à faire tourner ensuite ces divisions, et comme on fait tourner les soldats sur eux-mêmes dans l'infanterie, pour faire à droite ou à-gauche : on Ve en donner l'exemple dans le problème suivant.

TROISIEME PROBLEME.

Faire à droite ou à gauche par divisions du front de l'escadron, pour faire volte-face ou le demi-tour à droite, et pour marcher par la droite ou par la gauche de l'escadron.

Comme le seul obstacle qui empêche le cavalier de se tourner dans le rang, ainsi que le fait le soldat, n'est autre chose que la longueur du cheval qui a plus de deux fois sa largeur, il faut, pour remédier à cet inconvénient, prendre dans le rang un nombre de cavaliers suffisant pour que le front surpasse la longueur du cheval ; considérant ensuite ces cavaliers comme formant un seul corps inflexible, on pourra les faire tourner tous ensemble dans le rang, de la même manière qu'on le fait dans le quart de conversion et les à droite et les à gauche de l'infanterie.

On a déjà observé que chaque cavalier occupe, à-peu-près, trois pieds de largeur dans le rang, et que la longueur du cheval est d'environ 7 pieds ou 7 pieds et demi : il suit de-là que deux cavaliers joints ensemble n'occupent que 6 pieds de front, et par conséquent qu'ils ne peuvent tourner dans le rang, parce que ce front est plus petit que la longueur du cheval. Mais trois cavaliers, qui occupent un espace de 9 pieds, peuvent le faire ; et à plus forte raison, quatre, cinq, six, sept, etc. cavaliers.

Si l'on fait tourner des divisions de trois cavaliers, les rangs qu'elles formeront après avoir fait le quart du tour, ne seront qu'à la distance d'environ un pied et demi les uns des autres, et par conséquent trop près pour pouvoir marcher en-avant, sans que les chevaux se donnent des atteintes. Cette grande proximité ne permettrait pas non plus que les divisions fissent ensemble leur mouvement ; elles s'embarrasseraient trop les unes et les autres dans son exécution. Il faudrait, pour éviter cet inconvénient, qu'elles le fissent successivement.

Mais si l'on fait tourner ensemble quatre cavaliers, ils occuperont un espace de douze pieds ; et comme le cheval n'en a qu'environ sept et demi, les rangs que ces divisions formeront, après avoir fait la moitié du demi-tour, seront éloignés les uns des autres d'environ quatre pieds et demi. Alors ces divisions peuvent tourner ensemble, et marcher en-avant, sans aucune difficulté.

Si l'on fait les divisions de cinq cavaliers, les rangs qu'elles formeront après avoir tourné à droite ou à gauche, auront à-peu-près sept pieds et demi d'intervalle, c'est-à-dire environ la longueur d'un cheval ; si elles sont de six cavaliers, cet intervalle sera de dix pieds, et si elles sont de sept, d'environ douze pieds. Cette dernière distance est celle que M. le maréchal de Puységur prétend qu'il doit y avoir entre les rangs ; c'est pourquoi il regarde le mouvement dont il s'agit par divisions de sept cavaliers, comme plus parfait que par tout autre nombre.

Cependant comme le mouvement par quatre cavaliers s'exécute aisément, que ce nombre est moins difficîle à compter que toute autre division, l'usage le plus ordinaire des troupes étant de marcher ou de défiler par quatre, il suit de-là que ces divisions peuvent, pour ainsi dire, se former elles-mêmes : ce sera, par cette raison, le mouvement par quatre qu'on expliquera ici ; mais ce qu'on en dira pourra s'appliquer à toute autre division d'un plus grand nombre de cavaliers.

Sait la figure 67, (a) une partie quelconque de

(a) On a marqué dans cette figure et dans les deux sui vantes, les chevaux par leur projection perpendiculaire sur le terrain ; on distingue par-là plus aisément le mouvement des chevaux et l'espace qu'ils occupent, que s'ils étaient représentés en élévation ou en perspective.

l'escadron rangé sur deux rangs A B et C D ; divisés par quatre cavaliers. Chaque division est marquée par des points qui forment une espèce d'accollade qui renferme les quatre cavaliers qui doivent manœuvrer ensemble.

Pour que cette troupe fasse à-droite, il faut que le cavalier de la droite de chaque division soutienne, ainsi qu'on s'exprime ordinairement, c'est-à-dire qu'il serve de pivot, et que les autres fassent autour de lui un quart de conversion.

L'expérience fait voir qu'il n'y a rien de plus aisé à exécuter que ce mouvement. Le cavalier qui soutient n'a autre chose à faire qu'à ployer, pour ainsi dire, son cheval de manière qu'il suive le mouvement de ceux qui tournent avec lui ; ce qui est facîle lorsque les chevaux sont accoutumés dans l'escadron, où ils prennent l'habitude de marcher à côté les uns des autres, et à la même hauteur.

La figure 68. fait voir le mouvement exécuté et le nouvel ordre qui en résulte. La troupe est alors sur autant de rangs qu'il y a de divisions dans le rang, lesquels font face à la droite de l'escadron. Si l'on fait un second à-droite, la troupe fera face à la queue de l'escadron. Voyez la figure 69.

Les deux à-droite precédents qu'on a supposé être exécutés en deux temps, peuvent être faits par un seul mouvement sans interruption, comme dans l'infanterie. Alors si les officiers veulent passer à la tête de l'escadron, ils tournent autour de l'un des flancs ; mais si l'on fait le demi-tour en deux temps, il se trouve, après le premier à-droite, des ouvertures dans la profondeur de l'escadron, comme on le voit dans la figure 68, par où les officiers peuvent passer. Le second à-droite reforme l'escadron vers la queue, de la même manière qu'il l'était à la tête avant le mouvement.

REMARQUES.

I. Il faut observer que le demi-tour à droite de la manière qu'on vient de le supposer exécuté, change un peu le terrain de l'escadron ; car par ce mouvement on laisse à sa gauche un espace presqu'égal au front de chaque division, ou capable de contenir trois chevaux lorsque les divisions sont de quatre cavaliers. On a marqué cet espace dans la figure 69, par la représentation ponctuée des chevaux qui l'occupaient d'abord ; mais on gagne vers la droite de l'escadron un espace de pareille étendue.

II. Il se fait aussi quelques changements dans le dedans ou l'intérieur de l'escadron, mais seulement dans l'arrangement des hommes de chaque rang. Les chiffres par lesquels on a marqué les hommes dans la première position (fig. 67), font voir dans la figure 69. en quoi consiste cette espèce de dérangement.

III. Si l'on veut faire ce même mouvement à gauche, c'est le cavalier de la gauche de chaque division qui sert de pivot : il tourne sur le pied de devant du montoir, qui est le gauche, et les autres cavaliers de la même division tournent autour de lui et avec lui, comme dans le quart de conversion. Il est évident qu'on peut faire le demi-tour à gauche d'un seul mouvement continu, comme à droite.

IV. Par le mouvement qu'on vient d'expliquer, une ligne de cavalerie, c'est-à-dire une suite d'escadrons placés en ligne droite à côté les uns des autres, peut tourner pour marcher sur sa droite ou sur sa gauche, dans le temps nécessaire, à quatre ou six cavaliers pour décrire un quart de conversion. C'est pourquoi comme l'exécution de ce mouvement demande très-peu de temps, c'est celui, dit M. le maréchal de Puysegur, dont il faut se servir comme le plus sur et le plus prompt, lorsqu'on est près de l'ennemi et qu'on est obligé de s'ouvrir sur la droite ou sur la gauche.

5. Au lieu de faire des divisions qui obligent de compter, comme de cinq ou de six, etc. cavaliers, on peut diviser le front de chaque compagnie en deux parties, et faire le mouvement précédent sur la droite ou sur la gauche par demi-compagnie.

Si l'on a, par exemple, un escadron de quatre compagnies de trente-six hommes chacune ; ces compagnies formées sur trois rangs auront douze hommes de front, et l'escadron en aura quarante-huit.

Pour faire tourner cet escadron à droite, ou pour le faire marcher sur sa droite, on commandera à droite par six, ou par demi-compagnie ; et le mouvement étant exécuté, la troupe ou l'escadron marchera sur sa droite par un front de trois demi-compagnies, c'est-à-dire dans cet exemple de dix-huit hommes.

Si l'on veut que ces trois demi-compagnies se joignent sans intervalle, il faut avoir attention que les rangs ne soient éloignés les uns des autres, avant le mouvement, que de 18 pieds ou de la distance nécessaire pour mettre six cavaliers à côté les uns des autres.

De la conversion. Les conversions se font, dans la cavalerie, de la même manière que dans l'infanterie : il n'y a de différence que dans les termes du commandement.

Ce qu'on appelle quart de conversion dans l'infanterie, se nomme assez ordinairement caracole dans la cavalerie. Quelques auteurs donnent néanmoins le nom de caracole à la demi-conversion ou au demi-tour que fait l'escadron considéré comme corps inflexible, pour faire face à sa queue ; alors le quart de conversion est appelé demi-caracole, mais ce dernier terme est peu usité : on dit plus communément faire marcher sa gauche ou sa droite, suivant que le quart de conversion doit se faire de l'un ou de l'autre côté.

Pour exécuter le quart de conversion ou la demi-caracole, on fait arrêter la troupe, si elle est en marche, par ce commandement, halte : et l'on dit ensuite, si le quart de conversion doit se faire à droite, doucement la droite, marche la gauche ; de-là vient que ce mouvement est appelé faire marcher sa gauche.

Si la demi-caracole doit se faire à gauche, on fait ce commandement : doucement la gauche, marche la droite.

Comme ces dernières expressions sont équivoques, en ce qu'elles peuvent s'appliquer au mouvement de l'escadron par la droite ou par la gauche, et qu'elles ne sont point prescrites par les ordonnances, on croit qu'il est plus à-propos d'exprimer la demi-caracole par le terme de quart de conversion, comme le fait l'ordonnance du 22 Juin 1755 sur l'exercice de la cavalerie.

Le terme de caracole n'a pas toujours exprimé le demi-tour à droite ou à gauche de l'escadron : on le donnait autrefois à un mouvement de chaque file, qui se faisait successivement par le flanc de l'escadron : on l'employait pour insulter un escadron ennemi mal monté, ou qui ne pouvait quitter son terrain.

Dans ce mouvement chacune des files se détachait successivement de l'escadron, et elle allait passer devant l'ennemi en serpentant, et en faisant des passades à droite et à gauche pour ôter la mire à ceux qu'elle insultait ; elle revenait ensuite par l'autre flanc de l'escadron, et passant derrière, elle reprenait sa première position.

Lorsqu'on voulait exécuter ce mouvement, l'officier qui commandait l'escadron faisait ce commandement : à moi l'aîle droite par caracole à gauche en faisant front en queue.

On disait, en faisant front en queue, parce que la fîle pour se remettre, tournait insensiblement le front vers la queue pour l'aller regagner et passer derrière.

La caracole se faisait aussi par quart de rang ; alors chaque quart allait passer successivement devant l'escadron ennemi, en faisant des décharges de mousqueton ou de pistolet, et il allait ensuite se reformer ou reprendre sa première place par le derrière ou la queue de l'escadron.

Ce détail sur ce qui regarde la caracole, peut servir de supplément à ce qu'on en a dit au mot CARACOLE, où l'on en a parlé un peu trop brièvement.

De la demi-conversion sur le centre.

Nous avons déjà observé que le demi-tour à droite ou à gauche avait l'inconvénient de faire du premier rang de l'escadron le dernier, et du dernier le premier ; que la demi-conversion n'avait pas ce même défaut, mais qu'elle exigeait de grands intervalles à droite et à gauche de l'escadron, et qu'elle en changeait le terrain.

On peut remédier à ces deux inconvéniens, en faisant tourner l'escadron sur son centre de la même manière qu'on fait tourner le bataillon dans l'infanterie.

Pour cet effet, l'escadron étant divisé en deux parties, si l'on veut que la demi-conversion se fasse de gauche à droite, la partie de la gauche ne bougera point, et l'on fera faire le demi-tour à droite à l'autre partie, par divisions de quatre, cinq ou six hommes de front. Alors les deux moitiés de l'escadron se trouveront distantes l'une de l'autre à-peu-près de l'intervalle d'une des divisions de celle qui a fait le demi-tour à droite. On fait ensuite ce commandement : A droite sur le centre faites un quart de conversion.

Le cavalier qui est à la droite du premier rang de la partie de la gauche qui n'a pas bougé, sert de pivot au mouvement de cette partie qui fait le quart de conversion à l'ordinaire. L'autre tourne en même temps du même sens et sur le même pivot, mais en conservant toujours le même intervalle qui l'en sépare.

Lorsque la première partie a fait son quart de conversion, la seconde a fait le sien également ; elle fait face au côté opposé à celui de la première, et elle en est éloignée de l'intervalle du front d'une des divisions avec lesquelles elle a d'abord fait le demi-tour à droite.

Pour faire face du même côté que la première moitié de l'escadron, elle fait encore le demi-tour à droite par les mêmes divisions de son front. Lorsque ce mouvement est exécuté, l'intervalle qui la séparait de la première partie de l'escadron, se trouve rempli, toute la troupe fait face du même côté, qui dans cet exemple est le côté droit.

Il est évident que ce mouvement peut s'exécuter de la même manière tant à gauche qu'à droite.

Pour rendre ce mouvement plus aisé à concevoir, nous nous servirons de la figure 70, tirée de l'art de la guerre de M. le maréchal de Puységur, tome I. page 274.

Elle représente un escadron de cinquante-six hommes de front, composé de quatre compagnies de quarante-deux cavaliers chacune.

Les deux compagnies de la droite ont fait à-droite par demi-compagnie, c'est-à-dire par des divisions de sept cavaliers : ce qui les a éloignés des deux autres de l'intervalle A B F H, égal à-peu-près au front de sept cavaliers.

Les lignes ponctuées, K M et I N, représentent le terrain que l'escadron occupera ; après avoir fait le quart de conversion sur le centre ou le pivot. A.

La moitié de l'escadron à gauche viendra se placer par son mouvement autour de A, en A I L K. Les cavaliers O et P décriront, pour cet effet, les quarts de cercle O K et P L.

La moitié de l'escadron à droite, tournant en même temps sur le point A, le cavalier B se trouvera en C, lorsque le quart de cercle sera décrit, le cavalier D en E, et celui qui est en H en G. A l'égard des cavaliers R et S, ils seront en M et N, et ils auront décrit les arcs R M et S N.

Ainsi après le quart de conversion achevé, la moitié de l'escadron à droite occupera l'espace C G N M ; elle sera séparée de la gauche par les lignes A I et C G, et elle fera face à la gauche de l'escadron.

Pour lui faire faire face à droite, comme le fait la moitié qui est à la gauche, on lui fera exécuter le demi-tour à droite par les mêmes divisions avec lesquelles elle a d'abord fait ce même mouvement, c'est-à-dire par demi-compagnie ou par divisions de sept cavaliers de front. Alors la première division, dont le pivot est en C, occupera l'espace ou l'intervalle A C, et l'escadron sera ainsi formé sur le flanc droit, sans intervalle au centre.

Si l'on veut que l'escadron fasse tête à la queue, il est clair qu'au lieu du quart de conversion, il faut lui faire exécuter le demi-tour entier tout de suite ; après quoi les deux compagnies qui ont fait d'abord à droite par divisions de demi-compagnie, n'ont qu'à faire encore une fois ce même mouvement, pour faire face du même côté que les deux autres, et pour se rejoindre avec elles sans intervalle.

Par ce mouvement on fait tourner l'escadron, sans qu'il change de terrain, et l'on conserve toujours le premier rang à la tête. Comme le rayon du cercle n'est alors que la moitié du front de l'escadron, les quarts de cercle que décrivent les cavaliers ne sont que la moitié de ceux qu'ils décriraient, si l'on prenait pour rayon le front entier. C'est pourquoi le quart de conversion et la demi-conversion sur le centre s'exécutent dans un temps une fois plus court, que quand le pivot est à l'un des angles de l'escadron.

Manière de faire marcher et défiler l'escadron par différentes divisions, et de le reformer. Les différentes divisions en usage dans l'infanterie pour mouvoir ou faire marcher le bataillon, comme les manches, demi-manches, pelotons ou sections, etc. ne sont point connues dans la cavalerie. On se sert de divisions plus naturelles, et ce sont celles des quatre compagnies dont l'escadron est ordinairement composé.

Comme il est difficîle de trouver des terrains ou des chemins assez larges pour que l'escadron puisse marcher en bataille, c'est-à-dire les quatre compagnies rangées à côté les unes des autres sur la même ligne droite, on est obligé de le rompre en différentes parties, qui sont, lorsqu'on le peut, les quatre compagnies dont il est formé. On ne défîle sur un front plus petit que celui d'une compagnie, que lorsque les lieux où l'escadron doit passer, ne permettent pas de faire autrement.

La première règle pour faire mouvoir ou marcher une troupe de cavalerie, est, dit l'ordonnance du 22 Juin 1755, de s'éloigner le moins qu'il est possible de l'ordre de bataille, et de préférer les manœuvres par lesquelles on peut se reformer le plus promptement et avec moins de chemin.

Supposons un escadron de cent vingt hommes, ou de quatre compagnies de trente cavaliers chacune, rangés sur trois rangs ; il aura quarante hommes de front, et chaque compagnie en aura dix.

Comme le cavalier occupe trois pieds dans le rang, le front de cet escadron sera de vingt taises : en les rompant par compagnies, et les mettant à la suite les unes des autres, elles formeront ensemble douze rangs de dix hommes chacun.

Les rangs aussi serrés qu'il est possible pour marcher, ne peuvent guère occuper moins de douze pieds ou de deux taises, en joignant ensemble la longueur du cheval, et l'intervalle qui sépare les rangs les uns des autres ; c'est pourquoi les douze rangs occuperont environ 24 taises d'étendue. (a)

Les quatre compagnies à la suite les unes des autres auront trois intervalles, lesquels, en comprenant le rang des officiers à la tête de chaque compagnie, peuvent s'évaluer chacun environ à l'épaisseur de deux rangs, ou à quatre taises ; par conséquent les trois ensemble font douze taises. Ces taises ajoutées aux vingt-quatre précédentes, donnent environ trente-six taises pour la longueur de l'escadron, en marchant par compagnie, comme il en occupe vingt en bataille, lorsqu'il reprendra cette première disposition, il lui restera seize taises pour l'intervalle qui le séparera de l'escadron voisin.

Si l'on veut réduire cet intervalle à la moitié du front de l'escadron, c'est-à-dire à dix taises, comme le prescrivent le projet d'instruction pour la cavalerie, inséré dans le code militaire par M. Briquet, et l'ordonnance du 22 Juin 1755 ; on y parviendra aisément en serrant un tant-sait-peu les rangs et les intervalles des compagnies, ou bien de la manière suivante.

On considérera les officiers qui sont à la tête de chaque compagnie, comme formant un rang ; ainsi l'on aura quatre rangs d'officiers, qui joints aux douze des cavaliers, font ensemble seize rangs. On partagera trente taises ou 180 pieds, c'est-à-dire l'espace qu'occupe le front du bataillon, avec l'intervalle de dix taises, en seize parties égales, et l'on aura onze pieds pour l'épaisseur de chaque rang ; ce qui est un espace suffisant pour que les chevaux marchent aisément les uns derrière les autres sans se donner d'atteintes.

Si l'escadron est plus fort qu'on ne le suppose ici, il est évident qu'on trouvera de la même manière quelle doit être l'épaisseur de chaque rang, pour que la troupe n'occupe, en marchant par compagnie, qu'une fois et demie la longueur ou l'étendue de son front.

Quoique la marche de l'escadron par compagnie soit plus avantageuse pour réunir la troupe, ou la mettre en bataille plus facilement que lorsqu'elle marche sur de plus petites divisions, néanmoins comme on est obligé de se régler là-dessus, suivant les différents passages qu'on rencontre, il arrive qu'on fait quelquefois défiler l'escadron par un cavalier, par deux, par quatre, etc.

Pour défiler par un, le premier cavalier du premier rang de la compagnie de la droite ou de la gauche, c'est-à-dire du côté par où l'on veut commencer le mouvement, marche en-avant ; le deuxième vient prendre sa place, et le suit : les autres en font de même successivement.

Lorsque le premier rang a ainsi défilé, le second en fait de même, et ensuite le troisième.

La seconde compagnie, ou celle qui suit immédiatement celle qui a d'abord défilé, se met de même à la suite de la première ; elle est suivie de la troisième, et celle-ci de la quatrième.

Si la troupe marche par deux, les deux premiers cavaliers de la droite ou de la gauche du premier rang de la compagnie de la droite ou de la gauche, marchent d'abord en-avant ; le troisième et le quatrième viennent ensuite par un à-droite ou un à-gauche par deux (b), prendre la place des deux premiers, et ils se mettent à leur suite. Les autres cavaliers du même rang en font de même deux à deux, ainsi que ceux du second rang, puis ceux du troisième. Les autres compagnies de l'escadron défilent ensuite successivement, de la même manière que la première.

Si la troupe marche par quatre, les quatre premiers cavaliers de la première compagnie de la droite ou de la gauche, suivant le côté par où l'on veut commencer les mouvements, avancent d'abord droit devant eux : les autres du même rang font un à-droite ou un à-gauche par quatre, et ils se mettent successivement à la suite des quatre premiers : les cavaliers du second et du troisième rang de la même compagnie en font de même, puis ceux de la seconde, et ensuite ceux de la troisième et de la quatrième.

Il faut observer que si les compagnies qui composent l'escadron sont de trente hommes, comme on l'a supposé dans cet article, on ne pourrait faire défiler les rangs par quatre, par ce qu'ils ne se diviseraient pas exactement par ce nombre, mais qu'il faudrait les faire défiler par cinq ; c'est-à-dire par demi-front de compagnie ; ce qui se fait de la même manière que par quatre.

Pour reformer l'escadron, supposant qu'il marche par compagnie, la première, comme le porte l'ordonnance du 22 Juin 1755, se portera légèrement huit pas en avant, pendant que celle qui suit fera à-gauche, et tout de suite à-droite pour se former à la gauche de la première. Les deux autres continueront à marcher devant elles, jusqu'à ce que chacune étant arrivée où celle qui la précède a fait à-gauche, elle n'ait plus que l'espace nécessaire pour exécuter ce mouvement ; et elle fera ensuite à-droite par compagnie, lorsque son premier rang sera arrivé à la hauteur de la gauche de la compagnie qui la précède.

Lorsque l'escadron a défilé par deux ou par quatre, on reforme successivement chaque compagnie, et ensuite l'escadron par la réunion de ces compagnies en bataille.

Pour reformer une compagnie qui défile, par exemple, par un, on la fera d'abord marcher par deux, ensuite par quatre, si le nombre d'hommes de chaque rang le permet, c'est à-dire si les rangs contiennent plusieurs fois quatre exactement : dans ce cas on formera la compagnie en-avant, en faisant d'abord arrêter la première division, pendant que les autres du même rang se placeront successivement à côté les unes des autres. Lorsque le premier rang sera formé, le second se formera de même, et ensuite le troisième.

Si les quatre compagnies font ensemble ce mouvement, elles se trouveront formées dans le même temps, et elles pourront après cela former l'escadron, comme on l'a Ve ci-devant.

Si la compagnie est de trente hommes rangés sur trois rangs ; comme chaque rang sera de dix hommes, il ne pourra se diviser par quatre ; c'est pourquoi pour reformer la compagnie qui aura défilé par un, on la fera d'abord marcher par deux, et l'on reformera les rangs par deux, comme on vient de l'expliquer par quatre. Tout l'inconvénient de ce mouvement, c'est qu'il est plus long que lorsqu'on peut d'abord reformer les compagnies par quatre.

PROBLEME.

Doubler les rangs de l'escadron ou d'une troupe quelconque de cavalerie, ou les dédoubler.

Nous avons déjà observé dans les évolutions de

(a) On peut diminuer environ 4 pieds ou une taise de cette étendue, parce que le dernier rang n'a d'épaisseur que la longueur du cheval.

(b) Comme il n'est pas possible que deux cavaliers dont le front est de 6 pieds, tournent dans le rang, il faut qu'avant de faire ce mouvement ils gagnent deux ou trois pieds de terrain du côté où ils doivent tourner afin d'avoir l'espace nécessaire pour le faire.

l'infanterie, que l'expression de doubler les rangs, ne signifiait pas d'en doubler le nombre, mais seulement celui des hommes de chaque rang.

La manière de doubler les rangs dans la cavalerie, n'est pas la même que dans l'infanterie, parce que les cavaliers sont toujours trop serrés dans le rang, pour pouvoir introduire un nouveau cavalier entre deux.

Mais cette évolution se fait très aisément et très-simplement par le moyen des à-droite et des à-gauche par divisions de rangs.

On peut doubler les rangs dans la cavalerie, par la droite, par la gauche, et par l'un et l'autre côté en même temps. On ne donnera ici que cette dernière méthode, l'exécution des deux autres n'aura pas plus de difficulté.

Sait supposé une troupe de cavalerie de 120 maîtres, rangée sur deux rangs qu'on veut réduire à un seul, et cela par la droite et par la gauche en même temps.

On divisera le second rang en deux également. La moitié de la droite fera à-gauche par divisions de cinq cavaliers ; et celle de la gauche, à-droite par les mêmes divisions.

Ces deux demi-rangs marcheront ensuite devant eux ; savoir, celui de la droite, jusqu'à ce que sa dernière division déborde le premier rang d'environ 3 pieds, ou de l'épaisseur d'un cheval ; et celui de la gauche, jusqu'à ce que sa dernière division déborde également la gauche du premier rang de la même quantité.

Alors les divisions du demi-rang de la droite feront à-droite, et celles de la gauche à-gauche ; et elles marcheront devant elles jusqu'à ce qu'elles soient dans l'alignement du premier rang.

Il est clair que si l'on avait quatre rangs de cavalerie, on les réduirait à deux de cette même manière.

REMARQUES.

I. Pour exécuter ce mouvement, il est nécessaire que les rangs soient éloignés les uns des autres du front, au moins des divisions de chaque demi-rang ; c'est-à-dire, dans l'exemple précédent, où les divisions sont de cinq cavaliers, qu'il faut que les rangs aient au moins quinze pieds d'intervalle.

II. Au lieu de faire les divisions des demi-rangs de cinq cavaliers, on les aurait pu prendre de trois ; mais alors ces divisions, en marchant vers la droite et la gauche, auraient été un peu trop serrées les unes sur les autres pour pouvoir marcher aisément. On n'aurait pu prendre ces divisions de quatre hommes, parce que le demi-rang étant de quinze cavaliers ne peut se diviser exactement par quatre.

III. On peut par cette méthode augmenter le front d'un escadron dont les rangs sont en nombre impair, ou, ce qui est la même chose, diminuer le nombre de ces rangs.

Si l'on a, par exemple, une troupe de cavalerie sur trois rangs, et qu'on veuille la réduire à deux, on partagera le troisième rang en quatre parties égales ; on fera marcher les deux de la droite à la droite des deux premiers rangs, et celles de la gauche à la gauche des mêmes rangs, et l'on aura ainsi l'escadron en bataille sur deux rangs.

Pour dédoubler les rangs. Si l'on a une troupe de cavalerie sur un rang, et qu'on veuille en former deux, on la divisera en deux parties égales : on fera marcher l'une de ces parties trois ou quatre pas de trois pieds en-avant. Si l'on suppose que ce soit la moitié du premier rang à droite qui ait marché en-avant, celle de la gauche fera à-droite par division de trois, quatre ou cinq hommes, suivant que le demi-rang se divisera exactement par l'un de ces nombres. Le demi-rang de la gauche marchera ensuite derrière celui de la droite, jusqu'à ce que sa première division se trouve derrière les quatre ou cinq cavaliers de la droite, suivant que cette division sera de quatre ou cinq hommes.

Lorsque le demi-rang de la gauche aura ainsi marché, on lui fera faire à-droite par les mêmes divisions par lesquelles on l'a d'abord fait tourner à gauche, et il se trouvera placé derrière le premier, et faisant face du même côté.

Par cette méthode, si la troupe est sur quatre rangs, on la reduira également à deux.

On peut observer par ce qu'on vient de dire sur le doublement et le dédoublement des rangs, que c'est avec raison que M. le maréchal de Puysegur dit dans son livre de l'Art de la guerre, que par le moyen du quart de tour à droite ou à gauche par divisions de rangs, la cavalerie peut exécuter les mêmes mouvements que l'infanterie.

On n'entrera point ici dans un plus grand détail sur les évolutions ou manœuvres de la cavalerie ; on croit avoir donné les plus essentielles et les plus fondamentales : on renvoye pour toutes les autres aux ordonnances militaires concernant la cavalerie, et particulièrement à celle du 22 Juin 1755. Cet article est de M. LE BLOND.

EVOLUTIONS NAVALES, (Marine) Ce sont les différents mouvements qu'on fait exécuter aux vaisseaux de guerre pour les former ou mettre en bataille, les faire naviger, les rompre, les réunir, etc. Voici les éléments de cet art important.

Avant de donner les plans de tous les mouvements que peuvent faire les armées navales, il faut commencer par une règle qu'on met en pratique dans toutes les différentes évolutions, qui prouve que le chemin le plus court que puisse faire un navire pour en joindre un autre, et par conséquent pour prendre le poste qui lui est destiné, par rapport à un autre navire qui doit lui servir d'objet, est d'arriver sur lui, autant qu'il pourra, en le tenant toujours au même rhumb de vent.

Méthode générale pour joindre un vaisseau qui est sous le vent, par la route la plus courte, fig. 1. Pour mettre cette règle en exécution, il faut relever avec un compas de variation le navire sur lequel vous devez vous régler ; et en faisant votre route, le tenir toujours au même air de vent que vous l'avez relevé : la figure démontre que c'est la voie la plus courte que vous puissiez faire. Par exemple, si le vaisseau A qui chasse, parcourt la ligne A N, et le vaisseau B qui est chassé, la ligne B N, de telle sorte qu'ils se trouvent toujours sur des lignes CD, GH, IK, LM, parallèles à AB, ils sont toujours dans le même rhumb l'un à l'égard de l'autre, et ils se rencontreront au point N, où les lignes AN et B N concourent. Ici le vaisseau A, le vent étant au nord, a relevé le vaisseau B au sud delui ; il le doit toujours tenir au même air de vent, soit en arrivant ou venant au vent, selon qu'il reste de l'arrière, ou qu'il gagne de l'avant de vaisseau B : par cette manœuvre il arrivera au point C lorsque ledit navire sera au point D, qui sera toujours au sud de lui : de même il sera au point E, lorsque l'autre viendra en F, et ils se tiendront toujours dans le même rhumb ; et ainsi des autres points, jusqu'à ce qu'ils se joignent en N, jonction des deux lignes.

J'ai dit qu'il faut que le navire A arrive ou tienne le vent, pour peu qu'il sorte du rhumb auquel il a relevé le vaisseau qu'il doit joindre ; ce qui ne se peut faire que lorsque le navire B gagne de l'avant ou reste de l'arrière ; supposant qu'il fasse toujours la même route ; si le vaisseau B Ve de l'avant, il restera plus du côté de l'est ; et il faudra que le chasseur tienne le vent, pour l'avoir toujours au rhumb relevé, et il le joindra plus loin en parcourant la ligne AO ; mais si le vaisseau chassé reste de l'arrière, il reste plus à l'ouest : alors il faudra que le vaisseau A arrive, jusqu'à ce qu'il remette le vaisseau B au sud, rhumb relevé, et il le joindra au pont M en parcourant la ligne A M ; ce qui prouve qu'il faut avoir à chaque instant l'oeil sur le compas.

Il faut remarquer que si le vaisseau A se doit mettre par le travers du vaisseau B dans une autre colonne, il faut tenir le bâtiment B au même air de vent, comme nous venons de dire ; et quand il sera à la distance requise, il tiendra la route du général : mais s'il doit se mettre dans la même ligne, et si c'est de l'avant du vaisseau B, il doit le tenir un peu plus sous le vent ; s'il doit se mettre de l'arrière, il le tiendra un peu plus au vent : l'expérience de l'officier doit décider cette route sans erreur sensible, par un coup-d'oeil réglé par la pratique.

Manière de connaître si on est au vent ou sous le vent d'un autre vaisseau à la voile, figure 2. Dans les différents mouvements d'une armée navale, une des principales attentions qu'on doit avoir, est d'éviter les abordages : ils sont rares de vent arrière ou largue, un coup de gouvernail en garantit : mais lorsque deux vaisseaux courent au plus près, l'un amuré stribord, et l'autre bas-bord, et qu'ils sont l'un contre l'autre ; l'entêtement de vouloir passer au vent, ou l'incertitude de la manœuvre que l'on doit faire, si l'on n'a pas de l'expérience, jette souvent dans de fâcheux accidents, et dans des embarras dont on a que trop de peine à se tirer.

Pour ne courir aucun risque, il faut relever de bonne-heure, avec un compas de variation, le navire qui vient à votre rencontre ; s'il vous reste dans la perpendiculaire au lit du vent, les deux vaisseaux sont également au vent, et se rencontreraient, si l'un des deux ne prenait le parti d'arriver ; ce qu'il faut cependant toujours faire sans balancer. Cette figure fera mieux connaître ce qui en est. Les vaisseaux A et B vont au plus près d'un vent du nord, l'un amuré stribord, et l'autre bas-bord ; ils se trouvent est et ouest l'un de l'autre, qui est la ligne A B perpendiculaire au lit du vent F G ; s'ils font toujours la même route, et qu'ils parcourent l'un la ligne A E, et l'autre la ligne B E, avec des circonstances semblables, c'est-à-dire tenant également le plus près, et allant également vite, ils se rencontreront au point E, puisqu'ils parcourent deux lignes égales, et que les angles E B G et E A G sont égaux.

Si le vaisseau C Ve à l'encontre du vaisseau B avec les mêmes circonstances, et que la ligne C H qui est tirée du vaisseau C perpendiculaire au vent, ne rencontre pas le vaisseau B, et que cette ligne passe du côté d'où le vent vient ; le vaisseau C fera la ligne C F, et arrivera au point F, lorsque l'autre sera au point E, et il se trouvera au vent de la quantité F E égale à la ligne B H ; au contraire, le vaisseau D dont la ligne D I tirée perpendiculaire au vent, ne rencontre pas le vaisseau B, et passe sous le vent, c'est-à-dire du côté du sud, sera sous le vent du vaisseau B, et viendra au point G lorsque le vaisseau B arrivera au point E, et il sera sous le vent de la quantité G E, égale à B I.

Ainsi lorsqu'on fera exactement toutes ces observations, et qu'on relevera de bonne-heure le vaisseau qui court sur vous, on aura le temps d'arriver pour éviter l'abordage ; ce qu'on doit faire sans obstination, surtout lorsqu'il est question d'un pavillon, ou d'un capitaine plus ancien. Il est dangereux d'attendre trop tard pour arriver ; on n'y est plus à temps, lorsqu'on est à une certaine distance ; et pour lors le seul parti qu'il y ait à prendre, c'est que les deux vaisseaux donnent vent devant.

Figure 3. Cette figure sert à démontrer que le plus court chemin qu'on puisse faire pour aller à un vaisseau qu'on chasse, et sur lequel on peut mettre le cap sans lovoyer, est de se tenir toujours au même air de vent auquel on l'a relevé aussi-tôt qu'on l'a découvert. Je suppose que le vent est à l'est, et que le navire qu'on chasse est au nord-ouest de vous à six lieues, c'est-à-dire que le chasseur est au point A, et le chassé en B ; s'il prend chasse en faisant le nord-ouest, dont la ligne A 2 marque le chemin, en faisant le nord-ouest comme lui, il reste toujours au même air de vent ; et le plus court chemin d'aller à lui, est de suivre la même ligne. Si vous lui gagnez une lieue sur trois lieues, quand il aura fait ses trois, vous en aurez fait quatre ; il est certain que quand il aura fait dix-huit, vous en aurez fait vingt-quatre, que vous aurez gagné sur lui les six lieues qu'il avait d'avance sur vous, et que vous le joindrez au point 2 : on voit par-là qu'il vous faut faire plus de chemin sur cet air de vent pour le joindre, que sur tous les autres qu'il peut courir : qu'il fasse, par exemple, le nord nord-ouest en parcourant la ligne B R ; lorsqu'il arrivera au point N, le chasseur sera en S ; et il lui restera au nord-ouest, la ligne NS étant parallèle à la ligne B A, qui est au nord-ouest ; lorsqu'il sera au point L, l'autre arrivera en T, et ils seront toujours sud-est et nord-ouest l'un de l'autre.

Il n'y a qu'à jeter la vue sur ces différentes positions et figures, pour voir que toutes les lignes des différents triangles sont toutes des nord-ouest ; et lorsque le vaisseau chassé serait au point R, le chasseur l'y joindra, l'ayant toujours tenu au même air de vent : mais il aura fait moins de chemin pour l'attraper, puisque le vaisseau B n'aura fait que seize lieues et demie, et le navire A un peu plus de vingt-deux. Il arrivera la même chose, lorsque le navire B prendra chasse à l'ouest-nord-ouest, en parcourant la ligne B 10 ; parce que cet air de vent est à la même distance du nord-ouest, que le nord-nord-ouest dont je viens de parler : toute la différence qu'il y aura, c'est que dans la chasse du nord-nord-ouest, le chasseur fera sa route entre le nord-ouest quart de nord et le nord-nord-ouest, et dans la chasse de l'ouest-nord-ouest, le chasseur courra entre le nord-ouest quart d'ouest, et l'ouest-nord-ouest. L'on voit par cette démonstration, que plus le vaisseau chassé s'éloignera de la ligne du nord-ouest, moins le chasseur aura de chemin à faire pour le joindre ; s'il veut s'enfuir en faisant le nord, il parcourt B G, où il sera joint, et le chasseur fera le nord quart de nord-ouest prenant quelques degrés vers le nord-ouest, décrivant la ligne A G, où vous voyez qu'il lui reste toujours au nord-ouest, et qu'il le joindra après avoir couru dix-huit lieues 2/3, pendant que le chassé n'en fera que quatorze : mais s'il prenait chasse au nord-nord-est, il décrirait la ligne B 3, et le chasseur, A 3 qui est le nord prenant un peu de l'ouest, et il le joindra quand il aura fait près de quatorze lieues, et l'autre dix et 1/3 ; mais il reste toujours au nord-ouest, comme il est facîle à remarquer. Il faut avec le compas le relever à chaque instant, et tenir le vent, ou arriver, selon qu'on supposerait que le vaisseau chassé Ve de l'avant, ou reste de l'arrière.

Utilité du carré pour les mouvements d'une armée navale, fig. 4. Pour faciliter les mouvements d'une armée, et pour éviter l'embarras d'avoir toujours un compas devant les yeux, il faut avoir sur le gaillard de l'arrière un grand carré A B C D, dont la ligne EF réponde à la quille du vaisseau, de telle manière que le point E soit du côté de la proue, et le point F du côté de la poupe : la ligne F E représente donc toujours la route que tient le vaisseau ; la ligne G H marque son travers ; et quand le vaisseau est au plus près, les diagonales C A, D B, marquent, l'une la route que tiendra le vaisseau quand il aura reviré, et l'autre son travers. Mais pour tirer plus d'utilité de ce carré, il faut partager en seize rhumbs.

Dans cette figure quatrième on suppose le vent au nord soufflant du point N, lorsque le vaisseau I court au plus près sur la ligne I E, l'amure à basbord, l'angle N I E faisant un angle de six rhumbs de vents ; lorsqu'il aura reviré, il courra sur la diagonale B D, l'angle N I D étant égal à l'angle N I E, et par conséquent de six rhumbs ; et l'autre diagonale A C sera par son travers.

Ce carré bien compris sera d'un grand usage pour tenir facilement son poste dans une armée, et il sera fort aisé à l'officier qui se promene sur le pont, de voir d'un coup-d'oeil s'il y est. J'en montrerai l'utilité dans tous les différents mouvements où l'on pourra le mettre en pratique.

Ce carré peut être encore fort utile, sans avoir besoin de compas, dans la proposition précédente, démontrée dans la deuxième figure ; le vent vient du point N, et le lit du vent est la ligne N M. Le navire I court au plus près l'amure à bas-bord, faisant la route I E ; le navire K court au plus près l'amure à stribord, faisant la route K E, parallèle à la diagonale B D. Selon ce qui a été dit plus haut, tirez sur votre carré la perpendiculaire au lit du vent, qui sera la ligne K L ; ce qui sera facile, en faisant l'angle E I K de deux rhumbs de vent, ou de vingt-deux degrés trente minutes supplément de six rhumbs, ou de soixante-sept degrés trente minutes valeur de l'angle N I E ; si les deux navires I et K faisant route, restent toujours dans la même perpendiculaire au lit du vent I K, ou dans la même parallèle à cette ligne, ils se rencontreront au point E, et s'aborderont.

Ordre de marche au plus près du vent sur une ligne. Pour faire marcher l'armée au plus près du vent sur une ligne, un pavillon rayé blanc et rouge au bout de la vergue d'artimon, figure 5. L'armée faisant route au plus près du vent, le général marche le premier à la tête de toute la ligne, tous les vaisseaux marcheront sur une même ligne dans les eaux du général, en faisant le même air de vent ; ils se serreront jusqu'à deux tiers de câble si le temps le permet, pour connaître avec le carré de la quatrième figure, si l'on est exactement dans les eaux du général sur lequel on doit se régler.

Il faut le tenir précisément par la ligne I E, et vous n'en sortirez pas en tenant le même air de vent que lui.

Manière de revirer par la contre-marche dans l'ordre de marche au plus près du vent sur une ligne, fig. 6. Le général dans l'ordre de marche étant à la tête de la ligne, les navires qui le suivent le voyant revirer, vont tous revirer dans ses eaux les uns après les autres ; on ne fait aucun signal pour ce mouvement : on doit observer exactement de passer toujours sous le vent d'un navire que l'on suit qui aura reviré, et de bien régler sa bordée avant que de donner vent devant ; en sorte qu'elle ne soit ni trop longue, ni trop courte, afin que les distances soient toujours bien observées. Chacun se trouvera après avoir reviré plutôt sous le vent du vaisseau qui aura reviré avant lui, qu'au vent, étant le seul moyen pour bien serrer la ligne et garder l'ordre de marche. Pour cet effet il faut donner vent devant aussi-tôt que vous couvrez le bossoir de dessous le vent du vaisseau qui aura reviré avant vous, au cas qu'il soit dans son poste ; car s'il n'y était pas, il ne faut pas vous régler sur lui, mais à son chef de division dans les eaux de qui il faut revirer ; ce que l'on connaitra facilement par la ligne I E du carré.

Dans l'ordre de marche au plus près du vent sur une ligne, fig. 7. Lorsqu'on revire tous en même temps, et que l'arriere-garde devient avant-garde, manière de se mettre en ligne au plus près du vent.

Pour avertir tous les vaisseaux de revirer en même temps sans faire la contre-marche, un pavillon de Malte au bâton du pavillon du petit mât de hune.

Pour faire donner vent devant à tous les vaisseaux en même temps, un pavillon bleu au même endroit, et ôter le pavillon de Malte.

L'armée qui courait d'un vent de nord à l'est-nord-est, l'amure à bas-bord sur la ligne B A, vient de revirer pour courir à l'O. N. O. l'amure à stribord, l'arriere-garde devant faire l'avant-garde, et chaque vaisseau met le cap à la route qu'il doit faire pour aller prendre son poste dans la ligne C D.

Pour exécuter ce mouvement avec quelque ordre, il faut que le vaisseau B 9 serve de règle à toute l'armée ; que chaque navire, le général excepté, aille se mettre dans ses eaux ; et qu'y étant arrivé, il coure au plus près comme lui. Ledit navire 9 qui était le dernier de la ligne A B doit, dès qu'il a reviré, s'aller mettre à la tête de la ligne C D, et prendre son poste, qui est supposé au point 9, de l'arrière du commandant ; lorsqu'il y est arrivé, il est de la prudence du capitaine qui le commande, de carguer de voiles, ou de mettre en panne, lorsqu'il croit avoir laissé l'espace que doivent occuper les autres vaisseaux de l'arriere-garde, lequel espace doit être pris depuis le point B 9 où il a reviré.

On voit en jetant les yeux sur la figure, que chaque navire de la ligne B A, numérotée depuis 1 jusqu'à 9, doit s'aller placer dans la ligne C D, à son même numéro, en suivant les lignes ponctuées qui marquent la route que chacun doit tenir.

Ils doivent surtout avoir la précaution de ménager leur voilure, en sorte que chaque navire passe toujours de l'arrière de celui qui doit être devant lui dans la ligne C D, et le tienne à une distance raisonnable, afin de ne le point couper et d'éviter les abordages, qui sont plus à craindre pour les vaisseaux de cette nouvelle avant-garde, que pour ceux du corps de bataille et de l'arriere-garde, ceux-ci devant seulement observer de mettre plus de voile, comme ayant plus de chemin à faire pour prendre leur poste. Vous voyez, par exemple, que le commandant 1 qui doit parcourir la ligne A C, pour se mettre à la tête de C D, a la plus longue course à faire, et par conséquent le plus de voîle à mettre, et après lui les vaisseaux 2, 3, etc.

Ainsi le plus ou moins de chemin doit décider de la voilure qu'on doit faire.

Dans l'ordre de marche au plus près du vent sur une ligne pour revirer vent arrière, et prendre lof pour lof, un pavillon rouge au bout de la vergue d'artimon, et un pavillon blanc sous les barres du perroquet d'artimon.

Si ayant reviré et pris lof pour lof, on veut mettre l'armée en ligne au plus près du vent, et que l'avant-garde fasse l'arriere-garde, un pavillon rayé blanc et rouge au bout de la vergue d'artimon, en ôtant les autres pavillons.

Ce mouvement se fait de la même manière que le précédent ; il n'y a que la différence de revirer vent arrière, au lieu de le faire vent devant : ce qui met l'armée plus sous le vent. Du reste chaque vaisseau Ve prendre son poste dans la ligne C D, en observant les mêmes circonstances ci-dessus détaillées.

Si le général, après avoir fait revirer en même temps tous les vaisseaux de la ligne A B, fig. 8. remet le pavillon de Malte à la place du pavillon bleu, il faut que toute l'armée fasse l'O. N. O. et coure au plus près stribord dans l'ordre où elle se trouve, et que tous les navires se tiennent les uns à l'égard des autres, par le même air de vent où ils étaient avant qu'ils eussent reviré ; c'est-à-dire que faisant l'E. N. E. au plus près bas-bord, chaque vaisseau doit tenir à l'E. N. E, celui qui est à stribord de lui, et qui doit être devant lui lorsqu'on sera en ligne, l'amure à basbord, et à la même distance qu'il était dans la ligne A B. Le carré peut être utîle pour ce mouvement. Il faut que le vaisseau qui est au milieu du carré, et qui parcourt la ligne I E, qui est l'O. N. O. tienne les vaisseaux qui sont à stribord de lui par la ligne IC, et ceux qui sont à bas-bord par la ligne I A, la diagonale A C étant supposée E. N. E. et O. S. O. en observant ces circonstances ; toute l'armée sera E. N. E. et O. S. O. et arrivera toute en même temps dans la ligne F E, chacun au point marqué ; et dans la ligne D C, où l'on suppose que le général fait signe de virer : pour lors toute l'armée se trouvera en ligne au plus près du vent, l'amure à bas-bord, telle que vous la voyez en D C.

Dans l'ordre de marche au plus près du vent sur une ligne, pour revirer vent arrière et prendre lof pour lof, un pavillon rouge au bout de la vergue d'artimon, et un pavillon blanc sous les barres du perroquet d'artimon.

Pour faire tenir tous les vaisseaux dans l'ordre où ils se trouvent après avoir reviré, un pavillon de Malte au bâton de pavillon du petit mât d'hune.

Lorsque l'armée a pris lof pour lof, la manœuvre est la même que celle dont on vient de parler, quand elle a donné vent devant. Dans l'ordre de marche au plus près du vent sur une ligne, pour avertir tous les vaisseaux de revirer en même temps, un pavillon au bâton de pavillon du petit mât d'hune.

Pour faire donner vent devant à tous les vaisseaux, en même temps un pavillon bleu au même endroit, et ôter le pavillon de Malte.

Pour faire courir tous les vaisseaux dans l'ordre où ils se trouvent après avoir reviré, un pavillon de Malte au bâton de pavillon du petit mât d'hune, et ôter le pavillon bleu.

Pour faire revirer tous les vaisseaux en même temps, un pavillon bleu au même endroit, et ôter le pavillon de Malte.

Ordre de marche sur trois colonnes. Pour mettre l'armée dans l'ordre de marche sur trois colonnes au plus près du vent, un pavillon blanc à croix bleue au bout de la vergue d'artimon, fig. 9.

L'armée marchant au plus près sur trois colonnes, les commandants seront à la tête, et les vaisseaux se serreront jusqu'à deux tiers de câble, si le temps le permet. Les commandants, qui sont les vaisseaux A C E, doivent se tenir, les uns à l'égard des autres, sur la perpendiculaire de la ligne du plus près qu'ils courent : comme l'armée a le cap à l'E. N. E. d'un vent de nord, les lignes A C, C E, doivent être N. N. O. et S. S. E. si l'armée courait l'O. N. O. l'amure à stribord, ces lignes seraient N. N. E. et S. S. O.... ainsi des autres rhumbs de vent où l'on peut courir. Chaque navire des trois colonnes se tiendra au même air de vent.

Pour déterminer la distance d'une colonne à l'autre, le vaisseau A, qui est à la tête de la colonne sous le vent, doit avoir le vaisseau D, qui est à la queue de la colonne du milieu, sur la perpendiculaire de la ligne du vent ; et il en est de même du vaisseau C, qui est à la tête de la colonne du milieu, qui doit aussi avoir le vaisseau F de la queue de la colonne du vent, sur la perpendiculaire du vent, c'est-à-dire que si le vent est au nord, les lignes A D, C F, doivent être est et ouest, supposé que les deux colonnes de vent serrent la file, et gardent les distances ordonnées, ce qui est de conséquence dans ce mouvement.

On doit observer toutes ces circonstances qui paraitront absolument nécessaires, lorsqu'il faudra revirer par la contre-marche ; chaque navire voit par le carré ; s'il est dans son poste, c'est-à-dire s'il a les vaisseaux de sa colonne par la ligne I E ; les vaisseaux qui doivent être par son travers dans les autres colonnes, doivent lui répondre par la ligne G H, et les têtes doivent avoir les queues des colonnes par la ligne R L, l'armée marchant l'amure à-bas-bord ; mais si elle est amurée stribord, ce doit être la ligne P Q, fig. 4.

Ordre de marche par trois colonnes au plus près du vent. Pour revirer par la contre-marche, un pavillon mi-parti blanc et rouge au bâton du petit mât d'hune, fig. 10.

Le vaisseau A de la colonne A B, qui est sous le vent, revirera le premier, et tous ceux de la même colonne revireront successivement dans ses eaux au point A ; les deux autres colonnes continueront leur bordée jusqu'à ce que la tête C de la colonne du milieu se trouve au point G, c'est-à-dire jusqu'à ce que le vaisseau A lui reste par l'air de vent perpendiculaire à celui sur lequel ledit vaisseau A court, qui faisant l'O. N. N. l'amure à stribord, il doit lui rester au S. S. O. qui sera la ligne G H ; car en même temps que le navire C parcourt la ligne C G, le vaisseau A arrive au point H ; alors le vaisseau C, donne vent devant, et le reste de la colonne C D vient pareillement revirer au point G ; pendant ce temps-là, la colonne du vent E F court toujours l'amure à-bas-bord, jusqu'à ce que la tête E arrive au point I, et voie les deux vaisseaux C et A l'un par l'autre dans les points LK, c'est-à-dire lorsqu'ils lui restent au S. S. O. qui est l'air de vent perpendiculaire à celui sur lequel ils courent, qui est la ligne I K ; ces trois têtes doivent arriver en même temps aux points I L K ; ces lignes A K, CG, plus G L et E I étant égales.

En observant ces mouvements avec exactitude, les commandants se trouvent de front après avoir reviré, aussi-bien que tous les navires de chaque colonne, et l'armée se trouvera sur les colonnes K M, L N, IO, dans le même ordre qu'auparavant.

Il parait par la figure, que la colonne de dessous le vent coupe les deux du vent ; mais si on examine cette marche, on trouvera dans l'exécution que la chose n'arrive pas, parce qu'en même temps que le vaisseau A parcourt A H, le navire D arrive au point T ; et pendant que le même vaisseau A parcourt H S, qui est ou qui doit être la jonction des deux colonnes, le navire D arrive en S, en même temps que le navire A ; ainsi pour que le vaisseau A passe de l'arrière du vaisseau D, à une distance raisonnable, il faut qu'il ménage sa voilure, et que le vaisseau D serre sa file.

A l'égard de la colonne du vent, avant que celle de dessous le vent l'ait jointe, le navire F est au point I où il doit revirer ; comme la distance de la colonne du milieu à celle du vent est la même, elle ne la coupera pas plus qu'elle n'a été coupée par celle de dessous le vent ; mais pour bien exécuter ce mouvement, il faut que les vaisseaux de chaque colonne serrent leur fîle à la distance ordonnée.

Pour savoir par le carré (fig. 4.) quand les têtes des deux colonnes du vent doivent revirer, ce doit être aussi-tôt que le vaisseau C a le vaisseau A par la ligne IC du carré.

Ordre de marche sur trois colonnes au plus près du vent. Pour avertir les vaisseaux des trois colonnes de revirer en même temps sans faire la contre-marche, un pavillon de Malte au bâton de pavillon du petit mât d'hune.

Pour faire donner vent à tous les vaisseaux en même temps, un pavillon bleu au même endroit, et ôter le pavillon de Malte, fig. 11.

Pour faire courir tous les vaisseaux dans l'ordre où ils se trouvent après avoir reviré, un pavillon de Malte au bâton de pavillon du petit mât d'hune, et ôter le pavillon bleu. Pour faire donner vent devant à tous les vaisseaux en même temps, un pavillon bleu au même endroit, et ôter le pavillon de Malte.

Les vaisseaux des trois colonnes A B, C D, E F, ont reviré tous en même temps, et courent d'un vent nord à l'O. N. O. l'amure à stribord, parcourant les lignes de la figure ; il faut dans ce mouvement, qui est le même que celui de la fig. 7. excepté que dans celle-là, l'armée est sur une ligne, et dans celle-ci sur trois colonnes ; il faut, dis-je, que chacun observe les mêmes circonstances que j'y ai dites, qui sont que les navires de chaque colonne courent dans le même ordre où ils se trouvent, et qu'ils se tiennent les uns à l'égard des autres par le même air de vent, et la même distance où ils étaient avant qu'ils eussent reviré, par exemple, que chaque colonne soit E. N. E. et O. S. O, qui est la ligne du plus près bas-bord, afin que la colonne A B arrive en même temps sur la ligne G H, la colonne C D sur la ligne I K, et la colonne E F sur la ligne L M ; dans cet instant, le général faisant signal à l'armée de revirer une seconde fois tous en même temps, les colonnes G H, I K, L M, se trouveront formées dans le même ordre, et telles qu'elles étaient : ces observations sont plus détaillées dans la figure 8.

L'armée marchant sur trois colonnes, le général au milieu de son escadre ; manière de faire mettre en bataille l'escadre de dessous le vent, mettant de panne un pavillon blanc au dessus de la vergue d'artimon, figure 12. L'escadre A B, qui est sous le vent, met en panne ; l'escadre C D du milieu Ve faire le corps de bataille, et l'escadre E F du vent Ve prendre l'avant-garde en formant la ligne B E ; pour faire ce mouvement avec ordre et régularité, il faut avoir un point fixe, sur lequel on puisse gouverner pour aller prendre son poste par le plus court chemin et sans embarras ; dans celui-ci le navire D, qui est à la queue de la colonne du milieu, a ce point fixe à-peu-près, en l'imaginant à la distance de deux tiers de câble de l'avant du vaisseau A qui est en panne, pour s'aller mettre devant lui sur la même ligne à la distance de ces deux tiers de câble. L'expérience donnera très-peu d'erreur pour ce point imaginaire, et tous les navires de sa colonne doivent se régler sur lui, gouverner au même air de vent, et le tenir à la même distance, et toujours sur la ligne E. N. E. et O. S. O. puisque la colonne courait à l'E. N. E. au plus près : sur ce principe ils arriveront tous en même temps sur la ligne de bataille B E ; à l'égard de la colonne du vent, il faut que le vaisseau F, qui est à la queue, gouverne toujours au vent du vaisseau C, qui est à la tête de la colonne du milieu, qui est de se régler sur lui, de gouverner au vent pour lui passer au vent à une distance raisonnable, c'est-à-dire un demi-cable à-peu-près, et tous les vaisseaux de sa colonne, doivent faire comme ceux de la colonne du milieu, qui est de se régler sur lui, de gouverner au même rhumb de vent, de le tenir à la même distance, et que toute l'escadre en marchant soit toujours E. N. E. et O. S. O. le coup-d'oeil est plus beau, et le mouvement plus gracieux d'arriver tous en même temps, pour former la ligne de combat B E ; comme l'escadre F E a une fois plus de chemin à faire que l'escadre C D, il faut qu'elle force de voiles le plus qu'elle pourra, et que la colonne du milieu règle sa voilure pour faire une fois moins de chemin que la colonne du vent.

L'armée marchant sur trois colonnes, manière de la faire mettre en bataille. L'escadre dessous le vent prenant l'avant-garde, un pavillon bleu au bout de la vergue d'artimon, et ajouter un pavillon rayé blanc et bleu sous les barres du mât du perroquet d'artimon, figure 13.

L'escadre A B qui est sous le vent, Ve prendre l'avant-garde de la ligne B H, et occuper l'intervalle G H ; l'escadre du milieu Ve former le corps de bataille, et occuper l'intervalle I L, et l'escadre E F du vent, Ve prendre l'arriere-garde, et se mettre dans la place de l'escadre A B : dans cette évolution l'escadre A B a la plus longue course à faire et au plus près, et par conséquent elle doit forcer de voiles pour prendre l'avant-garde le plutôt qu'elle pourra : dans ce mouvement les deux colonnes du vent n'ont pas de véritable point fixe, sur quoi se régler pour aller prendre leur poste ; elles peuvent se servir d'un point imaginaire, qui tiendra, sans erreur sensible, la place du point fixe : il faut que le navire C, de la tête de la colonne du milieu, donne chasse au point K, qui doit être pris à la distance de deux tiers de câble de la poupe du vaisseau B, qui est à la queue de la colonne de dessous le vent ; cette distance est l'intervalle ordonné entre chaque navire ; ainsi aussi-tôt que le signal est fait pour ce mouvement, le vaisseau C doit relever avec un compas le point K, et sachant à quel rhumb il lui reste, il doit toujours tenir ce point au même air de vent ; de cette manière, lorsque le navire B arrivera en G, qui sera son poste, le navire C arrivera en L, qui sera le sien ; et là, il fera l'E. N. E. comme l'avant-garde : tous les navires de la colonne C D, doivent se régler en marchant sur leur tête C, et se tenir tous E. N. E. et O. S. O. les uns des autres, et à la même distance. En suivant cette règle, cette colonne courra à-peu-près à l'est, et fera beaucoup moins de voîle que la colonne de dessous le vent, ayant beaucoup moins de chemin à faire, et larguant pour aller prendre son poste : la colonne du vent fera la même manœuvre que la colonne du milieu, et le navire E de la tête, relevera le point M qui est à deux tiers de câble de la poupe du vaisseau D, et lui donnera chasse, le tenant toujours au même air de vent qu'il l'a relevé : lorsque le vaisseau D arrivera au point I, qui sera son poste dans la ligne de combat, le navire E arrivera au point A, qui sera le sien dans la même ligne ; et toute la colonne E F du vent observant les mêmes circonstances, c'est-à-dire se tenant E. N. E. et O. S. O. les uns des autres, et à la même distance qu'ils étaient, cette colonne E F du vent fera presque vent arrière, mettant le cap au S. S. E. et fera peu de voile, ayant beaucoup moins de chemin à faire que les deux autres colonnes : il est facîle de voir que, si au lieu de donner chasse au point imaginaire M et K, on donnait chasse aux corps des navires D B, le navire C rencontrerait le vaisseau B au point L, et le vaisseau E rencontrerait le navire D au point N ; qui est la jonction des deux lignes de route ; à quoi on remédie en donnant la chasse aux points K et M, puisque cette manœuvre donne le temps aux vaisseaux B et D de passer de l'avant, et aux vaisseaux C et E ; de se mettre de l'arriere-d'eux, qui est leur poste, et de faire ensuite l'E. N. E. comme l'avant-garde.

L'armée marchant sur trois colonnes, manière de la faire mettre en bataille. L'escadre de dessous le vent revirant de bord pour prendre l'arriere-garde et pour prendre le moins de chemin qu'on pourra, un pavillon blanc au bout de la vergue d'artimon, et ajoutant le pavillon Hollandais au bout du petit mât d'hune, fig. 13.

La colonne A B de dessous le vent, revirera de bord pour aller prendre l'arriere-garde ; l'escadre du milieu D C, Ve faire le corps de bataille ; et l'escadre du vent E F, doit forcer de voiles pour prendre l'avant-garde.

Dans cette évolution, le vaisseau A de la tête de la colonne de dessous le vent étant également au vent, comme le vaisseau D de la queue de la colonne du milieu, devrait le rencontrer au point K : ainsi il faudra que ce vaisseau A ménage sa voilure, et manœuvre de manière qu'il n'aborde pas le vaisseau D, mais qu'il lui passe sous le vent à une distance raisonnable ; et le vaisseau D aura soin de serrer sa fîle pour éviter l'abordage, comme on a Ve dans la figure neuvième.

Ainsi l'escadre A B se trouvera placée en K M, et l'escadre D C en I L : dans tout ce temps-là le vaisseau F de la queue de la colonne du vent, a dû donner chasse à un point imaginaire pris environ à la distance de deux tiers de câble de l'avant du vaisseau C : ainsi le navire F arrivera en G aussi-tôt que le navire C arrivera en L. Tous les autres vaisseaux de la colonne F E doivent se régler sur le vaisseau F, gouverner au même rhumb, le tenir à la même distance, et toujours en E. N. E. et O. S. O. comme on a Ve fig. 11.

L'ordre d'une armée qui force un passage, fig. 15. et 16. Quelques-uns veulent qu'on mette l'armée qui passe un détroit, sur deux colonnes, les moindres vaisseaux de guerre à la tête et les plus gros à la queue, et que les brulots et les bâtiments de charge soient entre les deux lignes.

Je trouve néanmoins quelque difficulté dans cet ordre, parce que si les deux colonnes sont fort éloignées, elles pourront être séparées par quelque accident, ou coupées. Si elles sont peu éloignées, elles seront doublées, c'est-à-dire que l'ennemi les attaquant de part et d'autre les mettra l'une et l'autre entre deux feux.

J'aimerais donc mieux ranger l'armée qui force un passage en ordre de retraite, en repliant un peu les ailes de part et d'autre pour leur donner moins d'étendue ; de cette manière, l'armée ne pourrait être attaquée de nulle part, sans y avoir de quoi se défendre.

Ordre de retraite, fig. 17 et 18. Quand une armée est obligée de faire retraite à la vue de l'ennemi, on la range sur l'angle obtus B A C, comme on le voit dans la figure. Le général A est au milieu et au vent ; la partie A B de l'armée qui est à la gauche du général, est rangée sur la ligne du plus près stribord, et la partie A C sur la ligne du plus près basbord ; les brulots et les bâtiments de charge sont au milieu.

Cette manière de ranger l'armée dans la retraite me parait très-bonne, comme le représente la figure 17, parce que les ennemis ne peuvent pas s'approcher des vaisseaux fuyards, sans se mettre sous le feu de ceux qui sont plus au vent.

Ainsi les vaisseaux ennemis D ne pourront pas s'approcher des vaisseaux E, sans se mettre sous le feu du général A et de ses matelots.

Si on appréhendait que l'armée en cet ordre ne fût trop étendue, on pourrait un peu replier ses deux ailes, et lui donner la figure d'une demi-lune au milieu de laquelle un convoi pourrait être en sûreté.

L'ordre d'une armée qui garde un passage, fig. 19. Pour garder efficacement un passage, il faut avoir une armée qui soit presque double de celle qu'on veut empêcher de passer : alors on la divisera en deux parties, qui croiseront l'une d'un côté du passage et l'autre de l'autre. Ainsi pour garder le détroit A E par où on veut empêcher que l'armée C D ne passe ; on fera croiser l'escadre A B du côté A du détroit, et l'escadre E F de l'autre ; puis quand l'ennemi C D se présentera au passage, l'escadre E F qui se trouvera au vent, fondra vent arrière sur lui, tandis que l'escadre A B tiendra le vent pour le couper.

De cette manière, il sera impossible à l'escadre C D d'échapper, quelque manœuvre qu'elle fasse.

Si on ne prend pas ces précautions, et que l'armée qui garde le passage se trouve être sous le vent, comme A B ; l'armée C D, en tenant un peu aussi le vent, pourra ranger le côté E du détroit, et échapper.

Si l'armée qui garde le passage se trouve au vent, comme E F, l'armée C D larguera un peu plus, pour ranger le côté A du détroit ; et mille accidents assez ordinaires à la mer lui pourront donner lieu d'amuser l'ennemi, jusqu'à ce que la nuit survienne.

Du vent de nord-ouest, fig. 20. L'armée rangée sur six colonnes, faisant vent arrière, le cap au sud-est, les généraux E D F se tiendront les uns à l'égard des autres sur la perpendiculaire du vent, et en avant chacun des deux colonnes qui le suivent.

Pour mettre l'armée sur six colonnes vent arrière, le général E sera à la tête de ses deux colonnes, et un peu en-avant de ces deux matelots, qui formera le corps de bataille. Les deux autres commandants seront, savoir l'avant-garde D à la droite du général, et en-avant de ses deux colonnes, et l'arriere-garde F à sa gauche, aussi à la tête de ses deux colonnes ; et tous les trois généraux se tiendront sur la perpendiculaire I L de la route qu'ils font. Il est important, dans cet ordre de marche, que le général E se trouve à la distance requise des deux autres commandants D et E, afin que tous les vaisseaux de l'armée puissent prendre leur poste sur la ligne I L, comme il est ici marqué par les lignes ponctuées : quand le général E aura le dernier vaisseau G de la colonne du dedans de l'arriere-garde, au troisième air de vent de lui, il tiendra de même le vaisseau H au troisième air de vent : l'intervalle des colonnes, par cette observation, sera telle qu'il convient pour mettre les vaisseaux en ligne de combat, du côté qu'il plaira au général.

Cette évolution n'est point employée dans les signaux de M. de Tourville, quoiqu'elle le soit dans les ordres qu'il emploie, et qu'elle paraisse fort bonne.

Du vent d'est, fig. 21. Mettre l'armée vent arrière sur six colonnes, en sorte que les deux commandants soient, à l'égard du général, sur les deux côtés du plus près ; sa voir celui de la droite pour se mettre l'amure à stribord ; le cap au nord-nord-est ; et celui de la gauche ; l'amure à bas-bord, le cap au sud-sud-est.

Le général B qui est sous le vent, à la tête de ses deux colonnes, et en avant de ses deux matelots, formera le corps de bataille ; les deux autres commandants A et C seront, à son égard, sur les deux plus près du vent d'est, savoir celui de la droite au nord-nord-est, et celui de la gauche, au sud-sud-est : de cette manière, l'armée sera parée pour être en bataille du côté qu'on voudra, mais plus promptement que dans la figure précédente ; parce que les trois généraux mettant en panne, ou faisant petite voile, tous les vaisseaux de leurs escadres viendront occuper leur poste dans les intervalles marqués sur les lignes B A et B C, qui se trouveront, par cette situation, dans l'ordre de marche le plus avantageux pour se mettre en bataille lorsqu'on est vent arrière.

Les distances qui doivent se trouver entre les colonnes seront proportionnées à leur longueur ; si le navire D de la colonne de dedans de l'avant-garde se met au nord-est du général B, ou au quatrième air de vent de lui, ainsi que le marque la ligne rouge, il faudra que le navire E de la colonne du dedans de l'arriere-garde observe la même chose à l'égard du général B, se tenant au sud-est de lui.

Cette évolution n'est point employée dans les signaux de M. de Tourville, quoiqu'elle soit dans les ordres qu'il emploie, et qu'elle paraisse fort bonne. Cet article est tiré d'un Manuscrit qui m'a été communiqué par une personne bien intentionnée pour la perfection de cet Ouvrage, et qui avait été longtemps à portée d'acquérir des connaissances sures de tout ce qui concerne la Marine.