adj. (Métaphysique) S'il est difficîle de fixer l'origine du beau, il ne l'est pas moins de rechercher celle du bon. Il se fait aimer, ainsi que le beau se fait admirer, dans les ouvrages de la nature et dans les productions des arts. Mais quelle est son origine et quelle est sa nature ? en a-t-on une notion précise, une véritable idée, une exacte définition ? Ce qui embarrasse le plus, ce sont les diverses acceptions qu'il reçoit, selon les diverses circonstances où on l'applique. Il signifie tantôt une bonté d'être, tantôt une bonté animale, tantôt une bonté raisonnée propre à l'être pensant. Essayons de développer ces divers sens.

La bonté d'être consiste dans une certaine convenance d'attributs qui constitue une chose ce qu'elle est. Tous les êtres en ce sens sont nécessairement bons, parce qu'ils ont ce qui les constitue tels qu'ils sont ; et il est même impossible qu'ils ne l'aient pas. J'ajoute que tous les êtres sont également bons de ce genre de bonté. Mais outre les rapports intérieurs, qui constituent leur bonté absolue, ils en ont encore d'extérieurs, d'où résulte leur bonté relative. La bonté relative consiste dans l'ordre, l'arrangement, les rapports, les proportions, et la symétrie que les êtres ont les uns avec les autres. Ici commence cette variété infinie de bonté qui différencie si fort tous les êtres. Ils ne sont pas tous également nobles et parfaits : un corps organisé est sans-doute préférable à une masse brute et grossière. Par la même raison, un corps organisé et en même temps animé, l'emportera sur un corps organisé qui ne l'est pas ; et parmi les êtres animés, qui doute qu'il n'y en ait de plus parfaits les uns que les autres ? On dirait que la nature a ménagé, pour la perfection de cet univers, une espèce de gradation qui nous fait monter à des êtres toujours plus parfaits, à mesure qu'on s'avance dans la sphère qui les comprend tous. Ces nuances, il est vrai, ces passages imperceptibles n'ont plus lieu, quand il est question de passer du monde matériel au monde spirituel. De l'un à l'autre le trajet est immense : mais quand nous sommes une fois parvenus au monde spirituel, qui pourrait exprimer la distance qui sépare l'âme des bêtes, des sublimes intelligences célestes ? Les nuances qui distinguent les différentes espèces d'esprits sont imperceptibles, et cependant très-réelles. Rien n'est plus mince que la barrière qui sépare l'instinct d'avec la raison, et cependant ils ne se confondent jamais. Voyez l'article ESPRIT, où nous avons eu soin d'en caractériser les différentes espèces, et d'assigner, autant qu'il est possible, les limites qui séparent les unes des autres.

Tous les êtres qui entrent dans la composition de ce grand tout qu'on appelle l'univers, ne sont donc pas également bons, il est même nécessaire qu'ils ne le soient pas. C'est de l'imperfection plus ou moins grande des différents êtres, que résulte la perfection de cet univers. On conçoit qu'il serait beaucoup moins parfait, s'il ne comprenait dans sa totalité que des êtres de la même espèce, ces êtres fussent-ils les plus nobles de tous ceux qui le composent. La trop grande uniformité déplait à la longue : du moins elle ne tient pas lieu de la variété, qui compense ce qui manque aux êtres finis. Crait-on qu'un monde, qui ne serait formé que de purs esprits, fut plus parfait qu'il ne l'est aujourd'hui ? qui ne voit que le monde matériel laisserait par son absence un grand vide dans cet univers ? On pourrait étendre cette reflexion jusqu'au mélange de vertus et de vices, dont nous sommes ici-bas le spectacle et les spectateurs tout-à-la-fais. Un monde d'où seraient bannis tous les vices, ne serait certainement pas si parfait qu'un monde qui les admet. La vertu prise en elle-même, est sans-doute préférable au vice, de même que l'esprit est par sa nature plus noble que le corps : mais quand on considère les choses par rapport au grand tout, dont ils font partie, on s'aperçoit aisément que pour une plus grande perfection, il était nécessaire qu'il y eut des imperfections dans le monde physique et dans le monde moral.

Si mala sustulerat, non erat ille bonus.

Voyez l'article MANICHEISME, où ce raisonnement est développé dans toute sa force.

Rien n'est sans-doute plus admirable que tous ces rapports, que la main du Créateur a ménagés entre les différents êtres. Ils sont plus ou moins immédiats, suivant le plus ou moins de variété de ces êtres. Il en est d'eux comme des vérités, qui tiennent toutes les unes aux autres, moyennant les vérités intermédiaires qui servent à les réunir. La bonté de cet univers consiste dans la gradation des différents êtres qui le composent. Ils ne sont séparés que par des nuances, comme nous l'avons déjà remarqué ; il ne se trouve aucun vide dans le passage du règne minéral au règne végétal, ni dans le passage de celui-ci au règne animal ; autrement, pour me servir de la pensée de l'illustre Pope, il y aurait un vide dans la création, où, un degré étant ôté, la grande échelle serait détruite. Qu'un chainon soit rompu, la chaîne de la nature l'est, et l'est également, soit au dixième, soit au dix-millième chainon. C'est alors qu'on verrait, pour continuer la pensée du poète Anglais ; la terre perdre son équilibre et s'écarter de son orbite, les planètes et le soleil courir sans règle au-travers des cieux, un être s'abimer sur un autre être, un monde sur un autre monde, toute la masse des cieux s'ébranler jusque dans son centre, la nature frémir jusqu'au trône de Dieu, en un mot tout l'ordre de cet univers se détruire et se confondre.

Il faudrait être stupide et insensible, pour ne pas apercevoir la dépendance et la subordination de tous les êtres qui entrent dans la composition de ce tout admirable : mais il faudrait être encore pis que tout cela pour l'attribuer à un hasard aveugle. Voyez HASARD et ÉPICUREISME. L'esprit ne peut être frappé sans admiration de cette multiplicité de rapports, de ces combinaisons infinies, de cet ordre, de cet arrangement qui lie toutes les parties de l'univers, et l'on peut dire que plus il saisira de rapports, plus la bonté des êtres se manifestera à lui d'une manière sensible et frappante. Dieu seul connait toute la bonté qu'il a mise dans ses ouvrages, parce qu'il est lui seul capable de connaître parfaitement la justesse qui brille dans ses ouvrages, le rapport mutuel qui se trouve entr'eux, l'harmonie qui fait d'eux un tout régulier et sagement ordonné, en un mot l'ordre établi pour les conserver. La chaîne qui attire et réunit toutes les parties est entre les mains de Dieu, et non entre celles de l'homme. Petites parties de ce tout, comment pourrions-nous le comprendre ? " Tout ce que nous voyons du monde (dit dans son style énergique le sublime Paschal) n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein de la nature : nulle idée n'approche de l'étendue de ses espaces : nous avons beau enfler nos conceptions, nous n'enfantons que des atomes au prix de la réalité des choses : c'est un cercle infini, dont le centre est par-tout, la circonférence nulle part : enfin c'est un des plus grands caractères sensibles de la toute-puissance de Dieu, que notre imagination se perde dans cette pensée.... L'intelligence de l'homme tient, dans l'ordre des choses intelligibles, le même rang que son corps dans l'étendue de la nature : et tout ce qu'elle peut faire, est d'apercevoir quelqu'apparence du milieu des choses, dans un désespoir éternel d'en connaître ni le principe ni la fin. Toutes choses sont sorties du néant, et portées jusqu'à l'infini : qui peut suivre ces étonnantes démarches ? l'auteur de ces merveilles les comprend, nul autre ne le peut faire " Pensées de Pasch. ch. xxij.

Nous sommes forcés de joindre le témoignage de notre raison, au témoignage aveugle des créatures inanimées et matérielles, dont la beauté, la disposition et l'économie annoncent si hautement la grandeur de celui qui les a faites. Un spectacle digne de Dieu, peut bien être digne de nous. Moyse rapporte que lorsque Dieu eut achevé l'ouvrage des six jours, il considéra tous les êtres d'une seule vue, et que les ayant comparés entr'eux et avec le modèle éternel dont ils étaient l'expression, il en trouva la beauté et la perfection excellente. L'univers parut à ses yeux comme un tableau qu'il venait de finir, et auquel il avait donné la dernière main. Il trouva que chaque partie avait son usage, chaque trait sa grâce et sa beauté : que chaque figure était bien située et faisait un bel effet : que chaque couleur était appliquée à propos, mais surtout que l'ensemble en était merveilleux : que les ombres mêmes donnaient du relief au reste ; que le lointain en s'attendrissant faisait paraitre ce qui était plus proche avec une force nouvelle ; et que les objets les plus remarquables recevaient une nouvelle beauté par le lointain, dont ils n'étaient séparés que par une diminution imperceptible de teintes et de couleurs. Qui considérerait ce tableau de plus près, pourrait apercevoir dans le plan de la création celui de la rédemption. Si quelques défauts nous frappent dans cet immense tableau, souvenons-nous que ce sont des ombres que la main de l'éternel y a jetées exprès pour en faire sortir les figures ; que leur ordre et leur situation contribuent à lui donner une beauté qu'il n'aurait pas : et que prendre occasion de ces défauts pour critiquer l'univers et son auteur, ce serait ressembler à un ciron, dont les yeux seraient fixés sur les ombres d'un tableau, et qui prononcerait que ce tableau est défectueux, qu'il n'y reconnait aucune ordonnance, ni le vrai ton des couleurs.

La bonté animale est une économie dans les passions, que toute créature sensible et bien constituée reçoit de la nature. C'est en ce sens qu'on dit d'un chien de chasse, qu'il est bon, lorsqu'il n'est ni lâche ni opiniâtre : c'est aussi en ce sens qu'on dit d'un homme, qu'il est bien constitué, lorsqu'il règne dans ses membres la proportion qui s'ajuste le mieux avec les fonctions auxquelles l'a destiné la providence. La bonté animale sera d'autant plus parfaite, que les membres bien proportionnés conspireront d'une façon plus avantageuse à l'accomplissement des fonctions animales. Par une suite des lois que Dieu a établies, il doit s'exciter dans l'âme telles ou telles sensations à l'occasion de telles ou telles impressions qui auront été faites sur les organes de nos sens. Si donc elles ne s'y excitaient pas, il y aurait alors un défaut d'économie animale. On en peut voir un exemple bien sensible dans les personnes paralytiques. Le défaut d'économie animale se trouve aussi dans ceux qui ont des mouvements convulsifs, qu'ils ne peuvent arrêter ni suspendre. On peut dire la même chose de ceux qui sont fous et stupides. Les uns ont trop d'idées, et les autres n'en ont pas assez, par un défaut de conformation dans le cerveau. Il est des personnes qui sont nées sans aucun goût pour la Musique, et d'autres pour qui les vers les mieux faits ne sont qu'un vain bruit. Ce défaut d'organes dans ces sortes de personnes est, comme l'on voit, un défaut d'économie animale. On peut dire en général, que c'est-là le grand défaut de ces esprits stupides et grossiers, dont la portée ne saurait atteindre au raisonnement le plus simple. Les organes du corps qui les voîle et les enveloppe, sont si épais et si massifs, qu'il ne leur est presque pas possible de déployer leurs facultés ni de faire leurs opérations. Plus les organes sont délicats, plus les sensations qu'ils occasionnent sont vives. Il y a des animaux qui nous surpassent par la délicatesse de leurs organes : le lynx a la vue plus perçante que nous ; l'aigle fixe le soleil qui nous éblouit ; le chien a plus de sagacité que nous dans l'odorat ; le toucher de l'araignée est plus subtil que le nôtre, et le sentiment de l'abeille plus exquis et plus sur que celui que nous éprouvons : mais n'envions point aux animaux l'avantage qu'ils ont sur nous en cette partie. Si nous avions l'oeil microscopique du lynx, nous verrions le ciron ; mais notre vue ne pourrait s'étendre jusqu'aux cieux. Si le toucher était plus sensible et plus délicat, nous serions blessés par tous les corps environnans, les douleurs et les maladies s'introduiraient par chaque pore. Si nous avions l'odorat plus vif, nous serions incommodés des parties volatiles d'une rose ; et leur action sur le cerveau en ébranlerait trop violemment les fibres. Avec une oreille plus fine, la nature se ferait toujours entendre à nous avec un bruit de tonnerre, et nous nous trouverions étourdis par le plus leger souffle de vent. Croyons que les organes dont la nature nous a doués, sont proportionnés au rang que nous tenons dans l'univers. S'ils étaient plus grossiers ou plus délicats, nous ne nous trouverions plus si propres aux fonctions animales, qui sont une suite de notre constitution. Après qu'on a pesé toutes choses dans la balance de la raison, on est forcé de reconnaître la bonté et la sagesse de la providence également et dans ce qu'elle donne et dans ce qu'elle refuse, et de convenir avec Pope, en dépit de l'orgueil et de la raison qui s'égare, de cette vérité évidente, que tout ce qui est, est bien. Nous nous regardons comme dégradés, parce qu'il a plu à l'auteur de notre être de nous assujettir aux organes d'un corps : mais il pourrait se trouver, en approfondissant la matière, que cette influence de l'union de l'âme avec le corps, s'exerce peut-être plus au profit qu'aux dépens de nos facultés intellectuelles. Voyez les articles ESPRIT et RESURRECTION, où cette question est agitée.

La bonté raisonnée, qualité propre à l'être pensant, consiste dans les rapports des mœurs avec l'ordre essentiel, éternel, immuable, règle et modèle de toutes les actions réfléchies : elle est la même que la vertu. Voyez cet article.

Jusqu'ici nous n'avons considéré le bon, que par les rapports qu'il a avec notre esprit. Pris en ce sens, il rentre dans l'idée du beau, qui n'est autre chose que la perception des rapports (voyez cet article) mais il y a un autre bon, dont les rapports sont plus immédiats avec nous, parce qu'ils touchent notre cœur de plus près. La bonté qui résulte de ces rapports, est plus intimement liée avec notre être, plus proportionnée à nos intérêts : il n'y a qu'elle qui ait de l'ascendant sur notre cœur, et qui l'ouvre au sentiment. L'autre bonté nous est, pour ainsi dire, étrangère ; elle ne nous touche presque pas : si elle a des charmes, ce n'est que pour notre esprit. Nous admirons les êtres en qui parait cette première bonté : mais nous n'aimons que ceux qui participent à cette autre bonté ; et l'amour que nous leur portons se mesure sur les différents degrés de cette bonté relative. Le bon, pris dans ce second sens, se confond avec l'utîle ; de sorte que tous les êtres qui nous sont utiles, renferment cette bonté qui intéresse le cœur, ainsi que cette autre bonté qui plait à l'esprit, est l'apanage de tous les êtres qui sont beaux.

Le bon a donc deux branches, dont l'une est le bon qui est beau, et l'autre le bon qui est utile. Le premier ne plait qu'à l'esprit, et le second intéresse le cœur : l'un n'obtient de nous que des sentiments d'estime et d'admiration, tandis que nous réservons pour l'autre toute notre tendresse. Un être qui ne serait que beau pour nous, se ferait seulement estimer et admirer de nous. Dieu, tout Dieu qu'il est, aurait beau déployer à notre esprit toutes les perfections qui le rendent infini, il ne trouverait jamais le chemin de notre cœur, s'il ne se montrait à nous comme bienfaisant. Sa bonté pour nous est le seul attribut qui puisse nous arracher l'hommage de notre cœur. Et que nous servirait le spectacle de sa divinité, s'il ne nous rendait heureux ?

On voit par-là combien s'abusent de pieux visionnaires, qui follement amoureux d'une perfection chimérique, s'imaginent qu'ils peuvent aimer dans Dieu autre chose que sa bonté bienfaisante. Quel désintéressement ! ils veulent que leur amour pour Dieu soit si pur, si généreux, si gratuit, si indépendant de toutes vues intéressées, que même à l'égard de Dieu on se contente du plaisir de l'aimer, sans rien attendre et sans rien espérer de lui. Ce n'est pas ici le lieu de combattre ces excès impies qui sont contraires à la loi naturelle, et qui déshonorent la Religion, sous la vaine apparence d'une perfection chimérique qui en détruit les fondements. Voyez les articles CHARITE et QUIETISME, où sont réfutées ces absurdités aussi impies qu'insensées, mais qui sont les suites nécessaires d'un désintéressement absolu.

Un être peut nous être utîle de deux manières ; ou par lui-même, ou par quelque chose qui soit distingué de lui. Ce qui ne nous est utîle que comme moyen, nous ne l'aimons pas pour lui-même. mais seulement pour la chose à laquelle il nous fait parvenir : ainsi nous n'aimons pas les richesses pour elles-mêmes, mais bien pour les plaisirs que nous achetons à leurs dépens ; j'excepte pourtant les avares, pour qui la possession des richesses est un véritable bien : ceux-ci sont heureux par la vue de l'or, et les autres ne le sont que par l'usage qu'ils en font. Mais un être nous est-il utîle par lui-même ? c'est alors que nous l'aimons par lui-même et que notre cœur s'y attache : ou cet être nous satisfait du côté de la conscience et de la raison, ce qui est un bien durable, solide, et qui n'est point sujet à de fâcheux revers ; et alors on lui donne le nom de bien honnête : ou bien cet être ne nous satisfait que du côté de la cupidité, et se trouve par conséquent exposé au dégoût et à l'inquiétude ; et alors on lui donne simplement le nom de bien agréable, entant qu'opposé à l'honnêteté.

Après avoir considéré le bon dans les êtres naturels, il est naturel de l'examiner dans ceux qu'on appelle artificiels : ils ont été inventés sur le modèle de la nature ; d'où je conclus que leur perfection dépend plus ou moins de leur imitation de la nature. Mais de même que dans les ouvrages de la nature il y a un bon et un beau, qui ne dépendent ni du hasard ni du caprice, ainsi dans les productions des arts il y a des lois immuables qui nous guident dans nos connaissances et dans nos gouts ; et on ne peut en aucune façon violer ces lois tracées, avec tant d'éclat dans les ouvrages de la nature, que l'esprit et le goût n'en soient révoltés.

Il se trouve, avons-nous dit, dans les ouvrages de la nature deux sortes de bontés ; l'une qui rentre dans la même signification que la beauté, et qui pour cette raison ne flatte que l'esprit ; et l'autre qui retient le nom de bonté, et qui intéresse notre cœur. Quand un objet réunit en soi ces deux genres de bonté, c'est-à-dire qu'il étend et perfectionne nos idées d'une part, et que de l'autre il nous présente des intérêts qui nous sont chers, qui tiennent à la conservation ou à la perfection de notre être, qui nous font sentir agréablement notre propre existence, nous prononçons que cet objet est bon ; et il l'est d'autant plus, qu'il possède ces avantages dans un plus haut degré. Pareillement une production de l'art, où le bon se réunissant avec le beau, renfermera toutes les qualités dont elle a besoin pour exercer et perfectionner à-la-fais notre esprit et notre cœur, sera d'autant plus parfaite, qu'elle attachera plus agréablement notre esprit, et qu'elle intéressera plus vivement notre cœur.

Parmi les ouvrages de la nature, il y en a qui ne sont que beaux, et qui ne plaisent qu'à l'esprit. La même chose se trouve dans les productions des arts : ainsi un théoreme de Géométrie, difficile, mais sans usage, n'est qu'un beau théorème. Voyez BEAU. Mais de même qu'il y a des ouvrages de la nature qui sont bons et beaux en même temps, parce qu'ils contiennent en soi de quoi réveiller des idées qui nous attachent et nous intéressent, il y en a aussi parmi les productions des arts qui produisent en nous le même effet, mais toujours d'une manière subordonnée à la nature, parce que la nature en tout surpasse l'art : in omni re procul dubio vincit imitationem veritas. Le cœur n'est touché des objets que selon le rapport qu'ils ont avec son avantage propre ; c'est ce qui règle son amour ou sa haine : or le cœur a plus d'avantage à attendre des objets naturels que des objets artificiels. Ce que l'art présente au cœur n'est qu'un fantôme, qu'une apparence ; et ainsi il ne peut lui apporter rien de réel. Ce qu'il y a de plus touchant pour nous, c'est l'image des passions et des actions des hommes, parce qu'elles sont comme des miroirs où nous voyons les autres, avec des rapports de différence ou de conformité. Il y aurait ici un beau problème à résoudre, savoir qui de Corneille ou de Racine a mieux peint les passions ; le premier, en nous élevant au-dessus de l'homme ; le second, en nous rendant à nos faiblesses naturelles. Voyez TRAGEDIE. (X)

BON, (en terme de Pratique) est un terme par lequel on ratifie une promesse, une cellule ; faire bon, c'est promettre de payer pour soi ou pour autrui. (H)

* BON, (Histoire moderne) c'est le nom d'une fête que les Japonais célebrent tous les ans en l'honneur des morts ; on allume ce jour-là à chaque porte grand nombre de lumières, et chacun s'empresse de courir aux tombeaux de ceux qui leur ont autrefois appartenu, avec des mets bien choisis qui sont destinés à la nourriture des morts.

BON, terme d'honneur dont on se sert dans le commerce pour désigner un marchand riche et solvable. Vous pouvez confier votre marchandise à M. N. je vous garantis qu'il est bon.

BON D'AUNAGE, voyez AUNAGE, et BENEFICE D'AUNAGE.