sub. m. (Mécanique) engin qui se meut de lui-même, ou machine qui porte en elle le principe de son mouvement.

Ce mot est grec , et composé de , ipse, et , je suis excité ou prêt, ou bien de , facilement, d'où vient , spontanée, volontaire. Tel était le pigeon volant d'Architas, dont Aulugelle fait mention au liv. X. ch. XIIe des nuits attiques, supposé que ce pigeon volant ne soit point une fable.

Quelques auteurs mettent au rang des automates les instruments de mécanique, mis en mouvement par des ressorts, des poids internes, etc. comme les horloges, les montres, etc. Voyez Joan. Bapt. Port. mag. nat. chap. xjx. Scaliger. subtil. 326. Voyez aussi RESSORT, PENDULE, HORLOGE, MONTRE, etc.

Le fluteur automate de M. de Vaucanson, membre de l'académie royale des Sciences, le canard, et quelques autres machines du même auteur, sont au nombre des plus célèbres ouvrages qu'on ait vus en ce genre depuis fort longtemps.

Voyez à l'article ANDROIDE ce que c'est que le fluteur.

L'auteur, encouragé par le succès, exposa en 1741 d'autres automates, qui ne furent pas moins bien reçus. C'était :

1°. Un canard, dans lequel il représente le mécanisme des viscères destinés aux fonctions du boire, du manger, et de la digestion ; le jeu de toutes les parties nécessaires à ces actions, y est exactement imité : il allonge son cou pour aller prendre du grain dans la main, il l'avale, le digère, et le rend par les voies ordinaires tout digéré ; tous les gestes d'un canard qui avale avec précipitation, et qui redouble de vitesse dans le mouvement de son gosier, pour faire passer son manger jusque dans l'estomac, y sont copiés d'après nature : l'aliment y est digéré comme dans les vrais animaux, par dissolution, et non par trituration ; la matière digérée dans l'estomac est conduite par des tuyaux, comme dans l'animal par ses boyaux, jusqu'à l'anus, où il y a un sphincter qui en permet la sortie.

L'auteur ne donne pas cette digestion pour une digestion parfaite, capable de faire du sang et des sucs nourriciers pour l'entretien de l'animal ; on aurait mauvaise grâce de lui faire ce reproche. Il ne prétend qu'imiter la mécanique de cette action en trois choses, qui sont : 1°. d'avaler le grain ; 2°. de le macérer, cuire ou dissoudre ; 3°. de le faire sortir dans un changement sensible.

Il a cependant fallu des moyens pour les trois actions, et ces moyens mériteront peut-être quelque attention de la part de ceux qui demanderaient davantage. Il a fallu employer différents expédiens pour faire prendre le grain au canard artificiel, le lui faire aspirer jusque dans son estomac, et là dans un petit espace, construire un laboratoire chimique, pour en décomposer les principales parties intégrantes, et le faire sortir à volonté, par des circonvolutions de tuyaux, à une extrémité de son corps toute opposée.

On ne croit pas que les Anatomistes aient rien à désirer sur la construction de ses ailes. On a imité os par os, toutes les éminences qu'ils appellent apophyses. Elles y sont régulièrement observées, comme les différentes charnières, les cavités, les courbes. Les trois os qui composent l'aile, y sont très-distincts : le premier qui est l'humerus, a son mouvement de rotation en tout sens, avec l'os qui fait l'office d'omoplate ; le second qui est le cubitus de l'aile, a son mouvement avec l'humerus par une charnière, que les Anatomistes appellent par ginglyme ; le troisième qui est le radius, tourne dans une cavité de l'humerus, et est attaché par ses autres bouts aux petits os du bout de l'aile, de même que dans l'animal.

Pour faire connaître que les mouvements de ces ailes ne ressemblent point à ceux que l'on voit dans les grands chefs-d'œuvres du coq de l'horloge de Lyon et de Strasbourg, toute la mécanique du canard artificiel a été vue à découvert, le dessein de l'auteur étant plutôt de démontrer, que de montrer simplement une machine.

On croit que les personnes attentives sentiront la difficulté qu'il y a eu de faire faire à cet automate tant de mouvements différents ; comme lorsqu'il s'élève sur ses pattes, et qu'il porte son cou à droite et à gauche. Ils connaitront tous les changements des différents points d'appui ; ils verront même que ce qui servait de point d'appui à une partie mobile, devient à son tour mobîle sur cette partie, qui devient fixe à son tour ; enfin ils découvriront une infinité de combinaisons mécaniques.

Toute cette machine joue sans qu'on y touche, quand on l'a montée une fais.

On oubliait de dire, que l'animal bait, barbote dans l'eau, croasse comme le canard naturel. Enfin l'auteur a tâché de lui faire faire tous les gestes d'après ceux de l'animal vivant, qu'il a considéré avec attention.

2°. Le second automate est le joueur de tambourin, planté tout droit sur son pied d'estal, habillé en berger danseur, qui joue une vingtaine d'airs, menuets, rigodons ou contre-danses.

On croirait d'abord que les difficultés ont été moindres qu'au fluteur automate : mais sans vouloir élever l'un pour rabaisser l'autre, il faut faire réflexion qu'il s'agit de l'instrument le plus ingrat, et le plus faux par lui-même ; qu'il a fallu faire articuler une flute à trois trous, où tous les tons dépendent du plus ou moins de force de vent, et de trous bouchés à moitié ; qu'il a fallu donner tous les vents différents, avec une vitesse que l'oreille a de la peine à suivre ; donner des coups de langue à chaque note, jusque dans les doubles croches, parce que cet instrument n'est point agréable autrement. L'automate surpasse en cela tous nos joueurs de tambourin, qui ne peuvent remuer la langue avec assez de légèreté, pour faire une mesure entière de doubles croches toutes articulées ; ils en coulent la moitié : et ce tambourin automate joue un air entier avec des coups de langue à chaque note.

Quelle combinaison de vents n'a-t-il pas fallu trouver pour cet effet ? L'auteur a fait aussi des découvertes dont on ne se serait jamais douté ; aurait-on cru que cette petite flute est un des instruments à vent qui fatiguent le plus la poitrine des joueurs ?

Les muscles de leur poitrine font un effort équivalant à un poids de 56 livres, puisqu'il faut cette même force de vent, c'est-à-dire, un vent poussé par cette force ou cette pesanteur, pour former le si d'enhaut, qui est la dernière note où cet instrument puisse s'étendre. Une once seule fait parler la première note, qui est le mi : que l'on juge quelle division de vent il a fallu faire pour parcourir toute l'étendue du flageolet provençal.

Ayant si peu de positions de doigts différentes, on croirait peut-être qu'il n'a fallu de différents vents, qu'autant qu'il y a de différentes notes : point du tout. Le vent qui fait parler, par exemple, le ré à la suite de l'ut, le manque absolument quand le même ré est à la suite du mi au-dessus, et ainsi des autres notes. Qu'on calcule, on verra qu'il a fallu le double de différents vents, sans compter les dièses pour lesquels il faut toujours un vent particulier. L'auteur a été lui-même étonné de voir cet instrument avoir besoin d'une combinaison si variée, et il a été plus d'une fois prêt à désespérer de la réussite : mais le courage et la patience l'ont enfin emporté.

Ce n'est pas tout : ce flageolet n'occupe qu'une main ; l'automate tient de l'autre une baguette, avec laquelle il bat du tambour de Marseille ; il donne des coups simples et doubles, fait des roulements variés à tous les airs, et accompagne en mesure les mêmes airs qu'il joue avec son flageolet de l'autre main. Ce mouvement n'est pas un des plus aisés de la machine. Il est question de frapper tantôt plus fort, tantôt plus vite, et de donner toujours un coup sec, pour tirer du son du tambour. Cette mécanique consiste dans une combinaison infinie de leviers et de ressorts différents, tous mus avec assez de justesse pour suivre l'air ; ce qui serait trop long à détailler. Enfin cette machine a quelque ressemblance avec celle du fluteur ; mais elle a été construite par des moyens bien différents. Voyez Obser. sur les écrits moderne 1741. (O)