S. m. (Jurisprudence) en général signifie accord, transaction ; ce terme n'est guère usité qu'en parlant d'actes fort anciens. On qualifie de concordats, quelques traités faits entre des princes séculiers ; par exemple, il y en a un du 25 Janvier 1571 pour le Barrais, passé devant deux notaires au Châtelet de Paris, entre le roi et le duc de Lorraine comme duc de Bar : néanmoins le terme de concordat est plus usité en matière bénéficiale, pour exprimer d'anciens accords qui ont été faits pour régler la disposition ou les droits spirituels et temporels de quelques bénéfices. Ces sortes de concordats doivent être faits gratuitement, autrement ils sont symoniaques ; c'est pourquoi s'ils contiennent quelque réserve de pension ou autre droit, il faut qu'ils soient homologués en cour de Rome. Ils sont cependant bons entre ceux qui les ont passés, lesquels ne peuvent pas se faire un moyen de leur propre turpitude. Voyez Louet et Brodeau, let. C. n°. 40. et let. P. n°. 33. Duperray, de l'état et capacité des ecclésiast. tom. II. liv. IV. chap. Ve pag. 137. et suiv. (A)

CONCORDAT pour la Bretagne, est la même chose que ce qu'on appelle plus communément Compact Breton. Voyez ci-devant COMPACT BRETON. (A)

CONCORDAT fait entre le pape Léon X. et le roi François I. qu'on appelle communément simplement le concordat, est un traité fait entr'eux à Boulogne en Italie, en 1516, dont le principal objet a été d'abolir la pragmatique-sanction qui fut faite sous Charles VII. à Bourges, en 1438.

Les états assemblés à Bourges par ordre de Charles VII. ayant examiné les vingt-trois decrets que le concîle de Bâle avait fait jusqu'alors, les acceptèrent tous, et en modifièrent seulement quelques-uns : ce fut ce qui composa la pragmatique sanction, qui entr'autres choses rétablit les élections des bénéfices, prive le pape des annates, et soutient que les conciles généraux ont le pouvoir de réformer le chef et les membres.

Depuis Charles VII. tous les papes avaient sollicité la révocation de cette pragmatique. Louis XI. y avait consenti ; mais les lettres de révocation ne furent point vérifiées dans les parlements. Le clergé s'opposa aussi fortement à la révocation de la pragmatique, et surtout les universités. Charles VIII. et Louis XII. firent observer la pragmatique, et ce fut un des sujets de différend entre Jules II. et Louis XII.

Jules II. cita ce prince au concîle de Latran pour défendre la pragmatique, et était sur le point de la condamner lorsqu'il mourut.

Français I. étant passé en Italie, en 1515, pour reprendre le duché de Milan qui lui appartenait, et ayant pris la ville de Milan, sut par son ambassadeur, que le pape et le concîle de Latran avaient décerné contre S. M. une citation finale et péremptoire, pour alléguer les raisons qui empêchaient d'abolir la pragmatique. Il résolut de traiter avec Léon X. lequel de son côté chercha à faire sa paix avec ce prince, et pour cet effet se rendit à Boulogne où ils eurent une entrevue le 11 Décembre 1515 ; après quoi François I. retourna à Milan, laissant le chancelier du Prat pour convenir des conditions du traité avec les cardinaux d'Ancone et Sanctiquattro que le pape avait commis pour cette négociation. Le concordat fut ainsi conclu le 15 Aout 1516, et inséré dans les actes du concîle de Latran, comme une règle que les François devaient suivre à l'avenir en matière ecclésiastique et bénéficiale.

Ce traité ne parle point de l'autorité des conciles. La pragmatique-sanction fut abolie, non pas en entier, mais le nom de pragmatique qui était odieux aux papes fut aboli, aussi-bien que les articles qui étaient contraires aux prétentions des papes. La plupart des autres articles ont été conservés.

Le concordat est divisé en douze rubriques ou titres.

Le premier abolit les élections des évêques, abbés, et prieurs conventuels, qui étaient vraiment électifs, et accorde au pape le droit d'y pourvoir sur la nomination du roi ; et dit que quand ces mêmes bénéfices vaqueront en cour de Rome, le pape y pourvoira sans attendre la nomination du roi.

Le second abolit les grâces expectatives, spéciales, ou générales ; et les réserves pour les bénéfices qui vaqueront, sont abolies.

Le troisième établit le droit des gradués.

Le quatrième réserve à chaque pape la faculté de donner un mandat apostolique, afin de pourvoir d'un bénéfice sur un collateur qui aura dix bénéfices à sa collation ; et il est dit que dans les provisions des bénéfices, on exprimera leur vraie valeur ordinaire.

Le cinquième ordonne que les causes et appelations soient terminées sur les lieux par les juges qui ont droit d'en connaître par coutume ou privilège, excepté les causes majeures qui sont dénommées dans le droit ; et pour les appelations de ceux qui sont soumis au S. siège, il est dit que l'on commettra des juges sur les lieux jusqu'à la fin du procès.

Les 6e, 7e, 8e, 9e, 10e titres qui traitent des possesseurs paisibles, des concubinaires, des excommuniés, des interdits, de la preuve que l'on peut tirer de ce qui est énoncé dans les lettres ou bulles du pape, sont conformes à ce qui est porté par la pragmatique-sanction.

Le onzième titre est pour l'abolition de la Clémentine litteris.

Et le dernier est pour assurer l'irrévocabilité du concordat.

Le pape envoya à François I. la révocation de la pragmatique et le concordat, et demanda que ces deux actes fussent enregistrés par les parlements de France. Le roi ne voulut pas que l'on publiât la révocation de la pragmatique ; mais il alla lui-même au parlement de Paris pour y faire enregistrer le concordat, ce que le parlement refusa alors de faire : il y eut aussi de fortes oppositions du clergé et de l'université.

Les motifs des oppositions étaient les inconvénients que l'on trouvait dans l'abolition des élections, l'évocation des causes majeures à Rome, et dans l'obligation d'exprimer la vraie valeur des bénéfices dans les provisions.

Ces motifs furent expliqués dans des remontrances, et envoyés au roi : mais le chancelier du Prat répondit que si l'on n'avait pas fait le concordat, la pragmatique n'aurait pas moins été révoquée par le concîle ; que la nomination du roi aux grands bénéfices n'était pas un droit nouveau, que nos rois en avaient joui sous les deux premières races ; que le roi nommait presque toujours aux évêchés : le droit de nomination qui était d'abord commun à tous les fidèles, ne s'exerçant pas bien en commun, passa au souverain comme ayant le gouvernement de l'état, dont l'Eglise fait partie.

En conséquence le roi n'eut point d'égard aux remontrances du parlement ; il envoya par le seigneur de la Tremoille un ordre précis au parlement d'enregistrer le concordat sans délibérer davantage : ce qui fut fait enfin le 22 Mars 1517, mais avec protestation que c'était du très-exprès commandement du roi réitéré plusieurs fais, et que l'on continuerait d'observer la pragmatique.

En effet, dans les contestations qui se présentèrent ensuite concernant les nominations aux évêchés et abbayes, le parlement jugeait suivant la pragmatique ; au contraire, le grand-conseil auquel Louise de Savoie, régente du royaume pendant la prison de François I. renvoya ces causes, les jugeait suivant le concordat : c'est pourquoi le roi, lorsqu'il fut de retour, par une déclaration de 1527, attribua pour toujours la connaissance de ces sortes de matières au grand-conseil ; ce qui contribua beaucoup à augmenter cette juridiction.

Par diverses bulles postérieures au concordat, les dispositions par rapport à l'expression de la valeur des bénéfices et aux mandats, furent révoquées ; la nomination du roi fut étendue, même aux évêchés et abbayes qui avaient privilège d'élire.

Le parlement, le clergé, et les états assemblés, ont fait de temps en temps diverses instances pour le rétablissement des élections ; on a même fait longtemps des prières publiques, pour demander à Dieu l'abolition du concordat : mais le concordat est demeuré dans le même état, et est présentement observé sans aucune contradiction.

Dans les pays conquis et autres qui ont été réunis à la France postérieurement au concordat, le roi nomme aux bénéfices en vertu d'indults particuliers qui ont été accordés en divers temps par les papes.

Plusieurs auteurs ont écrit contre le concordat et contre le chancelier du Prat, avec lequel il fut conclu.

Il faut néanmoins convenir, comme l'observe M. le président Henaut, que les annates contre lesquelles on s'est beaucoup récrié, n'ont point été établies par le concordat, mais par une bulle qui suivit de près ; et elles furent depuis restreintes aux bénéfices consistoriaux : qu'à l'égard du concordat, il est juste en ce que pour la nomination aux grands bénéfices, il n'a fait que rendre au roi un droit dont ses prédécesseurs avaient longtemps joui ; que nos rois ayant fondé la plupart des grands bénéfices, la collation doit leur en appartenir ; que c'est au roi à exercer les droits qu'exerçaient les premiers fidèles, et qu'ils lui ont remis lorsque l'Eglise a été reçue dans l'état pour prix de la protection que le roi accordait à la religion ; que les élections étant devenues une simonie publique, les grands sièges étaient souvent remplis par des gens de néant peu propres à gouverner ; et qu'à choses égales, il vaut mieux que ce soit la noblesse. Voyez les historiens de France aux années 1515 et suivantes ; le texte du concordat, et le commentaire de Rebuffe, et les traités de Genebrard et Dupuy. (A)

CONCORDAT entre Sixte IV. et Louis XI. est un accord qui fut fait entr'eux en 1472. Il est rapporté dans les extravagantes communes, chap. j. de trenga et pace, ch. j. et commence par ces mots : ad universalis ecclesiae. Par ce concordat Sixte IV. voulant pacifier les dissentions qui subsistaient entre la cour de Rome et la France, à l'occasion de la pragmatique-sanction, donna aux collateurs ordinaires six mois libres pour conférer les bénéfices ; savoir, Février, Avril, Juin, Aout, Octobre et Décembre, au lieu qu'ils n'avaient auparavant que quatre mois libres, pendant lesquels ils n'étaient pas sujet aux grâces expectatives ; il se réserva néanmoins la faculté d'accorder six grâces ; il se réserva aussi jusqu'à un certain temps la disposition des bénéfices de France, possédés par les cardinaux et par leurs familiers ; il fit aussi quelques règlements sur le jugement des causes et appelations, et ordonna que les taxes faites par Jean XXII. pour les bénéfices seraient observées ; mais ce concordat ne fut pas exécuté : le procureur général de Saint-Romain s'y opposa comme étant contraire aux decrets des conciles de Constance et de Basle, selon la remarque et note marginale de Dumolin sur l'extravag. ad universalis, sur le mot proh. dolor. Voyez les notes sur les indults, par Pinson, tome I. p. 32. (A)

CONCORDAT GERMANIQUE, est un accord fait en 1447 entre le légat du saint siège, l'empereur Fréderic III. et les princes d'Allemagne, pour raison des églises, monastères et autres bénéfices d'Allemagne, confirmé par le pape Nicolas V.

Par ce concordat, le pape se réserve tous les bénéfices mentionnés dans les extravagantes execrabilis 4. et ad regimen 13. aux modifications suivantes.

1°. Il conserve ou plutôt il rétablit la liberté des élections dans les églises cathédrales, métropolitaines et monastères, et s'oblige de les confirmer ; à moins que pour de justes causes et de l'avis des cardinaux, il ne fût nécessaire de pourvoir un sujet plus digne et plus capable.

2°. Il laisse les confirmations des élections, dans l'ordre commun aux supérieurs, et promet qu'il ne disposera point des prélatures des moniales, à moins qu'elles ne soient exemptes, auquel cas même il n'en disposera que par commission ad partes.

3°. Il abolit les expectatives pour tous les autres bénéfices inférieurs, et en donne aux ordinaires la libre disposition pendant six mois, semblable à l'alternative des évêques de Bretagne.

4°. Si dans les trois mois du jour que la vacance sera connue, le pape n'a pas pourvu pendant les mois qu'il s'est réservé, il sera permis à l'ordinaire de pourvoir.

5°. Il est dit que le temps pour accepter cette alternative commencera à courir à l'égard du pape, à compter du premier Juin lors prochain ; et durera à l'avenir, s'il n'en est autrement ordonné du consentement de la nation germanique dans le prochain concile.

6°. Les fruits de la première année des bénéfices vacans seront payés par forme d'annate, suivant la taxe délivrée par la chambre, appelée communs services.

7°. Que si les taxes sont excessives, elles seront modérées, et qu'à cet effet il sera nommé des commissaires qui informeront de la qualité des choses, des circonstances, des temps et des lieux.

8°. Que les taxes seront payées moitié dans l'an du jour de la possession paisible, et l'autre dans l'année suivante ; et que si le bénéfice vaque plusieurs fois dans une année, il ne sera néanmoins dû qu'une seule taxe.

9°. Que celle des autres bénéfices inférieurs se payera pareillement dans l'an de la possession paisible ; mais qu'on ne payera rien pour les bénéfices qui n'excéderont point vingt-quatre florins ou ducats d'or de la chambre.

Enfin ce concordat veut que pour l'observation de ce qui est réglé, l'Allemagne proprement dite ne soit point distinguée de la nation germanique en général.

Il y eut en 1576 une déclaration du pape Grégoire XIII. au sujet de la reversion du droit de conférer, en cas que le pape n'ait pas pourvu dans les trois mois, par laquelle il est dit que les trois mois commencent du jour que la vacance est connue au saint siège.

Le bénéfice doit être obtenu dans les trois mois, et conféré par le saint siège ; mais il faut que la publication soit faite dans les trois mois du jour de la vacance, comme dans le lieu du bénéfice.

L'empereur Maximilien ordonna en 1518, que ce concordat serait reçu à Liege ; et Charles-Quint par édit de Février 1554 en ordonna l'exécution dans l'église de Cambrai.

L'église de Metz est aussi comprise sous ce concordat, en vertu d'un indult ampliatif.

Il y a eu de semblables indults accordés par differents papes, pour d'autres églises, dont il est fait mention dans le recueil des principales décisions sur les bénéfices, par Drapier, tome II. ch. xxij. p. 234. les œuvres de Cochin, tome I. 5. consultation. (A)

CONCORDAT TRIANGULAIRE, est un accord fait entre trois bénéficiers, par lequel le premier résigne son bénéfice au second ; celui-ci résigne un autre bénéfice à un troisième bénéficier, lequel en résigne aussi un en faveur du premier des trois résignans : ces cercles de résignations qu'on appelle concordats triangulaires, ne sont point considérés comme des permutations canoniques, parce que chacun des résignans reçoit bien un bénéfice, mais il ne le tient pas de celui auquel il résigne le sien. Il se fait aussi de ces concordats quatriangulaires, c'est-à-dire entre quatre bénéficiers. Souvent ces concordats ne sont point portés à Rome, mais en conséquence chacun des résignans passe une procuration que l'on se contente de faire admettre en cour de Rome, ce qui ne suffit pas.

En effet, ces sortes de concordats ne sont point licites ; c'est une espèce de simonie, quae ex pacto oritur, à moins que pour des considérations particulières ils ne soient admis en cour de Rome. Le concîle de Malines tenu au commencement de ce siècle les a réprouvés. Les docteurs les appellent des contrats innomés, et tous les docteurs français, espagnols, italiens les condamnent. Gonzales dit que de son temps le pape les rejetait, et n'en admettait aucun, ainsi qu'il l'assure sur la règle de mensibus et alternativâ, et il y a des arrêts qui les ont proscrits : ils ne peuvent donc avoir leur effet, à moins qu'ils n'aient été admis en cour de Rome, et non pas seulement les procurations. Voyez Duperray, de l'état et capacité des ecclésiastiq. tom. II. liv. IV. ch. Ve pag. 152. (A)

CONCORDAT VENITIEN, est un accord fait entre le pape et la république de Venise, pour la nomination des principaux bénéfices de cet état ; ce concordat est à-peu-près semblable à celui qui fut fait entre Leon X. et François I. Voyez Thuana, p. 354. (A)